L'historien Vincent Lemire et Hubert Védrine, ancien ministre des Affaires étrangères, reviennent sur le conflit entre le Hamas et Israël, une semaine après l'attaque terroriste. Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-8h20/l-invite-de-8h20-du-week-end-du-dimanche-15-octobre-2023-9686279
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00:00 Guerre au sommaire du grand entretien ce dimanche matin, opération terrestre de l'armée israélienne
00:05 en suspens, situation humanitaire critique dans la bande de Gaza, toujours sous les bombes,
00:11 vous l'entendiez dans le journal.
00:12 Et deux invités ce matin qui vont se succéder à notre micro dans une dizaine de minutes,
00:17 rendez-vous avec l'ancien ministre des affaires étrangères, Hubert Védrine, il a consacré
00:21 des milliers d'heures à chercher une solution pour les deux peuples.
00:24 Posez vos questions, chers auditeurs, intervenez au 01 45 24 7000 ou sur l'application France Inter.
00:32 Mais d'abord avec Marion Lourds, nous recevons un historien.
00:35 Bonjour Vincent Lemire.
00:36 Bonjour.
00:37 Et bienvenue, vous êtes professeur à l'université Gustave Eiffel, ancien directeur du centre
00:41 de recherche français à Jérusalem.
00:43 Demain c'est une journée importante pour l'enseignant que vous êtes, pour les enseignants,
00:48 pour l'école de la république, avec des cours qui ne reprendront pas avant 10h, un
00:54 temps réservé aux enseignants, l'organisation d'une minute de silence dans tous les établissements
00:59 en hommage à Dominique Bernard, poignardé à mort par un jeune homme radicalisé à
01:05 Arras.
01:06 Je le disais, vous êtes professeur d'histoire, qu'est-ce qui doit être transmis demain
01:10 et qu'est-ce que vous attendez de ce moment solennel ?
01:13 Demain matin doivent être transmis, je pense, l'émotion et la dignité.
01:22 C'est-à-dire aider les élèves et la communauté enseignante et la communauté nationale en
01:27 fait, parce que l'école c'est le socle de la communauté nationale.
01:30 On doit aider ces collectifs à la fois à pleurer et à comprendre.
01:41 C'est-à-dire qu'on doit aider les consciences à tenir bon sur ces deux piliers que sont
01:48 notre commune humanité, notre capacité à pleurer, notre capacité à être en deuil
01:53 et notre capacité aussi à faire récit, à élucider ce qui nous arrive.
01:58 Et tout ce qui nous arrive depuis sept jours doit finir par assommer, je pense, les gens
02:04 qui nous écoutent.
02:05 On peut faire récit ?
02:06 On doit faire récit.
02:09 Je suis professeur d'histoire, je suis agrégé d'histoire.
02:12 J'ai passé l'agrégation en 1998, il y a 25 ans.
02:17 J'ai passé ces quatre dernières années à Jérusalem, j'étais à Gaza en juin.
02:20 Notre métier précisément, le métier de prof d'histoire, d'historien, ça consiste
02:25 à caler les événements dans le temps pour savoir s'ils ont des précédents ou pas.
02:30 Il n'y en a pas.
02:31 Il n'y a pas de précédent au 7 octobre 2023.
02:34 Mais quand il n'y a pas de précédent, on doit chercher des points de comparaison pour
02:38 faire récit, pour recaler en fait ce qui nous arrive.
02:43 Faire récit, ça permet d'inscrire un événement, en l'occurrence un attentat.
02:48 Un attentat, c'est toujours une atteinte portée à nos consciences.
02:52 C'est une atteinte portée à la fois à notre capacité à être lucide et à la fois
02:57 à notre capacité à pleurer, à être ému.
03:00 Un historien, il est là pour ça en fait.
03:05 Il est là pour essayer de permettre aux gens de dépasser la sidération et à inscrire
03:11 cet événement dans leur conscience et dans leur récit.
03:14 Et là Vincent Lemire, ce que vous faites, c'est de faire le lien entre cet attentat
03:17 d'Haras et ce qui se passe en Israël depuis l'attaque du Hamas contre Israël il y a maintenant
03:22 huit jours.
