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Endormie, une ado n'entend pas le meurtre violent de son père, Ken Eaton, chez eux. L'enquête révèle un tissu de mensonges et une histoire hantée par le chagrin.

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00:00 J'étais en terminale.
00:24 J'avais deux petits boulots et mon père travaillait beaucoup.
00:30 On ne faisait que se croiser.
00:32 J'étais heureuse et tout a basculé.
01:02 Et tout ça pendant mon sommeil.
01:21 Le samedi matin, le réveil a sonné.
01:40 C'était un jour comme les autres.
01:52 Je suis allée dans le salon et je me suis demandé ce qui avait bien pu se passer pendant
02:06 que je dormais.
02:07 Tout était sans dessus dessous et j'ai vu que la porte d'entrée était restée
02:13 ouverte.
02:14 C'était très bizarre.
02:17 Il manquait des choses.
02:20 Les tiroirs étaient ouverts, ça ne ressemblait pas à mon père.
02:26 Alors j'ai décidé d'aller le réveiller.
02:39 L'odeur m'a coupé le souffle.
02:50 Je suis restée figée.
02:56 Il y avait du sang partout.
02:57 J'ai essayé de le réveiller en vain.
03:15 J'étais complètement perdue.
03:22 Qui avait pu faire ça ? Je ne comprenais rien.
03:24 Alors je suis allée chercher le téléphone.
03:30 Mes parents étant divorcés, j'ai appelé ma mère.
03:34 Je lui ai dit "Viens vite, il s'est passé quelque chose de grave".
03:45 Nous avons reçu l'appel à 7h15 du matin.
03:51 Les agents m'ont informé de l'identité de la victime.
03:56 Il s'agissait de Kenneth Eaton.
04:01 Sa fille, Jennifer Eaton, se trouvait sur place avec sa mère.
04:06 On m'a mis au courant.
04:08 J'ai traversé le salon, remonté le couloir et je suis entré dans la chambre.
04:12 La victime était étendue sur le lit.
04:17 Le corps était dévêtu, mais partiellement recouvert par une couette.
04:24 Il y avait beaucoup de sang.
04:28 L'homme portait des traces de coups au visage, comme si on l'avait d'abord frappé.
04:33 Il avait été poignardé au thorax.
04:37 La mort avait dû être très violente et j'ai immédiatement pensé que l'assaillant
04:43 s'était acharné sur sa victime, comme s'il avait éprouvé de la colère à son égard.
04:49 Ne me remerciez pas, ils ont tout fait tout seuls, les lumières et le reste.
05:01 J'ai rencontré Ken en 1984, dans l'établissement scolaire où je travaillais.
05:08 Il était professeur de lettres et on s'est tout de suite bien entendus.
05:12 C'est écrit pour Monsieur Eaton, enfilez-le.
05:18 Ken s'occupait de l'atelier théâtre et les jeunes du collège l'adoraient.
05:24 Il avait tout du metteur en scène de Broadway et tout le monde voulait jouer dans ses spectacles.
05:30 Je suis aussi professeur de lettres et enfiler s'écrit avec un seul F.
05:36 Les élèves considéraient Ken un peu comme un ami, mais ils le respectaient beaucoup
05:47 parce qu'il avait le don d'établir une vraie relation avec eux.
05:51 J'ai d'autant plus honte que je l'ai en cours.
05:55 Il était très généreux.
06:00 Il aimait recevoir ses amis, faire la fête.
06:04 Il avait le cœur sur la main.
06:07 Il donnait à n'en plus finir et n'attendait jamais rien en retour.
06:10 Il était infernal, il était drôle.
06:14 Mon père avait une voiture de sport, une Pontiac Fiero.
06:18 Il en était fou.
06:20 Sur la plaque d'immatriculation, c'était écrit « Je m'éclate ». C'était tout pour lui.
06:27 A ses yeux, la vie était une fête.
06:29 Je crois que c'était sa philosophie.
06:32 Dans la vie, il faut s'amuser et vivre chaque journée à fond.
06:37 On travaille dur, on s'amuse.
06:40 Merci à tous.
06:42 Ken m'avait dit qu'il avait été marié.
06:47 Il n'aimait pas en parler parce qu'au fond, il était soulagé d'avoir divorcé.
06:52 Il se sentait mieux comme ça.
06:55 Je suis allée vivre avec mon père à l'âge de 15 ans.
06:59 Au moment du divorce, les relations entre mes parents étaient conflictuelles.
07:04 Je ne m'entendais pas avec ma mère.
07:06 En revanche, j'étais très attachée à mon père.
07:10 J'étais sa petite fille chérie.
07:13 Je n'arrive toujours pas à comprendre que l'on ait pu s'en prendre de façon aussi atroce
07:20 à quelqu'un qui aimait si passionnément la vie.
