SMART PATRIMOINE - L'Art à la Une du jeudi 6 juillet 2023

  • l’année dernière
Jeudi 6 juillet 2023, SMART PATRIMOINE reçoit Hedwige Gronier (responsable mécénat culturel, Fondation Bettencourt Schueller)

Category

🗞
News
Transcript
00:00 ...
00:01 -Bismarck.
00:02 -Nous commençons avec l'art à la une,
00:05 le rendez-vous dédié aux actualités du monde de l'art.
00:08 Un rendez-vous proposé par Sibyl Aoudjan,
00:10 journaliste spécialisée sur les questions d'art
00:13 au sein de la rédaction de Bismarck.
00:15 -Bonjour. -Ravi de vous retrouver
00:17 sur le plateau de Smart Patrimoine.
00:19 Que s'est-il passé dans le monde de l'art, Sibyl ?
00:22 -Cette semaine, l'Assemblée nationale a voté à l'unanimité
00:25 une loi pour faciliter les restitutions des oeuvres d'art
00:29 de la Nazi, encore présentes dans les collections publiques,
00:32 les musées. Cela concerne les oeuvres spoliées
00:34 entre 30 janvier 1933, accession au pouvoir d'Hitler,
00:38 et le 8 mai 1945, la Libération.
00:41 Aujourd'hui, n'importe quelle oeuvre présente dans un musée
00:44 est inaliénable, c'est-à-dire qu'elle ne peut pas être cédée.
00:48 Jusqu'à présent, une loi devait être votée
00:50 pour chaque tableau, pour qu'il soit rendu aux ayants droit.
00:54 La loi cadre tout juste votée va donc particulièrement alléger
00:58 cette démarche de restitution.
01:00 Le texte propose d'enterriner une dérogation à ce principe
01:03 d'inaliénabilité pour les oeuvres concernées.
01:06 L'Etat doit toutefois consulter
01:08 une commission spéciale à chaque fois.
01:11 "Rien ne saurait réparer la tragédie de la Shoah",
01:14 s'est exprimé Rima Abdulmalak, ministre de la Culture,
01:17 "mais nous pouvons faire tout ce qui est en notre pouvoir
01:20 "pour que ces biens culturels puissent être rendus."
01:23 -A-t-on une idée de l'ordre de grandeur des oeuvres
01:26 des collections publiques ?
01:28 -Après la Seconde Guerre mondiale, parmi les oeuvres Spoliers,
01:31 plusieurs dizaines de milliers d'oeuvres ont été rendues
01:35 à la France et la majorité à leurs propriétaires.
01:38 On parle de 60 000 oeuvres rendues à la France,
01:40 selon les chiffres du gouvernement,
01:43 45 000 restituées dès lors à leurs propriétaires.
01:46 Donc, il en reste 15 000.
01:47 Sur ces 15 000, il y en avait 13 000 qui avaient très peu de valeur
01:51 et qui ont été vendues par l'Etat au début des années 50.
01:54 Il en reste 2 200.
01:56 Elles ont été confiées à la garde des musées nationaux,
01:59 notamment pour leur intérêt artistique.
02:01 Sur ces 2 200, ce sont 184 oeuvres qui ont été aujourd'hui restituées.
02:05 Mais attention, sur ces 2 200,
02:07 toutes ne sont pas forcément des oeuvres d'art Spolier.
02:10 Certains peuvent avoir été vendues sans contrainte.
02:13 C'est pour ça qu'il faut encore des recherches.
02:16 Le recherche continue.
02:17 -On continue avec les actualités.
02:19 Le Conseil des maisons de vente a élu ses représentants civils.
02:23 -Pour la première fois, les commissaires priseurs français
02:27 ont procédé à l'élection de leurs représentants
02:29 au sein du nouveau Conseil des maisons de vente.
02:32 Un taux de participation de 67 %, le Conseil des maisons de vente
02:36 et l'autorité de régulation du marché des ventes
02:39 aux enchères publiques.
02:41 Ce Conseil a été réformé en février 2022.
02:43 -Un mot sur les objectifs de la réforme ?
02:46 -C'était d'abord réviser la composition de ce Conseil
02:49 pour qu'il y ait une présence accrue de professionnels
02:52 en assurant la représentation du maillage territorial
02:55 et des autorités de la régulation,
02:57 élargir le périmètre des missions pour un meilleur échange
03:00 avec le gouvernement et les professionnels
03:03 et créer un organe disciplinaire indépendant en son sein,
03:06 renforçant son pouvoir de sanction.
03:08 Là, ce sont six binômes qui ont été élus
03:11 des différentes circonscriptions.
03:13 Ce qui est intéressant, c'est que dans le Palmarès,
03:16 il n'y a aucune des grandes maisons de vente aux enchères.
