7 MINUTES POUR COMPRENDRE - Tempêtes à répétition: sommes-nous parés ?

  • l’année dernière
La France a été frappé par deux tempêtes consécutives ces derniers jours: Ciaràn et Domingos. Les dégâts sont conséquents et de nombreux foyers restent encore sans électricité ce lundi. Agriculture, urbanisme, assurances... sommes-nous prêts à faire face aux tempêtes à répétition ?

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Transcription
00:00 -Agriculture, urbanisme, assurance, le 7 minutes pour comprendre,
00:03 nous sommes parés contre les tempêtes à répétition.
00:07 -On va enchaîner.
00:10 Avec nous pour parler des tempêtes,
00:12 Maëlle Decalan, présidente du Conseil départemental du Finistère.
00:15 Merci d'être avec nous.
00:17 Marc continue de nous accompagner.
00:19 Et puis Cédric Fech, le reporter de Première Édition,
00:21 ce matin, il fait l'état des lieux auprès des agriculteurs,
00:23 notamment des maraîchers,
00:24 sinistrés par la tempête Karane de la semaine dernière,
00:27 aussi bien en Bretagne qu'en Normandie.
00:29 Alors Cédric, et ce matin près de Bailleux,
00:31 dans le Calvados, avec des maraîchers,
00:33 c'est simple, le vent a emporté les serres,
00:35 en fait, mercredi soir.
00:37 -Oui, vous voyez l'état de cette serre, par exemple.
00:42 Alors normalement, elle est deux fois plus large
00:43 parce qu'en fait, elle est à terre,
00:45 elle a été pliée en deux.
00:46 Alors normalement, il faudrait que les assureurs passent.
00:48 Ce n'est pas encore le cas ici.
00:51 Après, une fois que les assureurs seront passés,
00:53 les maraîchers pourront commander les serres.
00:55 Encore faut-il qu'après, les fabricants de serres
00:56 soient disponibles et des serres à vendre,
00:58 parce qu'il y a des centaines comme ça de serres
01:00 qui ont été abattues.
01:02 Et tout ça, ça prend du temps.
01:03 Et vous, vous n'avez pas de temps.
01:04 Vous devriez être en train de faire quoi,
01:05 normalement, s'il n'y avait pas eu la tempête et les dégâts ?
01:07 -Normalement, la serre devrait être plantée,
01:09 semée pour le printemps, pour proposer à nos clients
01:11 les pommes de terre, les carottes, les navets,
01:14 les fenouilles et tous les légumes nouveaux du printemps.
01:17 Et là, on n'aura rien, on ne peut rien faire.
01:19 Le temps que les assurances passent et que ce soit remonté,
01:22 ce sera trop tard.
01:23 -Ce sera trop tard, pourquoi ?
01:24 Parce que c'est maintenant qu'il faut semer
01:25 si vous voulez récolter au printemps.
01:27 -Le temps que les légumes soient bons pour la vente
01:29 et pour être consommés, il faut du temps,
01:32 surtout en hiver.
01:33 Et donc là, on n'aura plus le temps, c'est sûr,
01:35 ce sera trop tard.
01:36 -Caesar, cette serre, elle était toute neuve.
01:38 Il l'a commandée l'an dernier, il avait eu trois mois de délai.
01:41 Vous imaginez, cette année, il y aura au moins
01:43 trois mois de délai aussi, c'est beaucoup trop long pour...
01:45 -Voilà, il doit attendre l'arrivée de l'assureur
01:49 avant de commencer à envisager la reconstruction de sa serre.
01:53 Gilles Labouret, vous êtes courtier en assurance,
01:54 vous avez deux cabinets à Rouen et à Dunkerque.
01:56 Je crois que vous n'avez pas pu voir, pour l'instant,
01:59 tous les sinistrés, n'est-ce pas ?
02:01 -Non, effectivement, on se retrouve actuellement
02:03 donc au niveau de la déclaration.
02:07 Donc il est vrai qu'on est sur un phénomène de masse
02:11 et donc automatiquement, avec les moyens que l'on a,
02:14 on est effectivement en train de prendre du retard
02:19 sur les expertises et tous les moyens sont mis en œuvre
02:21 pour que les délais soient les plus courts possibles.
02:23 -Mais certains vont attendre jusqu'à quand ?
02:26 -Alors le problème que l'on a, si vous voulez,
02:28 c'est qu'au jour d'aujourd'hui,
02:30 on subit en fait une répétition des tempêtes,
02:36 ce qui fait qu'au jour d'aujourd'hui,
02:38 on est incapable d'évaluer les coûts d'une première tempête,
02:43 la deuxième arrive dans la foulée.
02:46 Au jour d'aujourd'hui, on a aussi des phénomènes météo
02:48 qui font qu'on aggrave encore les sinistres
02:53 et donc au jour d'aujourd'hui,
02:56 on est toujours au point de récupérer petit à petit
02:59 des éléments supplémentaires
03:00 et on n'arrive pas à définir les sinistres en lui-même.
