Dégâts des tempêtes Ciaran et Domingos: l'interview intégrale du ministre Christophe Béchu sur BFMTV

  • l’année dernière
Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, était l'invité de BFMTV ce dimanche soir pour parler des tempêtes Ciaran et Domingos qui ont soufflé sur la France ces derniers jours et causé d'importants dégâts.

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Transcription
00:00 Tout d'abord, est-ce que vous avez les derniers chiffres concernant le bilan de cette tempête Domingos ?
00:05 Vous l'avez mentionné dans votre reportage, on a eu une tempête qui a été heureusement beaucoup moins violente que Sierran,
00:11 mais qui a touché parfois des départements qui avaient déjà été touchés par Sierran,
00:15 compliquant donc le travail des équipes, en particulier pour aller partout rétablir l'électricité, globalement.
00:21 Si je reste sur ce premier élément, il reste environ 10% des foyers touchés par la tempête Sierran
00:26 pour lesquels il n'y a pas encore de retour à l'électricité aujourd'hui, ça va être l'histoire de ces 48 prochaines heures,
00:32 et on a environ un tiers des 150 000 foyers qui ont été privés d'électricité par Domingos,
00:38 qui à la minute où nous nous parlons n'ont toujours pas, sur le plan humain.
00:41 C'est entre 50 000 et 100 000 si je devais résumer ce soir ?
00:44 C'est exactement ça, 114 000 pour être précis sur les naufragés de Sierran, et 49 000 pour ceux de Domingos, si vous voulez des chiffres précis.
00:51 Le bilan humain est toujours trop lourd, mais le décès dramatique de cet employé d'Enedis électrocuté pendant le week-end
00:59 fait qu'on est aujourd'hui à 3 morts et 47 blessés pour Sierran, et on est à 5 blessés à la minute où on se parle,
01:05 dont 2 sapeurs-pompiers pour la tempête Domingos. Ce qui nous manque c'est évidemment le coût consolidé des dégâts,
01:10 il y a des images extrêmement impressionnantes, parfois sur des bâtiments publics, sur des flottes de bus, sur des maisons.
01:15 Les premiers chiffres pour Sierran c'est entre 750 millions et 1 milliard évoqués par les assureurs,
01:20 mais tous les dégâts ne sont pas encore totalement consolidés, et pour Domingos on aura des éléments de chiffrage à partir de demain.
01:26 Est-ce qu'on annonçait notamment une réunion peut-être à Bercy pour chiffrer précisément les dégâts,
01:30 et puis comment évidemment venir en aide aux administrés français ? Est-ce qu'on en sait plus sur une date ou la tenue d'une telle réunion ?
01:35 Il va se passer beaucoup de choses à partir de demain, d'abord au sein du ministère de l'Intérieur pour regarder tout ce que nous pouvons classer
01:41 en termes de catastrophes naturelles par rapport à ces événements, et à Bercy avec les assureurs pour être certain qu'il n'y a pas de délai
01:47 là où les cloches jouent, puisque les tempêtes relèvent normalement de la responsabilité des assureurs,
01:52 et donc on veut s'assurer qu'après un événement exceptionnel par son ampleur, il n'y aura pas de retard pour être capable d'aider ceux qui ont été en première ligne.
02:00 Je rebondis sur le mot exceptionnel. Est-ce qu'au fond, d'après ce que tous les experts disent, il ne faut pas plutôt envisager ce phénomène
02:07 comme étant maintenant récurrent, nous sommes dans l'ère des grandes tempêtes qui vont régulièrement arriver,
02:12 et donc envisager une politique publique de la récurrence et non pas de l'aspect exceptionnel ?
02:18 Vous avez tout à fait raison sur le fait que le dérèglement climatique multiplie les catastrophes auxquelles on est exposé.
02:24 C'est vrai un peu pour les tempêtes, c'est surtout l'ampleur de ces tempêtes plus que leur fréquence qui va être amené à se renforcer
02:31 si on évolue dans un monde à +3 ou +4 degrés, mais c'est surtout le retrait gonflement d'argile, et là on parle de millions de Français qui sont concernés,
02:38 c'est la montée des eaux avec des conséquences sur toute une partie du littoral, c'est 20% du littoral qui peut être impacté par cette érosion du trait de côte.
