Julie Chatry, victime d'un deuil périnatal : "On a fait le choix d’un arrêt des soins après quelques heures de vie"

  • l’année dernière
Viols, agressions, deuils insurmontables, accidents de la vie : dans "Trauma", anonymes et célébrités reviennent pour Yahoo sur un traumatisme qui a bouleversé leur vie.Julie Chatry est maman de trois enfants, ainsi que du petit Noé décédé après seulement quelques heures de vie à la maternité. Aujourd’hui, Julie se bat pour mettre en lumière le deuil périnatal et pour faire reculer le tabou autour de cette souffrance que vivent de nombreux parents. Pour Yahoo, elle livre un témoignage poignant sur son long parcours de deuil, de la perte de son enfant à sa reconstruction.D’après l’Organisation mondiale de la santé (OMS), on parle de deuil périnatal lorsqu’un parent perd un enfant entre 22 semaines d’aménorrhée et le 7e jour après sa naissance. En France, le taux de mortinatalité périnatale s’élève à 10,2 pour mille en 2019, d’après les données hospitalières. Ce chiffre comprend les enfants nés sans vie ou décédés lors de leur première semaine de vie.
Transcript
00:00 J'ai trois enfants à la maison.
00:02 Un garçon qui s'appelle Mathéo qui a 11 ans,
00:05 Sacha qui a 9 ans,
00:08 Évie qui vient d'avoir 2 ans,
00:10 et je suis aussi mamange de Noé qui aurait eu 4 ans hier.
00:14 Mamange c'est la contraction du terme maman et ange.
00:21 C'est un terme qui est utilisé dans le deuil périnatal.
00:25 Il y a 4 ans, j'ai accouché de mon fils Noé par césarienne en urgence
00:30 parce que son coeur ne battait plus.
00:32 Pour cette césarienne, j'étais enceinte de plus de 40 semaines.
00:35 Malheureusement, malgré une réanimation longue
00:39 et malgré tous les soins qui lui ont été prodigués,
00:43 on a fait le choix d'un arrêt des soins après quelques heures de vie
00:48 parce que son pronostic était vraiment très mauvais
00:51 et qu'il avait très peu de chance de survie.
00:53 J'ai eu une infection, la streptococque,
00:56 qui est très courante chez les femmes de manière générale.
00:59 On ne savait pas comment, mais ça s'est passé dans le placenta
01:03 et du coup ça a infecté aussi Noé.
01:05 Ça se passe dans notre corps, donc en tant que maman on se sent nulle.
01:09 Vraiment, on se dit qu'on n'a pas réussi à protéger notre enfant,
01:12 que c'est nous qui lui avons transmis ça,
01:14 même si ce n'était pas volontaire de notre part.
01:16 Il y a un fort sentiment de culpabilité
01:18 qui dure malheureusement assez longtemps pendant le deuil.
01:22 Noé est décédé après 13 heures de vie.
01:25 Et pendant ces 13 heures-là, déjà moi j'en ai loupé 6
01:30 parce que j'étais en salle de réveil après une césarienne avec anesthésie générale.
01:34 Donc quand je me suis réveillée, évidemment j'ai cherché mon fils.
01:37 J'étais seule en salle de réveil, il n'y avait pas mon mari.
01:40 J'étais vraiment désemparée et je n'avais plus mon fils dans mon ventre.
01:44 Je ne savais pas où il était.
01:46 Mon mari m'a rejoint assez rapidement en me montrant des photos de mon fils.
01:52 Et quand il m'a dit qu'il avait été réanimé plus de 30 minutes,
01:55 dans mon cerveau, ça a été très compliqué à gérer
01:59 parce que je suis auxiliaire-peur de métier.
02:01 Donc moi j'ai travaillé en milieu hospitalier.
02:03 Et je sais que 30 minutes chez un tout petit, c'est trop long.
02:07 Tout ça, j'en suis consciente et en même temps,
02:09 j'ai mon cœur de maman qui me dit "oui, mais on s'en fiche, il est là".
02:13 Et du coup, quand le pédiatre est venu, j'ai pris une deuxième claque
02:16 parce que là, c'était...
02:19 Toutes les données que moi je connais trop bien.
02:23 Acidose, arrhythmie, dyspnée, il était là,
02:27 mais il n'était déjà partiellement plus là.
02:30 J'ai pu le rejoindre.
02:32 Et c'était très difficile parce qu'il était évidemment branché de partout
02:36 et je n'osais pas le toucher.
02:39 Donc moi, mon métier, c'était de m'occuper d'enfants
02:42 dans des circonstances semblables.
