”Il n’y a plus de règles” la police marseillaise démunie devant les règlements de comptes

  • l’année dernière
Avec Bruno Bartocetti, secrétaire national chargé de la Zone Sud pour le syndicat Unité SGP Police.

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##C_EST_DANS_L_ACTU_4-2023-09-30##
Transcript
00:00 Marseille encore sous le choc de cette image ahurissante.
00:04 Ces images ahurissantes qui ont fait le tour des réseaux sociaux toute la journée d'hier.
00:08 C'est une fin de journée normale à Marseille, dans un quartier tranquille, une rue commerçante.
00:14 Une voiture noire s'arrête en milieu de la route.
00:18 La circulation s'arrête, un passager sort.
00:20 Il est vêtu d'une cagoule et d'une doudoune noire.
00:23 Il tient une kalachnikov et rafale un groupe de trois hommes qui discutaient sur le trottoir.
00:27 L'un d'eux est achevé quasiment à bout, pourtant à même le trottoir.
00:30 La voiture ensuite repart tranquillement comme si de rien n'était.
00:34 C'était pourtant un quartier tranquille, en théorie.
00:37 Bonjour Bruno Bartocetti.
00:38 Oui bonjour, merci de m'avoir invité.
00:40 Soyez le bienvenu sur Sud Radio.
00:42 Secrétaire national chargé de la zone sud pour le syndicat Unité SGP Police Force Ouvrière.
00:46 Plusieurs choses choquent évidemment dans cette image.
00:50 D'abord revenons quand même sur le bilan de cette tuerie, il n'y a pas d'autre mot.
00:53 Trois personnes visées, deux qui sont mortes et l'une très gravement blessée à ce stade.
00:58 Oui c'est exactement ça.
01:00 Un petit bémol, il semblerait que la personne principale qui a été visée et achevée au sol
01:08 soit la principale cible de ces tueurs.
01:12 Bien évidemment ils n'ont pas fait de détails, ils n'ont pas cherché à savoir,
01:16 à un moins sens, si les deux autres personnes étaient liées directement ou indirectement
01:21 avec cet homme qui a été abattu froidement.
01:23 Ça prouve surtout qu'il n'y a plus de limites finalement, plus de morale, plus de règles.
01:29 C'est-à-dire qu'on peut tirer, alors bien sûr les images sont choquantes,
01:32 mais c'est la méthodologie habituelle dans les règlements de comptes,
01:36 on est toujours sur cette même méthode.
01:37 Mais là ce qui est choquant au-delà des images, bien sûr, quand on voit ces images-là,
01:41 c'est qu'on est dans un quartier populaire,
01:43 mais qui n'a rien à voir avec les quartiers dits très sensibles de Marseille.
01:47 C'est une rue passante, commerçante, il est 19h30, donc ça démontre bien.
01:53 Et ils sont en voiture, c'est-à-dire qu'en fait à la limite,
01:56 ils peuvent se retrouver coincés dans le flou de la circulation, ça ne les dérange pas.
01:59 Ça démontre surtout qu'on ne peut pas comprendre leur mode de fonctionnement cérébral.
02:04 Je veux dire par là qu'ils sont sur une autre planète que la nôtre,
02:07 et on peut tourner dans tous les sens, on voit bien que leur seul but,
02:10 c'est de gagner de l'argent, de tuer quand on est gênant.
02:14 Il n'y a pas beaucoup de règles, il n'y a pas beaucoup de réflexions.
02:16 C'est ces individus.
02:18 - Alors un peu plus tard dans la nuit, la police a retrouvé dans une cité de Marseille
02:22 un véhicule calciné avec à l'intérieur une Kalachnikov,
02:26 très précisément probablement le véhicule des auteurs de ce meurtre.
02:30 Est-ce que la police marseillaise a les moyens d'intercepter des tueurs
02:34 lorsqu'ils sont sur le point de commettre un assassinat ?
02:38 - Alors si on peut éviter bien sûr, s'ils sont sur le point de commettre un assassinat,
02:43 tout va être mis en place, si on a les informations, pour les neutraliser,
02:46 les intercepter avant.
02:48 À partir du moment où ils ont tué, ils ont tiré,
02:50 j'ai presque envie de dire, l'intérêt c'est de bien sûr prendre tous les éléments,
02:54 de les pister, de les rechercher,
02:57 mais surtout pas de les interpeller dans une zone flagrante d'élite
03:00 quand on sait qu'ils sont armés, qu'ils sont capables de tirer sur n'importe qui.
03:04 Vous savez, c'est un peu comme dans les brancages,
03:06 il vaut mieux interpeller les braqueurs quelques jours ou quelques semaines après
03:09 que tenter de les interpeller au moins des faits,
03:12 parce qu'il peut y avoir des tômages collatéraux très très importants.
03:16 Donc c'est pour ça qu'il faut être très froid dans notre travail
03:19 et ne pas se faire dans la précipitation.
