Jeudi 22 juin 2023, SMART ÉDUCATION reçoit Magali Fourmaintraux (Secrétaire générale, Les Petits Champions de la Lecture)
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00:00 [Musique]
00:08 Bonjour à toutes et à tous, bienvenue dans ce nouveau numéro de Smart Education.
00:13 Smart Education, c'est votre magazine quotidien dédié à la formation,
00:17 au nouveau métier et aux nouvelles pédagogies.
00:19 C'est le rendez-vous qui donne un futur à la jeune génération.
00:22 Et maintenant, place à la lecture pour les enfants.
00:26 Dans quelques jours aura lieu la finale de la 11e édition des Petits Champions de la lecture.
00:31 Après des mois de compétition, ce sera à la Comédie-Française le 28 juin prochain.
00:37 Cet événement a rassemblé plus de 400 000 enfants depuis sa création.
00:40 Alors nous allons comprendre les raisons de cet engouement et surtout les bienfaits de la lecture à voix haute
00:46 avec Magali Fourmaintraud qui est secrétaire générale des Petits Champions de la lecture.
00:51 Magali Fourmaintraud, bonjour.
00:53 Bonjour Cybile.
00:54 Merci beaucoup d'être avec nous.
00:55 Est-ce que vous pouvez nous dire comment est née cette aventure ?
00:59 Alors les Petits Champions de la lecture, c'est une association qui a été créée il y a 11 ans par le Syndicat National de l'édition
01:05 suite à une étude assez mauvaise sur la baisse des résultats en lecture.
01:11 C'est les résultats de l'étude qui étaient mauvais ?
01:13 Oui, tout à fait.
01:15 La baisse du niveau de lecture des élèves, notamment à l'entrée au collège.
01:21 Et donc l'objectif a été de créer un dispositif qui redonne envie de lire aux enfants.
01:27 Et pourquoi avoir créé tout un événement autour de la lecture à voix haute spécifiquement ?
01:33 Alors on s'est inspiré d'un jeu allemand qui repose sur le même concept
01:40 et qui s'avérait déjà à l'époque très efficace pour créer ce déclic pour la lecture chez les élèves
01:48 et notamment chez des élèves qui ne lisaient pas ou très peu.
01:52 Et en fait le fait de lire à voix haute pour les enfants est très différent de la lecture silencieuse.
01:58 Ils perçoivent ça presque comme une activité différente.
02:00 Oui, du côté plus théâtral.
02:02 Voilà, pour l'enfant lire pour un public ça devient vraiment autre chose.
02:07 Et s'adresser d'abord à sa classe, parce que c'est le principe, pour participer chaque enfant choisit librement un roman.
02:14 Oui, alors vous allez nous dire comment s'organise l'événement de l'élève dans la classe jusqu'à la scène de la comédie française.
02:22 En tout cas, dans toutes les étapes, la prestation de l'enfant est vraiment la même,
02:27 c'est-à-dire lire à voix haute un extrait de trois minutes d'un roman jeunesse.
02:31 Ça démarre devant sa classe et puis ensuite ceux qui franchissent des étapes vont en finale départementale,
02:37 puis régionale, puis nationale à la comédie française.
02:41 Mais ça se fait petit à petit.
02:43 Et puis il y aurait combien d'élèves au tout début et à la fin il en restera combien ?
02:47 Alors il y a 133 000 élèves au tout début.
02:50 Donc ça c'est des classes entières en fait ?
02:52 C'est des classes entières, ça représente plus de 100 150 classes inscrites cette année,
02:57 qui sont des classes de CM1, CM2 et CM1-CM2, on en a énormément, dans toute la France,
03:03 dans l'ensemble des départements, y compris Outre-mer.
03:06 Et donc ces 133 000 enfants lisent à voix haute dans leur classe,
03:11 et puis un enfant de chaque classe participe ensuite à une finale départementale,
03:16 qui a lieu pas très loin de chez lui, dans son département,
03:19 souvent dans une bibliothèque, un centre culturel, un cinéma, un château,
03:25 on a des lieux très divers qui accueillent les finales.
03:28 Parce que chaque élève de chaque classe va être choisi par les autres élèves ?
03:32 Exactement, c'est un peu comme élire un délégué de lecture de la classe
03:36 qui va être l'ambassadeur de la classe à la finale départementale.
03:40 Et après comment est-ce que chacun choisit le livre qu'il va lire ?
03:44 Alors c'est très important pour nous que ce soit vraiment l'enfant qui choisisse son livre,
03:48 sans aucune liste imposée par l'enseignant ni par les parents.
03:54 Et donc on voit arriver dans les lectures des livres très variés,
03:59 beaucoup de classiques de la littérature jeunesse.
04:02 C'est seulement littérature jeunesse ?
04:04 Oui, on leur demande en tout cas que ce soit un roman,
04:07 ils n'ont pas le droit de lire une BD, ni un poème, ni une pièce de théâtre, ni un documentaire.