07:23 C'était un samedi matin.
07:31 Ce jour-là, je ne travaillais pas.
07:32 J'étais chez moi quand j'ai reçu l'appel.
07:34 On m'a mandaté sur une enquête criminelle.
07:38 Quand on a pris conscience de l'importance de l'affaire, on s'est dit qu'on allait
07:43 avoir besoin d'aide.
07:44 Ce qui m'a le plus frappé dans cette affaire, c'est combien on peut être vulnérable
07:53 quand on est plongé dans le sommeil.
07:55 Notre domicile est censé être un sanctuaire, un lieu sûr.
08:02 On n'imagine pas que quelqu'un puisse entrer chez nous et menacer notre vie ou la vie
08:08 de ceux qui nous sont chers.
08:09 Je crois que cette histoire m'a marqué à vie.
08:15 La scène de crime ne permettait pas vraiment de comprendre ce qui s'était passé.
08:22 On savait seulement que la victime avait été frappée, puis poignardée sur le lit.
08:28 Ça ne faisait pas de doute.
08:30 Et soudain, dans la cuisine, on a vu un bloc de couteau.
08:41 L'un des emplacements était vide.
08:44 Il en manquait un, le plus grand.
08:45 Il n'était nulle part dans l'appartement.
08:48 Il y avait de fortes chances que ce soit le couteau qui avait servi à tuer M.
08:55 Eaton.
08:57 C'était peut-être un cambriolage qui avait mal tourné.
09:01 Mais ce que je trouvais curieux, c'était cet acharnement sur la victime.
09:09 Généralement, dans ce genre d'agression, la victime hurle et se débat.
09:14 Or, Jennifer Eaton était présente dans la maison.
09:18 Et elle ne s'était pas réveillée.
09:20 Lors de notre premier entretien avec Jennifer, elle nous a dit qu'elle avait d'abord appelé
09:33 sa mère pour lui faire part de ce qu'elle venait de découvrir.
09:36 Toute l'équipe d'enquêteurs a trouvé son comportement étrange.
09:41 Pourquoi avait-elle appelé sa mère au lieu de joindre directement les secours ou la police?
09:48 Le fait que Lee Newton se soit rendu sur place, qu'elle ait été prévenue avant tout le
09:55 monde, soulevait un certain nombre de questions.
09:58 Est-ce qu'elle pouvait être impliquée?
10:02 Lynn et Ken Eaton étaient divorcés.
10:15 Dans ce genre de situation, les rapports peuvent être conflictuels.
10:18 Cela avait-il un lien avec sa mort?
10:23 Jen?
10:29 Chérie?
10:35 Chérie?
10:41 Chérie?
10:47 Chérie?
10:53 Chérie?
10:59 Nous nous sommes tous sentis très vulnérables après la mort de Ken.
11:11 On voulait tous savoir ce qui s'était passé.
11:15 Qui avait pu faire ça?
11:17 Et l'idée que Jennifer était là pendant ce meurtre, qu'elle était présente à côté,
11:25 et qu'elle avait été mis dans son lit, ça dépassait l'imagination.
11:29 Je n'ai pas de mots pour décrire ça.
11:31 C'était tout simplement terrifiant.
11:39 Il y avait beaucoup d'inconnus dans l'équation et il nous fallait des réponses.
11:45 La porte d'entrée n'avait pas été forcée.
11:49 Comment l'assaillant était-il entré?
11:51 Monsieur Eaton l'avait-il ramené chez lui ou lui avait-il ouvert la porte?
11:57 Est-ce que quelqu'un avait les clés de l'appartement?
12:01 On essayait de comprendre pourquoi Jennifer avait agi de cette façon.
12:05 Et on s'intéressait à Lynn Eaton, l'ex-épouse, pour savoir quel rapport elle entretenait avec son ex-mari.
12:13 Ma mère ne m'a jamais confié la vraie raison de leur divorce.
12:19 J'ai tout découvert plus tard.
12:23 Je ne sais plus si Ken m'avait dit qu'il était homo, mais je crois que je le savais.
12:30 Ademoine en faisait partie d'un groupe de papagais.
12:35 C'était un groupe d'entraide.
12:37 On échangeait sur les difficultés qui étaient les nôtres à vivre normalement tout en ayant une vie secrète.
12:44 Nous avions tous grandi à une époque où ce n'était pas facile d'être homosexuel,
12:50 particulièrement pour ceux qui avaient fait des études supérieures.
12:55 Il n'y avait pas encore de loi anti-discrimination.
12:59 Si cela avait été découvert, Ken n'aurait pas pu être professeur ou il aurait perdu son emploi.
13:07 Mon père voulait vivre libre et être lui-même.
13:12 Merci à tous de votre présence. Ça me touche beaucoup.
