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Les Editos Philosophiques de Pascal Dolhagaray, Semaine 47/2023
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Les Editos Philosophiques de Pascal Dolhagaray, Semaine 47/2023
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AmusantTranscription
00:00 *Musique*
00:17 *Son de clavier*
00:20 Bonjour, bienvenue sur 300 secondes maxi.
00:23 Je vous propose 12 détours d'une même durée, autant de parenthèses éphémères,
00:27 pour que tu aies l'espace inclus entre les deux grandes qui nous contiennent.
00:30 Juste des clins d'oeil sonores, une autre façon de vous décrire un détail dans ce paysage qui défile
00:36 à cette même vitesse que notre vie passe. Bonne émission à vous.
00:40 *Son de clavier*
00:42 *Musique*
00:48 L'être humain n'a pas un regard sur le monde,
00:52 l'être humain est un regard sur le monde.
00:56 Et le monde, en termes d'identité, lui constitue une identité au prorata de ce qu'il regarde.
01:07 Ainsi, plus le regard des êtres humains est orienté vers le monde,
01:15 le monde tel qu'il est, plus en temps qu'ensemble, l'être humain sera promis à durer.
01:24 A l'inverse, si l'être humain détient à l'égard de lui-même ce même regard,
01:33 ce regard réservé au monde, l'être humain est promis à une sorte de circuit fermé,
01:42 de spirale tournant sur elle-même.
01:46 L'être humain, à force de se voir, perdra de vue le monde,
01:53 l'être humain, à force de se voir, perdra aussi de vue l'être humain.
02:02 Car pour maintenir son regard à ce qui lui semble être,
02:08 il lui faudra être à tout prix, être en pure perte, être même en désespoir de cause.
02:19 L'être humain, selon ce processus, processus qui est celui à présent de nos sociétés dites avancées,
02:32 plus il cherchera à être pour s'attribuer par ses seuls soins une identité,
02:41 plus cette identité le fera disparaître en proportion.
02:48 Cette finalité est celle que nous entrevoyons de nos jours
02:58 si l'on observe nos sociétés dites avancées.
03:04 À se regarder lui, l'être humain en a oublié le monde.
03:10 À se regarder lui, l'être humain en a même oublié l'être humain.
03:17 Toutes et tous sommes autant d'auto-définition.
03:23 Nous croyons être et pour croire qu'il est possible d'être en procédant de la sorte,
03:31 nous disparaissons sous le nombre de ces identités toujours plus nombreuses,
03:39 de ces identités réclamant d'être plus identifiées, pour se dire identités.
03:49 L'être humain n'est qu'un regard.
03:53 Comme je l'ai déjà écrit au fil des dites au précédent,
03:58 il ne peut être que curiosité.
04:02 Il peut être celui qui nomme,
04:06 il peut être même celui qui se nomme sans s'identifier pour de bon.
04:13 Les identités qu'il se reconnaît sont autant de croyances,
04:20 sont autant d'illusions par défis, défis à l'égard du hasard.
04:28 L'être humain, en guise de pourquoi, se reconnaît autant de volonté,
04:36 se reconnaît autant de droits comme de capacité à décider, à répondre.
04:45 Et plus il décide, plus il s'impose de ses choix qui décident pour lui,
04:53 plus il répond, plus il s'inflige de ses réponses qui répondent à sa place.
05:03 [Musique]
05:22 On peut ne pas dire du hasard qui s'approprie l'espace, qui s'approprie le temps.
05:29 On peut ne pas le dire à ce point que le hasard paraît avoir un ascendant sur l'espace
05:38 comme il paraît avoir un ascendant sur le temps.
05:43 L'espace semblant être ce que le hasard en fait,
05:49 comme le temps semblant être ce que le hasard à son tour en fait,
05:55 à ce point que le hasard ne mesure pas plus l'espace qu'il ne mesure le temps.
06:04 Le hasard semble être en possession du temps comme en possession de l'espace,
06:12 sans ressentir la nécessité pour les posséder de façon absolue,
06:18 de s'en prétendre propriétaire,
06:22 en commençant pour se faire par se le prétendre à lui-même.
