Combattre le bien et le mal - Théorie du Bonheur - Bonus 7

  • l’année dernière
Le bien et le mal n'existent pas.

Nous seuls avons imaginé ces concepts. Et bien que purement inventés, ils sont causes d'énormément de violences, de souffrances et de malheur.

Je présente dans cet épisode les retombées désastreuses de notre croyance dans le bien et le mal, ainsi que dans les principes moraux qui en découlent.

Je propose ensuite de les rejeter, et de les remplacer par une réflexion plus profonde, en particulier quant aux conséquences de nos actes, et quant aux objectifs que nous nous fixons dans la vie.

Cette nouvelle approche, appelée conséquentialisme, ne nous sera favorable qu'à condition de la soutenir au moyen de notre honnêteté intellectuelle, de notre rigueur et de notre discipline.

0:00 • Introduction
0:28 • Agir selon le bien et le mal
1:06 • Subjectivité du bien et du mal
1:53 • Tautologie du bien et du mal
3:00 • Le manichéisme
3:51 • Le principalisme
4:39 • Principes moraux et dilemmes
5:11 • Principes moraux et complexité des situations
5:54 • Subjectivité des principes moraux
6:55 • Principes moraux relatifs à nos pensées
7:40 • Principes moraux relatifs aux personnes
8:30 • Culture et principes moraux
9:30 • Le politiquement correct
11:23 • Enjeu idéologique et manipulation
12:08 • Le conséquentialisme
13:27 • Sans bien ni mal, le chaos ?
14:28 • Conséquentialismes et principes moraux
15:11 • Limites du conséquentialisme
15:57 • La malhonnêteté intellectuelle

Musique par Jean-Michou : https://soundcloud.com/jean-michou
Texte original : https://amzn.to/3wnTUxP

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#theoriedubonheur #principalisme #consequentialisme #bonheur #philosophie #developpementpersonnel #bien #mal #manicheisme #politiquementcorrect
Transcript
00:00 Accrochez vos ceintures, cet épisode va envoyer du lourd
00:02 Aujourd'hui on va parler d'un truc qui n'existe pas
00:04 mais qui est néanmoins l'une des principales causes de malheurs et d'atrocités à travers le monde
00:08 Bon bah y'a pas tellement de suspense, vous avez lu le titre de la vidéo
00:11 On va parler du bien et du mal
00:13 Nous sommes responsables de nos actions conscientes
00:18 Il nous faut donc les décider soigneusement
00:20 A ce titre, le bien et le mal servent de repère à beaucoup de personnes
00:24 qui estiment que certaines actions iraient plutôt dans le sens du bien
00:26 auquel cas il faudrait les faire
00:28 tandis que d'autres iraient plutôt dans le sens du mal
00:30 auquel cas il faudrait y renoncer
00:32 Alors évidemment dit comme ça c'est bien joli
00:33 mais ça ne nous avance pas à grand chose
00:35 Bah oui parce que la question qui se pose alors c'est
00:37 comment savoir si une action va plutôt dans le sens du bien ou plutôt dans le sens du mal ?