03:23 La première ministre le fait aussi ce matin.
03:25 Elle dit que l'attaque contre Israël a pu être un élément déclencheur dans le passage
03:29 à l'acte du jeune homme fiché S à Haras.
03:31 Le ministre de l'Intérieur lui parle d'une atmosphère de djihadisme évidente.
03:35 Est-ce que vous croyez, vous, est-ce que vous ressentez cet effet de contagion ?
03:39 Si on ne trace pas une ligne de causalité simple et simpliste, oui.
03:48 Nous sommes dans un tel moment que oui, des esprits peuvent déraper.
03:56 Mais on le sait, on l'a déjà vu.
03:57 Voilà, je ne voudrais juste pas… Un historien, ce n'est pas quelqu'un qui trace des flèches
04:03 bien droites avec une cause et des effets.
04:05 Donc, je ne voudrais pas qu'on tombe là-dedans.
04:07 C'est quoi le lien ?
04:09 Mais le lien, encore une fois, c'est que ce qui arrive au Proche-Orient et ce qui arrive
04:15 en Israël-Palestine, ça touche toujours très très fort, en particulier la communauté
04:19 nationale française.
04:20 Je le répète toujours, mais la communauté juive française, c'est 500 000 citoyens
04:25 français.
04:26 C'est la plus importante communauté après celle des États-Unis.
04:28 Je veux dire, on n'est pas dans la même situation que d'autres pays d'Europe.
04:32 C'est aussi une communauté d'origine maghrébine qui a des solidarités particulières avec
04:37 la Palestine.
04:38 Ce n'est pas pour être indulgent.
04:39 C'est juste pour expliquer qu'effectivement, en France, on a ce souci-là.
04:44 Et puis, le conflit israélo-palestinien, c'est un conflit qui a été d'une certaine
04:47 manière engendré, en tout cas paramétré par la communauté internationale.
04:52 1917, le vote de l'ONU de 1947, ça aussi, ça permet d'expliquer que forcément, ce
04:58 conflit est un conflit transnational et international.
05:00 Il n'y a pas à s'en étonner.
05:01 Et c'est normal que finalement, on en parle toujours beaucoup plus que des drames qui
05:06 se passent en Afrique.
05:07 C'est peut-être injuste, mais c'est comme ça.
05:08 Vous dites qu'on est au bord de l'abîme.
05:11 En quel sens ? L'offensive terrestre de l'armée israélienne n'a pas encore été déclenchée
05:17 dans la bande de Gaza, mais il y a malgré tout des bombardements, il y a malgré tout
05:21 des opérations militaires.
05:22 Qu'est-ce qui vous fait dire qu'on est au bord du gouffre ?
05:25 Écoutez, il y a déjà plus de 2300 morts à Gaza.
05:30 Il y a eu 1300 morts en Israël, assassinés dans des conditions effroyables, avec une
05:38 cruauté absolument invraisemblable.
05:40 Je crois qu'il faut absolument qu'on arrive à saisir ensemble tous ces événements.
05:51 Il faut qu'on arrive à parler à tout le monde.
05:53 Il faut qu'on arrive à parler à la fois à ceux qui, au départ, ne voulaient que
05:57 pleurer les victimes israéliennes, celles qui ne voulaient que expliquer.
06:02 Il faut pleurer et il faut expliquer.
06:04 Ceux qui se préparent, ce sont des crimes de guerre massifs, ce qui est déjà en cours.
06:09 Le déplacement d'1,1 million de Gazaouis vers le sud, c'est impossible.
06:14 C'est littéralement impossible.
06:15 Là, a priori, ce matin, on considère que 400 000 Gazaouis se sont déplacés vers le
06:19 sud en 36 heures.
06:20 Ça veut dire qu'il en reste 700 000.
06:22 L'Anakba de 1948, c'est-à-dire le premier exode des Palestiniens, c'est précisément
06:29 700 000 personnes.
06:30 On est dans des événements, celui de samedi 7 octobre, 1 200 morts à l'échelle d'Israël.
