Les 4 vérités - Clémentine Autain

  • l’année dernière
Clémentine Autain, députée (LFI) de Seine Saint Denis est l'invitée des 4 vérités 

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Transcription
00:00 Bonjour Clémentine Otta. Bonjour Jean-Baptiste Dertoux.
00:03 Merci d'être avec nous dans les 4 REVÉS.
00:05 Une nouvelle fois l'entre-du-jour de l'Assemblée nationale sera occupée par le débat d'une
00:08 motion de censure déposée par votre groupe LFI.
00:10 Ce sera la 17ème depuis l'arrivée d'Elisabeth Borne à Matignon il y a un an.
00:14 Est-ce que ça sert en quelque chose ? Parce que disons-le, elle a quand même quasiment
00:17 aucune chance d'être votée.
00:18 Ça sert déjà à exprimer notre colère, notre réprobation à l'égard d'un gouvernement
00:24 et d'un président de la République qui a utilisé le pire de la Ve République, des
00:30 mécanismes rendus possibles par cette constitution qui est totalement obsolète, elle est dépassée
00:35 il faut dire les choses, pour imposer une loi dont les Français ne veulent pas, dont
00:39 les syndicats ne veulent pas et dont l'Assemblée nationale ne voulait pas.
00:43 Donc ça ne risque pas de démonétiser la motion de censure, ce droit des oppositions ?
00:47 Je pense que nous sommes depuis un an face à un gouvernement qui n'entend rien, qui
00:52 impose une politique très violente socialement et qui est dans un niveau de mépris et de
00:57 brutalité antidémocratique assez sévère.
01:01 Vous serez d'accord avec moi quand même que c'est incroyable d'imaginer qu'un
01:04 gouvernement puisse imposer une loi dont strictement aucune majorité, dans aucun endroit,
01:09 ni chez les syndicats, ni dans le peuple français, ni à l'Assemblée nationale.
01:11 La constitution a été respectée ?
01:12 Oui mais ce n'est pas parce que…
01:13 Vous dites qu'elle n'est plus bonne mais elle a été respectée pour l'instant.
01:16 D'abord, pas tout à fait, parce que l'utilisation de ce qu'on appelle l'article 40 à l'Assemblée
01:22 nationale, c'est ce qui oblige une proposition de loi à être gagée, c'est-à-dire qu'il
01:25 faut qu'elle soit financée.
01:27 Jamais, jamais, on ne l'utilise dans les conditions dans lesquelles elle a été utilisée
01:31 pour empêcher le vote des députés.
01:34 Jamais c'est arrivé.
01:35 Donc vous voyez, on l'utilise… il y a une jurisprudence sur l'utilisation des
01:39 mécanismes de la Ve et là je dirais que ça outrepasse tout ce qu'on a été capable
01:43 d'entendre.
01:44 Et je crois que le gouvernement Emmanuel Macron ferait bien d'être… comment dire…
01:49 d'entendre en fait ce que les gens ressentent.
01:51 L'impression d'être bafouée, l'impression d'être méprisée et ça, ça va finir
01:56 par se voir.
01:57 D'un mot, le fait que le RN dise qu'ils vont voter votre motion de censure, c'est
02:00 un problème ou ça ne l'est plus maintenant et vous prenez toutes les voix d'où qu'elles
02:03 viennent ?
02:04 Non mais tout le monde sait bien qu'il n'y a pas d'entente sur le fond possible
02:08 entre l'extrême droite et nous.
02:10 Vous pourriez dire, nous on ne veut pas des voix du RN.
02:12 Tout nous oppose, ce n'est pas une histoire de voix, tout nous oppose.
02:14 En revanche là, ce dont il s'agit c'est de dire est-ce que nous avons confiance dans
02:18 ce gouvernement ou est-ce que nous n'avons pas confiance dans ce gouvernement ?
02:21 Nous n'avons pas confiance dans ce gouvernement et tous les députés qui rejettent cette
02:26 confiance doivent pouvoir voter une motion de censure.
02:29 Après le vote…
02:30 Que ça vienne du RN ou…
02:31 Non mais ça ne vaut pas alliance, c'est ça qu'il faut comprendre.
02:34 Ce n'est pas une histoire d'alliance, c'est une histoire d'objectif général
02:38 qui consiste à dire que ce gouvernement ne va pas.
