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Le 10 avril 1912, le Titanic, le plus luxueux paquebot jamais construit, quitte le port de Southampton, en Angleterre, en direction de New York pour sa traversée inaugurale. Après quatre jours passés en mer, le navire percute un iceberg et sombre dans les eaux glaciales de l'Atlantique Nord en moins de trois heures. Retour sur les circonstances qui ont provoqué cette catastrophe, la plus célèbre de l'histoire maritime, dans laquelle ont péri 1500 personnes.

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00:00 [Générique]
00:06 Salut à tous. Les plus grandes catastrophes de l'histoire analysées à la loupe, c'est dans la Minute de Vérité.
00:11 Avec un seul et même objectif, expliquer pourquoi et comment l'addition de facteurs malheureux a débouché sur une tragédie.
00:17 Celle dont nous allons parler aujourd'hui est sans doute la plus célèbre. Il s'agit du naufrage du Titanic.
00:22 Environ 1500 personnes vont périr dans la nuit du 14 au 15 avril 1912 dans l'océan Atlantique Nord.
00:28 Cette catastrophe va provoquer un véritable émoi dans toute la communauté internationale.
00:33 Voici donc son histoire, sa Minute de Vérité, et c'est tout de suite sur Direct 8.
00:38 Le plus grand paquebot du monde, le Titanic, fait route dans l'Atlantique Nord en direction des États-Unis.
00:46 Plus de 2200 personnes se trouvent à bord.
00:49 "Iceberg droit devant !"
00:51 Soudain, c'est la catastrophe.
00:53 "Plus vite !"
00:57 Très vite, le navire prend l'eau et s'enfonce dans les flots glacés.
01:00 Faute de secours, plus de 1500 personnes se noient.
01:05 Mais pourquoi tant de victimes ?
01:08 Est-ce dû à une erreur humaine ou à une faute de conception ?
01:11 Aujourd'hui, grâce à des techniques de pointe et à une expérience inédite,
01:16 nous allons vous révéler le défaut caché du plus célèbre navire de l'histoire.
01:20 Les catastrophes sont rarement le fruit du hasard.
01:25 Elles résultent souvent d'un enchaînement d'événements malheureux
01:28 que nous allons tenter de reconstituer dans cette Minute de Vérité.
01:32 "Fermez les vannes !"
01:40 On le croyait insubmersible.
01:46 C'était une erreur.
01:55 "Ouvrez la grille !"
01:56 Europe, France, Cherbourg.
02:08 10 avril 1912.
02:11 C'est l'âge d'or des paquebots.
02:15 Au cours des 10 dernières années,
02:17 368 navires ont été mis en service sur la seule ligne transatlantique.
02:23 Le Mauritania, fleuron de la compagnie Cunard,
02:26 détient le record de vitesse avec 26 nœuds.
02:29 Mais un paquebot d'un genre nouveau va entrer dans l'arène.
02:32 Un colosse des mers.
02:37 Le Titanic.
02:39 Long de 269 mètres, c'est le plus grand navire jamais construit.
02:48 De plus, il appartient à une flotte comprenant deux autres nouveaux géants.
02:53 L'Olympique et le Gigantique, qui n'a pas encore été lancé.
02:57 Grâce à ces trois navires, la compagnie White Star Line
03:04 espère bientôt s'assurer le monopole sur la ligne transatlantique.
03:08 Il a fallu 3 ans pour construire le Titanic
03:14 dans les chantiers navals de Belfast en Irlande.
03:16 Assemblée de la même façon que l'Olympique,
03:19 navire légèrement plus petit qu'on voit ici en 1910,
03:23 ce paquebot est de conception robuste,
03:25 car il doit pouvoir résister aux tempêtes de l'Atlantique Nord.
03:27 2 000 plaques d'acier, à la fois solides et flexibles,
03:31 recouvrent l'énorme charpente du bateau.
03:33 Elles sont maintenues en place par 3 millions de rivets en acier et en fer forgé.
03:38 Au total, 8 ouvriers trouveront la mort sur ce chantier.
03:42 Le Titanic est en outre équipé de dispositifs de sécurité dernier cri.
03:47 Notamment, 16 compartiments étanches,
03:50 séparés par des portes électriques à la pointe de la technologie.
03:53 Lorsqu'enfin le navire est achevé,
03:56 ses concepteurs sont si confiants qu'ils décident de ne mettre à bord que 20 canaux de sauvetage.
04:00 Or, il en faudrait 2 fois plus pour pouvoir évacuer tous les passagers et l'équipage au complet.
04:06 Séduite par tant d'audaces, la presse surnomme le navire l'insubmersible.
04:12 Le Titanic peut naviguer à 23 nœuds.
04:15 C'est certes moins rapide que les navires de la compagnie Cunard,
04:18 mais le nouveau paquebot offre un luxe inégalé.
04:20 Pour les passagers de première classe,
04:23 il y a le grand escalier de somptueuse cabine et même un bain turc.
04:27 Mary et Lucian Smith, de jeunes mariés fortunés,
04:32 rentrent aux Etats-Unis après leur voyage de noces.
04:34 Mary, que l'on voit ici sur une photo de 1910,
04:38 est la fille d'un membre du congrès.
04:40 Enceinte de quelques semaines, elle a hâte de retrouver sa famille.
04:44 - Notre lune de miel a été fantastique.
04:48 Mais ma famille et mes amis me manquaient,
04:50 alors nous avons pris des billets pour New York.
04:52 Originaire de Virginie, Lucian Smith est le fils d'un industriel.
04:59 Le couple a payé 60 livres pour une cabine de première classe,
05:03 l'équivalent de près de 6 000 euros actuels.
05:06 Cependant, comme dans les avions d'aujourd'hui,
05:09 c'est surtout le grand nombre de passagers voyageant pour un tarif plus abordable
05:13 qui fait la rentabilité du navire.
05:16 A l'occasion de cette traversée inaugurale, cependant,
05:19 le Titanic n'est plein qu'aux 2/3, avec 1 343 passagers.
05:22 Les billets de 3e classe, les moins chers,
05:25 coûtent 2 livres pour un aller simple,
05:27 soit 2 semaines de salaire d'un ouvrier non qualifié.
05:30 Le magnifique navire est sous les ordres du plus prestigieux commandant
05:37 de la White Star Line, Edward Smith.
05:39 Cet homme d'expérience a déjà effectué
05:43 de nombreuses traversées inaugurales pour la compagnie,
05:45 mais celle-ci devait être sa dernière.