00:41 Au lieu de se demander quelles actions faire ou ne pas faire
00:44 on se demande maintenant quelles actions sont bonnes ou mauvaises
00:46 On pourrait donc se dire qu'on a fait que déplacer le problème
00:49 mais en réalité c'est bien pire que ça
00:51 S'il existait quelque part dans la nature un truc appelé bien
00:57 et un truc appelé mal qu'on pourrait tous observer et décrire objectivement
01:01 alors là oui on pourrait s'en servir de repère
01:03 sauf qu'évidemment bah c'est pas le cas
01:04 En réalité le bien et le mal sont des notions imaginaires
01:07 et le seul endroit où elles existent c'est là-dedans
01:09 Elles sont le fruit de notre jugement
01:11 par lequel nous décidons de ce qui est bon ou mauvais
01:13 et ce jugement ne reposant sur rien d'observable
01:15 il est purement subjectif
01:17 Le bien et le mal ne dépendent que de nous en tant qu'observateurs
01:19 Ainsi une même action peut être jugée bonne par une personne
01:22 et mauvaise par une autre
01:26 C'est donc à peu près aussi censé de se servir du bien et du mal comme repère
01:29 que de se servir d'un imprimé de boussole pour trouver le Nord et le Sud
01:32 C'est-à-dire que selon comment je tourne l'imprimé
01:34 ça peut m'indiquer tout et n'importe quoi
01:35 Enfin bref vous avez compris quoi
01:36 De toute façon on dit le Nord
01:37 Selon comment on est tourné ça change tout
01:38 Le problème du bien et du mal c'est que ces notions nous font commettre
01:44 une faute de raisonnement qu'on appelle une tautologie
01:46 C'est-à-dire que quand je dis qu'il faut faire une action parce que c'est bien
01:49 c'est comme si je disais qu'il faut faire une action parce qu'il faut la faire
01:53 Et de même quand je dis qu'il faut pas faire une action parce que c'est mal
01:55 c'est comme si je disais qu'il faut pas faire une action parce qu'il faut pas la faire
01:58 Dans les deux cas ça ne répond absolument pas à la question "pourquoi"
02:01 Bien que fausses, le bien et le mal constituent des justifications pratiques
02:05 et faciles à comprendre
02:06 qui peuvent convenir temporairement à de jeunes enfants
02:08 Manger des légumes c'est bien
02:10 Frapper des camarades de classe c'est mal
02:11 Et là je peux comprendre qu'on y ait recours
02:13 parce qu'un jeune enfant n'a ni l'esprit critique
02:15 ni le... connaissance nécessaire pour déterminer ce qui est dans son intérêt ou pas
02:18 Mais c'est comme les petites roulettes de vélo
02:20 ça doit avoir vocation à disparaître une fois qu'on s'est trouvé son équilibre
02:23 En grandissant, un enfant doit comprendre pourquoi rationnellement
02:25 il faut avoir une alimentation équilibrée
02:27 et pourquoi rationnellement il faut respecter les autres
02:29 Notamment parce qu'on est souvent confronté à des situations complexes
02:32 qui exigent de nous un jugement au cas par cas
02:34 Même que parfois il faut manger autre chose que des légumes
02:37 ou encore se défendre quand on est attaqué
02:39 Je tends l'autre joue bien sûr
02:41 J'en profite pour lui foutre un coup de boule dans les valseuses
02:44 Beaucoup d'adultes continuent d'avoir recours aux notions de bien et de mal
02:51 et ce pour au moins deux raisons
02:52 D'abord c'est une solution de facilité
02:54 Coller une étiquette "bon" ou "mauvais" sur nos actions
02:56 plutôt que de les justifier rigoureusement
02:58 ça demande de moins réfléchir
02:59 Mais surtout ça permet d'avoir toujours raison
03:02 Puisque le bien et le mal sont des justifications autosuffisantes
03:05 qui ne reposent sur rien d'objectif
03:06 Alors rien ne nous empêche de juger que tout ce que nous faisons est bien
03:09 et de nous en satisfaire
03:10 Or c'est précisément ce qui arrive
03:12 puisque nous avons justement tendance, du fait de notre biais de confirmation
03:15 à juger bon ce qu'on connaît et dont on a l'habitude
03:18 et mauvais ce qu'on ne connaît pas et dont on a peur
03:20 Et c'est pour ça que le manichéisme
03:21 qui consiste à tout rapporter aux notions de bien et de mal
