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Pierre-Henri Tavoillot, maître de conférences à Sorbonne Université, président du Collège de philosophie et auteur de "Comment gouverner un peuple roi?" aux éditions Odile Jacob, répond aux questions de Dimitri Pavlenko. Ensemble, ils reviennent sur la Grande marche contre l'antisémitisme en présence des membres du Rassemblement national et l'absence de la France insoumise.
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Pierre-Henri Tavoillot, maître de conférences à Sorbonne Université, président du Collège de philosophie et auteur de "Comment gouverner un peuple roi?" aux éditions Odile Jacob, répond aux questions de Dimitri Pavlenko. Ensemble, ils reviennent sur la Grande marche contre l'antisémitisme en présence des membres du Rassemblement national et l'absence de la France insoumise.
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NewsTranscription
00:00 Dimitri Pavlenko, vous recevez ce matin le philosophe et maître de conférences à la Sarobonne, Pierre-Henri Tavoyo.
00:05 - Bonjour Pierre-Henri Tavoyo.
00:07 - Bonjour.
00:08 - Bienvenue sur Europe 1, plus de 70 rassemblements dans toute la France ce dimanche contre l'antisémitisme.
00:13 105 000 personnes apparaissent selon la préfecture
00:16 derrière la banderole tenue en son centre par les présidents des deux assemblées, Gérard Larcher et Albron de Pivet,
00:22 qui étaient les initiateurs de ce défilé. Diriez-vous Pierre-Henri Tavoyo que c'est une réussite ?
00:29 - Oui incontestablement, je crois que c'est une réussite.
00:31 Il y avait des craintes notamment avec les polémiques qui avaient été enclenchées.
00:35 Moi je tiens vraiment à saluer l'initiative de Gérard Larcher et Albron de Pivet.
00:40 C'était vraiment une attente forte que ce moment, effectivement pour la République et contre l'antisémitisme,
00:47 et cet appel effectivement à une forme d'union nationale,
00:51 je pense que c'était vraiment une initiative vraiment très très importante
00:53 parce qu'elle émane non pas d'associations ou de lieux qui pourraient paraître comme partiaux,
01:00 mais vraiment de la représentation nationale et de ce point de vue là c'était capital.
01:03 - Alors parole entendue hier dans le cortège, Pierre-Henri Tavoyo,
01:06 il y avait la crainte qu'il ne se résume en fait à des politiques, des juifs et des journalistes.
01:12 Il y avait un peu plus que ça hier ?
01:14 - Oui il y avait plus que ça.
01:16 C'est vrai qu'il y avait beaucoup d'associations,
01:18 il y avait aussi beaucoup de représentants, de personnes toutes simples,
01:23 qui pouvaient apparaître simplement comme voulant manifester justement cet amour de la République.
01:28 Le terme sonne un peu désuet, mais je pense que c'est important
01:31 parce qu'au fond il y a deux adversaires principaux sur lesquels il faut vraiment être attentif.
01:37 A la fois ce qu'on peut appeler les communautaristes,
01:39 c'est-à-dire l'idée que la loi de la communauté, la religion compte plus que la loi de l'unité.
01:45 Et puis aussi ce qu'on peut appeler l'identitarisme,
01:48 c'est-à-dire le fait de se renfermer dans une identité personnelle particulière, hyper individualiste.
01:53 Et je pense qu'il faut rappeler effectivement que cette République-là,
01:57 c'est une communauté qui transcende les communautés, qui transcende les identités.
02:02 - Alors vous avez dit quelque chose que je trouve assez révélateur,
02:04 cet amour de la République qui serait un tantinet désuet,
02:08 et cette volonté de faire un peu d'unité nationale sur le thème de l'antisémitisme.
02:13 Ça sonne un peu tout de même, Pierre-Henri Tavoyau,
02:16 "cacher ce malaise que je ne saurais voir, ces fractures françaises que je n'ai pas tellement envie de voir".
02:21 C'est aussi ça qu'il y avait derrière cette manifestation ?
02:24 - C'était ça le pari en effet, c'est le fait clairement qu'une partie de la population d'origine musulmane,
02:30 il faut dire les choses, considère que cette cause de l'antisémitisme
02:35 cache quelque chose qui serait un soutien conditionnel à l'égard d'Israël,
02:40 et qu'en ce sens-là, elle ne mérite pas d'être défendue.
02:43 Et puis il y a un autre type de ce qu'on appelle la judéophobie,
02:47 qui considère qu'Israël représente en quelque sorte le dernier avatar du colonialisme occidental et raciste,
02:54 adossé à une forme de néolibéralisme,
02:58 et donc du point de vue de l'extrême gauche, toute opposition à l'antisémitisme
03:04 a une sorte de relanc pro-impérialiste,
03:08 et de ce point de vue-là, il ne faut pas y participer.
