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Mardi 4 juillet 2023, SMART IMPACT reçoit Sandrine Delory (Directrice générale, Prospérité fermière Ingredia)

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00:00 ...
00:05 -Bonjour, Sandrine Delory. -Bonjour.
00:08 -Vous êtes la directrice générale de Prospérité fermière Ingredia,
00:12 coopérative agricole fondée en 1949.
00:16 Votre métier, c'est le lait ?
00:17 Je peux être aussi basique que ça ?
00:20 -Exactement. Le lait, c'est le 1er aliment de la vie.
00:23 Il a plein de composants à l'intérieur de ce lait,
00:26 environ 2 000 composants.
00:27 Notre métier, c'est d'extraire ces différents composants
00:31 par des méthodes douces pour en faire des ingrédients laitiers
00:34 qui visent à mieux nourrir et mieux protéger la santé
00:37 tout en respectant l'environnement.
00:40 C'est une coopérative qui a été créée en 1949,
00:43 qui a bientôt 75 ans, l'année prochaine,
00:47 et qui appartient à 750 éleveurs,
00:50 dans les Hauts-de-France uniquement,
00:52 avec une laiterie basée à Saint-Paul-sur-Terre-Noise,
00:55 associée à l'Etat arras, depuis bientôt 75 ans,
00:58 et à peu près 450 salariés,
01:00 400 millions d'euros de chiffre d'affaires,
01:02 une clientèle uniquement B2B,
01:04 c'est-à-dire que nos ingrédients, vous ne les connaissez pas
01:08 parce que c'est des ingrédients très techniques,
01:10 mais si vous faites des courses,
01:12 vous les avez consommés dans des yaourts, des fromages,
01:15 des alicaments, donc une panoplie d'ingrédients laitiers
01:18 puisqu'on a une magnifique clientèle internationale
01:21 dans une centaine de pays
01:23 qui utilise ces ingrédients pour faire leurs propres produits.
01:26 On est un maillon dans la chaîne de l'agroalimentaire
01:29 mais qui essaie d'apporter de la valeur par de la RSE
01:32 et de l'innovation.
01:33 C'est un groupe petit, mais costaud,
01:36 avec des fortes productions.
01:37 -Et puis, à un niveau mondial, sur certains produits,
01:40 vous êtes sur le podium, c'est ça ?
01:43 -Sur certaines catégories de produits,
01:45 les protéines laitières et les bioactifs laitiers
01:48 pour nourrir certaines...
01:50 Comme le stress, le diabète,
01:52 avec les particularités de ce lait,
01:54 qui est le premier aliment de la vie
01:57 et qui regorge de choses merveilleuses.
01:59 -Ingrédients laitiers, vous en avez cité quelques-uns,
02:02 mais il y en a combien ? C'est très vaste.
02:05 Et surtout, vous l'avez aussi un peu évoqué,
02:07 c'est à la fois de l'alimentation et de la santé.
02:10 Ce sont vos deux piliers de clientèle ?
02:12 -C'est ça. La partie alimentation, la plus ancienne,
02:15 la partie santé, la plus récente.
02:17 On a encore beaucoup à explorer dans le monde laitier
02:20 et parmi ses 2000 composants, on arrive à les isoler.
02:23 Donc certains...
02:25 Par exemple, le bébé qui est nourri par sa mère.
02:27 Dans le lait, il y a des choses...
02:29 On avait l'impression que le bébé était zen
02:32 parce qu'il a été bien nourri,
02:34 mais dans le lait, il y a certains composants,
02:36 notamment le lactium, qui a des vertus antistress.
02:39 Et du coup, quand on arrive à l'isoler,
02:43 eh bien, il peut remplir ses fonctions
02:45 de protection de la santé.
02:47 C'est très important.
02:48 On essaie d'apporter de la valeur par ces deux axes, RSE et innovation.
02:52 -Alors, on va parler de cette labellisation Bicorp
02:56 puisque ça a été officialisé à quelle date ?
02:59 -Il y a quelques jours.
03:00 -Pourquoi avez-vous fait ce choix ?
03:03 C'est un engagement Bicorp.
03:04 Ca demande beaucoup de travail
03:06 et ensuite, il faut obtenir le label année après année.
03:09 -Tout à fait. Déjà, dire que depuis 1949,
03:13 les agriculteurs ont toujours été motivés
03:15 par la protection de l'environnement.
03:18 C'est eux qui entretiennent les paysages.
03:20 Ils ont, par culture, un lien fort
03:22 avec tous les aspects environnementaux,
03:24 climat, biodiversité.