06:37 Je le répète toujours, c'est l'équivalent de 10 000 morts civiles en France.
06:40 Et du côté palestinien, des centaines de milliers, peut-être presque un million de
06:45 déplacés, c'est comparable à l'Anakba.
06:48 Donc, on est dans des événements à proprement parler historiques.
06:51 On est donc au bord de l'abîme.
06:53 Et donc, les consciences internationales doivent tout faire pour essayer de freiner ou d'empêcher
07:00 ce qui va arriver.
07:01 De nombreuses questions aux standards, Vincent Lemire, notamment celle de Patrick.
07:05 Bonjour.
07:06 Bonjour.
07:07 Vous nous appelez de Montpellier.
07:08 Vous avez une question pour Vincent Lemire.
07:10 Oui, j'ai une question.
07:11 Que va-t-il se passer pour les Arabes de Gaza, lorsque Gaza, dans le cadre du Grand Israël,
07:20 va devenir Israël ?
07:21 Merci pour votre question Patrick.
07:23 Vincent Lemire ?
07:24 Oui, c'est un des scénarios possibles.
07:28 C'est-à-dire qu'on entend bien en Israël, il y a une option.
07:32 C'est de profiter, il n'y a pas d'autre mot, de profiter de l'occasion pour régler
07:39 définitivement le problème de Gaza.
07:42 Définitivement, ça veut dire, si possible, les faire sortir vers où ? Vers l'Égypte.
07:46 Il faudrait qu'ils soient d'accord.
07:47 Il faudrait qu'ils soient d'accord.
07:48 Mais si vous voulez, si au bout de 15 jours, on a une situation humanitaire dramatique
07:54 dans des proportions qu'on n'a jamais vues.
07:56 Un million de personnes déplacées vers le sud.
07:58 Ensuite, j'imagine qu'on va demander aux gens du sud de se déplacer vers le nord.
08:00 D'accord ? Parce qu'il y a des gens du Hamas partout, il y a des otages partout et
08:03 il y a des rampes de tir de roquettes partout.
08:05 Donc, à ce moment-là, peut-être que le plan, c'est d'obliger l'Égypte à ouvrir
08:11 un corridor humanitaire qui ne serait pas seulement un corridor humanitaire, qui serait
08:15 en fait un couloir de réfugiés et l'Égypte, qui était le seul pays de la région pour
08:18 l'instant à ne pas avoir de réfugiés, se retrouverait avec un million cinq, deux millions
08:24 de réfugiés Gazaoui.
08:25 Gaza serait rayé de la carte, à la fois sur le plan matériel et sur le plan humain.
08:30 C'est ça, le plan.
08:33 C'est ça qu'il faut empêcher, évidemment.
08:35 Quand Pékin dit qu'Israël agit au-delà du domaine de l'autodéfense, donc il y a
08:41 maintenant la Chine qui s'en mêle, vous parliez d'un conflit vraiment d'échelle
08:44 internationale, on sait qu'il y a un porte-avions américain qui est en Méditerranée pour
08:48 essayer d'éviter l'élargissement du conflit.
08:50 C'est vraiment le risque que le conflit s'élargisse aujourd'hui ? Vous le voyez
08:53 comment, vous l'historien ?
08:54 Non mais bien sûr, le Hezbollah a déjà menacé, s'il y avait opération terrestre,
08:57 nous entrerons en guerre.
08:59 Donc il y a un risque de front libanais ?
09:00 Oui, sur le front nord, l'Iran se tient prête.
09:04 Ce qu'il faut c'est, en tant qu'allié et en tant qu'ami d'Israël, il faut aider
09:11 Israël à ne pas céder à ses pires instincts et à ne pas tomber dans des crimes de guerre.
09:17 Pourquoi ? Parce que je le dis, l'opinion publique mondiale, pour l'instant, elle
09:21 est encore traumatisée par ce qui est arrivé samedi 7 octobre, mais l'antisémitisme
09:25 est là, il est là chez les individus, il est là dans des pays.
09:29 Et donc, il faut aussi protéger Israël contre ces pires instincts.
