• il y a 2 ans
Anne Fulda reçoit Eva Ionesco pour son livre «La bague au doigt» dans #HDLivres

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Transcription
00:00 Bienvenue à l'heure des livres, Eva Ionesco.
00:02 Alors, vous êtes réalisatrice.
00:05 Ce roman que vous venez de publier est votre troisième.
00:08 Vous avez déjà écrit "Innocence, les enfants de la nuit".
00:11 Celui-là s'appelle "La bague aux doigts", un titre explicite,
00:15 et c'est paru chez Robert Laffont.
00:17 C'est un roman qui raconte en fait une histoire d'amour,
00:20 ou plutôt d'un désamour,
00:22 d'un amour-passion qui finit mal.
00:25 Alors, pourquoi avez-vous décidé d'écrire sur ce sujet
00:29 en ne cachant pas l'identité de celui qui a été votre mari,
00:32 qui est l'écrivain Simon Beratti, dont vous donnez le nom ?
00:36 Pour deux raisons différentes.
00:38 La première, c'est que j'ai écrit ce livre dans l'urgence.
00:41 Et j'ai voulu aussi prendre le lecteur par la main
00:45 pour l'emmener vers ce qui est une histoire
00:49 de transgression, en fait,
00:51 et de déni, et aussi d'emprise.
00:54 Donc ça, ça a été les trois choses qui sont à l'intérieur de ce livre.
00:58 D'abord, c'est la passion, le rapte,
01:01 et après, c'est l'enfer qui constitue la fin du livre.
01:06 Et la fin du livre, que je considère comme être, pour moi,
01:09 avoir été un non-dit dans une nomerta
01:12 et dans une injustice, parce qu'il y a eu une injustice,
01:15 donc voilà, j'ai voulu dire tout simplement la vérité.
01:21 Alors moi, ma question, c'est est-ce que la vérité, c'est un scandale ?
01:25 Parce que lui-même a écrit d'ailleurs un livre
01:28 dans lequel il évoquait votre union.
01:31 Alors, vous écrivez "un filtre puissant m'attirait vers cet homme,
01:34 "le charme annonçait un danger, le piège de Narcisse,
01:37 "mais la traversée des miroirs ne me faisait pas peur."
01:39 Donc, en fait, dès le début, ce que vous dites,
01:42 c'est que vous avez conscience du danger.
01:44 On voit bien, vous y allez,
01:45 mais vous savez très bien que ça va être dangereux.
01:48 Oui, mais je n'avais pas conscience d'un tel danger.
01:50 Le danger était...
01:51 Il y avait de la séduction et de la littérature,
01:54 et j'étais attirée, effectivement, par cet homme,
01:57 mais je n'avais pas une telle conscience du mal qu'il représentait
02:00 et du mal qu'il allait me faire, parce que le mal a été fait.
02:03 Donc, en fait, je n'avais pas conscience d'en arriver là, en fait,
02:08 que ça allait jusque là.
02:09 Oui, parce que vous le dites, il a une réputation sulfureuse,
02:14 il a pu être violent.
02:15 Sa propre mère vous dit qu'en fait, il ment,
02:18 qu'il ment de façon presque pathologique, quoi.
02:22 Mais en fait, la passion, l'attraction est plus forte.
02:26 Dans un premier temps.
02:27 Disons qu'il entretient ce personnage depuis pas mal de temps.
02:30 Moi, ce que j'ai vécu, c'était quelque chose
02:32 de beaucoup plus terrifiant que ça, en fait.
02:34 C'est vraiment une descente en enfer.
02:36 Je rappelle quand même, pour ceux qui ne le savent pas,
02:39 que ma mère est issue d'un inceste, que ma grand-mère s'est suicidée
02:42 et qu'il y a dans notre famille une histoire assez lourde
02:45 et qu'il y a eu une transgression.
02:47 Simon a transgressé et donc a appuyé là où ça a fait très mal à la fin.
02:51 Et cette transgression s'est évidemment accompagnée
02:55 de violences psychologiques qui ont été tues.
02:57 Donc, est-ce que de parler de ça ouvertement,
02:59 c'est un scandale aujourd'hui ?
03:01 C'est ça que je me pose comme question.
03:02 Je trouve que c'est pas un scandale.
03:03 Est-ce qu'on n'a pas le droit de parler de ça ?
03:05 Donc, voilà. Si, on a le droit.