13:16 Après le divorce de mes parents, ma mère a traversé une mauvaise passe.
13:22 Toutes les scènes de crimes sont choquantes, terrifiantes.
13:28 Mais ce meurtre était particulièrement violent.
13:32 C'était le geste d'une personne très en colère, folle de rage.
13:37 S'agissant de la mère, elle n'avait pas les clés de l'appartement.
13:43 Elle n'y venait que rarement.
13:46 Jennifer était bouleversée.
13:49 Elle était véritablement en état de choc après avoir découvert le corps de son père.
13:55 C'est pourquoi elle a d'abord appelé sa mère.
13:58 Nous avons fini par comprendre que ni Lynn ni Jennifer n'étaient impliquées dans la mort de Ken Eaton.
14:08 Jennifer a passé toute la journée avec les enquêteurs.
14:15 Nous sommes retournés à l'appartement avec elle pour qu'elle nous dise si des objets avaient disparu.
14:21 C'est la dernière fois que j'y suis allée.
14:24 C'était terrible pour moi de revenir là et de revoir l'appartement en plein jour.
14:32 J'ai vu qu'il manquait des choses.
14:40 Il n'y avait plus de répondeur dans la cuisine.
14:44 Sa collection de films avait disparu.
14:47 Et le magnétoscope aussi.
14:51 Et il manquait tous ses T-shirts.
14:56 Nous avons demandé à Jennifer de retracer son emploi du temps dans les heures qui avaient précédé la découverte du corps.
15:15 Elle avait demandé à son petite amie de passer la chercher à la sortie du travail.
15:21 Mon copain est passé me prendre à deux heures à la fin de mon service.
15:25 Le vendredi soir, mon père sortait.
15:29 Quand je suis rentrée à la maison, il n'était pas là.
15:31 Mais ça n'avait rien d'anormal.
15:35 J'ai verrouillé la porte.
15:38 Et j'ai dû m'endormir vers 2h15, 2h30 du matin.
15:44 J'ai dû me reposer.
15:47 J'ai dû me reposer.
15:50 J'ai dû me reposer.
15:53 J'ai dû me reposer.
15:56 J'ai dû me reposer.
15:59 J'ai dû me reposer.
16:02 J'ai dû me reposer.
16:05 J'ai dû me reposer.
16:08 J'ai dû me reposer.
16:12 Salut chérie. Je suis rentré.
16:16 J'ai dit à la police que je l'avais vu cette nuit-là.
16:20 Quand il a poussé la porte, j'ai pensé...
16:22 "Ok, c'est bon. Je peux dormir tranquille maintenant."
16:27 Il m'a dit "Je t'aime fort. On se voit demain."
16:30 J'ai répondu "Moi aussi, je t'aime."
16:35 Je me suis rendormie tout de suite, très profondément.
16:41 Elle nous a dit que quand son père était rentré vers 3h30 du matin,
16:46 elle l'avait entendu parler avec quelqu'un,
16:49 mais elle ne savait pas avec qui.
16:51 Elle n'a pas reconnu la voix.
16:53 Elle s'est rendormie en se disant simplement qu'il y avait quelqu'un d'autre dans l'appartement.
16:59 Elle n'a pas entendu de dispute ou de bagarre.
17:03 On s'est alors intéressé à l'existence de Ken Eaton
17:07 pour tenter de savoir qui était avec lui cette nuit-là.
17:12 Il avait prévu d'aller dîner au théâtre Ingersoll,
17:19 puis de poursuivre la soirée ailleurs avec son ami Bernard.
17:23 Je l'avais rencontré. Je ne sais pas s'ils étaient ensemble, mais ils étaient amis.
17:30 Je ne le connaissais pas bien.
17:33 Nous nous sommes entretenus longuement avec Bernard.
17:37 Il nous a dit que Ken et lui étaient très amis,
17:41 mais aussi qu'il avait eu une relation avec l'ex-compagnon de Ken.
17:46 Ça avait fait des vagues.
17:48 On s'est donc demandé quelle était la nature de leur relation,
17:52 et si ce n'était pas une histoire de triangle amoureux qui aurait mal tourné.
17:56 Bernard nous a rapporté qu'après avoir dîné au théâtre Ingersoll avec Ken,
18:02 ils s'étaient rendus tous les deux dans un bar fréquenté par la communauté gay de la ville,
18:07 le Brass Garden.
18:09 Ils y sont restés jusqu'à la fermeture.
18:13 Quand le Brass Garden a fermé,
18:16 Ken Eaton a déposé Bernard devant chez lui,
18:20 puis il est reparti.
18:22 Il devait être 2 heures du matin.
18:25 Bernard avait peut-être fait demi-tour et suivi Ken jusqu'à chez lui.