02:45 Tous ces chantiers-là, et la réforme sans doute du régime de catastrophes naturelles, c'est un sujet sur lequel le ministère de la transition écologique,
02:52 sur lequel mes équipes sont en train de travailler avec Bercy, et qui devrait déboucher au début de l'année prochaine dans le cadre du plan d'adaptation
02:58 qui est un des volets de la planification, parce qu'on voit bien que malheureusement on a des épisodes qu'on qualifiait de millénaires ou centenaires
03:05 qui reviennent de plus en plus fréquemment, et donc on ne va pas pouvoir conserver les mêmes règles pour accompagner et protéger les Français.
03:11 En attendant un changement de l'état d'esprit peut-être, il y a des mesures concrètes, il y a eu un conseil de reconstruction après le passage d'Aline à Saint-Martin-Vésubie,
03:19 est-ce qu'un tel dispositif peut être mis en place après le passage de ces trois tempêtes ?
03:23 On va encore une fois demain, dès qu'on aura consolidé tous les dégâts, regarder quel est le bon niveau.
03:28 Aline, on était sur un événement, Alex, pardon, on était sur un événement dramatique, Aline il y a quelques semaines,
03:34 j'ai annoncé en me rendant sur place à Saint-Martin-Vésubie que avant la fin de l'année je tiendrai précisément un conseil de reconstruction au début du mois de décembre,
03:41 qui sera à la fois l'occasion de faire le point exact de là où nous en sommes sur les engagements qui avaient été pris sur Aline,
03:47 et de regarder ce que sont les besoins potentiels sur Aline, un dispositif exceptionnel par rapport à ces tempêtes, on prendra des décisions encore une fois en début de semaine.
03:56 Parmi les défis, il y a celui de maintenir la capacité ou le taux d'assurance des Français,
04:01 on est un des pays dans lesquels on est le mieux protégé via ces assurances,
04:04 et dans une tribune assez récente, l'ONU évoquait parmi les six défis à relever prochainement, la possible inassurabilité du monde.
04:12 Est-ce que c'est aussi quelque chose qui doit nous entraîner, France, mais pas seulement France,
04:16 à revoir la façon dont nous vivons, dont nous construisons, dont nous envisageons la façon de nous organiser en société ?
04:22 Bien sûr, et d'ailleurs ça provoque parfois de faux débats.
04:27 Quand on pose des normes environnementales, on nous dit parfois "mais c'est pour emmerder les gens, vous allez augmenter, vous allez créer de l'inflation",
04:33 alors qu'en fait il s'agit de se prémunir contre des causes dont nous savons qu'elles se traduiront par un coût gigantesque en cas d'inaction.
04:40 Il y a donc une double course contre la montre,
04:42 une qui consiste à faire évoluer une partie de nos référentiels compte tenu de ce que la science et les experts nous disent,
04:47 et une de l'autre, parce qu'il faut garder l'humilité, mesurer que l'on est exposé de plus en plus fréquemment,
04:52 comme le disait Michael Darmand, à des épisodes très complexes, qui sont potentiellement inassurables compte tenu de leurs fréquences,
04:57 et donc on va être condamné à revoir la manière dont les catastrophes naturelles doivent être appréhendées,
05:03 dont la solidarité autour de ce qui n'est pas assurable de manière classique doit être prise en compte.
05:07 Encore une fois, c'est un des chantiers majeurs de l'adaptation.
05:10 Et pourtant, on a le sentiment quand même que souvent la société ne comprend pas,
05:13 ou une partie des Français ne comprennent pas les politiques menées,
05:17 qu'on fait la façon dont le président de la République a été interpellé récemment lorsqu'il s'est déplacé sur le site de la tempête.
05:25 Qu'est-ce que vous répondez à ces Français qui disent "vous êtes quand même dans l'inaction,
05:29 vous n'êtes pas assez rapide par rapport à l'urgence de la situation".
05:33 Je réponds que nous accélérons, mais qu'il est totalement faux de dire qu'on est dans l'inaction.
05:37 Le disque rayé de l'inaction climatique qui est porté par une certaine gauche et qui est relayé par des militants...
05:41 Ce que disent aussi les organisations internationales.
05:43 Non, ils ne disent pas ça. Ce que disent les organisations internationales,
05:46 ce qui est au cœur de toute la diplomatie en vue de la COP 28, c'est qu'il faut que les États augmentent.
05:51 Il y a 20 pays sur la planète aujourd'hui qui baissent leurs émissions.
05:54 Dans ces 20 pays, depuis plus de 10 ans, il y a la France.