05:47 A 62 ans, il a en effet prévu de prendre sa retraite
05:51 dès son retour en Angleterre pour s'installer avec sa femme dans le Hampshire.
05:55 - La température baisse.
05:56 13 avril 1912, 17h.
06:00 Après 3 jours de navigation,
06:06 le plus grand vaisseau jamais construit par la main de l'homme
06:09 avance à la vitesse de 21 nœuds malgré les ennuis mécaniques.
06:15 Caché dans les entrailles du navire,
06:17 29 énormes chaudières génèrent une puissance de 46 000 chevaux.
06:20 Les 159 fourneaux sont en permanence alimentés en charbon par 58 hommes.
06:26 Parmi eux, le chauffeur de 1e classe Fred Barrett de Liverpool.
06:32 Ses 10 ans d'expérience ne sont pas de trop à bord de ce nouveau navire.
06:36 En effet, depuis 12 jours,
06:41 un incendie fait rage dans l'une des soutes à charbon.
06:44 Fred Barrett a utilisé les braises de charbon pour alimenter les chaudières
06:48 et le feu a fini par s'éteindre.
06:49 Mais la cloison n°5 a peut-être été déformée par la chaleur.
06:53 La construction du navire ayant coûté l'équivalent de 150 millions d'euros,
06:58 il serait catastrophique que des dégâts soient constatés lors de son 1er voyage.
07:01 14 avril 1912, 17h.
07:06 Après 4 jours de navigation sur les 7 prévus,
07:12 la décision est prise de faire inspecter le compartiment n°5 au retour à Belfast.
07:16 Dans la salle radio, juste derrière la passerelle,
07:22 John Phillips, l'opérateur, et Harold Bride, son assistant,
07:25 travaillent par roulement de 6 heures.
07:27 Les 2 hommes disposent d'un système dernier cri,
07:30 un télégraphe sans fil Marconi de 5 kW.
07:33 John Phillips envoie et reçoit des messages pour le compte des riches passagers.
07:38 Les signaux passent par une station relais située au Cap Reis,
07:42 dans la province de Terre-Neuve au Canada, à environ 725 km du navire.
07:47 L'opérateur a également reçu 3 messages en provenance de bateaux naviguant dans la zone.
07:53 Des mises en garde pour signaler la présence de glaces.
07:56 Chaque message est remis à Harold Bride, qui les transmet à la passerelle.
08:01 - Pour la passerelle. - D'accord.
08:03 - Commandant, un message radio pour vous. - Merci.
08:07 Le commandant Smith a soigneusement calculé son cap.
08:11 En 1912, il existe 2 principales routes transatlantiques.
08:14 La route du Nord est la plus courte, mais à la saison froide,
08:18 en raison du danger posé par les glaces dérivantes,
08:21 les navigateurs lui préfèrent celle du Sud, plus longue de 320 km.
08:24 L'hiver précédent a été le plus doux des 30 dernières années,
08:29 et des quantités inhabituelles de glaces se sont détachées de la banquise arctique.
08:33 Même la route du Sud est dangereuse,
08:37 et le commandant Smith corrige le cap pour descendre plus bas encore.
08:40 Ayant pris cette précaution, il décide de ne pas ralentir.
08:43 Sa vitesse actuelle devrait en effet permettre au Titanic d'arriver à la date prévue.
08:51 Une heure et 40 minutes plus tard,
08:56 les passagers de première classe se détendent dans le grand salon.
08:59 Mary Smith et son époux Lushan savourent un romantique dîner aux chandelles.
09:05 20h55.
09:10 Le capitaine Smith se rend sur la passerelle pour s'assurer que tout va bien,
09:13 puis se retire dans ses quartiers.
09:15 22h.
09:19 Sur la passerelle, William Murdoch, le commandant en second,
09:24 est désormais responsable du navire.
09:26 Il est préoccupé par les glaces, car il sait qu'à la vitesse où ils vont,
09:29 il faut plus d'un kilomètre et demi pour faire virer le bateau de 45 degrés.
09:37 Au-dessus de William Murdoch, 30 mètres plus haut dans le nid de pie,
09:41 Reginald Lee et Fred Fleet, les deux vigis,
09:44 viennent de prendre leur service pour deux heures.
09:46 Les deux hommes n'ont pas de jumelles.
09:49 À la suite d'un malentendu à Sarsompton,
09:52 un officier a en effet quitté le navire avec la clé du placard où elles sont rangées.
09:56 C'est une nuit sans lune, et seule la lumière des étoiles éclaire les flots calmes.
10:00 22h55.
10:05 Dans la salle radio, John Phillips s'efforce d'entendre un message très faible
10:10 en provenance de Terre-Neuve, lorsqu'un bateau tout proche, le SS Californian,
10:14 entre lui aussi en communication.
10:16 Cette interruption assourdit l'opérateur.
10:20 Et bien que le message mentionne des glaces,
10:24 il répond avec irritation, "Libérez la fréquence,
10:27 je suis en communication avec le Cap Race."
10:32 23h39.
10:34 Tandis que le Titanic continue d'avancer à pleine vitesse,
10:37 personne ne réalise qu'un minuscule défaut dans la structure du paquebot
10:41 va bientôt jouer un rôle déterminant dans la mort de 1500 personnes.
10:44 Le plus grand navire jamais construit file ainsi à 21,5 nœuds
10:50 dans les eaux glacées de l'Atlantique,
10:52 lorsque tout à coup, la vigie Fred Fleet aperçoit quelque chose dans l'obscurité.
10:57 Au départ, le marin peine à distinguer la forme sombre qui se profile à l'horizon.
11:02 Puis, à environ 450 mètres, un énorme iceberg surgit dans la nuit.
11:08 - Allô ? - Iceberg droit devant !
11:16 - Iceberg droit devant ! - Virez à bas bord !
11:18 William Murdoch ordonne immédiatement de virer de bord.
11:21 - Plus vite !
11:23 Lentement, le Titanic tourne vers la gauche.
11:28 Les hommes d'équipage tentent de couper les moteurs.
11:33 Mais pour arrêter le Titanic à cette vitesse, il faut plus de 800 mètres.
11:39 Il est déjà trop tard.
11:41 - Il est trop tard !
11:45 - Il est trop tard !
11:47 - Il est trop tard !
11:49 - Il est trop tard !
11:51 - Il est trop tard !
11:53 Éviter l'énorme mur de glace est tout simplement impossible.
11:57 - Plus vite !
11:59 - Il est trop tard !