06:28 Il semblerait même que ce désir de propriété, désir revendiqué,
06:36 correspond de façon proportionnelle à ce qu'on prétend avec force posséder,
06:45 en sachant de façon tout aussi proportionnelle qu'on ne le possédera jamais,
06:54 correspond à ce qu'on dit avoir, correspond à ce que l'on n'a pas, à ce que l'on ne saurait avoir.
07:06 Entre le hasard et nous se distingue cette différence,
07:12 la propriété de l'espace, la propriété du temps,
07:17 semble être pour le hasard un fait entendu.
07:22 Ces deux propriétés sont par lui détenues,
07:28 ils les possèdent comme on peut être possédé.
07:33 Ces deux propriétés ne sont pas seulement par lui en sa possession,
07:39 elles sont par lui possédées,
07:43 possédées à ce point qu'elles ne se possèdent plus elles-mêmes par cette possession-là.
07:52 Nous concernant, nous autres humains, pour ne rien détenir,
07:59 pour n'être pas en tant qu'être humain déjà en possession de nous-mêmes,
08:06 en nous se tient un élan qui nous possède plus que nous le possédons.
08:16 Cette impression de dépossession nous motive à posséder,
08:22 nous ambitionnons de posséder, à entraîner en ce sens par une impression de dépossession.
08:33 Se remarque déjà à ce niveau initial une contradiction,
08:41 le hasard nous apprend qu'il faut être pour avoir,
08:47 que plus on est, plus on est en capacité de posséder,
08:54 à l'inverse, moins on est, moins on s'avère en capacité de posséder.
09:02 Cette réalité va bien au-delà de cet adage voulant qu'en tant qu'être humain,
09:11 nous privilégions l'avoir pour privilégier l'être.
09:17 L'avoir est tributaire de l'être, plus on est, plus on est en capacité d'avoir.
09:27 La propriété, pour être propriété, est avant tout et seulement tributaire de l'être.
09:36 La propriété, pour être propriété, ne saurait être tributaire de l'avoir,
09:44 car celui qui possède, comme de nos jours, dans nos sociétés nous possédons,
09:51 est synonyme de dépossession.
09:58 La guerre est non seulement une réponse à la question de la propriété,
10:06 mais aussi une réponse à la question de l'intérêt de l'être.
10:14 La propriété est la réponse à la question de l'intérêt de l'être.
10:22 La guerre est non seulement une réponse, la guerre oppose des réponses à caractère humain,
10:34 réponses si entendues, si hermétiques, qu'elles se remettent en cause les unes à l'égard des autres.
10:45 Et ce refus viscéral, consistant à se remettre en cause à l'égard de réponses différentes,
10:57 différentes d'elles-mêmes, avoue une incapacité à se remettre en cause à l'égard d'elles-mêmes.
11:08 Et plus cette remise en cause s'avère impossible, plus les guerres qui s'en suivent s'avèrent fratricides.
11:20 Lorsque deux camps s'affrontent, non seulement ce qui les constitue
11:29 distingue dans le camp d'en face une obstination égale à la leur,
11:37 c'est-à-dire que leur soi-disant identité est tributaire de façon proportionnelle de leur obstination.
11:49 Pour être ces « quelqu'un-là », ils se doivent d'exprimer un entêtement équivalent,
11:58 sans paraître comprendre que celui qui est quelqu'un, quelqu'un pour de bon comme pour de vrai,
12:08 sait qu'il n'est personne, sait qu'il ne saurait être quelqu'un de façon véritable, de façon choisie,
12:20 qu'il est juste l'expression de ses goûts associés au contexte.
12:27 Contexte en capacité de savoir et pouvoir délivrer à ses mêmes goûts de quoi,
12:36 pour qu'il déniche dans ce même contexte de quoi se mettre en honte.
12:46 L'être humain, par son absence de nature, doit composer justement avec cette absence qu'il occupe,
12:58 qui est plus qu'une absence de nature, qui est une absence à part entière.
13:05 Nous devons à cette absence notre curiosité, vouloir répondre,
13:13 répondre pour de bon, c'est vouloir en chute libre instaurer sous ses pieds un plancher,
13:23 histoire de s'assurer, de se convaincre qu'une fois installé,
13:30 ce même plancher sera enrayé, cette fameuse chute libre, cette même chute libre,
13:39 expliquant même de façon métaphorique les inepties insistantes et têtues,
13:49 les inepties par définition surréalistes servant à ceux qui les réclament de plancher, d'assise et de fondation.