04:12 Il faut que ce soit un roman.
04:14 En revanche, ils ont vraiment le choix parmi tous les romans de la Comtesse de Ségure à Mortel Adèle.
04:20 Après ils prennent la parole devant combien de personnes sur la scène de la Comédie française ?
04:26 Ils lisent sur la scène de la salle Richelieu, la grande salle,
04:31 et la jauge de la salle est de 800 personnes.
04:34 Et on est bien partis pour que ce soit complet le 28 juin,
04:38 donc ils lisent devant 800 personnes, ce qui est très très impressionnant.
04:41 Comment est-ce qu'ils s'entraînent pendant tout ce processus ?
04:44 Parce que l'art oratoire n'est pas particulièrement enseigné en primaire.
04:50 Comment ça se passe ? Il y a des personnes de l'association qui viennent ?
04:55 Nous on fait un travail de pédagogie au cas des enseignants,
05:00 qui sont très demandeurs d'outils de formation pour savoir comment faire lire à voix haute leur groupe d'élèves.
05:08 C'est quelque chose qui n'est pas tellement enseigné en formation initiale ni continue aux enseignants.
05:14 On met à leur disposition des fiches pédagogiques, des vidéos tutos, des suggestions de lecture,
05:22 des tas de ressources qui sont gratuitement accessibles à tous sur le site des petits champions de la lecture,
05:29 pour les aider à faire travailler les trois grands critères qui vont évaluer les élèves lors de la lecture à voix haute sur scène.
05:39 Qui sont les trois grands critères ?
05:41 Il y a ce qu'on appelle la technique, c'est-à-dire lire assez fort, articuler, faire les liaisons par exemple.
05:49 Il y a ensuite la posture, c'est-à-dire bien gérer son corps, se tenir droit, détacher de temps en temps les yeux de son texte.
05:56 Et puis il y a la transmission, c'est-à-dire la capacité à faire comprendre le sens du texte qui est lu,
06:03 et puis à exprimer les émotions de l'histoire racontée.
06:07 Si vous aviez quelques tips ou conseils phares à donner à un élève, quels seraient-ils ?
06:13 D'abord, ne pas aller trop vite, parce que c'est vraiment un des grands défauts.
06:19 La crainte des enfants, qu'on note la plus importante, c'est le stress, bien sûr, le trac.
06:26 Et donc avec le trac, la tendance à aller à toute vitesse, à avaler des mots, à ne plus penser à ce qu'on dit, à débiter son texte de A à Z.
06:36 Et puis, paradoxalement, ne pas trop répéter, c'est-à-dire garder une certaine fraîcheur pour garder la spontanéité de la découverte du texte.
06:48 Ce qui est toujours...
06:50 Ça c'est difficile pour un enfant de trouver cet équilibre.
06:53 Exactement, très difficile de faire comme s'il redécouvrait le texte,
06:58 comme s'il venait de le lire pour la première fois et qu'il nous partageait sa surprise, son émotion à cette lecture.
07:05 Est-ce que vous accompagnez aussi les professeurs pour inscrire vraiment toute cette aventure, pour que ce soit quand même une aventure de classe entière ?
07:13 Parce que ça, quand il n'y en a qu'un seul qui monte après, c'est difficile.
07:17 C'est essentiel pour nous que ça reste une aventure collective tout au long de l'année.
07:22 Pour vous donner un exemple, les 14 enfants qui vont en finale nationale à la Comédie française dans 10 jours
07:30 vont être accompagnés par l'auteur du livre qu'ils vont lire.
07:35 À chacun ?
07:36 Voilà. Et cet auteur, on va offrir à la classe de chaque enfant une rencontre d'une journée avec cet auteur qu'on va envoyer dans les classes juste avant la finale.
07:46 Donc ça se passe en ce moment, depuis début juin.
07:49 Et donc ça, c'est un cadeau pour la classe finalement, d'avoir cette rencontre avec un auteur jeunesse.
07:55 Beaucoup d'enfants n'ont jamais rencontré d'auteur vivant, et donc ça modifie beaucoup leur rapport au livre, à la lecture,
08:02 de se rendre compte qu'ils peuvent échanger avec celui dont ils ont lu le livre quelques jours avant, sur son métier d'écrivain, comment il crée ses personnages.
08:14 Et en termes de pédagogie, vous nous avez parlé un peu des bienfaits de la lecture à voix haute pour aimer encore plus la lecture,
08:22 en termes de pédagogie, quels seront les bienfaits de la lecture ?
08:25 Alors, au-delà d'en effet développer l'envie de lire, j'en citerai deux autres.
08:33 Le premier, c'est de mieux comprendre le sens de ce qu'on lit.
08:36 Ça, ça a été prouvé par des chercheurs en neuroéducation qui ont établi que quand on lit à voix haute, on comprend mieux le sens du texte qu'on vient de lire.