03:24 est à la fois un symptôme de paresse intellectuelle
03:26 et aussi de complaisance
03:28 Il nous pousse à l'erreur dans des situations qui nécessitent notre discernement
03:31 et il nous conforte dans cette erreur
03:33 ce qui nous empêche de la reconnaître
03:34 d'apprendre d'elle et de progresser
03:36 Lorsqu'on considère qu'une action est en elle-même bonne ou mauvaise
03:43 et que par conséquent il faut ou ne faut pas y recourir
03:45 on établit ce qu'on appelle un principe moral
03:48 Ne pas tuer parce que tuer c'est mal, par exemple
03:50 c'est un principe moral
03:51 Et donc dans le prolongement naturel du manichéisme
03:53 le fait de décider nos actions en fonction de nos principes moraux
03:56 s'appelle le principalisme ou encore le déontologisme
04:00 Or cette approche pose un problème énorme
04:02 Les principes moraux étant des règles
04:04 dont l'application est crue bonne en toutes circonstances
04:06 alors aussitôt qu'on les a établies
04:08 on arrête de les remettre en question
04:09 On considère alors nos actions justifiées
04:11 tant qu'elles adhèrent aveuglément à ces principes
04:13 sans plus réfléchir ni à leur contexte ni à leurs conséquences
04:16 Et ça c'est extrêmement dangereux
04:17 parce que comme on va le voir
04:18 nos principes moraux sont en eux-mêmes très discutables
04:20 et les actions qui en résultent
04:22 peuvent avoir des conséquences dramatiques
04:24 D'abord nos différents principes moraux
04:29 ont très vite fait de se contredire
04:30 Imaginons que vous ayez pour principe
04:32 de ne jamais tuer un humain
04:33 et que vous ayez aussi pour principe
04:35 de ne jamais permettre, par votre inaction
04:37 qu'un humain soit tué
04:38 Si vous vous trouvez dans une situation
04:39 où votre seul choix est de tuer quelqu'un
04:41 ou de le laisser tuer quelqu'un d'autre
04:43 alors la seule application de vos principes moraux
04:45 débouchera sur un paradoxe
04:47 Si vous le tuez, vous enfreignez votre premier principe
04:49 Si vous le laissez vivre, l'autre meurt
04:51 vous enfreignez votre deuxième principe
04:53 Vos principes moraux seront alors impuissants
04:55 à guider votre décision
04:56 On pourrait imaginer que si les principes moraux
05:02 ne suffisent pas dans l'exemple précédent
05:04 c'est parce que ce que j'ai énoncé n'était pas assez précis
05:06 Par exemple, le premier principe pourrait devenir
05:08 ne jamais tuer un humain
05:09 sauf s'il menace la vie d'un autre humain
05:11 auquel cas vous pouvez tuer sans l'enfreindre
05:13 Mais si je vous dis maintenant
05:14 que l'humain qu'il s'apprête à tuer
05:15 est lui-même sur le point de tuer un autre humain
05:18 là encore, vous tombez en contradiction
05:19 avec le deuxième principe
05:20 qui dicte de ne pas permettre que cet autre humain soit tué
05:23 et donc de ne pas tuer celui qui l'empêcherait
05:25 Vous pourriez chercher à affiner votre principe
05:27 encore et encore
05:28 mais je pourrais toujours complexifier la situation à l'infini
05:30 Et c'est bien là où je veux en venir
05:31 vous ne pourrez jamais établir
05:33 des principes moraux suffisamment complets
05:35 pour prévoir l'infinité des cas de figure possible
05:37 auquel la vie peut nous confronter
05:39 Puisqu'ils ne sont fondés sur rien d'objectif
05:44 alors rien ne garantit que nos principes moraux sont valables
05:47 autrement on se mettrait tous d'accord sur les mêmes
05:48 et on n'en parlerait plus
05:50 Ainsi par exemple
05:51 certains ont pour règle de préserver équitablement
05:53 la vie de toute espèce vivante
05:54 quand d'autres jugent la vie humaine prioritaire
05:56 Objectivement, il n'y a aucun moyen d'affirmer
05:59 qu'un principe est meilleur que l'autre
06:00 Pourtant, les individus ont vite fait de se convaincre
06:02 que leur principe à eux est le meilleur
06:04 et recourent souvent à la violence pour l'imposer aux autres
06:06 Tu veux dire un pain au chocolat ?
06:09 Mais bah nous on dit chocolatine !