12:15 À 23h40, le Titanic heurte l'iceberg sur son flanc droit.
12:20 Dans la cale, le chauffeur Fred Barrett est aux premières loges pour constater les dégâts causés par la collision.
12:38 - Je parlais au second mécanicien quand une lumière rouge s'est allumée.
12:43 Alors j'ai crié "Fermez les vannes !"
12:45 Subitement, une voix d'eau se déclare dans la coque.
12:49 - L'eau rentrait à flots.
12:53 À l'arrière du bateau, les passagers remarquent à peine la collision.
13:03 - Ça m'a réveillée, mais pas assez pour me faire peur. Je me suis rendormie.
13:11 Le pacte a cependant réveillé Edward Smith. Il est inquiet.
13:15 23h48.
13:21 Le commandant inspecte les entrailles du navire.
13:25 Depuis une plateforme, il constate pour la première fois l'étendue des dégâts.
13:31 Très vite, des marins signalent que toute la partie avant du Titanic est inondée.
13:39 En 10 minutes seulement, le niveau d'eau dans la cale atteint 4,50 m.
13:45 Minuit.
13:51 De retour sur la passerelle, le commandant Smith reçoit des nouvelles alarmantes.
13:55 5 compartiments sont inondés.
13:57 À ce rythme, le Titanic risque de sombrer en à peine plus de 2 heures.
14:07 Dans la salle des chaudières, les mécaniciens actionnent héroïquement des pompes pour tenter de ralentir le naufrage.
14:13 - Dépêchez-vous !
14:19 Le commandant Smith ordonne aux officiers de préparer les 20 canaux de sauvetage,
14:23 tout en sachant que cela ne suffira pas pour toutes les personnes à bord.
14:27 Si seulement un autre navire se trouvait à 2 heures de navigation,
14:31 il pourrait secourir les passagers restants et les hommes d'équipage.
14:35 - Restez à l'intérieur !
14:37 Dans l'entrepont, les stewards réveillent les 3e classe et leur disent de se diriger vers les canaux de sauvetage.
14:43 Dans le même temps, beaucoup de passagers de 1re classe montent sur le pont.
14:49 La plupart ne savent même pas que le Titanic a heurté un iceberg.
14:53 Mary et Lushan Smith sont parmi la foule.
14:56 - Il n'y a pas eu de bousculades ou de panique.
14:59 Personne n'avait l'air d'avoir peur.
15:03 0h14. Dans la salle radio, le commandant Smith ordonne à John Phillips d'envoyer un message de détresse.
15:10 L'opérateur doit absolument trouver un navire qui puisse porter secours au Titanic.
15:16 Malgré les pompes, l'eau inonde désormais la salle du courrier.
15:23 Le temps presse et le commandant Smith prend la décision la plus difficile de sa vie.
15:30 Il ordonne l'évacuation du Titanic.
15:33 On attend de lui qu'il coule avec son navire et il le sait.
15:36 - Mesdames et messieurs, les femmes et les enfants seulement.
15:40 Sur le pont, les officiers font immédiatement embarquer les femmes et les enfants dans les canaux de sauvetage.
15:46 - Ces enfants n'ont pas de gilet de sauvetage. Donnez les gilets aux enfants.
15:49 Cependant, beaucoup de femmes ne veulent pas embarquer, refusant de partir sans leur mari.
15:54 - Je dois insister.
15:57 0h25. Dans la salle radio, les efforts désespérés de John Phillips aboutissent enfin.
16:04 Un autre paquebot, le Carpathia, répond à ses appels.
16:08 - Le Carpathien.
16:10 Cependant, ce navire se trouve à 93 km et même à pleine vitesse, il lui faudra presque 4 heures pour arriver.
16:17 Où donc se trouve le bateau qui a signalé des glaces au Titanic il y a 2 heures à peine ?
16:22 Son opérateur a forcément dû entendre les messages de détresse.
16:27 Le Titanic est en train de sombrer.
16:30 Tandis que l'eau monte, les passagers de 2ème et 3ème classe tentent de trouver leur chemin dans le labyrinthe de Coursive pour accéder au canot de sauvetage.
16:39 Les femmes et les enfants qui se trouvent déjà sur le pont embarquent à contre-coeur.
16:44 - Les femmes et les enfants seulement.
16:46 C'est alors qu'une lueur d'espoir apparaît.
16:50 Un officier aperçoit un navire à 10 km seulement.
16:53 Serait-ce le Californian ? Si son équipage repère le Titanic, il pourrait être sur place en moins d'une demi-heure.
16:59 Le commandant Smith ordonne immédiatement l'envoi d'une fusée de détresse.
17:03 0h40.
17:08 Dans la salle des chaudières, les mécaniciens continuent d'actionner les pompes lorsqu'une cloison cède subitement.
17:20 Les passagers continuent d'avancer sur le pont et l'équipage met le 1er canot de sauvetage à l'eau.
17:26 - Ok les gars !
17:28 Le canot peut contenir 65 personnes, mais il part avec 37 places vides.
17:33 Entre-temps, Lucian Smith supplie sa femme d'embarquer sans lui.
17:40 Dans la cale, l'eau continue de monter.
17:47 Des centaines de passagers de 2e et 3e classe tentent désespérément d'accéder au pont où se trouvent les canots de sauvetage.
17:54 Dans la salle radio, John Phillips et Harold Bride continuent d'envoyer des messages de détresse,
18:00 sachant qu'un navire voisin pourrait arriver sur place plus vite que le Carpathia.
18:04 Sur le pont, la confusion est à son comble.
18:08 Les officiers qui font embarquer les femmes et les enfants doivent repousser le pont.
18:13 Les officiers qui font embarquer les femmes et les enfants doivent repousser des hommes paniqués.
18:18 - Hé vous !
18:20 Le mystérieux navire à l'horizon n'a toujours pas répondu.
18:24 S'agit-il bien du Californian ? Pourquoi ne répond-il pas ?
18:28 Les officiers regardent les feux du navire disparaître dans la nuit noire.
18:35 1h30 du matin.
18:39 75 minutes après la collision, on déplore les premières victimes.
18:44 5 employés qui tentaient de sauver de l'eau des paquets de lettres dans la salle du courrier se noient.
18:50 Sur le pont, les passagers paniquent. C'est la ruée vers les canots de sauvetage.
19:06 Lucian Smith parvient à faire embarquer sa femme, enceinte, dans le canot numéro 6.
19:11 - Il m'a embrassée.