08:51 Voilà, donc ça c'est un apport vraiment très intéressant en termes de pédagogie,
08:56 notamment parce que souvent les élèves ont beaucoup appris à décoder, depuis le CP jusqu'au CE1, CE2, et qu'à partir du CM1, il est question qu'ils lisent pour apprendre des choses.
09:13 D'accord, oui, c'est plus la lecture pour la lecture.
09:15 Il ne s'agit plus uniquement de décoder des phonèmes mis les uns à la suite des autres,
09:21 mais aussi de lire suffisamment vite et avec suffisamment d'attention pour comprendre le sens,
09:31 être capable de le garder toute une page, tout un chapitre et tout un livre, finalement.
09:36 Et donc la lecture à voix haute aide à ça, donc ça c'est très intéressant.
09:39 Et puis le deuxième point, c'est qu'elle aide à entrer en contact avec l'autre,
09:44 c'est-à-dire à développer une forme d'empathie pour les personnages de l'histoire qu'on est en train de lire,
09:52 mais aussi avec le public auquel on s'adresse.
09:55 Et donc ça, c'est en termes de compétences psycho-émotionnelles, très intéressant.
10:01 Et là, ça va plus se rapprocher du théâtre, du coup, ou alors vous voyez une différence ?
10:04 Alors de toute façon, lecture à voix haute et théâtre sont des pratiques très cousines.
10:09 Pour revenir à la comédie française, les comédiens de la comédie française réalisent des lectures à voix haute à la table, comme ils disent.
10:16 Et donc un comédien peut faire les deux, peut jouer par cœur un texte sur scène, avec costume, mise en scène,
10:23 mais aussi le lire avec le livre dans les mains.
10:27 Et donc, bien sûr, quand on lit une scène dialoguée, par exemple, on est dans l'interprétation.
10:33 Et la recherche du bon ton pour chaque personnage, c'est très proche du théâtre.
10:38 Là, ça va faire 11 ans que les Petits champions de la lecture ont été créés.
10:42 Est-ce que vous voyez une différence ? Je ne sais pas s'il y a eu des nouvelles études sur l'appréciation de la lecture pour les jeunes ?
10:48 Alors, il y a des études qui sortent régulièrement.
10:51 La dernière montre qu'en France, la chute vient de s'arrêter.
10:57 La chute du niveau des élèves vient de s'arrêter.
11:00 Donc j'espère que les Petits champions de la lecture contribuent à ce palier.
11:06 Malgré tout, si on regarde les résultats depuis 15 ou 20 ans, il y a une baisse du niveau de la lecture qui se poursuit.
11:14 Et donc, il est...
11:16 Pour vous, la promotion de la lecture est encore vivement nécessaire aujourd'hui ?
11:20 Bien sûr.
11:21 Et les jeunes perdent le goût, vous diriez, aujourd'hui, de cette lecture ?
11:27 Les jeunes, comme d'ailleurs les moins jeunes, sont très sollicités.
11:31 On préfère souvent d'autres activités à la lecture pendant leur temps de loisir.
11:37 Et donc, l'école est quand même le lieu très privilégié pour faire découvrir la lecture et la faire aimer.
11:44 Ensuite, une fois que l'enfant rentre chez lui, c'est justement s'il a suffisamment accroché,
11:50 s'il a découvert qu'il peut avoir autant de plaisir à lire qu'à regarder une série ou qu'à jouer avec ses copains,
11:56 qu'il va continuer et garder ça comme loisir personnel.
12:02 Vous diriez que l'entourage est fondamental, finalement, aussi, pour accompagner dans ce goût ?
12:06 Oui, bien sûr. L'entourage est fondamental, mais également, participer à des jeux, des challenges, comme ça, collectifs,
12:15 joue un rôle très important.
12:16 Ça ne suffit pas de voir ses parents lire, ses frères et sœurs lire, pour se mettre à lire.
12:21 Et vous pourriez nous dire les romans jeunesse majeurs qui sont choisis par ces enfants ?
12:27 Alors, comme je le sais, il y a des grands classiques, comme "Le petit Nicolas", "Le petit Prince", les livres de Roald Dahl,
12:34 et bien sûr, toute la série "Harry Potter".
12:37 Et puis, on a des romans plus récents, je citais "Mortel Adele", mais il y en a d'autres.
12:41 Et on est très contents de voir que des romans parus récemment par des auteurs vivants
12:48 tirent leur épingle du jeu, aussi, dans les choix des enfants.
12:51 Merci beaucoup, Magali Fourmaintrou, d'avoir pris la parole.
12:54 Je rappelle que vous êtes secrétaire générale des Petits Champions de la lecture.
12:58 On vous souhaite donc un très bel événement le 28 juin prochain.
13:01 Et quant à nous, on se retrouve demain pour un nouveau numéro de Smart Education.
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