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Les procédures judiciaires engagées en raison de troubles du voisinage concernent des activités aussi variées que l’agriculture, la restauration, l’industrie, les écoles ou les crèches. Elles cristallisent les conflits et engorgent les tribunaux. Face à cette situation, Nicole Le Peih, députée du Morbihan et agricultrice, a porté un projet de loi sur les troubles du voisinage.

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Transcription
00:00 Bonjour à toutes et à tous. Alors la genèse de ce projet de loi.
00:05 Pourquoi ça m'a perturbée et j'en ai pris la responsabilité de cette proposition de loi et de ce texte.
00:22 Ce qui a fait déclencher, après maintes et maintes réflexions, je suis contactée par le maire d'une petite commune près de chez moi au mois d'août.
00:32 Après une météo capricieuse en juillet, vous avez vu, et donc au mois d'août, il y a la moisson.
00:38 Trois jours de moisson, trois jours de moissonneuses batteuses et pour certains de nuisances sonores des moissonneuses batteuses qui font la moisson.
00:49 Trois jours sur 365 jours de lait. Donc après maintes et maintes plaintes en mairie, le maire écrit un article sur Facebook.
00:57 Ni une ni deux, je vais le voir, je me dis là, on touche le fond.
01:03 Les nuisances sonores, les nuisances olfactives, une crêperie qui elle aussi, ayant travaillé depuis des années, là se retrouve aujourd'hui en difficulté
01:14 parce que le voisin ne supporte plus les nuisances olfactives, or elle était là depuis 20-30 ans.
01:19 Je me dis, on ne va pas pouvoir continuer à vivre ensemble sur un territoire au quotidien si chacun ne fait pas la part des choses.
01:26 Ce projet de texte était presque prêt. On me le confie au mois juillet, justement juillet-août.
01:36 Je le prends et j'ai travaillé pendant six mois sur ce projet.
01:40 Il y avait déjà des demandes, on va dire des citoyens français, de l'ancrer dans le code civil.
01:52 Du coup, on me l'a confié, je m'en suis emparé en tant qu'agricultrice, donc je connais le territoire rural
02:00 et à la fois j'ai fait beaucoup d'auditions avec aussi des personnes du territoire urbain, des néo-ruraux et des néo-urbains.
02:09 Et je me suis dit, puisqu'il y a eu un décret qui est quand même passé au mois d'octobre dernier,
02:14 un décret du gouvernement qui a été apposé que chaque conflit entre deux personnes doit passer impérativement par une médiation.
02:22 Je me suis dit, ça va déjà régler une partie des problèmes, parce que les gens vont apprendre à se parler avant d'aller rester en justice directement.
02:29 Voilà, première chose, donc premier étage de la fusée, apprendre à se parler en médiation.
02:36 Ensuite, s'il y a une problématique, on analyse.
02:39 Moi, j'ai souhaité que ce soit ancré dans le code civil pour qu'il y ait au moins, on va dire, une trace indélébile,
02:49 que ce soit bien ancré, que les gens prennent conscience que c'est une loi pour apporter une facilité du bien-vivre ensemble sur un territoire.
03:01 Et que vous êtes inscrit dans le code civil. C'est bien à travers ce code civil que nous apprenons à vivre ensemble au quotidien.
03:07 Avec l'antériorité, les trois conditions, c'est bien l'antériorité, donc elle existe avant que vous arriviez sur un territoire.
03:15 Avant que vous arriviez, il y avait une histoire sur ce territoire.
03:18 Vous n'avez pas fait vos arrivées. Vous achetez un terrain, vous arrivez sur un territoire.
03:22 Il existait une histoire d'hommes, de femmes, d'animaux, de paysages, d'architecture.
03:29 Il existait déjà une histoire avant vous.
03:31 Donc le jour où vous achetez un terrain, une maison, vous êtes conscient en votre âme et conscience, vous êtes conscient de votre achat.
03:38 Vous êtes conscient de tous les acteurs du territoire, puisque vous avez choisi vous-même, en pleine conscience, de venir là.