06:11 Ce n'est pas le cas des gens civilisés, Anakin
06:13 Bon là je plaisante, mais en réalité l'être humain est capable de persécuter
06:16 torturer et tuer pour des oppositions de principes moraux
06:19 et à bien y réfléchir, c'est pas drôle du tout
06:20 D'ailleurs, puisque leur validité est subjective
06:23 alors rien ne nous empêche non plus d'adopter uniquement
06:25 les principes qui nous arrangent
06:27 au moment où ça nous arrange
06:28 On peut donc très bien avoir un comportement parfaitement égoïste
06:31 voire malveillant
06:32 et le justifier au moyen de principes moraux
06:34 Le mal est nécessaire
06:35 par conséquent, si le mal est nécessaire
06:38 le mal, le mal, c'est forcément le bien
06:41 Les principes moraux
06:44 Les principes moraux peuvent s'avérer à eux seuls
06:46 encore plus néfastes que les actions qu'ils nous dictent de faire sans réfléchir
06:49 Notamment lorsqu'ils qualifient jusqu'à nos pensées de bonnes ou mauvaises
06:52 Comme dans plusieurs religions où il est admis qu'on puisse pécher en pensée
06:55 Ce qui est absurde, parce que nous ne contrôlons que partiellement nos pensées
06:58 Nos envies, nos idées, nos rêves nous viennent spontanément
07:01 Et contrairement à nos actions conscientes, nous n'en sommes pas responsables
07:04 Il est tout à fait normal par exemple d'avoir une pensée violente
07:07 envers une personne qui nous coupe la route dans le trafic
07:09 ou de ressentir une attirance sexuelle envers quelqu'un
07:11 alors même qu'on est déjà en couple
07:13 Notre mérite ne vient pas du fait qu'on n'est jamais soumis à ce genre de tentation
07:16 mais justement du fait qu'on y résiste
07:18 Et pourtant, il existe des gens qui se rendent véritablement fous
07:20 à se reprocher ce qui se passe dans leur tête
07:22 alors qu'ils n'y sont pour rien et que leurs actions sont irréprochables
07:25 Vous avez aimé les principes moraux qualifiant nos pensées de bonnes ou mauvaises
07:32 Vous aimerez les principes moraux qualifiant les personnes de bonnes ou mauvaises
07:35 Bon déjà, on va tout de suite virer l'idée
07:37 qu'il existe des individus intrinsèquement bons ou mauvais
07:40 Des gens lâches, courtois, criminels, aimables, stupides, honnêtes, autant que vous voulez
07:44 Mais pas des gens bons ou mauvais
07:46 On n'est pas dans Donjons et Dragons
07:47 Mais non, Donjons et Dragons, le jeu de rôle sur table, pas le navet !
07:54 Et pourtant, certaines personnes se permettent de juger que d'autres sont bonnes ou mauvaises
07:57 en se basant sur des critères tout à fait arbitraires
07:59 comme leur respect de la loi, leur patriotisme, leur assiduité religieuse
08:03 voire plus perchée
08:04 "Au-delà de la mort, il n'y a personne qui est mort comme Gaston"
08:07 D'ailleurs souvent, si ces personnes s'appliquaient leurs propres critères
08:10 ils en ressortiraient qu'elles-mêmes sont merveilleuses
08:12 Quel heureux hasard !
08:13 "Ça c'est un sacré coup de bol !"
08:15 Les principes moraux sont les plus nuisibles lorsqu'ils s'incrustent au point de devenir
08:22 une partie intégrante de notre culture
08:24 Les individus sont alors très fortement découragés de les remettre en question
08:27 D'abord par leur éducation, au cours de laquelle ces principes leur sont présentés comme irréfutables
08:31 puis à travers nos arts et divertissements
08:33 qui les valident souvent du simple fait qu'ils sont défendus par les "gentils"
08:36 dans leur combat contre les "méchants"
08:37 Bon j'adore Star Wars hein !
08:41 Mais là, on est supposé célébrer la victoire des "gentils"
08:43 qui ont fait sauter l'étoile noire
08:44 *tousse*
08:45 avec plus de 340 000 personnes à bord !