14:02 Plancher, assise et fondation ne pouvant par définition souffrir la moindre comparaison,
14:14 ces critères constituant les uns, ces critères constituant les autres,
14:21 par leur surréalisme juste comparé, mettant trop en exergue, en confrontation,
14:30 cette espèce d'infondée rédhibitoire par lequel, face à face, alors, ils se ridiculisent mutuellement.
14:43 Alors, ces frustrations mutuelles, frustrations inavouées,
14:50 exigent que l'un des deux camps soit éradiqué pour confirmer un terme d'identité, le bien fondé de l'autre.
15:03 Mais comme nos guerres ne savent produire que des perdants,
15:09 ceux qui disent les gagner sont encore plus mal lotis que ceux qui les perdent,
15:17 cette volonté consistante à se dire comme telle à tout prix
15:23 étant l'incarnation d'une absence de raison, d'une raison même perdue à jamais.
15:32 [Musique]
15:54 Pourquoi ne pas faire de nos vies une continuité, une continuité abandonnée au savoir,
16:06 c'est-à-dire une vie passée à s'interroger et non une vie passée à répondre ?
16:16 Selon l'expression, l'homme, plus que l'être humain, l'homme d'abord,
16:23 ce qui peut signifier que l'homme, pour être un homme avant tout, n'en est pas pour autant un être humain.
16:33 L'homme donc se cherche des réponses.
16:39 L'homme ferait peut-être mieux de se chercher des questions,
16:45 et à ce propos, cette recherche de questions ne le contraindra pour en obtenir qu'à se pencher.
16:55 Bien sûr, on ne rétorquera que la vie à ses impératifs.
17:02 La vie, ou plutôt nos vies, celles d'êtres humains,
17:08 ou plutôt d'hommes, de femmes et d'enfants, dans nos sociétés dites avancées,
17:16 ne manque pas d'impératifs, puisque nous n'avons de cesse d'en rajouter,
17:23 de les additionner, de les empiler, puis de positionner ce cumul d'impératifs pile sur nos épaules.
17:36 Cette charge ayant au minimum le mérite trompeur de nous croire utiles,
17:45 oui, la vie a ses impératifs, mais seulement de ces impératifs rattachés à la vie,
17:55 qui devraient, dans une société dite avancée, être réduits sans cesse à un investissement,
18:05 comme à la contribution de chacun revu à la baisse.
18:11 Les êtres humains que nous sommes, sommes curiosités,
18:17 et nourrir cette curiosité ne consiste pas à répondre pour de bon, mais à s'interroger sans cesse.
18:28 Nos réponses les plus instituées nous motivent à renoncer à nous interroger,
18:38 à renoncer à nous dire et nous faire humains du début de notre vie à sa fin.
18:48 L'être humain ne peut épouser cette mobilité qui l'occupe qu'en s'interrogeant.
18:57 L'être humain semble se distinguer par un goût pour l'infini comme l'éternité,
19:26 sans que l'être humain sache, sans qu'il en ait la preuve, preuve scientifique, évidemment.
19:34 Comment pourrait-il exister d'autres preuves que ces preuves-là,
19:40 sans qu'il sache donc si l'infini existe, si l'éternité existe.
19:47 Car l'infini n'est pas l'espace, l'espace infini étant un espace qui s'égare en lui-même en s'étirant à l'infini.
20:00 Car l'éternité n'est pas le temps, un temps éternel étant un temps sans durée véritable,
20:10 étiré à ce point qu'il ne sait plus être un temps défini, un temps déterminé.
20:20 Mais malgré tout, l'être humain conserve en lui ce goût-là, ce goût pour l'infini comme pour l'éternité.
20:32 Alors, on peut s'interroger, on peut s'interroger d'autant plus qu'il est agréable de s'interroger lorsqu'on est humain,
20:46 d'autant plus agréable qu'on se sent plus humain encore en s'interrogeant.
20:54 On peut s'interroger sur ce goût-là.