03:20 La maison de Vannes, chez Adair,
03:21 en binôme avec Violette Schepatschew,
03:24 qui est de l'étude Jiquello,
03:26 sont les deux représentants du top 10 des opérateurs en France.
03:29 Christie, Sosbis et Arcurial ne sont pas représentés.
03:33 -On continue avec des actualités en lien
03:35 avec les maisons de vente aux enchères.
03:37 Sosbis adopte une nouvelle manière de procéder
03:40 à des ventes aux enchères.
03:41 -C'est ce qu'on appelle la vente à la hollandaise.
03:44 Dans les ventes traditionnelles,
03:46 les enchérisseurs concourent pour une oeuvre d'art
03:49 à la cherisse jusqu'à ce que l'offre la plus haute
03:52 remporte l'enchère.
03:53 Pour les enchères hollandaises, c'est l'inverse.
03:56 Le prix de plafond est fixé au départ.
03:59 C'est une réduction par palier pour qu'un acheteur
04:02 se manifeste et remporte le lot.
04:04 C'est pour la première fois depuis trois siècles d'existence
04:07 que Sosbis adopte cette enchère à la hollandaise
04:10 pour une vente d'oeuvre digitale
04:12 de l'artiste Vera Molnar.
04:16 La vente est intitulée "Thème et variation".
04:19 Elle sera entièrement inscrite sur la blockchain
04:21 via la plateforme de Sosbis.
04:23 Elle aura lieu le 26 juillet prochain.
04:25 Ce sera une série de 500 oeuvres uniques
04:28 datant des premiers pas de l'artiste
04:30 dans l'art algorithmique qui seront proposés.
04:33 Et le prix plafond pour "Thème et variation"
04:36 est de 20 éthéréums.
04:37 -Voilà pour les actualités du monde de l'art cette semaine.
04:41 Des actualités proposées par Sibylle Aoudjan,
04:43 journaliste spécialisée sur les questions d'art.
04:46 Nous avons le plaisir de recevoir ensemble
04:49 sur le plateau de Smart Patrimoine Edwige Grenier.
04:52 Bonjour. -Bonjour.
04:53 -Bienvenue. Vous êtes directrice du mécénat culturel
04:56 au sein de la fondation Bettencourt-Schweller.
04:59 Nous allons tenter de comprendre ensemble
05:02 comment la filière des métiers d'art se structure en France.
05:06 Nous reviendrons sur les annonces du gouvernement
05:09 sur cette stratégie nationale des métiers d'art.
05:12 Un point de contexte, globalement,
05:14 le poids économique des métiers d'art,
05:16 cela représente quoi ?
05:18 -Le poids économique des métiers d'art
05:20 représente 19 milliards d'euros de chiffre d'affaires,
05:23 dont 8 à l'export.
05:24 -Aujourd'hui, on entend, depuis quelques années déjà,
05:27 mais on voit que les politiques parlent des métiers d'art.
05:31 Pourquoi...
05:32 Comment expliquer ce renouveau d'intérêt envers la filière ?
05:36 -Alors, le secteur des métiers d'art,
05:39 effectivement, nous le connaissons bien,
05:41 puisque ça fait presque 25 ans qu'on s'y intéresse.
05:44 Il est... Je pense qu'il ressuscite un intérêt récemment.
05:50 D'abord, ça s'est amplifié suite à la crise du Covid,
05:53 aussi parce que ce secteur répond à beaucoup d'enjeux
05:56 des problématiques de la société aujourd'hui.
05:59 Une envie de consommer mieux, une envie de consommer local,
06:03 des chaînes de circuit court,
06:06 des métiers qui ont du sens,
06:08 des métiers de transmission,
06:10 une valeur à l'international,
06:12 beaucoup de valeurs importantes pour la société actuelle.
06:17 -Et la ministre de la Culture, Reema Abdoumalak,
06:20 a annoncé un plan, une stratégie nationale
06:23 en faveur du secteur de l'artisanat d'art.
06:25 Est-ce que c'était nécessaire ?
06:27 Fallait-il un plan pour structurer cette filière ?
06:30 -Oui, c'était utile,
06:32 parce que c'est un secteur extrêmement dispersé,
06:35 avec des acteurs extrêmement différents,
06:38 qui ont 281 métiers différents,
06:41 donc des fédérations, des syndicats, des écoles.
06:44 Il est important de pouvoir mobiliser tous les acteurs,
06:47 et je pense que ça va être une des choses
06:49 que le plan va pouvoir permettre de mettre en oeuvre.
06:52 D'ailleurs, l'objectif de la ministre de la Culture
06:55 est d'aboutir, au bout des trois ans de son plan,
06:58 à un contrat de filière,
07:00 comme il peut exister dans le domaine de la mode.