03:26 Ce sont des choses qui sont génétiquement
03:28 dans l'esprit des agriculteurs depuis très longtemps
03:31 et dans ceux de notre coopérative depuis très longtemps.
03:35 Quand il y a eu...
03:36 En 2015, il y a eu l'Apricota,
03:38 qui a été un big bang dans le monde laitier.
03:41 Il y a eu l'Embargo russe, je sais pas si vous vous en souvenez,
03:44 qui avait fait effondrer les cours laitiers d'à peu près 40 %,
03:48 et derrière, il y a eu toute une cohorte de suicides
03:51 chez les agriculteurs.
03:52 Ca a été des apnées très difficiles
03:54 avec pas assez de revenus pour les éleveurs.
03:57 Donc, on a choisi, à ce moment-là, en pleine crise,
04:00 de se structurer sur la partie RSE,
04:02 mais comme je vends à des industriels
04:05 de l'alimentation ou de la santé,
04:07 il faut pas venir qu'avec du blabla et des convictions.
04:10 Il faut des chiffres, des preuves.
04:12 Donc, on a commencé à structurer notre démarche RSE
04:15 à la tamponnée par un certification international
04:18 qui s'appelle ISO 26030,
04:20 et qui permet de montrer que c'est pas que du baratin,
04:23 mais qu'il y a des preuves.
04:25 -Bicorp, c'est dans la continuité de cet engagement.
04:28 -Bicorp, l'idée est venue en 2020,
04:30 au moment où on cherchait des masques, du gel,
04:33 et qu'on était dans des grandes difficultés dans les industries,
04:36 parce que vous pouvez pas dire à une vache
04:39 "On a plus de personnel, on a pas de masque,
04:41 "on peut pas traiter le lait."
04:43 On a dû résister pour alimenter les magasins en France.
04:46 C'est à ce moment-là, dans les moments de crise,
04:49 chaque crise est aussi une opportunité,
04:51 et c'est à ce moment-là, en 2020,
04:53 qu'on a décidé de lancer le Bicorp,
04:55 parce que le Bicorp, il a une notoriété internationale,
04:59 et comme je vends à une clientèle internationale,
05:02 dans une centaine de pays,
05:03 ce référentiel nous semblait très intéressant.
05:06 -Oui, ça vous valorise aussi vis-à-vis de vos clients.
05:09 Est-ce qu'il y a une part, parce que j'entends bien l'engagement,
05:13 mais est-ce qu'il y a aussi une part de demande de vos clients ?
05:16 Eux-mêmes, on connaît tous le scope 3 ici,
05:18 donc des grandes entreprises,
05:20 des géants de l'agroalimentaire,
05:22 qui veulent améliorer leur scope 3,
05:24 donc le bilan des sous-traitants ou des fournisseurs,
05:27 vous rentrez dans cette logique ?
05:29 -Tout à fait. Le plus connu dans le monde laitier
05:32 qui est parti dans le Bicorp, c'est Danone, avec Précurseur.
05:35 C'était pour nous un partenaire important et intéressant,
05:39 et inspirant, donc c'est un exemple.
05:41 Et donc, dans notre clientèle, on a des gens, effectivement,
05:44 qui cherchent à avoir des preuves que leur scope 3,
05:50 eh bien, il a une vocation à s'améliorer,
05:52 et donc, nous, le scope 3, quand on est dans une coopérative,
05:56 c'est directement les agriculteurs,
05:58 et donc, je dirais que nous, on est le scope 3 de tout le monde,
06:01 même des banques, de beaucoup de secteurs.
06:04 D'apporter la preuve qu'on cherche à s'améliorer, c'est important.
06:08 -Donc, justement, votre financement,
06:10 il était déjà indexé sur des critères RSE ou ESG,
06:15 avec la LCL, c'est ça ?
06:17 -Donc, on a fait deux prêts à impact, effectivement.
06:20 Le premier, c'était avec le LCL.
06:22 On a vocation à multiplier ça,
06:23 parce qu'on pense que, effectivement,
06:26 les banques vont devoir prouver,
06:28 c'est pas dans une banque avec un bureau et quelques ordinateurs,
06:31 que vous avez les plus gros impacts directs,
06:34 mais le scope 3, comme l'agriculture,
06:36 c'est une solution, et effectivement,
06:38 on cherche à respecter les accords de Paris,
06:41 à tracer la voie et à faire le lien
06:43 entre notre bilan carbone, comprenant l'agriculture,
06:46 et le respect du réchauffement climatique.