02:41 Si ce soir votre motion de censure n'est pas adoptée, ce qui sera a priori le cas,
02:44 est-ce qu'on pourra dire que le travail parlementaire de cette réforme des retraites
02:48 est terminé ?
02:49 D'abord faites attention là-dessus, vous savez que la dernière motion de censure c'est
02:51 à 9 voix près.
02:52 Mais justement déjà le groupe Lyot a dit qu'il ne la voterait pas, les NR au Réunion
02:56 Brésil ont dit qu'il ne la voterait pas.
02:57 Je m'entends bien mais pour celles et ceux qui nous écoutent il faut se rendre compte
02:59 577 députés sauf 9 voix ont manqué à l'appel de la dernière fois.
03:05 Donc je ne vous dis pas que ce soir il y aura encore 9 voix etc.
03:09 Je vous dis juste que c'est très serré, très juste.
03:12 Ça aussi, quasiment du jamais vu sous la 5ème.
03:15 Donc si ce n'est pas voté la réforme des retraites, le travail législatif en tout
03:20 cas, ce sera terminé.
03:21 Elle sera définitivement adoptée cette réforme des retraites.
03:23 Elle est adoptée jusqu'à ce qu'on arrive à trouver un biais pour la détricoter.
03:26 Je vous assure que nous…
03:27 C'est pour être lequel ?
03:28 Il va falloir trouver, vous savez il y a d'autres niches parlementaires, il y a d'autres
03:30 moments on va continuer, on va par tous les moyens.
03:31 Vous voulez continuer à essayer de trouver des moyens d'abroger ?
03:32 Mais vous vous rendez compte, transformer les deux plus belles années de retraite en
03:36 deux pires années de travail c'est inacceptable.
03:40 C'est inacceptable.
03:41 Et moi je vous dis, quand la NUPES arrivera au pouvoir, nous abrogerons cette loi.
03:46 Nous l'abrogerons.
03:47 Et nous viserons la retraite à 60 ans parce que c'est ça le sens de l'histoire, c'est
03:51 de partager le temps de travail et de partager les richesses.
03:54 Tout ce que le gouvernement ne veut pas faire.
03:55 Autre thème Clémentine, après le recueillement, le choc, l'émotion suite au drame jeudi
03:59 à Annecy, cette attaque au couteau par un réfugié syrien qui s'en est pris à de
04:02 très très jeunes enfants.
04:04 Quelle leçon vous voulez tirer vous de cette attaque ?
04:07 D'abord je veux exprimer mon empathie, l'émotion qu'ont ressentis tous les Français
04:13 devant cet acte ignoble, ignoble d'un homme visiblement pris de démence parce que franchement
04:19 attaquer au couteau des bébés, on sent bien qu'on touche à quelque chose d'abjecte,
04:25 absolument insupportable.
04:27 Donc ça c'est la première chose.
04:28 Et je pense que cette émotion, cette empathie, cette concorde aussi nationale aurait dû
04:34 nous unir.
04:35 Très très vite on a vu qu'il y avait une politisation de la question.
04:40 Alors pourquoi pas quand il y a des faits qui se passent dans la société, après tout
04:43 c'est le rôle aussi des politiques que de dire ce que nous ferions.
04:46 Le problème c'est que je suis en désaccord complet avec la petite musique qui s'est
04:51 fait entendre sur les thèmes, sur l'agenda qui est celui de l'extrême droite.
04:56 Parce qu'immédiatement on est passé au procès de l'ensemble des migrants.
05:02 Or ce Syrien, effectivement il est Syrien, il est d'origine syrienne, pourquoi a-t-il
05:06 fait cet acte ? Est-ce qu'au fond s'il l'avait fait dans un autre pays, on s'en serait
05:10 dédouané en disant "ben c'est pas grave, il y a un acte de démence, mais c'est ailleurs,
05:14 ça n'est pas en France donc on s'en préoccupe pas".
05:15 Mais vous refusez de faire le lien entre ce drame et l'immigration.
05:17 Il n'y a pas de lien.
05:18 Quel est le lien ? Je vais vous dire les choses parce que je sais que celles et ceux qui nous
05:22 regardent pour moitié, en tout cas en France, la moitié des Français pensent qu'il y
05:26 a un lien entre immigration et insécurité, délinquance.