03:22 Ce qui est important de retenir, si vous me le permettez,
03:24 c'est qu'après on arrive à résoudre plus de la moitié des homicides volontaires,
03:30 c'est regarder le verre à moitié plein,
03:32 quand on sait qu'en France on arrive à remonter à peu près 30% des homicides volontaires,
03:38 dans le cadre des règlements de comptes, et j'insiste bien,
03:41 la police marseillaise, que ce soit la Sûreté départementale ou la PGI,
03:45 font un travail avec pas assez de moyens, extraordinaire en tout cas.
03:48 Et d'autant plus qu'il y en a malheureusement du travail, si j'ose dire, pour les policiers,
03:52 puisque le bilan est dramatique quand même à Marseille,
03:54 depuis le début de l'année, donc sur 2023,
03:56 46 morts et 110 blessés à Marseille depuis le début de l'année.
04:01 C'est un chiffre quand même qui est absolument incroyable.
04:05 Quoi qu'il en soit, revenons quand même au procédé.
04:07 Vous l'avez dit vous-même, ces derniers tueurs
04:10 ont décidé d'agir vers 19h30 alors qu'ils étaient dans une voiture.
04:14 Ça veut dire concrètement qu'ils n'avaient même pas peur d'être coincés dans les bouchons,
04:17 vous l'avez dit vous-même, hors d'autres termes qu'ils savaient qu'on ne les arrêterait pas soi-là.
04:22 Oui, ils avaient quand même réfléchi à pouvoir filer très rapidement du crime,
04:28 mais ils ont toutes les audaces.
04:31 Toutes les audaces, de toute façon, ces tueurs peuvent aussi être des cibles.
04:35 La peine de mort existe dans ce milieu-là,
04:37 l'espérance de vie n'est passeure à Romain les 30 ans.
04:40 Donc, à la limite, se faire interpeller par la police, c'est presque secondaire,
04:46 puisque, bien sûr, dans un cas de règlement de compte, lorsqu'il y a un assassinat,
04:50 on passe aux assises et on prend de très nombreuses années de prison,
04:54 mais les trafiquants de stupéfiants prennent beaucoup de risques
04:57 et prennent, à mon sens, pas assez de prison,
05:01 car il y a beaucoup de dossiers, il faudrait les traduire aux assises
05:06 et c'est là où ça demande beaucoup de moyens pour la justice,
05:08 beaucoup plus de magistrats, etc.
05:10 Mais quand on sait que la peine de mort existe dans ce milieu-là,
05:14 je crois que seule la sanction ne suffit pas pour repousser ce phénomène
05:19 qui est très important dans le cadre du trafic de stupéfiants et d'armes à feu.
05:23 Autant dire que vous vous sentez, à ce stade,
05:25 Bruno Bartocchetti, dépassé par la situation.
05:28 Vous, policier, dernière question, elle est importante.
05:31 Tous les habitants du quartier l'ont fait remonter
05:33 dans les différents médias qui les ont interrogés.
05:35 Le quartier des Chutes-Lavis, c'est un quartier tranquille,
05:38 commerçant, avec beaucoup de retraites et le plus gros immeuble,
05:41 en tout cas le plus haut de la rue où le crime a été commis,
05:43 doit faire 4 étages, pas beaucoup plus.
05:45 Est-ce que ça veut dire que la guerre des gangs
05:46 est en train d'envahir tout le centre-ville de Marseille ?
05:50 En tout cas, on n'est plus dans un seul schéma
05:53 d'il y a 5, 10 ans, 15 ans,
05:55 où seules les cités des quartiers Nord
05:58 étaient touchées par ce phénomène-là, effectivement.
06:01 Ça part sur la division Sud, ça peut partir dans le centre-ville.
06:04 On est en danger à Marseille,
06:07 et c'est pour cette raison qu'on le souligne,
06:10 bien sûr, avec ce qui s'est passé dans ce quartier des Chutes-Lavis.
06:13 Ça démontre qu'on doit être vigilants partout.
06:16 Ça demande beaucoup de moyens, beaucoup de présence,
06:18 et malgré les renforts qui ont été envoyés à Marseille,
06:23 malgré les renforts de police,
06:24 la violence s'est accentuée très fortement ces 10 dernières années.
06:29 On a encore beaucoup de chemin à faire pour sécuriser la population,
06:32 ça doit être la priorité, notre rôle est de sécuriser cette population,
06:35 et ça demande encore et encore et encore des moyens.
06:38 - Merci beaucoup, et bon courage à vous,
06:40 surtout Bruno Bartocetti.
06:42 Je le rappelle, vous êtes policier et responsable de la zone Sud
06:45 pour le syndicat Unité SGP Police Force Ouvrière,
06:48 et vous tous qui nous écoutez depuis Marseille,
06:50 si jamais vous assistez à un règlement de compte comme celui-ci,
06:52 par pitié, n'essayez pas de jouer au héros,
06:54 c'est trop dangereux de toute façon.

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