20:59 D'où nous vient ce goût pour l'infini comme l'éternité ?
21:05 Qu'est-ce qui en nous peut inciter un tel goût, une telle correspondance, une telle corrélation ?
21:16 Sinon, nos aptitudes, aptitudes si viscérales, aptitudes si constitutives à la curiosité,
21:30 ces aptitudes-là nous font aimer l'infini, nous font aimer l'éternité.
21:39 Ces aptitudes-là, surtout par ces deux penchants, nous avertissent que nous sommes habités par une curiosité sans fond et sans limite,
21:52 une curiosité qu'il nous faut en nous laisser à elle-même afin que les êtres humains que nous sommes en eux
22:04 se laissent dans un même élan, se laissent en proportion, laissés à eux-mêmes,
22:13 à cette curiosité sans limite, synonyme d'une humanité devant être protégée de toute limite.
22:24 [Musique]
22:44 Si l'on considère que nous sommes habités par une curiosité à ce point sans limite,
22:52 que nous ne sommes que curiosité, cette curiosité-là témoignant de nos goûts,
23:02 d'autres penchant pour l'éternité comme pour l'infini,
23:07 si l'on considère cette donnée, cette éventualité-là, on comprend aussitôt, avec plus de facilité,
23:19 pourquoi ces réponses si instituées, ces réponses bénéficiant de représentations en dur tout autour de nous,
23:33 ces réponses-là, au-delà de nous canaliser, de nous confirmer à nous-mêmes,
23:42 voire même de nous nourrir pour de bon, nous conduisent à nous sentir mal,
23:50 nous poussent à nous sentir autre que ce que nous pouvons et devons être en tant qu'êtres humains,
24:00 c'est à se demander même si par ces réponses instituées,
24:06 les êtres humains que nous sommes redoutent et craignent les êtres humains qu'ils peuvent devenir.
24:18 Pascal était effrayé par ces espaces sans fin et sans fond se présentant à lui.
24:29 On peut se demander si Pascal n'était pas plus effrayé par ces espaces sans fin et sans fond en lui.
24:41 Déjà tout en lui, ce du dehors imaginé et seulement imaginé, ressenti, lui signifiant ce du dedans,
24:55 ce du dedans d'ailleurs lui signifiant au dehors des espaces semblables à eux,
25:05 des espaces initiés par notre curiosité, des espaces à leur tour sans fin et sans fond.
25:18 L'être humain, comme l'était Pascal, à l'égard de lui-même, est peut-être effrayé par cette immensité qui l'occupe.
25:31 Aussi élève-t-il des frontières et des murs, et plus il résiste à cette immensité, à son élan, à son mouvement,
25:46 plus il se déchire en lui, plus il se sent coupable en étant innocent.
26:15 Si après tout, notre curiosité nous faisait sans limite, sans limite de façon absolue, totale,
26:26 pour tous les êtres vivants de ce monde, leur nature les arrête à ce qu'ils sont.
26:33 Ce sont des êtres vivants qui ne s'interrogent plus,
26:38 voire la réponse qu'ils incarnent paraît les posséder tout entier.
26:45 Ces êtres vivants paraissent porter leurs frontières, leurs limites et leurs murs comme une sorte de finalité cohérente.
26:56 Une finalité pouvant se suffire à elle-même, une réponse ayant répondu à toutes les questions pouvant l'interroger.
27:08 Des questions pouvant faire surtout que cette finalité, cette réponse, soit contrainte,
27:17 pour n'être pas assez aboutie, assez cohérente, de s'interroger à nouveau, de s'interroger encore.
27:27 Nous, nous paraissons être l'exact contraire.
27:32 Bien sûr, nous n'en manquons pas de réponses, mais ces réponses sont désirées, voulues, puis instituées.
27:44 Non pas en tant que réponses, mais pour taire en nous ces questions que notre curiosité nous incite à nous poser.
27:55 Les êtres humains ne peuvent pour l'heure se penser curiosités, sans être étourdis, sans perdre pied.
28:06 Alors ils s'imposent et s'infligent des réponses en guise d'identification, en guise d'arrêt.