05:30 Or ce lien n'est prouvé par strictement aucune étude.
05:34 Ce n'est pas simplement moi qui le dit, ce sont des chercheurs et je pense en particulier
05:38 au CEPI qui est un organisme de recherche qui est lié pourtant au gouvernement, c'est-à-dire
05:44 au sens où il propose un certain nombre d'analyses qui sont soumises au gouvernement et ils le
05:51 disent très clairement comme l'OCDE.
05:52 Donc vous voyez, des organismes officiels.
05:54 Donc pour vous il ne faut absolument aucun lien avec l'immigration ?
05:57 Ce lien est erroné, il ne s'appuie sur strictement aucune étude.
06:01 En revanche quand vous allumez la télévision, quand vous écoutez le discours ambiant, on
06:06 a l'impression, là on est tout de suite angoissé parce qu'on a l'impression que ce lien existe.
06:10 Or ce lien n'existe pas.
06:12 On ne peut pas systématiser ce lien et dire qu'il a fait ça parce qu'il est migrant
06:17 et que donc il faut mettre dehors tous les migrants.
06:19 Et surtout, est-ce que les propositions aujourd'hui de l'extrême droite et des droites dures
06:24 qui visent à chasser toujours plus les migrants, 29 lois sur l'immigration depuis 1980 et
06:30 globalement des lois, notamment ces 20 dernières années, qui durcissent les conditions d'accueil.
06:35 Pour quel résultat ? Pour quel résultat ? Il n'y a pas d'issue possible dans cette
06:42 course sécuritaire dans l'approche des migrants.
06:44 Donc je suis en désaccord avec cette façon à la fois de penser, qui est fausse sur le
06:49 fond, mais aussi sur les solutions qui du coup sont apportées et qui sont de fausses
06:53 solutions.
06:54 Vous savez, celles et ceux qui nous regardent, il ne faut pas qu'ils s'imaginent qu'une
06:56 fois qu'on aura chassé les migrants, eh bien on aura une solution pour que le train
07:00 arrive à l'heure, pour que les salaires soient meilleurs, pour qu'on soit bien accueillis
07:03 à l'hôpital.
07:04 Par exemple, prenez l'hôpital, vous savez que les médecins, heureusement qu'on a un
07:08 certain nombre de médecins étrangers qui font tourner les hôpitaux aujourd'hui parce
07:11 que sinon je ne sais pas comment on ferait.
07:13 29 lois sur l'immigration, il y en a une trentaine, une trentième qui est en préparation.
07:17 Est-ce que ce drame justement risque d'avoir un incident sur ce débat qui est en cours
07:20 en préparation ?
07:21 Ça dépend de vous, de nous.
07:22 Moi j'appelle aujourd'hui toutes les voix progressistes, les voix de gauche, à dire
07:27 stop.
07:28 Stop à cet acharnement contre les migrants.
07:30 Il est faux de dire que la France prend une part incroyable de l'accueil.
07:36 En réalité c'est l'inverse.
07:37 En réalité la France par rapport au pays de l'Europe de l'Ouest ne prend pas sa part
07:41 de l'accueil.
07:42 Et la violence, la dureté, la brutalité, elle est d'abord à l'encontre des migrants.
07:46 Quand on n'est même pas capable d'accueillir l'Aquarius, vous voyez, c'est-à-dire quand
07:50 on laisse la Méditerranée devenir un cimetière, en fait nous avons un problème moral.
07:53 Mais nous avons aussi un problème qui est un problème que ce n'est pas une crise de
07:59 l'immigration, c'est-à-dire que ce n'est pas une crise des migrants, comme le dit l'extrême-droite
08:02 aujourd'hui.
08:03 Notre problème est une crise de l'accueil.
08:05 Donc il y a deux visions de société et moi je pense qu'il est temps d'arrêter avec
08:11 à la fois les mensonges qui sont véhiculés par l'extrême-droite, reprises par la droite
08:15 dure et aussi par la Macronie.
08:17 Il faut que nous soyons au rendez-vous pour dire c'est faux, c'est faux de dire que si
08:22 on chasse les migrants d'abord on n'y arrivera pas parce qu'on ne peut pas fermer les frontières,
08:25 ça n'existe pas.