08:47 Et enfin par conformisme
08:48 puisque contester ces principes revient à risquer d'être marginalisés
08:51 étiqueter mauvaise personne
08:53 persécuter ou encore rejeter de la société
08:55 On s'en rend bien compte notamment en ligne
08:57 où de nombreux individus se servent de principes moraux
08:59 comme prétexte pour donner libre cours à leur haine
09:01 lors de véritables lynchages numériques envers ceux qui n'y adhèrent pas
09:04 ou juste qui font preuve d'un peu de nuance
09:06 Ainsi nous sommes contraints à des prises de positions inconditionnelles
09:09 qu'il nous faut adopter aveuglément et quel que soit le contexte
09:12 Et c'est par ce processus désastreux que grandit le politiquement correct
09:15 Non seulement le politiquement correct nous impose de publiquement juger
09:22 bonnes ou mauvaises certaines actions, pensées ou personnes
09:25 mais en plus à cause de notre biais de simplification
09:27 il nous oblige à le faire en bloc
09:29 c'est-à-dire à juger soit tout bon, soit tout mauvais
09:31 Or collectivement nous sommes très souvent confrontés à des problèmes complexes
09:34 et du fait de notre compréhension trop superficielle
09:36 d'une, on risque d'y apporter des solutions inefficaces, contre-productives ou trop extrêmes
09:41 beaucoup de projets écologiques par exemple ont eu à terme des impacts méfastes sur l'environnement
09:45 alors qu'ils cherchaient à accomplir précisément l'inverse
09:47 de deux, on ne fait plus la différence entre ceux qui apportent de vraies solutions
09:50 et ceux qui se contentent d'en parler ou d'agir n'importe comment juste pour bien se faire voir
09:54 comme de nombreux dirigeants, partis politiques ou entreprises
09:56 qui pour rester dans le thème de l'écologie pratiquent le greenwashing à outrance
10:00 c'est-à-dire qu'ils s'autoproclament écolo par souci d'image
10:02 alors qu'ils ont autant à voir avec l'écologie que moi avec la danse classique
10:06 Malheureusement, défendre des points de vue ne serait-ce qu'un tout petit peu détaillé
10:09 c'est déjà risquer d'être marginalisé
10:11 d'une part parce que ces points de vue étant plus complexes
10:13 ils demandent plus de temps et d'efforts à comprendre
10:15 et donc ils sont compris par moins de monde
10:17 d'autre part parce que ceux qui ne les comprennent pas préfèrent les résumer
10:20 avec ceux qui les défendent au moyen d'une simple étiquette, le plus souvent mauvaise
10:23 prenez l'immigration par exemple, c'est un sujet extrêmement complexe
10:26 qui ne peut pas être résumé à un simple point de vue, c'est bien ou c'est pas bien
10:29 mais le simple fait de publiquement vouloir rentrer dans le détail
10:32 peut valoir à ceux qui s'y risquent un jugement négatif
10:35 la conséquence de ça, c'est que pour ne pas être inquiété
10:37 on préfère ne pas aborder ces sujets qui deviennent ainsi des tabous
10:40 or ça empêche de parler de problèmes existants liés à ces tabous
10:43 et de leur trouver des solutions raisonnables
10:45 à la place, on préfère faire comme si ces problèmes n'existaient pas
10:48 sauf qu'il y a des gens qui en souffrent de ces problèmes
10:50 et ces gens-là deviennent un public privilégié pour de nombreux démagogues
10:53 qui profitent de l'absence de solutions raisonnables
10:55 pour se faire élire en proposant des solutions extrémistes
10:58 certes simples et faciles à comprendre mais potentiellement catastrophiques
11:01 et voilà précisément, oh ironie de l'histoire
11:03 comment le politiquement correct favorise très largement
11:06 la montée d'extrémisme en tout genre au lieu de le combattre
11:09 les principes moraux influencent nos opinions, nos comportements et nos décisions
11:16 c'est pourquoi naturellement certains essaient de les contrôler
11:18 afin de servir leurs intérêts
11:19 pour ces individus, les principes moraux sont un moyen de manipulation indirecte
11:23 ainsi les publicitaires en créent ou s'en servent
11:25 pour attribuer des valeurs morales fictives aux produits qu'ils vendent
11:28 les politiciens démonisent des idées ou des catégories entières de populations
11:32 pour faciliter leur accession au pouvoir
11:33 et bien sûr ça a été le jeu de toutes les religions majeures pendant des siècles
11:36 qui ont longtemps recouru à la violence pour asseoir leur domination
11:40 en réalité nos principes moraux ont toujours été un enjeu de pouvoir
11:43 autour duquel se livre en permanence une guerre idéologique meurtrière