28:15 Et toutes ces identifications qui nous font, par exemple, français, homme, électricien, marié et père de famille,
28:26 nous privent d'une humanité imminemment plus globale, pour être une humanité se laissant elle-même filer,
28:39 elle-même filer en elle-même, préférant, pour se dire humaine, la saveur infinie, la saveur éternelle de la curiosité,
28:53 à celle de ces réponses qui désirent et ambitionnent en s'arrêtant dans ce monde, en mouvement,
29:02 à ce que ce même mouvement consente à s'arrêter à elle.
29:08 [Musique]
29:31 Nos turpitudes actuelles, comme nos turpitudes de toujours d'ailleurs, sont les fruits de réponses,
29:41 sont les fruits de certitudes et autres convictions, qui semblent protéger de toute remise en cause,
29:50 de toute remise en question, au sens propre du terme.
29:55 Nous avons arrêté notre monde au niveau de certaines réponses, réponses entendues et instituées,
30:06 tellement entendues et instituées, que ceux qui se risquent à remonter ces mêmes réponses,
30:16 en leur imposant pour se faire autant de questions correspondantes, cela sont taxés de folie et autres démences.
30:28 Ainsi, ces réponses vous affirmeront que l'école est nécessaire, que le travail est indispensable,
30:39 que l'amour est une bénédiction et les enfants autant de joies indépassables.
30:46 Les réponses sont de ces fondations, de ces bases, à partir desquelles nos sociétés s'élèvent
30:56 et à partir desquelles ces mêmes sociétés nous conditionnent.
31:02 Ces réponses, non seulement répondent à notre place, mais nous retiennent afin que nous ne nous interrogeons pas.
31:15 Ainsi, je ne suis pas sûr que l'école, sous sa forme, serve un savoir correspondant à nos caractéristiques d'être humain.
31:28 Je ne suis pas sûr que le travail, sous sa forme aussi, puisse rivaliser avec ces notions d'effort
31:39 qui font les êtres humains mieux aboutis et les mondes qu'ils occupent plus aboutis à leur tour.
31:47 Je ne suis pas sûr que l'amour soit ce qu'il est, je ne suis même pas sûr qu'il existe.
31:54 A défaut d'amour en plus, commençons pour aimer par autant de haine en moins.
32:02 Et je ne suis pas sûr que les enfants soient ces joies qu'on dit d'eux pour être des êtres humains en construction absolue où tout reste à faire.
32:16 [Musique]
32:41 Beaucoup d'entre nous, parmi lesquels je m'intègre, cèdent à ce réflexe fâcheux,
32:49 voulant par exemple que si du doigt on me montre un écureuil, et si l'on me demande si je sais ce qu'est ce petit animal-là,
33:01 je répondrai que je sais ce qu'il est, en l'occurrence un écureuil.
33:08 Le titre d'écureuil dans mon esprit, en première instance, me communiquera l'impression d'un savoir de base, suffisant.
33:19 En première instance, dire d'un écureuil qu'il est un écureuil, en termes de connaissances concernant ce petit animal-là, me paraîtra suffisant.
33:34 Le titre d'écureuil, pour les écureuils comme pour tout ce qui est intitulé par nous, incarne un résumé expéditif.
33:46 La possibilité de pouvoir désigner d'un titre, quoi que ce soit, ou qui que ce soit, peut nous délivrer l'impression d'un savoir abouti, d'un savoir suffisant.
34:05 Les titres, ces titres que nous accolons à chaque chose, ces titres-là témoignent de notre volonté d'appropriation.
34:20 Volonté d'appropriation générée par une panique en nous, proportionnelle, par une angoisse en nous, proportionnelle.
34:34 Notre vie, un jour, s'achèvera. Au moins, adoptera-t-elle une tournure à l'égard de laquelle nous redoutons de ne plus disposer de la moindre maîtrise ?
34:52 Alors, nous nous accrochons au monde, et la manière qui paraît nous permettre de nous y accrocher, semble passer par l'appropriation de ce même monde,
35:09 et intituler ce monde, comme tout ce qui l'occupe et le constitue, nous offre l'impression de mourir un peu moins, un peu moins, au fil de ce temps où nous sommes encore vivants.
35:32 L'appropriation, c'est la volonté d'appropriation.
35:48 Qu'on le veuille ou non, qu'on le réfute ou non, dans un titre donné se remarque une volonté d'appropriation.