09:33 Mais comment on l'aide alors ? On lui met la pression ?
09:35 Oui, en amie.
09:36 On lui dit "attention, ne va pas trop loin, parce que ça va créer une situation intenable,
09:44 y compris pour l'avenir d'Israël, et je n'en parle même pas évidemment pour l'avenir
09:47 des Palestiniens.
09:48 C'est ça qu'on peut attendre du sommet européen en visioconférence mardi ? C'est
09:51 une pression amicale sur l'état d'Israël pour essayer de...
09:55 Du courage, parce que c'est extrêmement difficile de tenir un discours de la raison
10:02 dans l'état dans lequel on est.
10:03 C'est beaucoup plus facile de rester seulement dans le régime de l'émotion et d'envoyer
10:07 des munitions à Israël et de dire "vous avez le droit de vous défendre, et allez-y,
10:10 etc."
10:11 C'est beaucoup plus facile.
10:12 Ça parle, j'allais dire, ça parle au ventre.
10:14 Il faut avoir du courage et il faut aider Israël à ne pas commettre l'irréparable.
10:20 Merci infiniment, Vincent Lemire, d'avoir été l'invité du Grand Entretien ce matin.
10:25 Et de nous avoir aidé à comprendre cette situation.
10:29 Nous sommes au bord du gouffre.
10:31 Combien d'heures restent-ils aux habitants de la bande de Gaza pour fuir le nord de l'enclave
10:36 avant l'offensive terrestre de l'armée israélienne ? C'est une question qui est
10:40 encore posée avec une catastrophe humanitaire en cours.
10:45 Bonjour Hubert Védrine, ancien ministre des Affaires étrangères.
10:49 Vous avez consacré probablement des milliers d'heures à chercher une solution pour créer
10:54 un État palestinien, pour assurer la sécurité d'Israël.
10:58 Vincent Lemire en parlait il y a un instant, il parlait d'émotion.
11:02 Vous êtes plutôt considéré comme un réaliste en politique étrangère.
11:06 L'émotion que vous ressentez aujourd'hui, ce n'est pas de la colère ? De la colère
11:10 d'avoir consacré ces milliers d'heures et de voir ce qu'on en a fait ? Ce que certains
11:15 en ont fait ?
11:16 Ce n'est pas une question personnelle.
11:17 J'ai dit des milliers, c'est sans doute au minimum des centaines, mais j'ai travaillé
11:22 avec énormément pendant ces années, mais pas que moi, je suis un élément parmi des
11:25 tas d'autres en réalité.
11:27 Pendant ces années, le discours de Mitterrand à la Knesset sur l'État palestinien c'est
11:30 il y a 40 ans.
11:31 Le poste de Slauce il y a 30 ans.
11:34 Un processus de paix qui a été saboté systématiquement par des extrémistes des deux côtés, abandonné
11:40 par les gouvernements arabes qui s'en fichaient, abandonné par fatigue par les Européens,
11:45 et puis les Américains n'ont jamais rien compris depuis le début.
11:47 Donc c'est révoltant.
11:48 C'est révoltant parce que tous ces efforts, toutes ces années, c'était pour empêcher
11:53 ça, pour empêcher ces abominations.
11:56 Donc je suis révolté.
11:57 Et je pense que quand on en viendra après cette séquence épouvantable, à l'idée
12:03 qu'il faut quand même trouver des solutions, elles seront combattues avec la même efficacité
12:10 calculée, diabolique, cynique.
12:11 Donc elles vont se projeter dans la suite, après les événements.
12:14 Donc voilà ce que je ressens, mais ce n'est pas moi personnellement.
12:17 Parce qu'il y avait énormément de Palestiniens, d'Israéliens, de Juifs de France, d'Arabes,
12:21 et plein de gens qui ont travaillé à ça.
12:24 Ils ont été bloqués, sabotés.
12:26 - Comment qualifier le moment où nous sommes, Hubert Védrine ? Ce moment qui est comme
12:30 un moment suspens, les bombardements continu de l'armée israélienne sur la bande de Gaza,
12:35 mais tout le monde attend cette offensive terrestre qui a été repoussée de quelques
12:39 heures, peut-être quelques jours.