19:16 Et pendant qu'on descendait le canot, il m'a dit de garder les mains dans les poches.
19:22 Parce qu'il faisait froid.
19:24 C'est la dernière fois que je l'ai vue.
19:33 1h44 du matin.
19:35 Le dernier canot de sauvetage est mis à l'eau.
19:38 Plus de 1500 passagers et membres d'équipage se trouvent encore à bord du Titanic.
19:43 La proue du navire s'enfonce toujours plus dans l'eau.
19:46 Et beaucoup se précipitent vers la poupe, paniqués.
19:57 Les bonnes manières et la galanterie sont oubliées.
20:00 C'est désormais chacun pour soi.
20:02 2h40 après la collision, les chaudières s'arrêtent finalement de fonctionner et l'éclairage s'éteint.
20:12 - Oh mon Dieu !
20:15 Horrifiée, Mary Smith voit la mer engloutir le navire et son époux bien-aimé.
20:22 Plus de 700 survivants dérivent désormais dans la nuit glacée, sans savoir si des secours ont pu être envoyés.
20:49 A 4h30 du matin, le Carpathia arrive enfin sur place.
20:53 Tandis que les rescapés quittent les canots pour monter à bord du petit paquebot,
21:00 il apparaît tout de suite que le bilan est très lourd.
21:03 Parmi les 1500 victimes, on compte le commandant Smith, John Phillips, l'opérateur radio,
21:12 et l'époux de Mary Smith, Lucian, qui ne véritablement n'a pas été touché.
21:17 Au cours des semaines suivantes, les autorités britanniques et américaines ouvrent des enquêtes officielles.
21:22 Une à Londres et une à New York.
21:24 Plus de 41 000 questions seront posées dans le cadre de ces investigations,
21:29 mais aucune n'aboutit à une conclusion claire sur la cause du naufrage.
21:33 Près d'un siècle a passé depuis lors.
21:39 Pour les victimes, ce n'est pas la première fois qu'une enquête a été faite.
21:43 Près d'un siècle a passé depuis lors.
21:47 Pourtant, cette tragédie reste l'une des pires catastrophes maritimes de l'histoire.
21:51 Le mystère entourant le drame a captivé l'imagination de plusieurs générations,
21:58 donnant naissance à d'innombrables livres et films.
22:01 Aujourd'hui, sur Internet, quelques 40 millions de pages sont consacrées au Titanic.
22:06 On peut lire sur certaines que c'est en réalité son navire jumeau, l'Olympic, qui a coulé,
22:12 et d'autres invoquent une théorie du complot.
22:15 Pour découvrir la vérité, une approche scientifique moderne est indispensable.
22:20 En utilisant des techniques de pointe et des simulations informatiques,
22:24 nous allons réexaminer le naufrage du Titanic,
22:27 révélant ainsi qu'un minuscule détail aurait peut-être pu sauver des milliers de vies.
22:32 Le capitaine de frégate, Brian Penoyer, est enquêteur accident pour les gares de côte américaines.
22:41 Une grande partie de son travail est classée secret,
22:43 et il a déjà étudié près de 400 sinistres maritimes.
22:47 Ce spécialiste n'en est pas moins choqué par l'ampleur de la catastrophe du Titanic.
22:52 Sur le plan des pertes en vie humaine, c'est terrible.
22:56 Le capitaine Penoyer a été chargé de rouvrir l'enquête
23:01 et de passer en revue les moindres documents et indices existants.
23:05 Il commence son travail à la bibliothèque du Congrès,
23:08 où des centaines d'archives relatent en détail toute l'horreur de la nuit du naufrage.
23:12 Il y a des transcriptions des communications télégraphiques,
23:17 des témoignages de passagers et de membres d'équipage,
23:20 ainsi que de nombreux rapports techniques.
23:22 Les premiers indices pour résoudre l'énigme doivent donc se trouver ici.
23:26 Cependant, le capitaine Penoyer sait d'expérience
23:29 que c'est un enchaînement d'événements imprévus qui a dû mener au drame.
23:35 Une catastrophe de cette ampleur n'a jamais une seule et unique cause.
23:39 C'est une façon dépassée de voir les choses.
23:42 En fait, un certain nombre de facteurs doivent se combiner
23:46 au bon moment et au bon endroit.
23:49 Pour Brian Penoyer, deux questions principales se posent.
23:55 Est-ce la combinaison des conditions de navigation
23:57 et des réactions de l'équipage qui a causé la collision ?
24:00 Et après le choc, un défaut du navire a-t-il accéléré son naufrage ?
24:05 En bref, faut-il blâmer la machine ou l'homme ?
24:09 Car aujourd'hui encore, c'est souvent l'erreur humaine qui est cause de tragédie.
24:17 Ainsi, en 1989, une erreur de navigation de Lexon Valdez
24:23 a provoqué une catastrophe écologique.
24:28 Deux ans auparavant, c'est aussi une négligence de la part d'un des membres de l'équipage
24:32 qui a causé le naufrage du ferry Herald of Free Enterprise
24:36 provoquant la mort de 193 personnes.
24:39 Quelque chose de semblable a donc pu se produire sur le plus célèbre navire de l'histoire.
24:49 Selon les protocoles d'enquête moderne,
24:51 Brian Penoyer doit établir quelles étaient les conditions de navigation.
24:56 En étudiant les archives, il constate que l'océan était calme,
24:59 il n'y avait pas de vent et c'était une nuit sans lune.
25:02 L'enquêteur vérifie ensuite le cap suivi.
25:07 Le Titanic se trouvait à environ 16 km au sud de la route méridionale,
25:11 la plus sûre des deux principales routes transatlantiques.
25:14 Cependant, le capitaine Penoyer constate que plusieurs navires
25:18 avaient signalé dans cette zone des glaces dérivantes,
25:21 dues à un hiver particulièrement doux.
25:23 Or, l'un de ces messages revêt une importance particulière.
25:27 Un navire du nom de SS Californian s'est arrêté en pleine mer
25:32 en raison de très mauvaises conditions de navigation.
25:34 Et Cyril Evans, son opérateur radio,
25:37 a envoyé un message d'avertissement à tous les bateaux voisins.
25:41 À une époque où le radar n'existait pas encore,
25:44 la radiothélégraphie constituait une source vitale d'informations météo.
25:48 Or, il s'agissait d'un navire de glace.
25:50 Mais John Phillips a coupé Cyril Evans.
25:53 Pour le capitaine Penoyer, c'est difficile à croire.