36:00 L'on s'empare forcément, l'on s'empare autrement de ce qu'on intitule.
36:08 Les êtres humains que nous sommes, en donnant à chaque chose en ce monde un titre, ont voulu, en proportion, s'approprier le monde à travers ces titres donnés aux choses.
36:25 Ensuite, il nous a semblé suffisant de trouver un titre à ce que nous désirions voir exister, pour que la chose rattachée à ce titre, à notre entendement, se fasse existante.
36:45 Ce procédé contribua à ce que nous tentions par lui de nous approprier la réalité.
37:00 Le résultat se distingue à présent partout autour de nous. Tout ce qu'il nous semble créer n'est qu'un laps de temps concédé à autant de mirages, comme à autant de chimères.
37:17 Mais plus encore, ces titres donnés à toutes choses en ce monde ont initié en nous l'impression que ces mêmes titres avaient sur les choses intitulées par eux pris un ascendant,
37:36 et que, par ces mêmes titres, nous qui les avions conçus avions aussi pris sur les choses comme sur le monde un même ascendant.
37:53 Ces titres, rapidement, ne se sont pas contentés des choses intitulées par eux. A travers ces titres, nous avons voulu passer à la vitesse supérieure.
38:08 Nous avons, par anticipation, créé des titres chargés de donner corps à des choses intitulées par eux, répandant sur le monde par notre concours autant de mirages,
38:25 autant de chimères, autant de baudruches désireuses de rendre grâce aux titres qui les autorisèrent, tellement en quête d'existence qu'elles sont promises, pour ne pas être malgré tout, d'exploser en proportion.
38:48 Le Dieu est en nous l'expression d'une faculté surestimée.
39:13 Cette même faculté nous offrant, nous incitant à coiffer toutes choses dans ce monde d'un nom.
39:24 Cette faculté-là, en retour, nous donne à penser en nous que nous sommes capables de création. Ce qui n'est pas faux.
39:36 Ce loge dans ces noms donnés une réelle création. A partir de cette sensation, sensation associée au fait que nous sommes les seuls ici-bas à exprimer une telle faculté,
39:55 cette sensation-là a véhiculé en nous une impression de toute puissance. Cette toute puissance, à son tour, comme toutes les choses de ce monde qui croisèrent notre regard,
40:14 fut d'abord nommée à cette différence que cette toute puissance-là, intitulée Dieu, débuta sa pseudo-existence en ce monde par un titre, par un nom.
40:35 Dans son cas, le processus fut inversé et son cas, d'ailleurs, nous aspira bien d'autres inversions.
40:47 A ce titre de Dieu, un corps manquait. D'où ce recours aux églises, aux temples et autres mosquées. Ce mirage intitulé Dieu passa de derrière nos yeux à devant,
41:07 rattaché à un cérémonial synonyme d'insistance à plein temps, pour que ce mirage intitulé Dieu ne soit pas rattrapé par une sorte de volatilité dans son cas original, dans son cas de toujours.
41:31 Les êtres que nous sommes ne se sont pas contentés de ces titres par nous donnés aux choses, l'on réclama des choses au titre par nous inventé.
41:46 Ce qui n'existe pas prit alors un ascendant sur ce qui est, nos alentours, comme notre cécité toujours croissante à ce sujet en témoigne.
42:04 Le mirage intitulé Dieu, nous a fait croire à ce qui n'existe pas.
42:20 Si nous sommes capables de donner corps à ce qui n'existe pas, à donner corps à des mirages et autres chimères, qui même s'ils peuvent par nous être considérés comme existants,
42:42 sans qu'ils cessent pour autant d'être des chimères et des mirages, si nous détenons cette faculté là, c'est peut-être parce que nous ne disposons pas en nous de quoi exister.
43:01 Oui, nous pouvons voir le monde, l'observer, l'intituler, donner à ce qui le compose un nom, croire et s'imaginer même qu'en donnant aux choses de ce monde un nom, en les intitulant,
43:25 nous sommes en capacité de faire plus exister encore ces mêmes choses.
