Emmanuel Macron, dans son discours du 28 septembre à Ajaccio, a été le premier président de la République à prononcer le mot « autonomie ». C’est une nouvelle étape dans un long processus historique qui pourrait aboutir à une réforme constitutionnelle.
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00:00 Il y a un mot dans la phrase qui suit qui n'avait jamais été prononcé par un président de la République en parlant de la Corse.
00:05 "Ayons l'audace de bâtir une autonomie à la Corse."
00:10 "Cette autonomie..."
00:11 "Une autonomie..."
00:12 "Autonomie..."
00:12 "Une autonomie pour la Corse."
00:14 Pour comprendre pourquoi ce mot est important, il faut reprendre l'histoire du lieu.
00:18 Installez-vous, c'est parti pour une véritable série qui remonte le fil des siècles.
00:22 Épisode 1, la France annexe la Corse.
00:26 Au cours de son histoire, l'île est passée entre les mains de différentes puissances.
00:30 En 1755, les Corses, menés par sept hommes, Pascal, Paoli, se révoltent
00:35 et installent les structures d'un État, en créant notamment une constitution.
00:39 Mais 14 ans plus tard, en 1769, la France prend le contrôle de l'île.
00:44 Pendant deux siècles, les aspirations nationalistes corses,
00:47 c'est-à-dire leur volonté d'obtenir une plus grande indépendance vis-à-vis de la France,
00:50 existent mais demeurent limitées.
00:52 Mais en 1960, la France installe, en Corse, de nombreuses personnes qui habitaient en Algérie,
00:58 devenues indépendantes.
00:59 "Dans cette campagne admirable, 80 logements s'élèveront pour abriter les vieux
01:04 qui ont tout perdu en Algérie, même l'espoir d'y retourner."
01:08 Les Corses se sentent de plus en plus lésés, car ils estiment leurs territoires sous-développés
01:12 et exploités par d'autres, et leur patrimoine culturel pas assez respecté.
01:16 Tout va se précipiter dans les années 1970.
01:20 Épisode 2, la lutte armée pour l'indépendance.
01:23 Le principal mouvement, le Front de Libération Nationale de la Corse, FLNC, est créé en 1976.
01:29 Il milite pour que la Corse devienne un pays à part entière.
01:32 Pour les autorités, le FLNC serait responsable d'une quarantaine d'homicides
01:37 et de plus de 10 000 attentats entre 1976 et 2014.
01:41 Ces attaques visent principalement des banques, des bâtiments administratifs
01:45 et des résidences secondaires détenues par des non-Corses.
01:47 "Bonjour à tous, un attentat sans précédent a été commis hier soir en Corse."
01:51 En 1998, un somment met à teint lorsque le préfet de Corse, Claude Hérignac,
01:56 est assassiné dans une opération commando par l'indépendantiste Ivan Kolona.
02:00 Épisode 3, la lutte devient démocratique.
02:03 En 2014, le FLNC annonce déposer les armes.
02:07 À partir de l'année suivante, une coalition nationaliste dirigée par Gilles Simeoni
02:11 remporte plusieurs élections, notamment les territoriales les plus importantes de l'île.
02:16 Petite pause pour comprendre.
02:17 La coalition nationaliste est composée de deux courants politiques.
02:21 Les indépendantistes, qui veulent que la Corse devienne indépendante à moyen terme,
02:25 et les autonomistes, qui demandent plus de liberté politique
02:28 pour prendre des décisions adaptées à la Corse,
02:30 mais toujours au sein de la République française.
02:32 En gros, les nationalistes estiment que les Corses sont plus compétents que Paris
02:36 pour décider du sort de leur île.
02:38 Épisode 4, l'heure de l'autonomie.
02:41 En mars 2022, Ivan Kolona, devenu un symbole,
02:44 est assassiné en prison sur le continent.
02:47 Des émeutes ont lieu sur l'île.
02:49 En signe d'apaisement, le gouvernement ouvre des négociations
02:52 pour doter la Corse d'un nouveau statut, qui serait le cinquième depuis 1975.
02:56 Les nationalistes demandent
02:58 à ce que le peuple corse soit reconnu par le droit français,
03:01 que la langue corse devienne langue officielle au même titre que le français,
03:04 que les non-corses ne puissent devenir propriétaires sur l'île
03:07 sans y avoir habité au moins 5 ans,
03:09 et que la constitution française reconnaisse l'autonomie de la Corse.
03:12 Dans ce discours, Emmanuel Macron a ouvert la porte à l'autonomie.
03:15 L'inconnu pour l'instant, c'est ce qu'il entend par là,
03:18 car tout le monde n'est pas d'accord, même en Corse.
03:21 Les nationalistes aimeraient pouvoir décider de lois spécifiquement corses,
03:24 lever des impôts pour les financer,
03:26 et, au final, ne laisser au pouvoir de Paris presque que le domaine militaire.
03:30 À l'inverse, d'autres élus sont en faveur d'une autonomie moindre.
03:33 La Corse aurait simplement plus de liberté qu'aujourd'hui pour gérer son territoire.
03:37 Elle pourrait aussi adapter les lois nationales aux spécificités de l'île
03:40 dans certains domaines, comme l'écologie ou le logement par exemple.
03:43 Emmanuel Macron a demandé aux élus corses de se mettre d'accord sur un texte sous 6 mois,
03:47 qui ouvrirait la voie à une réforme constitutionnelle.
03:50 Elle devrait ensuite être validée par l'Assemblée nationale,
03:53 le Sénat, puis les deux réunis, voire par un référendum en Corse.
03:57 Mais ça, ça sera l'objet du prochain épisode.
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