03:03 -Mais le temps que les assureurs arrivent,
03:05 c'est du temps perdu pour les agriculteurs sinistrés.
03:08 Est-ce qu'ils doivent absolument attendre l'expert
03:11 ou est-ce qu'ils peuvent commencer,
03:12 par exemple dans le cas du maraîcher qui était avec nous,
03:14 est-ce qu'il peut commencer à ranger sa serre,
03:17 à défaire un petit peu tout ce qui a été abîmé
03:20 pour commencer à reconstruire ?
03:23 -Oui, alors au jour d'aujourd'hui,
03:25 en fait, ce qui est compliqué pour l'assureur,
03:28 c'est la disparition de la preuve,
03:30 la disparition de la constatation du dégât.
03:34 Donc là, le conseil que je peux donner à nos assureurs,
03:38 c'est déjà de prendre des photos,
03:40 de garder les éléments qui ont été impactés
03:43 et effectivement, à un moment donné,
03:45 on est quand même plus compréhensif
03:47 quand il s'agit de remettre en activité des entreprises.
03:55 Voilà, mais effectivement, à un moment donné,
03:58 si on remet tout en état sans que l'expertise soit faite,
04:02 il y a un risque, si vous voulez,
04:03 de définir la somme à indemniser.
04:06 -Maël De Calence, qu'on voit parmi les leçons quand même
04:08 de ces catastrophes et de ces tempêtes à répétition,
04:11 c'est qu'on a beaucoup progressé dans l'anticipation,
04:13 la prévision et ça a donné finalement
04:16 et heureusement très peu de victimes.
04:18 Est-ce qu'il ne faudrait pas faire mieux
04:20 dans la réponse à la catastrophe aujourd'hui ?
04:24 -Je pense qu'on a aussi progressé dans la réponse à la crise
04:27 s'agissant du service public qui passe.
04:30 En quatre jours, si vous voulez, par exemple,
04:31 on avait 3 500 km de route bloquées dans le funictaire.
04:35 En quatre jours, avec nos moyens,
04:36 avec des colonnes de renforts venues d'extérieur,
04:38 on a réussi à débloquer tout le réseau routier
04:41 de sorte qu'on circule dans le funictaire librement
04:44 alors même qu'on a eu un cataclysme qui s'est abattu sur nous.
04:47 En revanche, au plan administratif, au plan bureaucratique,
04:50 il y a peut-être encore des progrès à faire.
04:52 Ce qui a été dit sur votre antenne de l'état des serfs,
04:55 de l'état des pépiniéristes,
04:56 en règle générale, l'immobilier agricole
04:58 qui a souffert de dégâts absolument considérables
05:01 et tout à fait justes.
05:02 J'ajoute, s'agissant des particuliers,
05:04 je pense qu'il y a beaucoup de gens qui vous écoutent
05:06 qui n'ont pas vu leur maison s'effondrer,
05:08 mais un bout de leur toit s'envoler.
05:10 Dans le funictaire, on dit que les couvreurs ont du travail
05:12 pour un an, donc il est sûr qu'il y a peut-être
05:14 des mécanismes un peu opérationnels
05:16 consistant à mobiliser des ressources de l'extérieur
05:19 pour se concentrer sur un département en crise
05:21 qui pourrait être enclenché.
05:22 En tout cas, c'est ce que nous, on va chercher à établir
05:24 dans le funictaire, c'est d'expérimenter pour voir comment
05:27 dégager des moyens pour reconstruire plus rapidement
05:30 que si la puissance publique ne s'intervenait pas.
05:32 Il y a encore quelques 80 000 foyers
05:35 qui sont privés de courant en Bretagne.
05:37 Ça fait 4-5 jours maintenant.
05:39 À votre avis, ils peuvent espérer retrouver l'électricité
05:42 sous quel délai ?
05:43 Alors effectivement, il y a 80 000 foyers.
05:46 Donc 80 000 foyers, ça veut dire près de 160 000 personnes
05:49 qui sont privées d'électricité.
05:50 Dans le funictaire, c'est un peu moins de 50 000 foyers,
05:54 c'est-à-dire 100 000 personnes.
05:55 Ce que Enedis nous dit, c'est qu'il y aura un retour
05:58 complet à la normale mercredi.
06:00 Donc entre aujourd'hui et mercredi, toutes les personnes
06:01 qui sont privées d'électricité devraient la retrouver.
06:05 Je dois ajouter que dans le funictaire,
06:07 même si j'ai conscience que pour les personnes concernées,
06:09 c'est absolument intolérable, très dur en tout cas à vivre.
06:15 On est vraiment, nous, je pense, satisfaits de la réponse
06:18 à la crise de la part de l'État et du service public.
06:21 Les gens d'Enedis se battent.
06:22 Il y a même un agent d'Enedis qui est décédé
06:24 alors qu'il n'était jamais venu dans le funictaire.