43:34 Aussi, cette impression confortée en nous, cette impression consistant à nous laisser croire que nous faisons plus existants encore ces choses bénéficiant par nos soins d'un titre, d'un nom,
43:57 nous communique une seconde impression, celle de pouvoir exister plus que toute autre chose en ce monde, de pouvoir exister à partir de nous, de nous seuls, d'être en quelque sorte comme bon nous semble.
44:22 Cette faculté à pouvoir nommer toute chose en ce monde, cette faculté là nous a convaincus que nous concédions par elle à ces mêmes choses un supplément d'existence.
44:42 Donc, que nous détenions en nous de quoi faire exister plus encore ce qui existe déjà, qui existe sans nous.
44:55 Et surtout, que nous existions plus que tout dans ce monde, sans s'apercevoir ou en s'en apercevant trop tard, que cette existence que nous nous reconnaissons,
45:12 plus elle devient dominante, plus elle se fait visible, plus ce qui est pour de bon et sans nous depuis l'origine s'efface en proportion.
45:29 La définition de ce qui n'existe pas
45:44 On pourrait essayer d'établir là ou une définition de ce qui n'existe pas et qui malgré tout parvient à exister, parvient à être constatable grâce à notre concours.
46:04 Nous avons cette capacité, cette faculté pouvant donner corps à des chimères, donner corps à des rêves, à nos rêves, à des fantasmes.
46:20 Nous parvenons à faire que ce qui n'existe pas existe au minimum à nos yeux.
46:29 Cette définition tentant de décrire ce qui n'existe pas, de le définir, dirait peut-être de lui que ce qui n'existe pas,
46:45 à la différence de ce que laisse apparaître ce qui existe en ce monde, ce qui n'existe pas est dans l'incapacité d'exister par lui seul et plus encore,
47:02 ce qui n'existe pas produit de ces déchets à partir desquels rien ne saurait exister.
47:13 Si vous prenez pour exemple le contraire, ce qui se trame sur cette planète en guise de réalité,
47:23 vous vous rendrez compte que cette réalité parvient à exister, parvient à se poursuivre à partir d'elle seule,
47:37 mais plus encore que cette réalité produit de ces déchets, de ces faux déchets, en capacité de servir sa cause,
47:51 de servir la cause de la réalité qui les a produits.
47:58 Maintenant, cette définition voulant définir ce qui n'existe pas peut, peut-être, être jointe à une seconde définition,
48:14 ce qui n'existe pas est peut-être la production, les fruits, les tentatives de prolongement de ceux qui n'ont pas les moyens d'exister.
48:29 Nous autres humains sommes peut-être de ceux-là, de ceux qui ne disposent pas en eux des moyens voulus pour exister.
48:43 [Musique]
49:02 Souvent, l'on prétend prendre du plaisir par cette affirmation, voire même par cette prétention, le plaisir est pris.
49:13 Mais ne peut-on pas se demander qui du plaisir, qui de nous parvient à prendre l'autre, à s'emparer de l'autre.
49:26 Vous remarquerez aussi que nombre de plaisirs sont en capacité de générer, de provoquer des addictions,
49:36 tabac, alcool, drogues diverses et variées, nourriture, sexe et autres emplois dans notre organisme de tout genre, sport compris.
49:48 Le plaisir, à vouloir en nous compenser, ne se transforme-t-il pas en un ascendant se devant sans cesse de se remettre en cause
50:02 pour rester et demeurer cet ascendant qu'il prétend être.
50:08 Le plaisir n'est-il pas en nous qu'une illusion, illusion réclamant pour ne pas être considérée comme une illusion,
50:19 qu'elle soit la fois d'après plus que ce qu'elle était la fois d'avant.
50:26 Une illusion ne pouvant s'empêcher pour être une illusion, de façon contre-productive, de façon désespérée,
50:38 de mettre plus encore en avant ce qu'elle envisage de dépasser.
50:45 Processus logique, une illusion grandissante, devenant plus encore une illusion,
50:54 cette illusion-là réclamant ainsi à ceux qui la jugent et la veulent réalité, qu'elle soit sans cesse plus conséquente,
51:06 qu'elle soit sans cesse et plus encore une illusion.
51:12 Nous amenant à cette question, le plaisir comme valeur de compensation est-il par définition une cause par avance perdue ?