06:50 Donc, ça, c'est tout un enjeu qui est assez complexe,
06:53 qui demande beaucoup de formation, d'explication,
06:55 mais où on peut emmener notre collectif d'agriculteurs,
06:59 de salariés, de parties prenantes,
07:01 vers quelque chose de très motivant
07:03 en étant apporteur de solutions
07:05 et d'agriculture qui est celui qu'on souhaite avoir
07:07 pour nous, nos enfants, et surtout pour l'alimentation.
07:10 -Comment ça se passe pour les producteurs de lait bio ?
07:13 Vous parliez des difficultés de certains exploitants.
07:17 C'est une période qui est quand même compliquée,
07:19 généralement, pour le bio, avec le contexte inflationniste,
07:23 mais particulièrement pour le lait bio.
07:25 Comment ça se passe ? Et comment vous les soutenez ?
07:28 -Nous, on a une collecte d'obios qui fait 5 % de notre collecte.
07:31 On ne déclasse aucun lait bio,
07:33 c'est-à-dire que la totalité du lait bio qu'on collecte
07:36 est totalement transformée.
07:38 C'est très important, on ne cherche pas à déclasser,
07:41 mais ça ne fait que 5 % de la collecte.
07:43 C'est très important qu'il reste valorisé correctement,
07:47 mais il faut emmener les 95 % autres,
07:49 parce que si on veut avoir un impact sur le climat,
07:52 c'est la totalité de notre collectif d'agriculteurs
07:54 qu'il faut emmener.
07:56 C'est pour ça qu'on a segmenté les laits
07:58 avec un lait de vache nourrie non-OGM
08:00 pour éviter la déforestation,
08:02 un lait conventionnel où on mesure la trace carbone
08:05 par un outil qui s'appelle le cap de zeur.
08:07 On doit emmener notre collectif d'agriculteurs
08:10 pour décarboner notre SCOP3
08:13 et servir à toute la chaîne en aval.
08:15 -Je vais vous poser une question,
08:17 mais j'assume, quand on fait des ingrédients laitiers,
08:21 le fait que le lait d'origine soit bio, c'est important aussi ?
08:25 Vous voyez ce que je veux dire ?
08:27 Ca change aussi la nature des ingrédients laitiers ?
08:30 -Oui, moi, comme je suis un fournisseur d'un composant,
08:35 quand vous prenez une tablette de chocolat au lait bio,
08:38 il faut que le lait soit bio,
08:40 mais si vous avez acheté une tablette de chocolat conventionnelle,
08:43 il faut aussi qu'il s'engage dans une voie de décarbonation.
08:47 Le lait bio est en France un secteur important
08:50 qu'il faut protéger,
08:51 mais il faut aussi emmener les 95 % autres,
08:54 surtout qu'avec les problématiques d'inflation,
08:57 tout le monde n'a pas forcément les moyens
08:59 de faire face à ces achats plus importants,
09:02 et donc il faut garder un collectif d'agriculteurs,
09:06 ne pas les opposer entre eux,
09:08 car ils peuvent s'inspirer les uns les autres
09:11 de pratiques vertueuses.
09:12 On cherche à embarquer 100 % du collectif
09:15 avec un bilan carbone,
09:17 un plan d'action,
09:19 et après, un peu plus tard, un autre bilan
09:23 pour montrer combien on a décarboné.
09:26 Les objectifs de l'accord de Paris sont ambitieux.
09:29 -Vous êtes là-dessus.
09:30 Quand il y a ce label Bicorp,
09:32 vous allez être évalué régulièrement,
09:36 donc vous pourrez évaluer vos progrès.
09:39 -Exactement. C'est une démarche vertueuse,
09:41 qui s'inscrit aussi dans la démarche de l'industrie verte,
09:45 qui est aujourd'hui beaucoup poussée par le gouvernement.
09:48 On a eu la chance d'être auditionnés
09:50 dans ce projet de loi,
09:51 et c'est quelque chose qui me tient à coeur,
09:54 de montrer que l'industrie française,
09:56 même s'il oeuvre avec des conditions de coût d'énergie
10:00 qui sont défavorables par rapport à d'autres zones du monde,
10:04 car aux Etats-Unis, les coûts d'énergie sont moins chers,
10:07 on doit faire la différence
10:10 par la verdisation,
10:12 et montrer comme quoi notre modèle,
10:15 même s'il est plus cher,
10:17 avec ses conditions économiques plus compliquées,
10:20 il est plus vert, plus respectueux,
10:22 et de montrer l'impact vert de notre industrie verte en France.
10:26 - Merci beaucoup, Sandrine Delory, à bientôt sur Bismarck.
10:29 On passe à notre débat,
10:31 le e-commerce face à ses enjeux de transition,
10:33 de transformation écologique.

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