03:07 Non, parce que j'ai un peu ce sentiment...
03:08 - Personne ne vous dit que vous n'avez pas le droit.
03:09 - Oui, mais j'ai le sentiment quand même
03:11 qu'il y a quand même une omerta,
03:13 qu'il y a quand même la présence d'hommes
03:15 qui ne veulent pas que les choses soient dites.
03:17 Et c'est la première fois dans ma vie que je ressens ça.
03:20 - Est-ce que peut-être que vous avez l'impression
03:21 qu'autour de lui, de sa personnalité,
03:24 dans un petit milieu littéraire,
03:25 il y a une forme de protection qui s'est faite, en fait ?
03:28 C'est ça ? - Tout à fait.
03:29 - Tout à fait ? - Plus précisément.
03:30 - Oui, tout à fait.
03:32 On va dire un espèce de clan germanopratin.
03:35 Oui, oui, il ne faut pas le dire.
03:37 - Il est comme ça. - Il est comme ça.
03:39 Mais voilà. Donc oui, il y a ça.
03:41 Donc, effectivement, ça fait que c'est encore enlisé.
03:45 Vous comprenez ce que je veux dire ?
03:46 - Oui, bien sûr.
03:47 - Alors, les excès, ça va loin.
03:50 Vous avez des points communs dans la transgression,
03:54 dans une enfance un peu agitée ?
03:57 Enfin, la vôtre plus que la sienne.
04:00 Le goût des excès, aussi.
04:02 - Les excès, moi, je ne suis pas quelqu'un d'excessif.
04:05 Je veux dire, moi, personnellement, on me connaît.
04:08 J'ai peut-être dû faire des excès dans mes années pas larges,
04:11 un petit peu,
04:12 mais sinon, je ne suis pas du tout quelqu'un d'excessif.
04:15 - Et alors, vous y allez, quand même,
04:19 et vous décrivez, en fait...
04:20 C'est une surprise que vous décrivez,
04:23 l'homme que vous décrivez au jour le jour.
04:25 C'est-à-dire que vous mettez du temps, quand même, à dessiner.
04:28 Parce que...
04:30 - J'ai essayé de ce livre... - Un rôle de personnage.
04:32 - ...que vous décrivez.
04:34 - J'ai essayé, dans ce livre, d'être au plus près de nos rapports
04:37 et au très fond de nos rapports,
04:38 et de raconter exactement toutes les parties saillantes
04:41 des choses qui m'ont violentée ou qui font sens.
04:45 Donc, effectivement, il y a de l'amour,
04:47 mais il y a aussi ces choses terribles,
04:50 d'où je reviens,
04:51 qui sont celles qui, pour moi, équivoient à des violences, à un viol,
04:55 et aussi, on dit beaucoup ce terme maintenant, "gaslighting".
04:59 Quand on perd complètement les gens, quand on veut complètement les perdre.
05:02 Alors, est-ce que le mot "pervers", on peut en parler ?
05:05 Est-ce qu'on peut parler de perversion, où c'est un gros mot ? Je ne sais pas.
05:08 Je pense qu'on peut parler de perversion.
05:11 Et donc, je suis tombée, effectivement, dans ce piège.
05:16 - Et alors, ça terminera par la transgression ultime.
05:20 Il est jaloux de votre fils et il séduira sa fiancée.
05:23 - Oui.
05:24 Mais il voulait séduire aussi les autres. Je veux dire, c'est...
05:27 - Et cela se terminera par un coup de couteau à pain
05:32 et l'impression que vous, vous êtes désignée comme la coupable,
05:36 alors qu'en fait, vous vous sentez plutôt victime.
05:38 - Alors, si on lit le livre,
05:40 et c'est en ça que le livre est intéressant,
05:42 c'est savoir comment toute la mécanique arrive à ça
05:45 et qui est la victime et qui est le bourreau
05:49 et quelles sont les choses qui ont amené à ça,
05:51 parce que ça, ça a été complètement tué.
05:54 Donc, je laisserai plutôt le lecteur
05:55 découvrir pourquoi les choses en sont arrivées là.
06:00 - En tout cas, merci. Merci, Eva Ionesco.
06:03 C'est-à-dire, ça s'appelle "La bague aux doigts".
06:06 Et c'est paru chez Robert Laffont. Merci beaucoup.
06:08 - Merci beaucoup. Merci.
06:10 (Générique)
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06:14 [SILENCE]

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