18:31 [Musique]
18:37 Nous lui avons posé la question
18:40 "étiez-vous dans l'appartement de Ken Eaton la nuit du samedi 13 février 1988 ?"
18:46 Évidemment, il a dit non.
18:49 Mais on ne pouvait pas prendre cette réponse pour argent comptant.
18:53 Pour moi, comme c'était la dernière personne à avoir vu mon père,
18:58 ça ne pouvait être que lui.
19:00 Il ne nous avait peut-être pas dit toute la vérité.
19:04 La soirée s'était peut-être mal passée.
19:07 Je ne connaissais pas Bernard.
19:11 Je ne savais pas ce qu'il y avait entre nous.
19:14 C'était la Saint-Valentin.
19:16 C'est une soirée que l'on n'a pas envie de passer seul.
19:19 Personne n'aime être rejeté, c'est normal.
19:23 Peut-être que c'est ce qui s'était passé ce soir-là,
19:26 mais la situation s'était envenimée.
19:29 Les secrets, c'est terrible.
19:31 Les mensonges aussi.
19:33 Ça peut vous détruire.
19:35 [Musique]
19:39 [Bruit de moteur]
19:46 [Bruit de porte qui s'ouvre]
19:53 [Bruit de moteur]
19:56 Après le meurtre de mon père, j'ai dû...
20:06 recommencer à vivre.
20:10 Mais tout avait changé.
20:12 C'était une autre vie.
20:15 Chaque soir, quand j'allais me coucher,
20:18 l'angoisse montait en flèche.
20:20 J'avais peur...
20:22 que quelqu'un entre dans l'appartement pendant la nuit
20:25 et vienne m'agresser.
20:27 J'ai dormi avec un couteau de boucher caché sous l'oreiller
20:31 pour me rassurer.
20:33 [Musique]
20:37 Jennifer nous a dit que le soir du meurtre,
20:40 Ken avait passé la soirée avec un certain Bernard,
20:43 un ami à lui.
20:45 À ce stade de l'enquête,
20:47 Bernard était donc la dernière personne
20:49 qui aurait été en contact avec Ken Eaton
20:51 avant sa mort.
20:53 Bernard nous avait dit que Ken l'avait déposé devant chez lui.
20:56 Disait-il la vérité ?
20:59 Ou est-ce que c'était lui qui avait tué Ken ?
21:03 [Musique]
21:06 Ce matin-là, au réveil, j'ai reçu un coup de fil.
21:11 Un ami m'a appelé et il m'a dit...
21:14 "Tu es au courant pour Ken ?"
21:18 Il est mort.
21:20 Il a été tué.
21:22 Je n'arrivais pas à y croire.
21:25 Et...
21:27 quelques instants plus tard,
21:29 j'ai reçu un autre appel de la police de West Des Moines
21:32 qui me demandait de me rendre au poste.
21:36 J'ai compris qu'ils me soupçonnaient
21:39 d'être liés à ce meurtre.
21:41 Je me souviens que j'étais bouleversé.
21:46 Pourquoi quelqu'un avait-il voulu le tuer
21:49 de façon aussi atroce ?
21:51 Je n'arrivais pas à comprendre.
21:53 Aujourd'hui encore,
21:55 c'est un acte que je ne parviens pas à appréhender.
21:59 Heureusement, j'avais un alibi
22:04 qui a pu être confirmé.
22:07 L'un des résidents de mon immeuble a entendu ma voiture.
22:11 Des voisins m'ont entendu ouvrir la porte de mon appartement
22:15 et me refermer vers 2h du matin.
22:18 Je me souviens être descendu de la voiture
22:21 et avoir regardé Ken partir.
22:23 Comment j'aurais pu imaginer
22:25 que c'était la dernière fois que je lui parlais ?
22:28 J'ai été totalement dévasté par cette histoire.
22:32 Il était mon ami.
22:34 Nous venions de passer une soirée très agréable.
22:38 Et le souvenir de ce moment heureux, c'est comme...
22:41 évaporé. Je nageais en plein cauchemar.
22:45 Quand j'ai rencontré Ken, j'avais 25 ans.
22:52 Lui devait en avoir 40 à cette époque.
22:56 J'ai eu beaucoup de mal à faire mon coming out.
23:00 À ce moment-là, j'étais très jeune.
23:06 J'étais un garçon naïf
23:08 et j'étais très angoissé à l'idée de l'avenir qui m'attendait.
23:12 Pour moi, la présence de quelqu'un comme Ken dans ma vie
23:15 était salutaire.
23:17 C'était un homme pour qui j'éprouvais de l'admiration.
23:21 Ce soir-là, Ken est venu me chercher chez moi,
23:24 dans sa belle voiture de sport.
23:27 Comme d'habitude, il était bien coiffé,
23:32 il s'était habillé pour l'occasion.