02:44 Et là, j'étais en incapacité de toucher mon fils.
02:48 J'avais peur de lui faire mal.
02:51 C'était très déstabilisant.
02:54 Et je suis restée avec lui un petit moment,
02:56 mais j'étais effectivement très douloureuse.
02:59 Je venais juste de réveiller d'une longue opération.
03:01 Donc on m'a demandé d'aller me reposer.
03:03 Quelques heures après, on est venu me rechercher.
03:06 Et quand on est venu me rechercher, je savais que c'était fini.
03:09 Ils m'ont dit "Noé, ça ne va plus, ça ne va pas aller".
03:13 Et donc je suis revenue auprès de lui.
03:16 Même si on arrivait à trouver un traitement qui pouvait le faire vivre encore un peu,
03:20 le résultat aurait sans doute été pire que
03:24 lui faire connaître des choses qu'il n'avait pas forcément besoin de connaître.
03:28 Et puis, même s'il avait survécu plus tard,
03:31 il n'aurait sans doute pas eu une vie comme on peut l'espérer.
03:35 Donc du coup, assez rapidement, ils m'ont proposé de prendre Noé sur moi.
03:40 Et ce n'était pas une demande officielle.
03:42 Mais je savais très bien qu'à partir du moment où je le prendrais sur moi,
03:45 c'était terminé, c'était l'arrêt des soins.
03:48 Mais j'ai dit oui.
03:50 Tout de suite, on s'est regardé avec mon mari.
03:52 On a décidé qu'il s'était battu assez.
03:54 Et que maintenant, c'était à nous de nous battre pour lui et de le laisser partir.
03:58 Donc on a eu le droit d'avoir une chambre improvisée.
04:01 J'ai pris Noé sur moi.
04:03 Et on a eu quelques minutes pour lui dire tout ce qu'on avait à lui dire.
04:07 Et pour lui chanter une berceuse, pour l'accompagner dans un ailleurs bien plus beau que le nôtre.
04:14 J'avais à lui dire tous les "je t'aime" du monde en quelques minutes.
04:17 Que j'étais extrêmement fière de lui.
04:21 Que toute sa famille l'aimait.
04:23 Qu'il allait nous manquer.
04:25 Que c'était un guerrier.
04:27 Qu'il continuerait toujours à vivre à travers nous.
04:30 Et qu'on se battrait pour lui, pour son histoire, pour cette cause.
04:37 Et lui dire qu'il avait le droit de partir simplement.
04:41 Qu'il ne devait pas lutter.
04:43 Qu'il devait accepter de partir et que ça irait pour nous.
04:45 Qu'on allait s'en sortir.
04:47 Le deuil pour moi, il dure toute la vie.
04:50 C'est-à-dire qu'on ne fait pas le deuil d'un enfant.
04:53 On fait le deuil de ce qu'on aurait aimé pour lui.
04:56 De ce qu'on aurait voulu partager avec lui.
04:58 De ce qu'il aurait pu devenir.
05:00 Mais le deuil d'un enfant, il dure toute la vie.
05:03 Il n'y a pas de date de fin.
05:04 Noé, aujourd'hui, pour moi, il est au paradis.
05:06 Parce que moi, je crois à la vie après la mort.
05:08 Et puis, il est surtout partout avec moi.
05:10 Dans tout ce que je fais, dans tout ce que j'entreprends.
05:12 Il est gravé sur mon corps.
05:14 Il est dans mon livre, dans ma vie de tous les jours.
05:17 On en parle quasiment tous les jours.
05:21 Quand mes enfants font un dessin, ils dessinent un petit Noé dans le ciel.
05:25 C'est quelque chose chez nous qui est très naturel.
05:27 J'ai tatoué ces empreintes sur le côté coeur, sur ma peau.
05:33 Ces vraies empreintes qu'on a prises à la maternité ce jour-là.
05:37 Quand j'ai fait ce tatouage-là, c'était après avoir vu une psychologue
05:40 avec qui j'ai beaucoup parlé.
05:41 Et qui m'a dit, ce qui vous manque le plus, c'est le contact physique.
05:46 Et c'est vrai que moi, je suis une maman qui a besoin de toucher mes enfants.
05:50 Le contact, le peau à peau, c'est très important.
05:52 Ça l'a toujours été pour moi.
05:54 Et là, je ne pouvais pas.
05:55 Je pouvais aimer mon fils.
05:57 Il me manquait.
05:58 Je pouvais parler de lui.
05:59 Mais le contact physique était douloureux jusque dans ma chair.
06:03 C'était vraiment une douleur qui était toujours présente.