07:03 Donc c'était nécessaire,
07:05 et c'est bien qu'un ministère s'adresse au secteur
07:10 de façon aussi ambitieuse désormais.
07:13 -Un contrat de filière ?
07:15 -C'est un contrat qui va permettre à tous les acteurs
07:19 de se mobiliser, de co-signer ensemble des actions
07:22 pour atteindre des objectifs ensemble.
07:25 -Ca veut dire que là, on constate que la filière
07:27 des métiers d'art commence à se structurer,
07:30 ce qui n'était pas le cas avant, et on aimerait,
07:33 même si c'est pas le cas aujourd'hui,
07:35 qu'elle parle d'une même voix.
07:37 -Une meilleure cohésion entre les acteurs.
07:40 -Vous avez travaillé avec la ministre,
07:42 justement, vous avez concerté avec elle.
07:45 -Alors, oui. -Oui, je vous en prie.
07:47 -Nous, notre fondation, oui, a été engagée depuis longtemps,
07:50 étant un acteur fort du secteur,
07:52 et on a échangé avec d'autres acteurs,
07:55 puisqu'elle a sollicité beaucoup de personnes
07:57 pour pouvoir construire son plan.
08:00 -Pour vous, quel est l'axe fondamental,
08:02 l'axe majeur de ce plan qui serait nécessaire ?
08:05 -Elle a défini un plan qui va reposer sur cinq axes,
08:10 la transmission, la formation, la recherche et l'innovation,
08:14 la notion de territoire et le rayonnement international.
08:18 Nous-mêmes, nous sommes positionnés
08:20 sur un peu tous ces domaines d'intervention,
08:23 mais c'est vrai que la fondation soutient beaucoup
08:26 le rayonnement des métiers d'art à l'étranger,
08:28 parce que c'est une valeur importante,
08:31 comme je l'ai indiqué tout à l'heure,
08:33 8 milliards d'euros de chiffre d'affaires à l'étranger,
08:36 c'est quelque chose d'important à accompagner.
08:39 -Et la demande est croissante ? -Oui, la demande est croissante.
08:43 -Et comment ça se manifeste, en fait ?
08:46 Par peut-être quel secteur,
08:49 quels artisans sont représentés particulièrement à l'international ?
08:53 -Alors, vous pouvez voir
08:55 que l'Etat, en fait,
08:57 dispose de résidences à l'international.
09:00 Au Japon, en Italie et aux Etats-Unis.
09:04 Et par exemple, aux Etats-Unis, grâce à la Villa Alberti,
09:08 l'idée, c'est d'accompagner les créateurs,
09:10 et donc les artisans d'art, à rencontrer le marché.
09:13 Là, on le voit particulièrement avec les métiers d'art,
09:17 en particulier les métiers liés à la décoration et à l'architecture.
09:21 Les Américains sont extrêmement friands des savoir-faire français,
09:25 artisans de papier peint,
09:29 fabricants de meubles.
09:31 Et là, nous, on a d'anciens...
09:33 Nous avons d'anciens lauréats
09:35 qui sont partis en résidence à la Villa Alberti,
09:38 qui, après un séjour de deux mois, reviennent en France
09:41 et vont soit installer une antenne aux Etats-Unis,
09:45 soit prendre un agent pour développer leur marché aux Etats-Unis.
09:50 -Ca passe par les résidences... Vous parlez de la Villa Alberti,
09:53 mais il y a la Villa Medicis à Rome, si je dis pas de bêtises.
09:57 C'est aussi une ambassade culturelle
09:59 ou des métiers d'art dans les pays en question.
10:02 -Exactement. Depuis 10 ans, dans les villas dont la France dispose,
10:06 les métiers d'art peuvent aller en résidence.
10:09 L'avantage ou l'intérêt de ces résidences,
10:12 c'est aux Etats-Unis, une rencontre de marché.
10:15 À la Villa Medicis, à Rome,
10:16 c'est vraiment une vitrine d'excellence
10:20 des savoir-faire français.
10:22 Ou au Japon, à la Villa Kujuyama,
10:25 on assiste à un dialogue entre les cultures
10:28 et l'interdisciplinarité entre les pratiques artistiques.
10:32 -C'est via l'internationalisation des métiers d'art
10:35 que ça va vraiment tirer, développer encore plus le secteur ?
10:38 C'est pas l'international que ça va passer ?
10:41 -C'est un des axes forts.
10:42 On voit bien, pas uniquement pour les métiers d'art,
10:45 mais dans l'art contemporain aussi,
10:48 que les artistes, une fois reconnus à l'international,
10:51 sont plus regardés en France.
10:53 -Comment est-ce qu'on accède à ces villas ?
10:56 C'est quand on est un artisan et on dépose son dossier,
10:59 il y a un jury... -Oui, c'est ça.