05:57 Le rythme de baisse de nos émissions a doublé au cours des 5 dernières années, il a quadruplé sur le premier semestre.
06:02 Nous ne sommes pas dans le bon rythme, il faut qu'on accélère, mais qu'on dise qu'on n'agit pas,
06:05 c'est à la fois une insulte vis-à-vis des Français qui agissent et vis-à-vis des décisions qui sont prises sur le plan gouvernemental.
06:11 Si on veut générer de l'inaction climatique, continuons à expliquer qu'il ne se passe rien, qu'on ne décide de rien,
06:17 que 700 000 rénovations ce n'est pas assez, que le virage vers la voiture électrique ce n'est pas assez.
06:21 Ces discours-là, porteurs de simplisme et qui, dans beaucoup de cas, empruntent les vieux habits de l'extrême gauche
06:26 pour essayer d'aller faire de la réhabilitation, de la lutte des classes ou du greenwashing, de la haine des riches,
06:31 ils nous conduiront dans la passe écologique aussi sûrement...
06:34 - C'est une anxiété d'une jeune génération, qui est en amont des engagements idéologiques.
06:38 - Mais elle est alimentée, qu'est-ce qu'on lui propose ? Je crois beaucoup plus au fait qu'on lui propose d'agir
06:42 en montrant les sujets sur lesquels on se mobilise. Je pense important d'être capable d'insister sur les 10 milliards d'euros,
06:47 ce qui est un effort sans précédent dans le cadre de la planification écologique qui sont décidés, et qu'on sorte d'un espèce de discours
06:52 où vous avez une extrême droite qui dit que vous en faites trop, et arrêtez de perturber les modes de vie des Français,
06:57 comme ce qui les perturbait c'était les mesures qu'on prend pour les protéger plutôt que les conséquences de l'inaction,
07:02 et de l'autre, une gauche qui considère que de toute façon si vous n'êtes pas de gauche et d'extrême gauche,
07:06 vous n'êtes pas légitime sur les questions écologiques.
07:08 - Je voudrais justement qu'on parle de ces deux parties de l'échiquier politique,
07:11 notamment sur la question de l'explosion du nombre d'actes antisémites depuis le 7 octobre,
07:15 depuis les attaques du Hamas sur le sol israélien, 887 actes recensés, 257 en Ile-de-France,
07:20 et voici ce que disait Jordan Bardella, le président du Rassemblement National, il y a moins de deux heures sur BFM TV.
07:26 - On a un candidat à l'élection présidentielle, qui a fait 22% en 2002, monsieur Mélenchon,
07:33 et qui se fait le porte-voix du Hamas en France.
07:36 - La France insoumise pourrait s'appeler la France islamiste,
07:38 parce que la France islamiste épouse toutes les thèses des fondamentalistes islamistes.
07:43 Donc la France insoumise fait partie dans notre société de ces collabos,
07:47 de ces gens qui sont des collabos d'une idéologie qui s'est constituée en cinquième colonne dans notre société,
07:54 et qui veut encore une fois anéantir la République française, la nation française et notre société.
07:59 - Porte-parole du Hamas, collabos, Jordan Bardella qui estime que le Rassemblement National est un bouclier pour les vies de France.
08:06 Quelle est votre réaction ?
08:08 - D'abord ma réaction c'est que la lutte contre l'antisémitisme mériterait mieux que des formules à l'emporte-pièce.
08:14 Le silence, l'indifférence de ce qui se passe, la peur et l'effroi dans lequel vivent des dizaines de milliers,
08:20 des centaines de milliers de nos concitoyens, les actes qui sont rapportés d'un chauffeur VTC
08:25 qui débarque quelqu'un parce qu'il n'a pas le bon prénom, de quelqu'un qui refuse d'aller faire une livraison,
08:29 l'agression au couteau, bref, tout ça c'est effroyable quand on est attaché à la République,
08:34 je dirais même quand on est humaniste, on ne peut pas accepter ça.
08:38 Et cet antisémitisme il ne vient pas de nulle part et malheureusement il s'appuie sur un recto et un verso.
08:44 Jordan Bardella il est l'héritier d'une famille politique qui s'est construite sur le point de détail,
08:49 sur les blagues, sur les fours crématoires, sur la remise en cause du juif qui a tué Jésus-Christ
08:55 avec un antisémitisme d'extrême droite qui n'a pas disparu.
