• il y a 8 mois
Anne Fulda reçoit Angie David pour son livre «La Renommée» dans #HDLivres

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Transcription
00:00 -Bienvenue à l'heure des livres, Angie David.
00:02 Vous êtes éditeur, éditrice, auteur.
00:06 Vous avez déjà écrit plusieurs livres,
00:07 notamment "L'échappée", sur Dominique Horry,
00:09 qui a eu le concours de la biographie.
00:11 Et là, vous venez de publier "La renommée",
00:14 un livre qui est paru chez Léocher,
00:15 un récit autobiographique et en même temps,
00:18 une réflexion qui est vraiment passionnante
00:20 sur ce que signifie et implique un changement de nom.
00:23 Alors, dans ce livre, vous révélez ainsi
00:27 que votre nom, le nom de votre père, Mottard,
00:31 vous êtes évertué à le cacher.
00:34 Et vous avez décidé, là, de le dévoiler.
00:38 Alors, pourquoi tout à coup cette mise à nu, finalement ?
00:41 -J'en ai parlé parce que j'ai pu enfin véritablement changer de nom.
00:45 Jusqu'à il y a un an et demi, je m'appelais en fait Nji Mottard,
00:49 donc du nom de mon père.
00:51 Et une récente loi, qui est parue le 1er juillet 2022,
00:55 permet de prendre le nom du parent
00:57 qui ne nous a pas été transmis à la naissance.
01:00 Donc, David étant le nom de ma mère,
01:02 j'ai pu officiellement devenir Nji David.
01:05 Par chance, j'avais déjà choisi comme pseudonyme le nom de ma mère,
01:08 parce qu'évidemment, cette loi ne permet pas de prendre n'importe quel nom,
01:11 un nom qu'on aurait inventé.
01:12 Mais voilà, j'ai pu devenir Nji David
01:14 et je ne pensais jamais raconter cette histoire,
01:16 puisque justement, j'ai passé ma vie à cacher mon ancien nom.
01:21 Mais une fois devenue vraiment Nji David,
01:23 je me suis dit que c'est intéressant de raconter,
01:25 puisque je suis allée au bout du processus,
01:27 de raconter comment et pourquoi on change de nom.
01:29 - Alors, c'était chez vous, avant tout,
01:31 une manière de renier votre père, finalement,
01:34 d'une forme d'expression d'une révolte contre votre père.
01:37 - Bien sûr.
01:38 C'est vrai que je n'ai pas beaucoup ce nom,
01:40 que je ne trouve pas très joli par ailleurs.
01:41 Peut-être que s'il avait été plus glorieux,
01:44 je me le serais mieux approprié.
01:46 Mais c'est sûr que le fait d'avoir une relation,
01:48 on va dire, inexistante,
01:50 pour ne pas rentrer dans les détails avec mon père,
01:52 puisque il m'a littéralement abandonnée,
01:54 a beaucoup joué.
01:56 C'est vrai que si j'avais beaucoup aimé mon père,
01:58 peut-être que j'aurais hésité quand même à abandonner son nom.
02:00 Je pense qu'il y a beaucoup de gens qui n'oseraient pas le faire,
02:03 parce qu'ils auraient peur de donner l'impression à leur père
02:05 qu'il leur renie.
02:07 Moi, la question ne s'est pas posée.
02:08 - Alors, ce nom, c'est "Motard".
02:11 Et vous auriez pu choisir une autre voie,
02:13 c'est-à-dire de le magnifier.
02:15 Vous citez une phrase de François Nourricier,
02:17 "La bonne façon de sauver un nom détesté
02:19 "et le sauvant d'établir à l'intérieur de soi une paix durable,
02:22 "c'est de lui donner de la gloire."
02:24 Mais c'est une option que vous avez refusée.
02:25 - Oui, parce que j'ai pensé que c'était un nom
02:27 que je ne pourrais jamais sauver,
02:29 justement par rapport à l'histoire que j'avais eue avec mon père,
02:31 et qui donc a complètement envahi l'histoire de ce nom.
02:35 Et aussi parce que c'est quand je suis devenue,
02:37 quand j'ai décidé de me faire appeler NJ David,
02:40 que j'ai eu l'idée de peut-être avoir une carrière d'écrivain.
02:44 Je pense que je n'aurais pas écrit si j'étais restée NJ Motard.