12:40 - C'est un moment de tragédie antique.
12:43 - Oui, et la fatalité, l'engrenage de la fatalité, qui tourne.
12:47 Même les plus pacifistes israéliens, même les plus clairvoyants, comme l'ancien patron
12:52 du Shin Bet, M. Ayalon, qui explique à quel point le gouvernement israélien a eu tort
12:57 de détruire tout leadership palestinien crédible.
12:59 Donc il a laissé le champ libre à Hamas, on a offert comme un plateau l'espèce de
13:05 bombe à retardement qui est Gaza ou Hamas et à l'Iran.
13:09 Même eux, même ces gens-là, ils savent bien que l'armée israélienne n'a pas d'autre
13:13 choix que d'aller détruire la branche armée de Hamas.
13:15 - Mais c'est un moment tragique, est-ce que c'est une opportunité ? Vous qui êtes diplomate,
13:20 est-ce que c'est un moment où l'on peut dialoguer, où l'on peut, par des canaux secrets, peut-être
13:25 pas officiellement, essayer de trouver malgré tout des portes de sortie ?
13:29 - Non, pas maintenant.
13:30 Le seul dialogue, on espère, c'est sur l'aide humanitaire à Rafah, près de la zone, disons
13:38 la partie de Gaza qui est à la frontière égyptienne, peut-être les corridors humanitaires,
13:44 mais la relance de l'idée, on ne peut pas laisser les choses comme ça, même d'abord
13:47 du point de vue israélien, il faut faire quelque chose, ça viendra après.
13:50 On ne peut pas le dire maintenant.
13:52 Donc maintenant s'il y a des négociations, c'est que sur l'humanitaire.
13:55 - Le ministre de l'Intérieur parle d'une atmosphère de djihadisme évidente en France
13:59 depuis samedi dernier, il y a huit jours, et l'attaque du Hamas contre Israël.
14:03 Le président appelle à l'unité.
14:05 C'est désespéré, d'après vous, il y a un risque d'importation de ce conflit chez
14:09 nous ?
14:10 - C'est comme ça depuis des décennies.
14:12 J'ajoute que M.
14:13 Darmanin était très courageux en rappelant que la Cour européenne des droits de l'homme
14:17 s'était opposée à l'expulsion du Tchétchène qui a tué le professeur.
14:21 Pas Tchétchène, le pingouchi je crois.
14:23 C'est comme ça depuis très longtemps.
14:26 C'est une des raisons, en plus de l'intérêt de l'Israël, l'intérêt des palestiniens,
14:31 laquelle les prises en français étaient assez actives sur ce point, pour montrer qu'il
14:35 y avait au moins une recherche, un processus qu'il faut réveiller.
14:37 C'est pas nouveau, hein ?
14:38 C'est pas nouveau malheureusement.
14:39 - Mais comment on évite dans ce cas que ça devienne explosif ? Est-ce qu'il faut interdire
14:43 les manifestations pro-palestiniennes comme c'est le cas aujourd'hui ?
14:45 - Moi je pense qu'il faudra interdire toutes les manifestations pendant la période la
14:48 plus sensible.
14:49 - Pro-Israël et pro-Palestine ?
14:50 - Sur le sujet.
14:51 Toutes.
14:52 Pour le moment.
14:53 - Vraiment ?
14:54 - Pendant quelques jours.
14:55 - Même quand vous regardez ce qui se passe de l'autre côté de la Manche à Londres
14:57 par exemple, où une grande manifestation a eu lieu hier et sans débordement ?
15:00 - C'est autre chose.
15:01 On gère une situation française qui est particulière.
15:04 Mais en France, vous savez, les gens prennent des positions.
15:06 Après ils s'envoient des grenades verbales, espérons, d'une tranchée à l'autre.
15:11 Alors que moi ce qui m'intéresse c'est les solutions.
15:13 - Justement.
15:14 C'est aussi sur quoi nous voulions vous entendre.
15:18 De qui peut venir la solution ?