03:10 C'est les nouvelles formes en quelque sorte de judéophobie,
03:13 il y avait les deux traditionnelles chrétiennes en accusant effectivement les déicides,
03:21 et puis l'antisémitisme racialiste, nazi ou drumontesque, si je puis dire, des années 1886,
03:29 mais ces deux formes primordiales se sont un peu estompées par rapport à ces deux autres formes montantes,
03:35 en effet, l'antisémitisme islamiste et l'antisémitisme, j'appellerais "woke", par une sorte de raccourci rapide.
03:42 - Mais on a vu que le Rassemblement National, lui, avait été maintenu à l'écart du carré de tête,
03:46 un relégué en fond de cortège,
03:48 Marine Le Pen n'a pas semblé, outre mesure, s'indigner finalement d'être relégué au fond de la classe ?
03:56 - Alors c'est assez habile de sa part.
04:00 D'une part, je pense qu'il faut quand même rappeler l'événement majeur,
04:04 c'est que le fait que le RN s'engage dans son ensemble dans la lutte contre l'antisémitisme,
04:10 c'est une nouveauté absolue,
04:12 et qui témoigne effectivement qu'il y a entre le Front National et le Rassemblement National une véritable rupture.
04:17 Simplement, Marine Le Pen aussi a besoin de se sentir un peu exclue,
04:21 ou de montrer qu'elle est un peu exclue du système,
04:24 parce qu'une partie de son discours, c'est effectivement la lutte contre le système.
04:27 Donc d'une certaine façon, elle fait ainsi une pierre deux coups,
04:30 c'est-à-dire de dire "ben écoutez, moi j'ai dit les choses clairement,
04:34 j'affirme que le RN n'est pas antisémite, très clair,
04:39 et par ailleurs, je maintiens ma position de contestation à l'égard du système".
04:43 - Et pendant ce temps-là, la gauche,
04:45 alors s'il y avait quelques personnalités de gauche qui étaient présentes hier,
04:48 Fabien Roussel, Olivier Faure, Marine Tondelier étaient dans le cortège parisien,
04:51 mais pas les Insoumis qui ont préféré aller déposer une gerbe de fleurs aux Veldives.
04:56 Quel était le message selon vous des Insoumis à travers cette contre-manifestation ?
05:01 - Je vais être un peu dur et un peu violent, c'est de dire que grosso modo,
05:05 le 6 octobre pour les Insoumis, c'est-à-dire le jour du massacre du Hamas,
05:10 c'est un point de détail.
05:12 Et donc de ce point de vue-là, il y a une sorte d'inversion qui vient de se produire,
05:17 on s'y attendait assez largement, c'est que l'extrémisme a changé de camp.
05:21 Je pense qu'aujourd'hui, le RN a cessé d'être un parti d'extrême-droite,
05:25 et que l'extrême-gauche devient de plus en plus extrême-gauche dans les deux sens,
05:29 c'est-à-dire toute l'idéologie de l'extrême-gauche,
05:31 mais aussi véritablement un extrémisme avec à la fois ce qu'on peut appeler l'intolérance,
05:38 et puis aussi par ailleurs, dans d'autres occasions, le culte de la violence.
05:41 Donc l'extrémisme a changé de bas.
05:43 - Dernière question, Pierre-Henri Tavoyau.
05:45 Est-ce qu'Emmanuel Macron aurait dû venir à la manifestation hier selon vous ?
05:49 - Oui, je pense que la clarté...
05:52 Quand on appelle à l'unité nationale, quand cet appel vient effectivement de deux représentants majeurs,
05:59 je rappelle que le président du Sénat, c'est le numéro 2 de la République,
06:03 donc qu'il y ait le président de l'Assemblée nationale, le président du Sénat,
06:07 qu'on appelle sur une cause qui est une cause incontestable pour la République et contre l'antisémitisme,
06:12 il me semble que la présence du président aurait été très très souhaitable.
06:17 Elle me paraît assez largement incompréhensible.
06:19 Je vois bien quelques raisons possibles, mais si on fait un équilibrage entre les raisons d'y être et de ne pas y être,
06:26 il me semble que ça penchait vraiment sur le fait de la présence.
06:30 Là, il y a un regret d'autant plus accentué par la polémique qu'il y a eu lieu avec l'entretien à la BBC
06:36 où le président, disons, considérait qu'il n'y avait pas de légitimité à Israël de se défendre.
06:43 Je résume rapidement, mais c'était un peu ça la substance.
06:45 - On en reparlera d'ailleurs avec Vincent Trémolet de Villers.
06:47 A tout à l'heure à 8h10.
06:49 Merci Pierre-Henri Tavoyau, on vous lit sur votre blog, on vous lit également dans le Figaro très régulièrement.
06:55 Merci à vous, bonne journée.