06:07 Et c'était ma manière à moi de faire ce peau à peau-là
06:10 en le gravant de manière indélible côté coeur.
06:13 Mon mari Bertrand, c'est quelqu'un qui avança de ne montrer pas beaucoup d'émotions.
06:19 Et quand on a perdu notre fils, honnêtement, j'ai découvert un nouveau Bertrand.
06:24 Il est passé partout.
06:26 Il a fait toutes les émotions, la colère, beaucoup, l'injustice, la tristesse.
06:31 C'est la première fois depuis, enfin en 10 ans,
06:35 que je voyais mon mari vraiment fondre en larmes
06:37 de manière à être secoué par des sanglots, à être croquillé.
06:41 Je ne l'ai jamais vu comme ça.
06:42 Ça a débloqué certaines émotions qui étaient bien cachées depuis un moment.
06:46 Depuis, alors, il n'est plus en colère.
06:48 Il parle de Noé sans tristesse.
06:50 Et puis surtout, il est en paix avec ça, je pense, maintenant.
06:55 Quand on a perdu Noé, on s'est dit, OK, tout peut s'arrêter demain.
06:59 Est-ce qu'on est content de la vie qu'on a ?
07:02 Est-ce que c'est ça qu'on voulait faire ?
07:04 Est-ce qu'on a compris le plus important ?
07:06 Et bien, clairement pas.
07:07 Et donc, du coup, on s'est dit, l'important, c'est nos enfants, notre famille
07:12 et vivre avec la simplicité, sans se rattacher aux choses matérielles.
07:17 Du coup, on voulait se créer des nouveaux souvenirs avec nos enfants
07:20 et vraiment en vivant le plus simplement possible.
07:24 Donc, on a acheté une caravane, on a quitté nos emplois,
07:27 on a donné ou vendu nos meubles
07:29 et on est partis dès la fin de la période scolaire des garçons, donc en juillet.
07:34 Mathéo avait 6 ans et Sacha en avait 5.
07:38 Quand on a acheté la caravane, on a rencontré un couple de jeunes retraités.
07:43 Eux-mêmes avaient perdu un enfant des années auparavant
07:47 et on n'avait pas le prix pour mettre cet argent dans la caravane.
07:51 Et en fait, ils ont aligné le prix de la caravane à notre budget
07:57 parce qu'ils avaient été touchés par notre histoire
07:59 et qu'ils voulaient qu'on puisse réaliser notre rêve.
08:01 Et donc, du coup, on a pu partir grâce à eux.
08:04 C'était vraiment une parenthèse enchantée dans notre vie.
08:07 C'était vraiment une super expérience.
08:09 On a reçu beaucoup de signes de Noé.
08:11 Moi, je suis quelqu'un qui croit beaucoup dans les signes,
08:13 dans le destin, dans toutes ces choses qui nous arrivent.
08:16 Et notamment, quand on était en caravane,
08:19 on a vu des choses qui étaient improbables.
08:23 Je te donne un exemple.
08:25 On a gravi à pied, 4 mois après la césarienne,
08:29 le puits de Sancy, en Auvergne.
08:33 Et en arrivant en haut de ce volcan,
08:37 il y avait une balustrade sur laquelle était inscrit le prénom de Noé.
08:40 Il y a des dizaines de puits dans cette région.
08:44 Et c'est celui-là qu'on a gravi.
08:46 Et c'est sur celui-là qu'il y avait écrit son prénom.
08:49 On a eu aussi le droit, dans notre nouvelle maison,
08:53 sur un étage qui avait été réaménagé,
08:55 où personne n'était monté auparavant,
08:57 dans la pierre de la fenêtre,
08:59 était gravé dans la pierre le prénom de Noé.
09:02 Même moi, quand je l'ai vu, je me suis dit
09:04 "C'est pas possible, il y a une explication logique à ça."
09:06 Mais en fait, il n'y en avait vraiment pas.
09:08 C'était juste des signes.
09:10 Et c'était beau, parce que ça voulait dire qu'il nous suivait,
09:12 et qu'il était...
09:14 C'était presque une autorisation de continuer à avancer.
09:17 Il nous disait "C'est super ce que vous faites, continuez, je suis toujours là."
09:21 Quand Noé est mort et qu'on l'a amené après qu'il soit parti,
09:25 ce qu'on s'est dit avec mon mari à ce moment-là,
09:27 devant le corps de notre fils,
09:29 c'est que deux choses, ça ne nous séparerait pas.
09:32 Et la deuxième chose, c'était qu'on ne laisserait pas la mort gagner,
09:35 et qu'on ferait un autre enfant.