15:20 Tout à l'heure, Gallagher Fenwick évoquait le rôle potentiel du Qatar.
15:24 On a évoqué évidemment le rôle des Etats-Unis, l'Union Européenne également.
15:30 La France peut-être.
15:31 Qui peut être un agent qui permettrait de trouver une solution à ce conflit ?
15:37 - Mais si ça fonctionnait, on ne serait pas dans la situation où on est.
15:41 Le fameux processus aurait fonctionné.
15:43 Il y aura un Etat palestinien, il serait peut-être en mauvais terme avec Israël.
15:46 Mais en fait ce serait différent.
15:48 Donc c'est pour ça que je dis, le jour venu, ça viendra d'Israéliens, à mon avis.
15:52 D'Israéliens qui diront "Bon, on a fait ce qu'il fallait à Gaza, c'était terrible,
15:57 il fallait le faire, mais on ne peut pas en rester là."
15:59 Donc moi je m'attends à ce que de grandes voix, politiques et morales ou philosophiques
16:03 en Israël disent "il faut quand même trouver une solution."
16:06 Alors il faudra que se rassemblent à nouveau les forces dont ceux que vous avez cités,
16:09 mais qui n'ont pas réussi dans le passé à empêcher le sabotage du processus de paix
16:14 qui était saboté délibérément.
16:16 Rappelez-vous l'assassinat d'Itzhak Rabin par un gifle fanatique.
16:20 Rappelez-vous les bombes dans des bus scolaires en Israël,
16:24 chaque fois qu'il y avait un processus qui redémarrait, ça recommencera.
16:28 Mais je crois qu'en dehors de tout ce qui peut être dit à l'extérieur, en Europe ou ailleurs,
16:33 ça viendra des Israéliens.
16:34 Mais il faudrait... Le point clé c'est que les Etats-Unis n'ont jamais rien compris.
16:39 Ils ont fait exactement le contraire de ce qu'ils auraient dû faire,
16:41 ils auraient dû prendre la tête, il y a 30 ou 40 ans, du processus de paix.
16:45 Au lieu de s'aligner sur la branche la plus dure, la plus extrémiste, la plus nationaliste
16:50 des Israéliens qui se servent comme prétexte.
16:52 Et malheureusement, il existe, l'existence des fanatiques palestiniennes.
16:55 Donc il faudrait aider les Américains, mais ce n'est pas les Américains actuels dans le cas où ils sont.
17:00 En plus, si Trump revient.
17:02 Donc ça viendra d'Israéliens relayés par une nouvelle coalition pour la paix, un jour.
17:08 Mais ça parait absurde de dire ça ce matin.
17:10 - Question d'Olivier... - Pas pour la curie en tout cas.
17:12 - Absurdement, puisque c'est important de se rejeter, mais... - C'est pour l'expert.
17:15 - Question d'Olivier qui nous appelle de Paris.
17:17 Bonjour Olivier, vous aviez une question pour Hubert Védrine.
17:20 - Merci de prendre ma question, bonjour M. Védrine.
17:22 Je voulais demander ce matin à Hubert Védrine si ça ne lui pose pas de problème de conscience
17:27 d'intervenir souvent à la radio et à la télé après avoir été l'un des principaux complices
17:31 du génocide rwandais des Tutsis en 1994.
17:33 - Ce n'était pas la question...
17:35 - Et clairement à France Inter, si ça ne vous pose pas de problème d'éviter ce complice
17:38 d'un génocide qui a fait près d'un million de morts.
17:40 - Olivier, vous vouliez alors d'abord demander...
17:44 - Il faut essayer la lecture des 40 livres dans le monde, y compris africains ou américains,
17:48 qui démontrent l'inverse.
17:49 Il faudrait qu'il écoute le prix Nobel de la paix, le docteur Mukwege, il s'insère
17:53 au jugement de justice, qui a conclu que c'était de la diffamation fondée sur rien.
17:58 - Mais en l'occurrence...
17:59 - Il faut qu'il se documente.