11:01 Pour toutes les villas, il y a des process de sélection
11:05 avec des jurys pour accéder aux résidences.
11:08 -Et en tant que...
11:10 Ca, c'est ce qui va permettre aussi
11:12 de découvrir des nouveaux métiers,
11:14 parce qu'être artisan, c'est un métier
11:16 qui est assez solitaire, parfois, on voit des niches.
11:19 C'est via ces villas que ça va permettre
11:22 de montrer que, en France,
11:24 il y a un artisan qui est capable de faire ce genre de spécificité.
11:27 -Oui, c'est pour ça que nous, on a été heureux
11:30 de pouvoir contribuer à faire que ces villas
11:33 ouvrent leurs résidences aux métiers d'art,
11:35 ce qui n'était pas le cas avant.
11:37 C'est une pratique artistique qui mérite de rayonner
11:40 autant que les autres et qui a beaucoup de valeur.
11:43 Au Japon, par exemple, l'artisan japonais
11:46 a beaucoup à apprendre de l'artisan français,
11:49 et inversement.
11:50 -Est-ce que c'est récent que les résidences soient ouvertes
11:53 aux métiers d'art, en plus des artistes
11:55 qu'on connaît de manière plus classique ?
11:58 -Oui. Pour la Villa Kujuyama, au Japon,
12:00 c'était il y a 10 ans.
12:02 Albertine, c'est créé il y a 2 ans, donc...
12:04 -Bien sûr. Dès l'ouverture, oui.
12:06 -Et la Villa Médicis, on a établi un partenariat
12:09 avec la Villa Médicis l'année dernière.
12:11 -Ca veut dire que la prise en considération
12:14 du côté artistique des métiers d'art est assez récente,
12:17 c'est ce qu'il faut comprendre,
12:19 ou c'est la volonté de l'exporter qui est plus récente ?
12:22 -Les deux. -Les deux, c'est ça.
12:24 -Et ensuite, donc,
12:27 si on va développer ce secteur,
12:30 est-ce qu'il va y avoir de la place aussi
12:33 dans les métiers pour accueillir tous ces artisans
12:36 qui vont être formés ?
12:38 -Oui, il va y avoir beaucoup de place,
12:40 parce que c'est tout l'enjeu du secteur des métiers d'art
12:44 aujourd'hui. Vous devez l'avoir vu
12:46 avec les maisons de luxe
12:48 qui créent de plus en plus leurs écoles.
12:51 Il y a un véritable souci
12:54 de perte de savoir-faire
12:57 et d'enjeu de transmission et de formation,
13:00 parce que là, on arrive à des générations
13:03 qui vont partir à la retraite,
13:05 et la succession n'est pas encore au rendez-vous.
13:08 C'est vraiment très important
13:10 de faire connaître les métiers d'art.
13:12 -La succession n'est pas au rendez-vous
13:14 de votre vocation dans les métiers d'art ?
13:17 Ca n'intéresse pas suffisamment ?
13:19 -Ca n'intéresse pas, ce n'est pas connu,
13:22 ce n'est pas assez valorisé.
13:25 Nous-mêmes, on a bien créé un prix
13:27 qui s'appelle l'intelligence de la main,
13:30 car on est dans un pays qui prône plus l'intellect
13:32 que le travail de la main.
13:34 Il y a tout un travail d'éducation à faire de ce côté-là.
13:38 Pour les jeunes, il faut y aller, il y a plein de travail.
13:42 -Ceux qui portent financièrement
13:44 le secteur, c'est les maisons de luxe,
13:46 c'est la grande majorité, ou il y a d'autres acteurs ?
13:49 -Non, les maisons de luxe
13:51 sont liées aux métiers d'art de la mode.
13:53 Vous avez tous les métiers de la déco,
13:55 tous les métiers liés au patrimoine.
13:58 Sur le chantier de Notre-Dame de Paris,
14:00 il y a beaucoup de jeunes artisans qui travaillent.
14:03 Il y a beaucoup de domaines,
14:05 il y a l'architecture.
14:06 La mode est très importante,
14:08 le luxe est très important pour la mode.
14:10 -Y a-t-il une grande place pour les collectionneurs
14:13 d'art dans votre fondation ?
14:15 -Oui, bien sûr. Ils sont très actifs.
14:17 -Il faudra qu'il y en ait plus.
14:19 -Plus de jeunes, plus de vocation et plus de mécènes.
14:22 Merci beaucoup, Edvige Grenier,
14:24 de nous avoir accompagnés dans "Smart Patrimoine".
14:27 Vous êtes directrice du mécénat culturel
14:29 au sein de la fondation Betancourt-Schweller.
14:32 Merci à Sibylla Oudjan,
14:33 journaliste spécialisée sur les questions d'art.
14:36 On se retrouve tout de suite dans "Enjeu patrimoine".

Recommandée