23:35 Il était d'excellente humeur, prêt à passer une bonne soirée.
23:39 Bernard a confirmé qu'ils avaient dîné ensemble
23:43 en regardant le spectacle.
23:45 Après, on a décidé de continuer la soirée.
23:48 On a repris la voiture et on est allés au Brass Garden.
23:52 Nous avons cherché à savoir qui était présent au Brass Garden ce soir-là.
23:59 Nous avons découvert que parmi les clients,
24:02 il y avait un homme avec qui M. Eaton avait entretenu
24:05 une longue relation auparavant.
24:07 Il s'appelait Ed.
24:09 J'étais présent, moi aussi.
24:13 Et quand Ed est entré dans le bar,
24:15 l'attitude de Ken a changé.
24:18 La tension est montée.
24:21 On l'a tous senti.
24:28 Ed a été le compagnon de mon père pendant plusieurs années.
24:33 Il vivait avec nous.
24:35 C'était son grand amour.
24:37 Il ressemblait à ma mère.
24:40 Il était calme.
24:42 Mon père, lui, était infernal, débordant de vie.
24:46 Mais ils se complétaient et ça collait parfaitement entre eux.
24:51 Nous étions heureux.
24:54 Mais à l'automne 1987, les choses se sont gâtées.
24:59 Il y avait des cris, des disputes, des portes qui claquaient.
25:07 En décembre 1987, Ed est parti.
25:12 Après leur rupture,
25:18 Ed et moi, nous nous sommes sentis très attirés l'un par l'autre.
25:24 Mais ça n'a pas duré.
25:26 Ça a été une petite histoire rapide de quelques semaines.
25:31 Je sais que Ken me tenait pour responsable de leur rupture,
25:35 de la fin de cette belle histoire.
25:38 C'était une situation difficile pour lui.
25:42 Il avait eu des mots très durs.
25:45 Ce soir-là, nous sommes allés dîner ensemble
25:48 parce que je voulais renouer le contact avec lui,
25:51 m'excuser, lui demander de me pardonner.
25:55 Nous nous sommes intéressés à Ed
26:03 et au rapport qu'il entretenait alors avec Ken.
26:06 Ils avaient rompu deux mois plus tôt.
26:09 À la fin de leur histoire, ils se disputaient souvent.
26:12 En plus, Ed avait eu une relation avec Bernard.
26:16 C'était une situation très complexe.
26:19 En fouillant les effets personnels de Ken,
26:22 nous avons trouvé son testament qui a éveillé nos soupçons.
26:26 Ken Eaton avait une assurance vie
26:29 et il avait désigné Ed comme bénéficiaire.
26:32 S'agissant d'un meurtre, la clause de double indemnité s'appliquait.
26:38 C'est ce qui s'est passé.
26:40 Tout allait à Ed parce que c'est ce que mon père avait écrit dans son testament.
26:46 On ne compte plus les homicides motivés par l'appât du gain.
26:50 L'argent était donc un mobile possible.
26:53 Ed a accepté de se présenter au poste et nous l'avons interrogé.
27:00 Il nous a dit que ce soir-là, au Brass Garden,
27:03 il avait discuté avec Ken.
27:06 Il semble qu'ils aient eu une conversation passionnée, un peu houleuse.
27:11 Ils ont parlé argent et évoqué la question du partage des affaires.
27:16 Ils ont discuté un long moment.
27:20 A la fin, il ne semblait pas être parvenu à un accord.
27:24 Ed nous a dit que peu après, il était parti avec ses amis
27:29 et qu'ils avaient continué la soirée chacun de leur côté.
27:33 Il nous a dit qu'il s'était aimé, mais que pour sa part, avec le temps,
27:38 il n'éprouvait plus les mêmes sentiments, ce qui les avait conduits à la rupture.
27:43 Il n'a évoqué aucune forme d'hostilité entre eux.
27:46 Il semblait dire que tout cela n'avait rien de dramatique.
27:50 Il a précisé qu'il n'avait plus les clés de l'appartement de Ken Eaton.
27:54 Il les lui avait rendues.
27:57 Est-ce qu'il mentait qu'il les avait encore ?
28:00 Est-ce qu'il en avait fait un double ?
28:03 Est-ce qu'en rentrant chez lui, cette nuit-là, Ken avait trouvé Ed dans son appartement ?
28:08 Tout ce que l'on savait, c'est que pendant que son adorable fille dormait paisiblement dans son lit,
28:21 Ken Eaton avait rendez-vous avec le diable,
28:24 qui l'avait suivi jusque dans son appartement.
28:30 Après le meurtre de Ken, j'avais du mal à trouver le sommeil.
28:33 C'était horrible.
28:36 Je rêvais de ce meurtre.
28:39 J'imaginais ce qui avait pu se passer.