25:56 - C'est fou. Pourquoi a-t-il fait ça ?
25:59 Le naufrage du Titanic est-il dès lors dû à la faute d'un seul homme,
26:05 John Phillips, l'opérateur radio ?
26:07 - À ma bord ! Plus vite !
26:17 Brian Penoyer, capitaine des gardes-côtes américains,
26:21 arrive à un point crucial de son enquête.
26:24 John Phillips, l'opérateur radio du Titanic, est-il en faute ?
26:28 A-t-il omis de transmettre à la passerelle un navire de glace
26:31 juste avant la collision avec l'iceberg ?
26:34 Grâce à l'équivalent moderne du radiothélégraphe, la visioconférence,
26:42 l'enquêteur contacte Park Stephenson,
26:45 l'historien spécialiste du Titanic et du Code Morse.
26:48 Il lui demande s'il pourrait y avoir une explication
26:51 au comportement de John Phillips.
26:54 - À ce moment-là, John Phillips recevait en fait des messages
26:59 qu'il attendait en provenance du Cap Race.
27:02 D'après l'historien, John Phillips devait avoir du mal
27:06 à entendre le faible signal du Cap Race, situé à 725 km de là.
27:11 Or, Cyril Evans, l'opérateur du Californian,
27:14 ignorait que la fréquence était occupée,
27:17 car il ne disposait pas d'un appareil aussi performant.
27:20 Lorsque Cyril Evans a commencé à envoyer son navire de glace,
27:24 John Phillips a donc dû être brutalement assourdi.
27:27 - Le SS Californian était très près du Titanic.
27:34 Le signal devait donc être si fort que ça lui a percé les pimpons.
27:40 - La réaction de l'opérateur n'en paraît pourtant pas moins absurde.
27:44 Il retourne en effet aux messages des passagers
27:47 sans transmettre l'avis de glace à la passerelle.
27:50 Cependant, Stephenson, qui connaît parfaitement les règles
27:53 de la communication télégraphique, pense que cette attitude peut s'expliquer.
27:57 - Compte tenu des protocoles,
27:59 la responsabilité revient entièrement à Cyril Evans.
28:02 - En 1912, les messages destinés à la passerelle d'un autre navire
28:06 devaient avoir le préfixe "MSG" pour "Master Service Gram".
28:10 Or, Cyril Evans n'a pas respecté cette règle.
28:16 John Phillips était donc en droit d'ignorer son message.
28:19 Et c'est pour cette raison que l'avis de glace n'a pas été transmis
28:22 à la passerelle du Titanic.
28:24 Au lieu de réémettre le message,
28:26 Cyril Evans a alors éteint son appareil et il est parti se coucher.
28:33 - En fin de compte, il n'a pas transmis l'avis de glace au Titanic
28:36 comme son commandant lui en avait donné l'ordre.
28:39 Cependant, même si l'opérateur n'a pas agi dans les règles,
28:43 le drame qui a suivi ne peut lui être entièrement imputé.
28:47 Le Titanic avait en effet reçu 5 avis de glace dans cette même journée.
28:55 Pourtant, le commandant a décidé de continuer de naviguer à 21 nœuds et demi.
29:01 Après tous ces avertissements,
29:03 pourquoi avoir maintenu la vitesse normale du navire ?
29:06 Brian Penweyer s'intéresse désormais au 2ème principal suspect,
29:12 le commandant.
29:14 Edward Smith a-t-il commis une erreur fatale
29:17 en maintenant une vitesse trop élevée malgré les risques ?
29:20 Selon les archives, ce navigateur accompli avait plus de 24 ans d'expérience
29:25 aux commandes de vaisseaux de la White Star Line.
29:28 Le voyage inaugural du navire jumeau du Titanic, le Limpic,
29:32 s'était d'ailleurs fait sous ses ordres 10 mois plus tôt.
29:35 Le commandant Smith, avec ses 40 ans d'expérience,
29:38 était choisi en priorité pour toutes les traversées inaugurales.
29:42 Après la catastrophe, les faits et gestes d'Edward Smith
29:47 n'en ont pas moins été soumis à un examen minutieux.
29:50 Après tout, en tant que commandant, il était responsable du navire.
29:54 Beaucoup ont laissé entendre qu'Edward Smith était soumis
29:57 à une intense pression commerciale sur le marché très compétitif
30:00 des traversées transatlantiques.
30:02 Il aurait donc pris des risques pour arriver à New York à la date prévue.
30:06 Chaque jour à midi, la distance parcourue la veille
30:11 était indiquée sur un tableau d'affichage destiné aux passagers.
30:14 Le premier jour, le navire a parcouru 621 km.
30:18 Le deuxième, 830 km.
30:20 Et le troisième, 878 km.
30:23 C'était moins rapide que le Mauritania,
30:28 mais le Titanic était une fois et demie plus grand.
30:31 Malgré ces témoignages, Brian Penoyer découvre dans les archives
30:38 une réalité bien différente.
30:40 Le commandant Smith semble en effet avoir commencé doucement
30:46 le rodage du nouveau navire.
30:48 Deux des 29 chaudières n'étaient même pas allumés.
30:51 Il ne s'est donc pas montré imprudent.
30:53 Le Titanic aurait pu naviguer plus vite encore.
30:56 C'est alors que le capitaine Penoyer fait une découverte cruciale
31:02 en étudiant les conclusions de l'enquête britannique.
31:05 Un élément vient éclairer les faits d'un jour nouveau.
31:08 L'enquêteur découvre que l'attitude du commandant vis-à-vis des glaces
31:13 était en fait plutôt normale pour les passagers.
31:16 En 1912, il était en effet courant d'avancer à bonne vitesse
31:19 à travers les champs de glace.
31:21 Smith a avant tout appliqué les principes de sécurité de son temps.
31:24 L'idée, j'imagine, était que le navire courait un danger
31:30 tant qu'il était dans le champ de glace,
31:32 et que donc il fallait en sortir le plus vite possible.
31:35 Au début du siècle, les commandants se fiaient ainsi simplement
31:39 à leur bateau et à leur capacité de navigateur.
31:43 C'est fou. C'est comme si on disait que pour traverser un champ de mine,
31:46 il vaut mieux courir.
31:48 Ne pouvant incriminer ni le commandant Smith,
31:56 ni John Phillips ou même Sir Ed Evans,
31:58 le capitaine Penoyer tourne son attention
32:01 vers la dernière ligne de défense du Titanic, les vigies.
32:04 Perchés dans le nid de pis,
32:09 les brigades de la gare de la mer se déroulent.