18:00 - Olivier a menti, puisque lorsqu'il a appelé au Standard, il voulait vous poser la question
18:04 suivante.
18:05 Quel moyen de pression avons-nous sur le Hamas et sur Israël pour essayer de trouver
18:12 une solution ?
18:13 - Je suis assez très malheureux qu'il soit sorti de ce registre-là, pour ce que ce n'est
18:18 pas le sujet du jour.
18:19 - Ça m'a permis de donner des conseils de lecture.
18:20 - Oui, mais alors du coup, la question qui était légitime, les moyens de pression,
18:26 est-ce que Hamas et Israël sont des entités, alors un État, une organisation terroriste,
18:32 qui peuvent être contraintes à dialoguer, à essayer de trouver une solution d'une
18:38 manière ou d'une autre ?
18:39 - Non, on ne va pas appeler un dialogue, ça ne servira à rien en plus.
18:41 Encore une fois, si ça fonctionnait...
18:42 - On ne va pas appeler un dialogue avec ses ennemis.
18:44 - Non, mais la question qu'il avait mise en avant, avant de poser une autre question
18:47 absurde, c'était une bonne question.
18:49 Mais si ça avait fonctionné, on n'en serait pas dans cette situation.
18:53 Vous voyez ?
18:54 - Et ce matin...
18:55 - On revient à l'idée de la réinvention, sans doute, je pense, à l'initiative d'Israélien,
18:59 aussi paradoxale que ça puisse paraître aujourd'hui.
19:02 - Israélien, c'est Netanyahou.
19:03 - Mais on...
19:04 Non, Netanyahou, vous voyez bien qu'il y a l'Union Nationale en Israël, tant mieux,
19:09 c'est très bien, mais ils ne veulent pas, disons, le blanchir de sa politique des dernières
19:13 années et de sa politique contre la Cour constitutionnelle.
19:16 Donc il se passera des choses en Israël, mais on ne va pas appeler un dialogue entre
19:20 Israël et le Hamas.
19:21 - Et ce matin, la première ministre...
19:22 - On peut dire à Israël qu'Israël aura besoin de reconstituer un interlocuteur palestinien
19:27 crédible, crédible, au lieu de tout faire pour le démolir.
19:30 Ça, oui, peut-être, certains le diront, mais ça, encore une fois, ça vient après.
19:34 - Donc ce matin, la...
19:35 - Mais avant la bataille urbaine de Gaza, qu'est-ce que vous voulez qu'on dise ?
19:37 - On le dit pour après.
19:39 - Ce matin, la première ministre dit qu'elle agit autant qu'elle peut pour éviter un embrasement
19:43 régional dans cette zone, très rapidement, peut-être, que peut la France ?
19:48 - La France, elle peut s'associer aux Etats-Unis, à d'autres Européens, s'ils sont patrouillards,
19:56 comme d'habitude, à l'Egypte, beaucoup l'Egypte.
19:58 C'est ces pays-là qu'elle essaie de contenir, c'est les mises en garde contre l'Ouest
20:02 de là, au Liban, bon, mais tout ça, c'est assez indirect.
20:05 Encore une fois, si les pressions extérieures fonctionnaient, on n'en serait pas là.
20:09 Si la pseudo-communauté internationale fonctionnait, on n'en serait pas là.
20:13 Donc il faut être réaliste et savoir que rien ne peut empêcher la bataille de Gaza.
20:17 Et nos échanges, à mon avis, auront du sens dans quelques jours, quand on en sera après
20:21 et qu'ils diront, bon, qu'est-ce qu'on fait maintenant ?
20:23 - En tout cas, c'était important de vous entendre sur ce sujet et qualifier ce moment
20:29 de tragique, d'inéluctable, remettra plus tard la possibilité d'une solution.
20:34 Merci infiniment, Hubert Védrine, d'avoir été l'invité de France Inter.
20:38 - Ce n'est pas la solution qui est inéluctable, ce sont les événements du prochain jour.
20:41 Mais après, il faudra essayer d'aller au-delà.
20:43 - Allez au-delà.
20:45 Merci Hubert Védrine d'avoir été l'invité d'Inter.