28:42 Quand j'ai appris que Jennifer dormait dans la chambre voisine,
28:45 j'ai eu peur.
28:48 Je me suis dit que j'allais me faire un coup de coeur.
28:51 Je me suis dit que j'allais me faire un coup de coeur.
28:54 Je me suis dit que j'allais me faire un coup de coeur.
28:57 Quand j'ai appris que Jennifer dormait dans la chambre voisine,
29:00 je me suis dit...
29:03 Est-ce que le meurtrier savait qu'elle était là ?
29:06 Et s'il le savait,
29:09 c'est monstrueux.
29:12 Nous avons essayé de retracer la chronologie des dernières heures de Ken Eaton.
29:25 Le bar avait fermé à 2 heures.
29:28 Ken avait déposé Bernard chez lui, mais après, on ne savait pas où il était allé.
29:32 Selon Bernard, il n'était pas rentré directement chez lui.
29:36 Il pensait qu'il avait pu aller faire un tour du côté du Gay Loop.
29:40 Le Gay Loop était un lieu où les homosexuels se retrouvaient en fin de soirée,
29:48 au coin de la 8e rue et de Crocker Street.
29:51 C'était une sorte de terrain vague, grand comme deux pâtés de maison.
29:56 Il n'était fréquenté que pendant la nuit.
30:00 Quand Ken se sentait seul, il lui arrivait d'y aller faire un tour,
30:06 pour essayer de faire des rencontres.
30:09 On pouvait se garer facilement, donc c'était simple.
30:13 On arrêtait la voiture et on regardait autour de nous qui était présent cette nuit-là.
30:19 Le Gay Loop n'était pas un endroit sûr.
30:23 Des hommes s'étaient déjà fait agresser là-bas, très violemment.
30:28 Avec l'équipe d'enquêteurs, nous avons donc mis ce lieu sous surveillance.
30:36 Nous recherchions des témoins susceptibles d'avoir croisé Ken Eaton.
30:41 Quelqu'un s'est souvenu avoir vu le véhicule de Ken Eaton
30:47 grâce au "Je m'éclate" inscrit sur la plaque d'immatriculation.
30:51 Le témoin disait l'avoir aperçu vers 2h30 ou 3h du matin.
30:58 Nous savions donc que Ken Eaton était bien allé au Gay Loop
31:04 après avoir déposé Bernard chez lui.
31:07 L'un des témoins l'a vu faire plusieurs tours en voiture
31:11 avant de s'arrêter de se garer.
31:14 À ce moment-là, un véhicule noir s'est arrêté derrière lui
31:17 avec à bord 2 occupants, 2 hommes blancs.
31:21 C'était une Chevrolet Camaro 1968.
31:26 Puis, des témoins ont vu l'un des 2 occupants de la Camaro sortir de la voiture
31:33 et se diriger vers le véhicule de M. Eaton.
31:37 Il lui a parlé à un moment.
31:43 Ensuite, les témoins nous ont rapporté que M. Eaton avait redémarré,
31:47 qu'il avait quitté les lieux avec derrière lui cette Camaro noire qui le suivait.
31:53 Qui étaient ces hommes ?
31:56 L'un des témoins avait pu voir le type qui était sorti de la voiture.
32:01 Un homme de constitution moyenne, d'environ 1m80.
32:05 Le conducteur avait l'air plutôt costaud, assez carré.
32:11 La description physique de ces 2 individus ne correspondait en rien
32:15 avec celle des amis de Ken Eaton.
32:18 Ce ne pouvait être ni Ed ni Bernard.
32:22 De plus, ni l'un ni l'autre ne conduisait ce genre de véhicule.
32:27 Il fallait absolument retrouver les 2 types de la Camaro.
32:40 Les équipes ont donc commencé à surveiller toute la zone du guéloupe
32:44 au cas où cette Camaro noire réapparaîtrait.
32:47 Mais ça n'a rien donné.
32:50 Et puis nous avons reçu un appel de la police de Des Moines, la ville voisine,
32:59 qui a fait basculer l'enquête.
33:02 Des éboueurs venaient de découvrir un couteau taché de sang dans une baine à ordures
33:08 enveloppé dans un chiffon.
33:11 Ils ont prévenu la police de Des Moines.
33:14 Or, sur la scène de crime, on avait vu qu'il manquait un couteau.
33:19 Le couteau retrouvé dans la baine à ordures correspondait à celui
33:25 qui manquait dans la cuisine de l'appartement.
33:28 Ce couteau était bien l'arme du crime.
33:35 J'ai essayé d'assembler toutes les pièces du puzzle.
33:39 Cette baine à ordures se trouvait à une douzaine de kilomètres du domicile de Ken Eaton.
33:46 Et tout à coup, j'ai eu l'intime conviction qu'on était sur la bonne piste.