32:12 Le nid de pis, Réginald Lee et Fred Fleet
32:15 devaient être les yeux du navire.
32:17 Pourquoi n'ont-ils vu l'iceberg que 37 secondes avant la collision ?
32:24 Brian Penoyer décide de pratiquer une expérience des plus simples
32:29 pour tenter d'en savoir plus.
32:31 A bord d'un bateau des gares de côte,
32:35 il traverse le lac Chesapeake dans l'état du Maryland
32:38 pour reconstituer les conditions du naufrage.
32:41 Les éléments clés sont la vitesse de l'embarcation
32:44 et la température extérieure.
32:46 A 21,5 nœuds, le pouvoir de refroidissement du vent
32:50 est de -7 degrés.
32:52 Or, même si les deux marins étaient chaudement vêtus,
32:55 leurs yeux étaient forcément exposés au froid.
32:58 Lorsque le bateau des gares de côte atteint une vitesse similaire
33:02 à celle du Titanic, l'intuition de Brian Penoyer se confirme.
33:05 L'air glacé lui fouette les yeux, affectant nettement sa vision.
33:10 J'ai déjà les yeux qui pleurent,
33:12 et c'est plus difficile que je pensais de voir l'horizon.
33:15 Lorsque la lumière est faible, l'œil humain ne voit pas les couleurs.
33:19 Il est alors presque impossible de distinguer de la glace bleue
33:23 sur un fond de ciel noir.
33:25 Sans vagues venant se briser sur l'énorme iceberg,
33:28 il est donc guère surprenant que les vigies l'aient aperçu trop tard.
33:31 Autre facteur aggravant, les deux hommes n'avaient pas de jumelles
33:35 suite à une méprise à Sault-Sarmton.
33:37 Cet instrument aurait-il changé la donne ?
33:40 En 1912, la technologie optique était déjà relativement avancée.
33:46 Une paire de jumelles standards avait un pouvoir grossissant de 4 ou 5
33:50 et un champ de vision d'environ 4 degrés.
33:53 Cela aurait-il pu aider les vigies ?
33:55 En fait, les jumelles ne sont pas aussi utiles qu'on pourrait croire.
34:01 À moins de savoir ce qu'on cherche, on ne sait pas où les pointer,
34:05 et tout ce qu'on voit c'est un cercle noir.
34:07 Je crois que ça n'aurait rien changé cette nuit-là.
34:10 De plus, les vigies avaient pour instruction de ne pas se servir de jumelles
34:15 pour scouter l'horizon.
34:17 Ils devaient observer à l'œil nu et n'utiliser les jumelles que pour confirmation.
34:21 Ne pouvant trouver aucune preuve que les vigies aient commis une quelconque faute,
34:26 le capitaine Penoyer en arrive à la seule conclusion possible.
34:29 Ce serait pratique de pouvoir blâmer un individu.
34:34 Mais la vérité, c'est qu'il n'y a pas une personne dont on puisse dire
34:37 "c'est le seul responsable de cet accident".
34:40 La tension de l'enquêteur se tourne alors vers le navire et l'iceberg.
34:45 Il doit établir ce qui s'est exactement passé au moment de la collision.
34:49 Cette photographie a été prise à partir du CS Minya,
35:01 un navire qui s'est rendu sur les lieux de l'accident quelques jours plus tard.
35:05 Et cet iceberg serait précisément celui que le Titanic a percuté.
35:09 Des océanographes ont calculé que l'énorme bloc de glace dérivait en direction du sud
35:15 à un peu plus d'un kilomètre heure, croisant presque à angle droit la trajectoire du navire.
35:19 On sait que les 7/8ème d'un iceberg sont immergés.
35:24 Or, selon des témoins, celui-ci mesura environ 18 mètres de haut.
35:29 Brian Penoyer calcule que son poids total devait approcher 270 000 tonnes,
35:34 soit 6 fois plus que le navire.
35:36 Même dans ces conditions, le Titanic aurait dû résister à l'impact.
35:41 En effet, sa coque formée de plaques d'acier de 2,5 cm d'épaisseur,
35:48 fixées par 3 millions de rivets, n'était pas sa seule défense.
35:52 Il était prévu que 4 de ses 16 compartiments
35:55 puissent être inondés sans affecter la flottabilité du navire.
35:59 Or, à l'évidence, cette nuit-là, une défaillance s'est produite.
36:03 Les enquêtes de l'époque ont conclu que le Titanic avait été littéralement éventré.
36:09 Une déchirure de 90 mètres aurait transpercé 5 compartiments,
36:13 soit un de plus que ce que le navire pouvait supporter.
36:16 Cependant, ce scénario reste controversé.
36:19 En 1985, grâce à un sous-marin de recherche de la marine américaine,
36:25 l'explorateur Robert Ballard a retrouvé l'épave à 3 000 mètres de profondeur.
36:30 Dix ans plus tard, une équipe scientifique est revenue sur les lieux.
36:34 En utilisant un sonar pour voir à travers l'épaisse couche de sédiments,
36:38 les chercheurs ont pu constater que la coque semblait comporter
36:41 de multiples petits trous plutôt qu'une longue déchirure.
36:44 Le Titanic a-t-il été ouvert comme une vulgaire boîte de conserve
36:48 ou est-ce un autre type de dégâts qui a provoqué le naufrage ?
36:54 Pour en savoir plus, le capitaine Penoyer rend visite à l'un des plus grands spécialistes mondiaux
36:59 de la structure du Titanic, Bill Garsky.
37:02 Sa question est la suivante.
37:06 Une déchirure de 90 mètres serait-elle cohérente avec le fait
37:09 que le navire a coulé en 2h30 ?
37:11 Pour Bill Garsky, le calcul est simple.
37:14 Pour que le navire coule, il fallait qu'il se remplisse de quelque 34 470 tonnes d'eau.
37:20 Avec une ouverture de 90 mètres, cette quantité aurait été atteinte beaucoup plus rapidement.
37:24 C'est une ouverture énorme.
37:27 Et puisqu'on sait que le Titanic a coulé en 2h30,
37:31 ça ne pouvait pas être ce genre de dégâts.
37:34 Il semblerait donc que le Titanic ait subi des dégâts moins importants sur son flanc droit,
37:40 ce qui expliquerait pourquoi si peu de personnes à bord
37:43 ont pris conscience du danger ou même ressenti la collision.
37:48 Mais pourtant, Bill Garsky pourrait apporter des lumières sur une autre hypothèse.