06:25 Il était volontaire pour venir nous aider.
06:27 Ça aide à relativiser.
06:28 En tout cas, on a une pensée pour sa famille
06:30 et pour ses collègues.
06:32 Gilles Labouret, est-ce qu'après ces tempêtes à répétition,
06:36 se pose la question de l'assurabilité ?
06:39 C'est-à-dire, est-ce qu'il y a des risques
06:41 que peut-être aujourd'hui ou demain,
06:43 vous ne prendrez plus en compte ?
06:46 Oui, alors ce qu'il faut savoir,
06:47 c'est que de toute façon, tous les experts sont sur le terrain.
06:51 Au jour d'aujourd'hui, on défend aussi des déclarations de l'État,
06:56 d'État de catastrophe naturelle.
06:59 Donc là aussi, c'est important que l'État nous suive.
07:05 Et l'État ne suit pas suffisamment, selon vous ?
07:08 Ce n'est pas suffisamment.
07:09 C'est que les délais pour pouvoir faire la déclaration
07:13 de catastrophe naturelle, plus elle est courte
07:15 et plus on a une réponse immédiate.
07:19 Cédric, l'assurance est une vraie question pour les maraîchers
07:22 qui sont sinistrés, on l'a évoqué aussi avec Maël Decalan.
07:27 Est-ce que ces gens-là étaient assurés pour leurs dégâts ?
07:32 Alors, pas tous évidemment,
07:34 parce que ça coûte cher une assurance.
07:35 Il faut en vendre des légumes pour payer l'assurance.
07:37 Mais César, oui, vous vous étiez assuré.
07:39 Ça veut dire que là, vous êtes couvert pour tout.
07:41 Est-ce que ça règle tous les problèmes d'être assuré ?
07:42 Alors, on ne sait pas encore.
07:44 Est-ce qu'on m'a déjà parlé d'une franchise ?
07:46 Est-ce qu'elle va être vraiment là ou pas ? On ne sait pas.
07:50 La franchise, ce serait 1 500 euros environ, c'est ça ?
07:51 Oui, dans ces eaux-là.
07:52 Après, non, ça ne couvre pas tout,
07:53 parce que ce n'est pas ça qui va nous faire gagner du temps.
07:56 Évidemment, le temps que là, on ne peut rien démonter
07:58 parce que l'expert n'est pas encore passé.
08:00 Donc, on attend après ça et après, on va attendre une décision et tout ça.
08:03 Donc, c'est sûr que ça nous fait encore faire plus de temps, j'irais dire,
08:06 mais on n'est pas sûr du résultat.
08:08 Et vous n'êtes pas sûr surtout qu'on continue à vous assurer
08:10 si l'année prochaine, il se passe la même chose ?
08:12 Ça va devenir compliqué ou alors les prix vont encore monter.
08:14 Et c'est clair qu'on va bien voir, mais ce n'est pas sûr.
08:19 Ça va peut-être poser problème.
08:21 Maël Decalan, on voit que les tempêtes sont à la fois
08:24 de plus en plus fréquentes et de plus en plus violentes.
08:25 Est-ce qu'à un moment, les locaux que vous êtes se dit
08:29 qu'il faut réfléchir peut-être à un aménagement du territoire différent ?
08:33 Alors, c'est des questions qu'on se pose depuis maintenant plusieurs années.
08:38 Il y a l'érosion et la subversion marine,
08:40 vous savez, qui touche les départements côtiers,
08:43 de sorte qu'il y a déjà des hameaux qui doivent reculer,
08:47 c'est-à-dire concrètement qu'ils vont devoir être détruits,
08:49 ils vont devoir reloger des gens.
08:50 C'est déjà des questions qu'on se pose, des routes qui sont en bord de mer
08:54 et qui, peut-être dans 10 ou 15 ans, ne seront plus là.
08:57 Donc, c'est une question qu'on se pose depuis maintenant très longtemps.
09:00 L'essentiel, de mon point de vue comme élu local,
09:02 c'est qu'on apprenne de ces crises qui seront, comme vous le dites,
09:05 de plus en plus nombreuses, de plus en plus fréquentes
09:07 et de plus en plus violentes, et que le service public se muscle,
09:10 qu'il soit de plus en plus agile, de plus en plus rapide à intervenir.
09:14 Donc, on est en train d'apprendre en ce moment de ce qui est un cataclysme
09:18 qui jusqu'à présent intervenait jusqu'à peu près tous les 30 ans
09:22 et qui interviendra peut-être maintenant tous les 2, 3, 4 ans,
09:24 je n'en sais rien, pour faire en sorte qu'on débloque notre département,
09:27 non pas en 4 à 5 jours, ce qui est le cas aujourd'hui,
09:29 mais en 24 à 48 heures.
09:32 Donc, on sait que ça va être de plus en plus dur.
09:34 On se charge au service public d'être de plus en plus efficace.

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