33:52 Les équipes se sont relayées pour patrouiller dans le secteur.
33:57 Et dans la journée, on a repéré une Camaro 1968.
34:04 Grâce à la plaque, on a retrouvé le propriétaire.
34:08 Un certain James Michael Green, âgé de 20 ans.
34:14 Il se faisait aussi appeler Billy Green.
34:18 Il avait déjà été arrêté et condamné pour vol avec effraction.
34:24 Nous avons découvert que lors de ce vol, Billy Green avait un complice.
34:32 Un certain Gary Titus, âgé de 19 ans.
34:37 Et Billy Green et Gary Titus habitaient ensemble.
34:41 Est-ce que Billy Green ou Gary Titus connaissaient Ken Eaton ?
34:50 Entrez !
34:53 [Musique]
34:56 Quand j'ai appris ce qui s'était passé, j'en ai eu la chair de poule.
35:10 Tout ça pendant que je dormais.
35:15 C'était une torture.
35:18 Un cauchemar.
35:21 Pourtant, c'était vrai.
35:23 Nous avions le sentiment d'avoir enfin identifié les responsables de la mort de Ken Eaton.
35:39 Billy Green et Gary Titus.
35:45 Nous avions des témoins qui avaient vu une Camaro noire 1968 suivre le véhicule de Ken Eaton depuis le Gay Loop.
35:52 Nous avions l'arme du crime qui avait été jetée tout près de leur domicile.
35:59 Nous avions beaucoup d'éléments qui semblaient les désigner comme coupables.
36:03 Maintenant, il fallait les entendre.
36:07 À ce stade de l'enquête, nous avions assez d'éléments pour les convoquer tous les deux et les interroger.
36:14 [Musique]
36:17 Green et Titus ont été interrogés en même temps, mais séparément.
36:25 La gentille mane et moi, on s'est occupé de Billy Green.
36:29 Je lui ai regardé et je lui ai dit "raconte-moi tout".
36:33 Gary Titus lui avait interdit de parler.
36:36 Mais il a dit "je ne peux pas garder ça pour moi".
36:42 Et il nous a raconté la soirée du vendredi 12 février.
36:46 En partant de chez Gary, on avait trois packs de douze bières dans la voiture.
36:51 À la fin de la soirée, il n'y avait plus rien.
36:54 Alors on a décidé d'aller du côté du Gay Loop, voir si on trouvait de l'alcool.
36:58 Au départ, M. Green et M. Titus cherchaient simplement de l'alcool.
37:04 Mais pour en acheter, il leur fallait de l'argent.
37:07 Alors ils se sont dit que le Gay Loop était peut-être le meilleur endroit où trouver quelqu'un,
37:13 une personne homosexuelle à qui ils pourraient soutirer cet argent.
37:17 L'intérêt pour eux de se rendre à cet endroit, c'est qu'à cette époque en 1988,
37:27 aucune victime de vol ou d'agression ne se serait risquée à porter plainte.
37:33 La découverte de leur homosexualité pouvait leur coûter leur emploi et nuire à leur relation sociale.
37:39 Billy nous a confirmé que Gary et lui s'étaient garés derrière la voiture de Ken.
37:46 Gary est sorti du véhicule.
38:01 Et il s'est entretenu quelques instants avec Ken et Titus.
38:05 Ils ont appâté M. Eaton en le laissant croire qu'ils étaient disposés à avoir une relation sexuelle avec lui.
38:13 Il a demandé à Gary si on était homo et quel genre de choses on aimait faire.
38:18 Et il nous a proposé de l'alcool.
38:21 Il a dit "Vous voulez boire un verre ? Dans ce cas, suivez-moi."
38:27 Et Gary Titus a répondu "Ça marche."
38:31 Ils sont allés chez Ken Eaton.
38:38 Il les a fait entrer.
38:40 Allez, entrez.
38:46 Ils s'étaient entendus. Leur plan était le suivant.
38:49 Une fois qu'ils seraient seuls avec lui, ils lui feraient les poches.
38:52 On est allés dans sa chambre.
38:57 En chemin, Ken s'est arrêté et a passé la tête dans la chambre de Jennifer.
39:02 Ils se sont dit "Je t'aime."
39:04 Ken a refermé la porte et Jennifer s'est ré-endormie immédiatement.
39:08 Gary devait s'occuper de distraire M. Eaton.
39:19 C'était leur plan.
39:21 Et pendant ce temps, Billy fouillerait l'appartement pour mettre la main sur son portefeuille et d'éventuels objets de valeur.
39:28 J'ai trouvé le portefeuille dans son manteau dans la penderie.
39:33 Mais il n'y avait que 3 dollars.
39:35 Je suis allé dans la cuisine et j'ai vu un support avec plusieurs couteaux.