37:52 L'héroïque chauffeur Fred Barrett, qui a survécu au naufrage,
37:56 a en effet rapporté qu'un incendie s'était déclaré dans une soute à charbon,
38:00 près de la cloison séparant les compartiments 5 et 6.
38:03 Or, une heure après la collision avec l'iceberg,
38:07 cette même cloison a brusquement cédé.
38:09 Avait-elle été affaiblie par l'incendie,
38:13 ce qui aurait provoqué l'inondation d'un cinquième compartiment,
38:16 ou un naufrage ?
38:17 Pour Bill Garsky, c'est peu probable.
38:19 C'est une bonne théorie,
38:23 mais ça ne colle pas avec ce qui s'est passé.
38:25 On sait en effet que l'équipage pompait déjà de l'eau dans le compartiment 5,
38:32 c'est donc que celui-ci avait cédé avant.
38:35 C'était sans espoir, le bateau allait couler.
38:38 La théorie de la cloison étant écartée,
38:43 le capitaine Penoyer envisage une autre explication.
38:46 Le navire a-t-il été construit avec des matériaux de mauvaise qualité ?
38:49 Dans une eau proche de 0°C,
38:52 se pourrait-il que les plaques d'acier de la coque
38:54 soient devenues cassantes et aient cédé au moment de l'impact ?
38:57 Au fil des ans, plusieurs échantillons ont été remontés de l'épave.
39:02 Des morceaux des plaques, et des rivets qui servaient à les fixer.
39:06 L'enquêteur décide donc de vérifier si ces pièces présentent des défauts.
39:12 Au NIST, l'Institut américain des normes et de la technologie,
39:16 Tim Feike, ingénieur métallurgiste,
39:18 a eu la chance d'examiner quelques-uns des fragments de la coque en 1998.
39:22 Ce que je voudrais savoir, c'est si les plaques d'acier du Titanic
39:29 avaient des défauts de fabrication, ou si elles étaient en mauvais état.
39:32 On a fait des tests de charge dans une eau glacée,
39:36 avec l'acier provenant du Titanic.
39:41 Tim Feike a soumis les échantillons à des tests mécaniques
39:44 et à une analyse chimique poussée,
39:46 examinant également leurs surfaces avec un microscope électronique.
39:49 Or, la qualité de l'acier s'est avérée conforme aux normes de l'époque
39:54 et les plaques n'étaient pas particulièrement cassantes,
39:56 même à basse température.
39:58 En conséquence, si certains matériaux présentaient un défaut,
40:01 c'est ailleurs qu'il faut chercher.
40:03 Les plaques de la coque étaient toutes raccordées les unes aux autres
40:07 par des joints étanches.
40:09 Et ces joints étaient renforcés par 3 millions de rivets
40:12 d'un diamètre de 2,5 cm.
40:14 Certains avaient été fixés par une machine, et d'autres à la main.
40:19 Tim Feike explique que sur la plus grande partie de la coque,
40:25 les ouvriers ont utilisé une grosse rifteuse
40:27 pour planter des rivets en acier.
40:29 Cependant, cette énorme machine ne pouvait accéder à l'avant du Titanic.
40:35 Cette section de la coque a donc dû être riftée à la main.
40:39 Les ouvriers ont alors utilisé des rivets en fer forgé
40:41 plutôt qu'en acier, car ils étaient plus faciles à fixer manuellement.
40:45 Mais le fer forgé est moins solide que l'acier,
40:48 un problème dont les constructeurs avaient conscience.
40:50 Il a donc été décidé de mélanger au fer fondu
40:53 ce qu'on appelle des scories.
40:55 Celles-ci forment de minuscules particules
40:58 semblables à du verre, qui renforcent le métal.
41:01 On obtient alors ce qu'on appelle du fer pudelé.
41:04 Cependant, les proportions du mélange sont critiques.
41:07 Un trop fort pourcentage de scories peut affaiblir le métal.
41:11 Un autre chercheur du NIST,
41:15 la professeure Jennifer Hooper-McCarty,
41:17 a étudié des rivets récupérés sur une des sections de la coque.
41:20 Or, ces pièces présentent des défaillances.
41:23 Normalement, les scories renforcent le matériau.
41:30 Mais dans le cas des rivets du Titanic,
41:32 elles étaient trop grosses par endroit.
41:34 Et il est possible que ça ait affaibli le matériau.
41:36 C'est possible que ça ait affaibli ces pièces.
41:38 Dans ces zones, de grosses scories ont pu provoquer
41:42 une défaillance des rivets, et donc le naufrage du Titanic.
41:45 C'est possible.
41:47 Reste à prouver cette théorie.
41:49 Les rivets en fer pudelé sont peut-être la cause de toute la catastrophe.
41:54 S'ils ont cédé sous le choc,
41:56 l'eau a dû s'engouffrer dans le bateau à l'endroit des joints.
41:59 Ce qui expliquerait comment un impact oblique
42:01 a pu provoquer le naufrage du Titanic.
42:05 Les pénoyers décident de pratiquer une expérience inédite
42:08 pour vérifier si des rivets de mauvaise qualité
42:10 ont pu se traduire par une défaillance de la coque du navire.
42:13 L'enquêteur charge une fonderie anglaise
42:17 de fabriquer une réplique d'une petite section de la coque
42:20 en suivant les plans originaux.
42:22 Les ouvriers métallurgistes chauffent les rivets à 600 degrés
42:28 avant de les fixer à travers deux plaques d'acier
42:30 de 2,5 cm d'épaisseur
42:32 en créant un assemblage à recouvrement.
42:34 Tandis que les rivets refroidissent,
42:36 les plaques sont pressées l'une contre l'autre,
42:38 ce qui constitue le joint étanche essentiel
42:40 à la navigabilité du Titanic.
42:42 La réplique fabriquée en Angleterre
42:47 se trouve désormais dans le laboratoire de Tim Feky aux Etats-Unis.
42:50 Elle est placée dans une sorte d'énorme étoffe,
42:53 une machine conçue pour pratiquer des tests de charge.
43:01 L'idée est de reproduire la pression exercée sur la coque du Titanic
43:05 au moment de la collision avec l'iceberg
43:07 pour déterminer si les rivets sont bien la clé de la catastrophe.
43:11 C'est la première fois qu'on fait ce genre de test
43:14 avec une réplique de la coque.
43:16 Cette expérience permettra-t-elle enfin de déterminer
43:20 pourquoi le Titanic a coulé,
43:22 mettant ainsi un terme à près d'un siècle de conjecture ?