02:48 Donc finalement, c'est le changement de nom
02:49 qui m'a donné l'idée que je pourrais peut-être avoir une vie
02:52 avec un minimum de publicité.
02:54 - Il vous racontait d'ailleurs comment celui qui a été un peu votre Pygmalion,
02:58 l'éditeur Léo Scher,
02:59 vous encourage à prendre le nom de votre mère en disant
03:02 "Oui, c'est un nom, c'est bien pour la littérature,
03:05 "on ne sait pas très bien, il y a du mystère,
03:07 "on ne sait pas très bien si c'est anglo-saxon, si c'est juif..."
03:11 Et il vous encourage à prendre ce nom.
03:13 - Oui, c'est grâce à lui que je me suis fait appeler NJ David.
03:15 Je continuais à me traîner le nom de mon père
03:18 et ça me posait vraiment problème.
03:20 Et justement, je me disais, parce que je voulais être d'abord éditeur,
03:23 donc j'ai commencé comme éditrice, l'écriture est venue ensuite.
03:26 Mais il en parlait de ça avec Léo Scher.
03:28 Il me disait "Ce serait bien quand même que tu écrives un jour".
03:30 Et je lui dis "C'est pas possible, avec ce nom,
03:32 "je ne pourrais pas signer un livre de ce nom,
03:34 "je ne pourrais pas mettre en avant ce nom".
03:36 Et c'est lui qui m'a dit "Tu sais, c'est très simple,
03:38 "tu n'as qu'à te débarrasser du nom de ton père, tout simplement".
03:40 Je n'avais pas eu l'idée,
03:42 peut-être parce que justement, je le subissais tellement
03:45 que je pensais que je ne pourrais jamais m'en défaire.
03:47 Et donc, ça a tout réglé.
03:48 Je me suis dit "Oui, il a raison, je vais me faire appeler NJ David,
03:51 "personne n'en saura rien finalement, les gens,
03:53 "à part les impôts et la sécurité sociale,
03:55 "personne ne saura mon vrai nom,
03:57 "il suffit juste de me faire appeler NJ David".
03:58 Donc c'est vraiment lui qui m'a libérée de ça.
04:01 - Et alors en fait, c'est l'histoire assez classique d'une émancipation.
04:04 Et c'est une histoire, ce qui est intéressant,
04:06 c'est que vous racontez, il y a d'autres écrivains avant vous,
04:10 qui soit se sont forgés un nom, vous parlez de Lévi-Strauss,
04:13 de Claude Lévi-Strauss, là, c'est deux noms qui sont apposés.
04:16 Vous parlez aussi de Marguerite Duras,
04:18 vous parlez de Constance Debré,
04:20 qui dans son œuvre très radicale,
04:23 ne va pas cependant jusqu'à abandonner son nom Debré,
04:26 qui fait partie peut-être du marketing.
04:28 Et vous parlez surtout de Dominique Horry.
04:30 Pourquoi ? Parce qu'elle a eu un rôle important pour vous.
04:32 - Oui, donc mon premier livre est une biographie de Dominique Horry.
04:35 Et elle a toujours vécu sous pseudonyme.
04:38 Alors c'est une idée qui est venue en écrivant,
04:40 ce que c'est souvent le cas, finalement,
04:42 ce sont des choses dont on n'a pas conscience comme ça,
04:45 mais quand on écrit, les choses prennent du sens et se révèlent finalement.
04:48 Et donc cette problématique-là du nom de Dominique Horry,
04:51 du fait qu'elle ait toujours vécu sous pseudonyme,
04:53 puisque même... C'est l'auteur d'Histoire d'eau.
04:56 Quand elle signe Histoire d'eau, elle signe sous le nom de Pauline Réage.
04:59 Mais Dominique Horry était déjà un pseudonyme.
05:01 Donc en fait, elle avait toujours caché son nom.
05:04 Et je me suis rendu compte que c'était peut-être pas un hasard,
05:06 si j'ai été si fascinée que j'ai voulu écrire un livre sur cette femme,
05:10 qui était justement la femme aux multiples noms.
05:12 En tout cas, je vous conseille vraiment de lire ce livre.
05:14 Donc ça s'appelle La renommée.
05:16 C'est paru chez Léo Scher.
05:17 Merci beaucoup, Angie David.
05:19 -Merci.
05:20 ...
05:24 [SILENCE]

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