39:39 J'ai attrapé l'un des couteaux et je l'ai gardé en main.
39:44 Ken était face à nous en caleçon.
39:46 On lui a dit qu'on n'était pas homos.
39:49 Gary l'a poussé sur le lit et a commencé à le frapper.
39:52 J'ai pris le couteau que j'avais posé par terre et je l'ai menacé avec.
39:56 Je n'avais pas l'intention de m'en servir.
40:00 Je l'avais en main et j'ai dit "Où est ton fric ?"
40:03 Il a répondu qu'il n'avait rien et je lui ai dit "Bouge pas sinon t'es mort."
40:08 Je ne voulais pas mais il a crié, il s'est redressé, il m'a repoussé.
40:13 Alors je l'ai poignardé.
40:17 Jennifer n'a rien entendu parce qu'à ce moment-là,
40:20 Billy Green a attrapé un oreiller et il l'a maintenu sur le visage de M. Eaton.
40:25 Ils l'ont laissé là, ils ont pris le couteau et ils ont continué de fouiller l'appartement.
40:32 À la fin, je lui ai demandé s'il voulait ajouter quelque chose.
40:37 Et Billy Green a dit qu'avant de partir, il était allé dans la chambre de J.
40:43 Ils m'ont regardé dormir.
40:46 Ils ont ouvert la porte de ma chambre, ils m'ont regardé pendant que je dormais.
40:52 Quand il m'a dit ça, j'ai eu des sueurs froides.
41:02 Elle n'imaginait pas combien elle avait eu de la chance.
41:06 Je me suis dit "Je vais me faire un petit déjeuner."
41:10 Elle n'imaginait pas combien elle avait eu de la chance.
41:13 J'ai fini par penser que Dieu m'avait plongé dans un sommeil profond pour me protéger,
41:19 pour que je ne me réveille pas à ce moment-là.
41:22 Voilà, c'est terminé.
41:28 Ce garçon allait finir en prison.
41:37 M. Green et M. Titus ont été jugés séparément devant un jury populaire
41:42 et condamnés tous les deux pour meurtre au premier degré.
41:46 État de l'Iowa, meurtre au premier degré est puni de la réclusion criminelle à perpétuité,
41:52 sans possibilité de libération conditionnelle.
41:55 Lorsque le verdict est tombé, j'ai fait...
42:05 J'ai respiré.
42:07 J'ai serré mon grand-père et j'ai pleuré.
42:10 Pleuré.
42:11 Quand on lui a raconté, ça a été très dur.
42:15 Je m'en souviens encore.
42:17 Elle était traumatisée. Alors...
42:22 Oui, je suis heureux de voir ce qu'elle est devenue.
42:26 Et je suis fier d'avoir en quelque sorte contribué
42:30 à ce qu'elle puisse se reconstruire.
42:34 C'est tout.
42:35 Le meurtre de M. Eaton doit tout au hasard.
42:44 Il voulait rencontrer quelqu'un.
42:47 Malheureusement, ceux qui se sont arrêtés derrière lui s'appelaient Billy Green et Gary Titus.
42:52 Et ces deux-là étaient rongés par le mal.
42:54 Je me demande encore pourquoi
42:58 Ken a invité
43:02 ces deux types chez lui.
43:04 Ce genre de pratique fait partie des stéréotypes attachés aux homosexuels,
43:08 mais Ken n'était pas comme ça.
43:10 Et je ne peux pas m'empêcher de penser
43:14 que ce qui a motivé cette décision, c'est sa solitude,
43:18 la rupture qu'il venait de vivre avec Ed.
43:21 Ce dont je me souviens et qui m'a blessé quand cette tragédie est arrivée,
43:28 c'est que tous les gros titres de la presse parlaient de l'affaire de l'homosexuel qui s'était fait tuer.
43:34 Et on passe à côté de tout si on catalogue les gens de cette façon,
43:39 si on les réduit à ça.
43:41 On oublie que Ken était un père fabuleux,
43:44 un ami formidable,
43:46 un professeur talentueux.
43:48 Il était d'abord et surtout une belle personne.
43:52 Et j'espère sincèrement que c'est ce que l'on retiendra de lui.
43:57 Mon père...
43:59 ne m'a pas vu grandir,
44:04 recevoir mon diplôme.
44:07 Il n'a pas vu la naissance de mes cinq enfants.
44:10 Ces types m'ont volé ça.
44:14 Si j'avais pu lui parler une dernière fois,
44:18 je lui aurais dit que je l'aimais infiniment.
44:20 Je lui aurais dit "Merci d'avoir fait de moi celle que je suis aujourd'hui.
44:24 C'est grâce à toi."
44:26 C'est grâce à toi.
44:29 Merci à tous.
44:33 Sous-titrage Société Radio-Canada
44:36 [Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org]

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