43:29 Ce test devrait s'avérer déterminant pour l'enquête.
43:32 Cette machine va permettre de reproduire la force de l'impact
43:41 sur la réplique d'une section de la coque.
43:43 C'est parti.
43:45 Ça commence à plier.
43:47 Le scénario que les deux hommes cherchent à vérifier est le suivant.
43:52 Lorsque le Titanic a percuté l'iceberg,
43:54 une défaillance des rivets de la coque
43:56 aurait provoqué une rupture des joints
43:58 et donc de nombreuses voies d'eau.
44:00 En fonction de la vitesse de la collision,
44:03 du poids du navire et de celui du bloc de glace,
44:06 Tim Fecke a calculé que chaque rivet a dû subir une pression
44:10 de plus de 980 kg par cm².
44:13 On va voir si les rivets tiennent.
44:15 Si les rivets de la réplique cèdent en dessous de 980 kg par cm²,
44:20 le capitaine Penoyer saura que leur défaillance
44:23 a probablement provoqué le naufrage.
44:25 Sinon, l'enquêteur ne devra repartir de zéro.
44:28 À 280 kg par cm², la plaque d'acier commence à se déformer.
44:40 La déformation devient visible à 350 kg par cm².
44:46 On voit que ça plie au niveau du rivet.
44:51 À 420 kg par cm², le rivet reste intact.
44:55 Les plaques se séparent. Le rivet se déforme.
44:58 490 kg par cm².
45:01 Le rivet va-t-il céder avant ou après 980 kg par cm² ?
45:05 Tout dépend de qui ne pourra plus absorber d'énergie en premier.
45:10 560 kg par cm².
45:13 630 kg par cm².
45:18 640 kg par cm².
45:21 640 kg par cm².
45:25 640 kg par cm².
45:29 Ah, ça a lâché.
45:32 Ouais, impressionnant.
45:34 Le rivet a cédé aux environs de 700 kg par cm².
45:38 L'expérience est concluante.
45:45 Pour s'assurer que ce sont bien les rivets qui ont provoqué une défaillance de la coque,
45:49 Brian Penoyer retourne voir Jennifer Hooper-McCarty
45:52 afin de comparer les répliques aux pièces récupérées sur l'épave.
45:56 Là, on peut voir un dérivet du test.
46:02 Le microscope nous montre sa surface, là où il a cédé.
46:06 Lorsque le chercheur examine les rivets du test au microscope électronique,
46:11 les scories apparaissent sous la forme de taches sombres au milieu du fer.
46:15 C'est dans ces zones que les premières défaillances se sont produites.
46:18 À partir de là, de minuscules fissures se sont étendues
46:22 jusqu'à ce que la pièce cède complètement.
46:25 Or, les véritables rivets du Titanic présentent le même type de défaillance.
46:30 Maintenant, si on prend les vrais rivets du Titanic,
46:35 et cette image ici, on voit la même chose, une surface de fracture.
46:39 Les scories ont créé un trou avec des fissures,
46:42 et ça s'étend progressivement jusqu'à ce que le rivet entier cède.
46:46 Les deux échantillons ne présentent qu'une seule différence.
46:51 Les rivets du Titanic étaient d'encore plus mauvaise qualité.
46:55 Les particules étaient plus grosses,
46:57 elles ont créé de plus gros trous et de plus grosses fissures,
47:00 et les rivets ont cédé plus vite.
47:06 Donc, c'est un résultat concluant.
47:09 Tout à fait.
47:11 En simulant l'instant où l'énorme navire a percuté l'iceberg,
47:16 nous pouvons désormais reconstituer le naufrage
47:19 et révéler l'enchaînement d'événements critiques qui s'est produit
47:22 juste avant la catastrophe, lors de la Minute de Vérité.
47:26 14 avril 1912.
47:31 Une heure et dix minutes avant la catastrophe.
47:35 Le Titanic fait route vers l'ouest à 21 nœuds et demi.
47:38 C'est une nuit sans lune et il fait froid.
47:41 Dans le Nid de Pye, les vigies sont gênées par l'obscurité
47:45 et l'air glacé qui leur fouette les yeux.
47:48 H - 45 minutes.
47:52 John Phillips, l'opérateur radio, reçoit un avis de glace d'un bateau voisin,
47:56 le SS Californian.
47:58 Le message ne respectant pas les règles de communication,
48:01 il n'est pas transmis à la passerelle.
48:05 H - 30 secondes.
48:07 Un énorme iceberg surgit de l'obscurité.
48:10 Au moment de l'impact, les rivets maintenant la coque
48:25 subissent une pression d'au moins 980 kg par cm².
48:29 Or, ces pièces en fer pudelé sont affaiblies
48:33 et un fort pourcentage de scories.
48:35 Les rivets cèdent.
48:37 L'eau s'engouffre à travers les joints, inondant 5 compartiments,
48:40 un de plus que ce que le navire peut supporter.
48:43 John Phillips échoue à contacter le SS Californian
48:47 car son opérateur radio est parti se coucher.
48:50 Le navire n'est alors qu'à une quinzaine de kilomètres du Titanic
48:53 mais il ne se portera pas à son secours.
48:56 2h30 après avoir percuté l'iceberg,
49:00 le plus grand navire jamais construit s'abîme dans les flots.
49:03 Plus de 1500 hommes, femmes et enfants périssent dans le naufrage.
49:08 D'importantes leçons ont été tirées de cette tragédie.
49:12 Le gouvernement américain a créé la patrouille internationale des glaces
49:16 chargée de localiser les icebergs.
49:19 Et des deux côtés de l'Atlantique, la loi a été modifiée
49:22 pour faire en sorte que tous les navires commerciaux
49:25 emportent suffisamment de canots de sauvetage.
49:27 Mais le drame n'en reste pas moins vivant dans notre mémoire collective.
49:31 Le Titanic est entré dans l'histoire pour de nombreuses raisons.
49:34 Un navire flambe en oeuf, une époque fascinante,
49:38 un accident qui aura pu être évité et surtout, une fin tragique.
49:42 Ce drame montre que malgré toute sa science,
49:46 l'homme ne doit jamais sous-estimer la nature
49:49 au risque de payer un lourd tribut en vies humaines.
49:55 C'est impossible de se plonger dans les archives du naufrage du Titanic
49:59 sans être ému par cette tragédie humaine.
50:02 C'est vraiment un incroyable gâchis.
50:06 [Musique]

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