11:46 et nous en payons le prix
11:47 alors que cette guerre n'est pas combattue dans notre intérêt
11:50 mais dans celui de ceux qui les provoquent et qui espèrent en profiter
11:56 les principes moraux ainsi que les notions de bien et de mal dont ils découlent
12:00 sont cause de manipulation, de violence et surtout de souffrance au sein de notre société
12:04 plutôt que de nous rassembler afin de progresser ensemble
12:06 ils nous opposent et nous poussent à nous entredéchirer
12:08 et ce alors même que je le rappelle, ils n'existent pas
12:11 c'est pourquoi je pense que nous devrions purement et simplement
12:14 rejeter les principes moraux et même les notions de bien et de mal
12:17 mais alors comment devrions-nous décider nos actions ?
12:20 et bien plutôt que de les juger bonnes ou mauvaises
12:22 nous devrions réfléchir à leurs conséquences
12:24 on va choisir d'entreprendre les actions dont nous jugeons les conséquences désirables
12:28 et de ne pas entreprendre celles dont nous jugeons les conséquences indésirables
12:32 cette approche s'appelle le conséquentialisme
12:34 et elle est l'inverse du principalisme
12:36 reste à savoir maintenant comment déterminer
12:38 si les conséquences prévues de nos actions sont désirables ou non
12:41 et ça, ça dépend du but que vous vous fixez dans la vie
12:44 si comme je l'ai proposé à l'épisode 19
12:46 vous vous fixez pour but d'être heureux
12:47 alors les conséquences de toutes vos actions devraient favoriser votre bonheur
12:51 les conséquences désirables sont alors celles qui y contribuent
12:54 et les indésirables, celles qui y contreviennent
12:56 alors bien sûr ça mettra sans doute pas fin à tous nos conflits
12:58 puisque nous aurons toujours des objectifs différents les uns des autres
13:01 et souvent incompatibles
13:02 mais nos conflits auront beaucoup plus de chances
13:04 de trouver une résolution intelligente et pacifique par la réflexion commune
13:08 que si chacun campe sur son point de vue
13:09 en vertu de principes moraux purement tautologiques
13:12 beaucoup de gens pensent que sans bien ni mal
13:17 les humains n'agiraient qu'égoïstement
13:18 ce qui les empêcherait de vivre ensemble
13:20 ou pour le dire autrement
13:21 que les notions de bien et de mal rendent les humains altruistes
13:24 et permettent donc la vie en société
13:25 or ce n'est absolument pas le cas
13:27 d'abord le bien et le mal n'empêche pas les humains d'agir de manière hypocrite ou égoïste
13:31 en particulier lorsqu'ils considèrent, comme on l'a vu
13:33 que leurs actions ou leurs intérêts à eux sont toujours bons
13:35 ensuite l'absence de bien et de mal n'empêche pas d'être altruiste
13:38 dans le chapitre sur la bienveillance j'ai expliqué pourquoi
13:40 en veillant au bonheur des autres ont contribué à son propre bonheur
13:43 et ce sans jamais avoir recours aux notions de bien et de mal
13:46 mais surtout que les humains soient altruistes ou égoïstes n'a que peu d'importance
13:49 les termes de leur coexistence ne sont pas établis par leur bon vouloir
13:53 heureusement d'ailleurs
13:53 mais par la loi
13:54 et juste pour clarifier
13:55 la loi ne constitue ni le bien ni la morale
13:58 elle n'est qu'un accord établi entre les humains d'une société
14:00 visant à permettre qu'ils vivent ensemble
14:02 et tirent avantage de leur collaboration
14:04 d'ailleurs les lois les plus efficaces sont celles qui parviennent à aligner nos intérêts personnels
14:07 avec les intérêts de la société
14:09 mais ça on va y revenir quand on abordera le chapitre sur la justice dans quelques épisodes
14:13 le conséquentialisme nous amène parfois à contredire des principes moraux bien établis
14:21 par exemple certains individus voient dans la loi un principe moral et s'interdisent de l'enfreindre
14:25 le conséquentialiste quant à lui voit la loi davantage comme ce qu'elle est
14:28 c'est à dire un contrat passé entre la société et lui
14:30 qu'il s'autorise éventuellement à transgresser
14:33 si le gain qu'il espère en le faisant
14:34 vaut la peine par rapport au risque de sanction auquel il s'expose
14:38 et je vous laisse juger de quelle approche est la plus adaptée
14:40 si par exemple quelqu'un est en train de mourir de l'autre côté d'un passage piéton
14:44 alors que le feu est rouge pour vous
14:45 bon bah si la voie est libre vous allez pas attendre bêtement que le feu passe au vert pour aller le secourir
14:49 mais qu'est-ce que t'attends pour y aller ?