08:59 Mais aujourd'hui ils ont la chance d'avoir une France insoumise qui se fait, oui, le complice d'une organisation terroriste
09:07 en la décrivant comme un mouvement de résistance et en refusant d'avoir les mots qui sont à la hauteur de la situation.
09:13 Daniel Obono l'a décuté à la France insoumise.
09:15 Moi, face à cette situation, c'est un sursaut républicain et pas un concours entre Mme Le Pen et M. Mélenchon qu'il faut qu'on appelle.
09:23 Mais M. Bardella n'a pas aussi la chance d'avoir été invité par le président de la République
09:29 à passer pratiquement toute une nuit à discuter à Saint-Denis sur l'état de la France et les solutions
09:35 et être réinvité comme on vient de l'apprendre encore dans les prochains jours.
09:38 Donc l'arc républicain...
09:40 Légitimé.
09:41 M. Darmon, qu'est-ce qu'on aurait dit si le président de la République avait décidé qu'il invitait tous les chefs de parti
09:47 sauf ceux qui, bien qu'ils soient représentés au Parlement, n'avaient pas grâce à ces élus ?
09:51 Peut-être qu'on aurait eu des cohérences vis-à-vis des propos officiels qui consistaient à dire que l'ARN n'est pas dans l'arc républicain
09:56 de la part du parti Renaissance, par exemple.
09:58 Ma conviction la plus profonde, c'est qu'à partir du moment où vous avez 20, 25, 30% des gens qui votent pour un parti politique,
10:04 le meilleur moyen de faire en sorte de ramener ces électeurs vers des sentiments qui soient plus républicains,
10:09 c'est pas de les ostratiser parce que vous renforcez le sentiment qu'ils sont dans le vrai et qu'ils sont anti-système.
10:15 Parler à tout le monde, c'est une nécessité si vous êtes démocrate.
10:18 Personne n'est assigné à une résidence politique.
10:20 En revanche, ceux qui assument une fonction politique, ils ont une responsabilité dans les mots qu'ils emploient,
10:25 dans les symboles qu'ils utilisent, dans ce qu'ils tweet, dans ce qu'ils disent, dans la façon dont ils se comportent.
10:31 Alors justement, Mickaël faisait référence à l'invitation à cette nuit à Saint-Denis.
10:36 Une deuxième invitation a été lancée ce soir dans une lettre adressée au parti politique par Emmanuel Macron
10:41 avec des choses assez intéressantes, notamment concernant le seuil d'abaissement pour les référendums,
10:46 le signe de vie populaire, et rajouter des questions de société, notamment l'immigration.
10:50 Marine Tondelier, la patronne d'Europe Écologie Les Verts, dit "il n'y a rien, notamment sur les questions d'urgence sociale et des questions environnementales".
10:59 Déconnexion, #déconnexion. Quelle est votre réponse ?
11:04 Ça n'est absolument pas à la hauteur.
11:06 Marine Tondelier, sur la base d'une lettre envoyée...
11:08 Elle défend son choix de cible.
11:10 Le président de la République invite dans un format qui est inédit, tous les patrons de parti à évoquer tous les sujets qu'il souhaite,
11:15 elle reçoit l'invitation et elle explique qu'il n'y a pas ce qu'il faut dans la lettre.
11:18 C'est à la fois un mépris profond pour nos institutions, pour un format qui lui permet d'avoir voix au chapitre,
11:24 et dans un contexte où, si on veut jouer à ça, si vraiment les écologistes veulent parler d'écologie,
11:28 pourquoi est-ce qu'ils invitent M. Médine pour leurs universités d'été, et pourquoi ils font leur rentrée sur le thème de la baillage ?
11:33 À un moment, que le président de la République réunisse tous les chefs de parti pour dire
11:39 "Élargissons les sujets qui pourraient être traités par référendum, et je vous invite à ce qu'on en discute",
11:43 précisément, qu'elle utilise ce format pour en discuter, mais en soi, je ne comprends pas des attitudes qui, à la fin,
11:51 finissent aussi par abaisser notre vivre ensemble collectif, et quand on voit ce qui se passe dans le monde,
11:55 on mesure qu'on doit plus faire nation, qu'on débatte sur le fond, c'est une chose,
11:59 mais qu'on s'écharpe sur la forme, c'est pas au niveau.
12:01 Deuxième réunion de Sainte-Denis prévue donc le 17 novembre. Merci d'avoir été là ce soir pour parler sur le fond.

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