09:36 On l'a dit vraiment tout de suite,
09:38 et on y tenait.
09:40 C'était ambigu parce que j'avais très peur,
09:43 mais en même temps je sentais que j'avais besoin de gagner un combat.
09:47 Pas pour remplacer Noé, pas du tout,
09:49 mais parce que je voulais faire un pied de nez à la mort
09:52 en disant qu'elle ne m'achèverait pas,
09:54 que ça ne se finirait pas comme ça.
09:56 Je ne suis pas tombée enceinte tout de suite,
09:58 c'était un peu long.
09:59 Quand je suis tombée enceinte,
10:01 la première fois, ça n'a pas fonctionné.
10:04 J'ai enchaîné deux fausses couches
10:06 avant de pouvoir avoir ma fille.
10:08 C'était des fausses couches qui étaient très dures à vivre
10:11 parce que j'ai l'impression que la boucle ne s'arrêtait pas.
10:14 J'étais toujours dans la même spirale infernale
10:16 et que je n'avais pas fait tout ce que je pouvais pour m'en sortir.
10:20 Ça renforçait encore plus mon sentiment
10:22 de ne pas être capable de donner la vie,
10:24 de porter la mort.
10:25 C'était hyper difficile à gérer.
10:29 Mais on s'est accrochées,
10:30 puis on a vu des professionnels
10:32 qui nous ont beaucoup encouragées,
10:34 qui nous ont accompagnées.
10:35 J'ai pu tomber enceinte de ma petite-fille.
10:39 C'était une grossesse extrêmement compliquée
10:43 parce que sur le plan clinique, elle était parfaite.
10:45 Mais moi, psychologiquement, j'étais terrifiée.
10:48 J'avais peur de vivre une autre perte.
10:54 Pour moi, dans ma tête,
10:56 je me suis dit que si ça arrive, je ne vais pas survivre.
10:59 J'avais peur de faire souffrir mes proches,
11:01 mes enfants,
11:02 qui avaient déjà beaucoup souffert de la perte de leur frère.
11:06 J'avais peur de faire souffrir mon mari.
11:09 Et puis surtout, j'avais peur de l'aimer.
11:11 J'ai mis beaucoup de temps à m'accrocher à cette grossesse-là.
11:14 Pas qu'elle n'était pas désirée, au contraire.
11:16 Mais je me suis dit que si je m'y attache et qu'elle part,
11:19 je vais mourir.
11:21 Donc c'était très compliqué, c'était très ambivalent.
11:26 On m'a fait même accoucher en avance
11:28 parce qu'à la fin, plus on se rapprochait du terme de Noé,
11:30 plus c'était anxiogène,
11:32 moins je dormais et moins je mangeais.
11:34 Ils l'ont fait sortir dès la 38e semaine
11:37 pour que je puisse la voir au plus vite dans mes bras
11:40 et que je sois rassurée.
11:41 Quand on l'a posé sur moi, c'était des larmes,
11:44 beaucoup de larmes, de soulagement
11:46 de la voir, de l'entendre.
11:48 En fait, d'entendre un bébé crier,
11:50 puisque je n'avais pas vu mon fils crier,
11:52 ni ouvrir ses yeux.
11:53 Et de la voir bouger, de la voir respirer.
11:57 Et c'était extraordinaire.
12:00 Je ne peux même pas décrire avec des mots simples
12:02 ce que ça m'a fait ressentir.
12:04 Donc j'ai pleuré pour ça.
12:05 Et puis j'ai pleuré aussi pour Noé,
12:08 qui ne pourrait jamais connaître sa sœur,
12:10 même si je sais qu'il veille sur elle.
12:12 Puis c'était des larmes de victoire aussi,
12:13 parce que j'avais réussi.
12:15 C'était vraiment une réussite pour moi,
12:17 une promesse que j'avais faite à mon fils
12:18 et que j'avais pu tenir.
12:19 Et Viv, je suis très fusionnelle avec elle, évidemment.
12:23 Je suis un peu surprotectrice, sans doute.
12:26 Mais c'est une petite fille qui est pleine de joie de vivre.
12:29 Et puis elle porte très bien son prénom,
12:31 puisque son prénom signifie "porteuse de vie".
12:33 Et oui, je crains pour sa vie,
12:35 comme pour celle de mes deux autres enfants.
12:37 Parce que je sais ce que ça fait de perdre un enfant.
12:39 Mais je ne suis pas inquiète pour l'avenir,
12:43 parce qu'en fait, on n'a pas la main mise dessus.