51:26 [Musique]
51:52 Une question se pose, peut se poser, concernant nos notions de plaisir, concernant ce que nous aimons.
52:04 Aimons-nous ce que nous aimons comme on dit aimer ?
52:09 Ou aimons-nous ce que nous aimons pour faire face en nous à ce que nous n'aimons pas, à ce que nous aimons moins ?
52:21 Le plaisir ainsi incarne-t-il seulement un désir inconscient de compensation ?
52:34 Le plaisir est-il seulement en capacité en nous de donner le change ?
52:42 Si le plaisir est compensation, est compensation avant tout, cette surenchère qui l'accompagne s'explique.
52:56 Car cette compensation qu'il exerce alors en nous est subjective.
53:05 Elle ne peut être considérée comme compensation qu'en s'aidant à la surenchère.
53:14 Cette compensation-là, paradoxalement, met en exergue sur la balance le poids qu'elle est censée contrecarrer.
53:27 Poids subjectif à son tour, poids qui se révèle d'autant plus qu'on envisage de prendre sur lui un ascendant.
53:41 Ainsi, plus le plaisir compense, plus cette compensation met en évidence ce qu'il est censé compenser.
53:54 Plus alors, il est nécessaire de se rendre à ce plaisir-là, à cette compensation-là,
54:03 afin qu'elle se fasse plus évidente, qu'elle prenne sur ce qu'elle est censée dominer un ascendant réel.
54:15 Le plaisir est-il subjectif en nous à ce point qu'il n'est que plaisir par défaut,
54:25 faisant que ce que l'on dit aimer doit tout, même par opposition à ce que l'on n'aime pas ?
54:35 [Musique]
54:52 Et/et. Cette façon consistante à présenter ce qui est pour dire de ce qui est qu'il est,
55:03 paraîtra à certains indigeste. Mais après tout, le verbe être est à ce point accolé à ce qui n'est pas,
55:14 à ce qui ne serait être, qu'il est un peu normal de ramener le verbe être au verbe être,
55:23 afin qu'il soit au minimum à parts égales avec ce qui n'est pas, avec ce qui ne serait être.
55:34 Beaucoup de nos projections, de nos fantasmagories sont rattachées à ce qui est,
55:44 afin de les faire moins discutables. Il suffit de prétendre que Dieu a ordonné de ne pas voler,
55:53 de ne pas tuer, pour que ces évidences, évidences d'ordre pratique, fassent plus évident Dieu.
56:04 Plus ce qui est préconisé touche à autant de réalités de base, plus en retour ces réalités de base
56:15 font plus vrai le procédé les ayant préconisé.
56:22 Notre société actuelle à ce niveau incarne un authentique mélange des genres.
56:30 Ce qui n'est pas, ce qui ne serait être, au sujet de ce mélange là, depuis belle lurette françaisaise.
56:40 Le faux use et abuse du vrai pour paraître plus crédible et à force d'habitude,
56:49 d'habitude combiné à autant de générations, les êtres humains que nous sommes s'accoutument à ce qui n'est pas,
57:01 à ce qui ne saurait être et ne semblent plus dérangés par eux.
57:09 Cette accoutumance ne saurait être sans conséquence. Ce qui n'est pas, par cette accoutumance, n'est pas autant qu'il devrait l'être.
57:23 Ce qui n'est pas gagne du terrain sur ce qui est. La réalité en ce monde recule.
57:31 Notre environnement naturel en témoigne. Mais aussi, ce qui n'est pas, pour se poursuivre, nous conditionne à être comme nous ne pouvons être.
57:45 Ce qui n'est pas, pour nous faire à son service, nous fait disparaître en faisant de nous ce que nous ne pouvons être.
57:58 [Musique]
58:09 [Son de cloche]
58:12 Merci pour votre attention. Le temps nous a imposé sa loi, nous entraînant dans nos vies respectives une heure plus loin.
58:18 J'ignore où vous vous trouverez la semaine prochaine, mais si le cœur vous en dit, je vous donne rendez-vous pour renouveler l'expérience
58:25 en vous souhaitant d'ici là plein de hasards heureux. Bien à vous.
58:30 *toc toc*
58:30 Merci d'avoir regardé cette vidéo !