08:26 Même au Mexique, il y a un mur immense et ce mur n'empêche pas les gens qui fuient
08:30 la guerre et la misère d'arriver.
08:31 Ce ne sont pas les plus pauvres des plus pauvres qui viennent, puisqu'en général ce sont
08:35 des étudiants et des travailleurs qualifiés qui ont le plus de titres de séjour.
08:40 Donc tout ça est faux et tout cela, cette chasse, d'abord elle est vaine, on n'y arrivera
08:46 pas, elle est moralement contestable et enfin elle n'apportera pas de solution aux problèmes
08:53 quotidiens de celles et ceux qui nous regardent.
08:55 Clémentine Autain, vous avez dit tout à l'heure en parlant des retraites, quand l'ANUP
08:58 sera arrivé au pouvoir ? Justement en 2027, ça se prépare déjà effectivement, certains
09:01 au sein de votre parti comme Manuel Bompard appellent à des listes uniques de la gauche
09:04 pour toutes les prochaines élections, des européennes jusqu'aux élections présidentielles,
09:09 pourquoi pas les législatives.
09:10 Vous pensez que c'est le cas, que c'est possible ? Alors que par exemple en ce moment, on a
09:14 vu Bernard Cazeneuve ce week-end qui remontait son mouvement pour essayer de faire revivre
09:17 la social-démocratie.
09:18 Elle a un avenir cette social-démocratie à gauche aujourd'hui ?
09:21 Écoutez, moi je ne comprends pas le projet de Bernard Cazeneuve et de ses amis, j'ai
09:26 vu ça ce week-end et en réalité je trouve ça pas très sérieux.
09:29 Pourquoi pas sérieux ? Je vous dis franchement les choses, parce que je ne vois pas comment
09:33 il y a une solution majoritaire dans le pays en voulant créer quelque chose entre la Macronie
09:40 et la NUPES.
09:41 Je ne vois pas.
09:42 Pour moi c'est un no man's land, je vous le dis franchement c'est un no man's land.
09:46 Aujourd'hui si on veut apporter une réponse à nos concitoyennes et nos concitoyens, il
09:50 faut faire bloc, il faut travailler ensemble et ce travail ensemble il doit se faire dans
09:55 le cadre des forces de gauche et écologistes qui sont rassemblées dans la NUPES.
09:59 Mais il y a un espace qu'il y en a certains qui ne veulent pas justement, peut-être de
10:02 la radicalité de certains notamment au sein de la NUPE, de ce discours parfois, de ces
10:06 provocations qu'on a vues à l'Assemblée Nationale.
10:08 Certains à gauche ne veulent pas de ça.
10:09 Non mais on peut discuter du profil, il y a plein de choses qui peuvent se discuter
10:12 à l'intérieur de la NUPES.
10:13 Mais il y a un fait politique.
10:14 Jean-Luc Mélenchon est arrivé très très nettement en tête à gauche il y a un an.
10:19 Et donc à partir de là il faut en tirer aussi des conclusions.
10:22 C'est que ceux qui ont gouverné à gauche, et c'est le cas de Bernard Cazeneuve et de
10:25 ses amis, ils ont essayé, voilà.
10:26 Si on ne tire aucun bilan de toute cette ère, notamment de la Hollandie, c'est-à-dire de
10:34 toute cette gauche au pouvoir qui a tant déçu au point que François Hollande lui-même
10:38 n'a pas pu être à nouveau candidat, si on ne comprend pas que c'est ce moule dans lequel
10:43 cette gauche s'est mise, comme d'ailleurs partout la social-démocratie en Europe, qui
10:47 a accepté les normes de marché.
10:49 C'est ça qui s'est passé.
10:50 Eh bien je pense qu'il faut rompre avec ça, et c'est pourquoi Jean-Luc Mélenchon est
10:54 arrivé en tête, et c'est pourquoi la NUPES, effectivement, c'est nouveau.
10:58 Donc je crois qu'il y a des gens qui se disent "Ah ben essayons de refaire ce qui a été
11:01 fait avant", mais ce qui a été fait avant a conduit à des échecs.
11:03 Il faut en tirer des conclusions et être capable aujourd'hui de se rassembler parce
11:08 que nous devons impérativement gagner.

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