12:46 On peut juste profiter des moments qu'on a avec nos enfants
12:49 et voir ce qui se passera plus tard.
12:51 Evy vient d'avoir deux ans.
12:53 Noé est parti il y a quatre ans.
12:55 Est-ce que j'ai combattu cette pensée-là
12:59 où j'étais porteuse de mort ?
13:01 Oui, d'une certaine manière,
13:03 en donnant naissance à une porteuse de vie.
13:05 Après, est-ce que la culpabilité est revenue à zéro ?
13:08 Je ne saurais pas le dire avec certitude.
13:13 En revanche, je sais que je suis en paix avec ça.
13:15 Je sais que moi, j'étais, pendant ces 13 heures de vie,
13:19 une bonne mère pour mon fils,
13:21 parce que j'ai fait des choix qui étaient bons pour lui.
13:24 J'étais là jusqu'à la dernière seconde.
13:27 Je lui ai donné tout mon amour condensé en quelques heures.
13:31 Donc, non, je n'ai plus de sentiments qui m'assaillent au quotidien.
13:36 Il y a des petits résidus, bien sûr,
13:38 mais ça va beaucoup mieux.
13:40 Comment ça va aujourd'hui ?
13:42 Aujourd'hui, ça va bien.
13:44 Je suis une maman comblée.
13:46 D'ailleurs, je ne veux plus d'enfant.
13:48 Ça y est, j'ai bouclé la boucle.
13:50 J'ai rendu mon fils éternel en écrivant mon livre.
13:53 Mon livre, il s'appelle "Vole petit prince",
13:56 parce que quand j'étais en néonate,
13:59 c'est comme ça que les soignantes ont nommé Noé.
14:03 C'est un livre qui retrace ma vie avant,
14:06 pendant et après la venue de Noé.
14:09 Il est tiré en grosse partie du journal intime
14:12 que j'ai tenu pendant plusieurs mois après son départ.
14:15 Il y a deux versions.
14:16 Il y a la Julie qui donne ses souvenirs,
14:19 qui offre ce qu'elle a compris, comment elle a avancé.
14:22 Et puis, il y a les parties de mon journal
14:24 où là, c'est la Julie qui souffre à l'instant T
14:27 et qui, du coup, avec des mots forts,
14:31 va expliquer par quoi, nous, parents endeuillés,
14:35 on peut passer des émotions qu'on peut rencontrer,
14:39 la colère, la culpabilité, la tristesse, la douleur, tout ça.
14:44 C'est expliqué dans ce livre-là.
14:46 Pour moi, on est maman à partir du moment où on porte un enfant,
14:48 c'est encore un embryon,
14:50 parce qu'on l'aime déjà, on y est déjà attaché.
14:53 Le deuil périnatal ou post-natal, en fait,
14:56 il doit être reconnu, il doit être entendu,
14:58 il doit être défendu.
14:59 Et c'est pour ça aussi que j'écris ce livre-là,
15:01 parce que je veux faire bouger les mentalités.
15:03 C'est déjà suffisamment dur de perdre un enfant
15:05 sans qu'en plus, on se retrouve avec un tabou à porter sur nos épaules
15:08 qui n'a pas lieu d'être.
15:09 Mon nouveau combat, c'est ça.
15:11 Je veux faire reculer le tabou autour du deuil périnatal
15:13 et je me donnerai les moyens d'y arriver.
15:15 Alors moi, j'ai rencontré des mamans qui ont vécu le deuil d'un enfant
15:18 de par mon métier déjà,
15:20 avant même d'avoir moi-même perdu un enfant.
15:22 Et depuis, j'en ai rencontré des dizaines.
15:26 Et déjà, la première chose que je demande à ces personnes-là,
15:29 c'est comment s'appellent leurs enfants.
15:31 Parce qu'en fait, très souvent, on ne les nomme pas.
15:35 Et c'est terrible, parce qu'en fait,
15:37 tout le monde porte un nom,
15:39 et tout le monde a le droit d'être nommé.
15:40 Et à chaque fois, c'est beaucoup d'émotion de parler avec eux,
15:44 parce qu'ils me remercient,
15:45 alors qu'en fait, je ne fais rien de plus que ce qui est complètement normal.
15:48 C'est-à-dire entendre leur tristesse
15:51 et entendre leur expérience et leur histoire.
15:55 Et elles sont toutes belles.
15:56 Elles sont tristes, mais elles sont belles.
15:57 Parce que ça part du sentiment de l'amour
15:59 qui est provenu de mère pour un enfant.
16:01 Enfin.
16:02 [Générique]

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