14:51 y'a pas de passage clôté
14:53 Dieu nous protège
14:56 le conséquentialisme a bien sûr ses limites
15:01 d'abord pour évaluer les conséquences de nos actions sans nous laisser influencer par les principes moraux
15:06 dont on nous a bourré le crâne
15:07 il faut faire preuve d'ouverture d'esprit, de réflexion et de rigueur
15:10 c'est donc pas du tout la voie la plus facile
15:11 et ensuite tout simplement parce qu'on peut se tromper
15:14 oups
15:15 il est en effet impossible de prévoir indéfiniment les conséquences
15:18 des conséquences des conséquences de nos actions
15:20 on est donc jamais à l'abri d'un effet papillon
15:22 et puis même nous devons souvent agir malgré le manque d'informations
15:25 il y a donc toujours un risque attaché à chacune de nos actions
15:28 que nous devons estimer et assumer en pleine conscience
15:30 si nous décidons d'agir
15:31 cela dit je pense qu'il vaut mieux se tromper et apprendre de nos erreurs
15:34 que de considérer que parce qu'on a aveuglément suivi un principe moral
15:38 alors on a rien à se reprocher ni à apprendre des conséquences de nos actions
15:45 enfin un dernier écueil du conséquentialisme
15:47 et qu'il est vulnérable à la mauvaise foi
15:49 puisque nos actions ne sont plus justifiées par des principes
15:52 mais par notre raisonnement
15:53 alors nous devons nous assurer que notre raisonnement est impartial
15:56 or souvent on n'aime pas admettre nos erreurs
15:58 et notre biais de préférence nous pousse parfois à tordre notre raisonnement
16:01 pour nous trouver toutes sortes de fausses justifications
16:04 les explications du genre "j'obéis aux ordres"
16:06 "j'ai pas le choix" ou "de toute façon tout le monde fait pareil"
16:08 ne doivent pas nous satisfaire
16:09 il faut rester vigilant et nous juger honnêtement
16:12 avec humilité, rigueur et discipline
16:14 sans quoi le conséquentialisme ne vaudra pas mieux que le principalisme
16:17 voilà on va s'arrêter là, j'espère que cet épisode vous a plu
16:20 vous l'aurez remarqué c'est un double épisode que je n'ai pas pu me résoudre à couper en deux
16:23 c'est ce qui a pas mal retardé sa publication
16:25 et je vous prie de m'en excuser
16:27 je me rends bien compte que de réfuter entièrement les notions de bien et de mal
16:30 c'est un point de vue qui est pas intuitif
16:31 c'est pourquoi je serais très curieux de lire vos commentaires à ce sujet
16:34 donc surtout n'hésitez pas à vous exprimer
16:36 voilà, comme d'habitude je vous dis à la prochaine
16:38 et d'ici là
16:39 prenez soin de vous
16:41 Sous-titrage Société Radio-Canada

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