03:43 Donc vous êtes totalement responsable de ce que vous allez acheter.
03:47 Donc vous avez vu qu'il y a une scierie à côté, vous avez vu qu'il y a une crêperie, vous avez vu qu'il y a des exploitations avec l'école,
03:52 vous avez vu que vous êtes presque proche d'un hôpital, vous avez vu qu'il y a une école avec des enfants qui sortent, etc.
03:58 Donc vous connaissez, vous êtes censé connaître l'ambiance de votre futur projet.
04:04 Vous décidez de vous installer là.
04:06 Donc c'est en pleine conscience que vous arrivez.
04:08 Donc vous êtes conscient qu'il existe une histoire avant vous.
04:11 Donc pour apprendre à bien vivre ensemble sur un territoire, c'est ce qu'on nous inculque quand même depuis la naissance,
04:17 c'est que chacun doit faire sa part pour apprendre à bien vivre ensemble.
04:24 Maintenant s'il y a vraiment une nuisance, quelque chose qui vous dérange, vous pouvez toujours rester en justice,
04:30 mais vous devrez vérifier et on vérifiera que l'antériorité du projet, enfin l'antériorité pardon, de l'activité qui était là avant vous,
04:39 elle était bien là depuis tant de temps, etc.
04:41 Ensuite, elle doit rester bien sûr en accord avec la législation, sinon elle serait fermée.
04:47 Que ce soit une entreprise, elle serait fermée, ok ?
04:50 Si elle n'était pas en accord.
04:52 Donc ça veut dire qu'elle est en accord avec la réglementation, qui parfois change.
04:57 Vous achetez une maison collée à un pub, c'est le cas autour de chez nous, collée à un pub,
05:03 même si c'était une jolie maison bourgeoise avec du caractère patrimonial, etc.
05:08 Vous savez qu'il y a un pub à côté.
05:10 Vous savez que jusqu'à 1h du matin, vous aurez du bruit.
05:12 Ok.
05:13 Mais il y a aussi une réglementation qui dit, apposée par le maire parfois,
05:19 le 21 juin, jour de la fête de la musique, il y aura une dérogation pour des effets sonores,
05:24 sans doute jusque 3h du matin.
05:26 C'est aussi donc en accord avec la législation, en accord avec la réglementation.
05:30 Et puis que ce soit bien sûr dans les mêmes conditions.
05:32 Si demain l'entreprise à côté de chez vous se multiplie par 4,
05:36 c'est qu'elle a demandé un accord à l'urbanisme pour être multipliée par 4,
05:41 c'est qu'elle a eu un accord avec l'ADEME sans doute pour toute la partie environnementale,
05:46 et s'il y a un code qui est bien drastique, et j'espère que vous le connaissez,
05:52 c'est celui de l'environnement.
05:54 Donc c'est celui qui apporte le maximum, je dirais, de conditions pour pouvoir avoir l'autorisation.
05:59 Voilà.
06:01 Donc quand vous avez passé tout ça, et que vous avez quand même décidé d'habiter là,
06:05 c'est que vous êtes conscient, pleinement conscient.
06:07 Et pour appuyer ce projet de loi, et aujourd'hui ce texte de loi,
06:15 je me suis aussi appuyée sur une expérience qui a eu lieu dans le Morbihan,
06:19 puisque le préfet, il y a quelques années, et la chambre des notaires,
06:23 étaient exaspérés d'avoir des litiges sur le quotidien, des banalités du quotidien.
06:31 Donc pour éviter tous ces dossiers, on va dire, qui embolisent le travail au quotidien de beaucoup de monde,
06:41 ils avaient écrit dans une petite note qui était accrochée à l'acte de vente, et l'acte d'achat,
06:47 et donc à chaque fois qu'un terrain, une maison, etc., quelque chose était acheté,
06:52 vous aviez la liste de tous les acteurs du territoire sur un périmètre.
06:55 Donc vous êtes en pleine conscience, vous connaissez les acteurs autour de vous.
06:59 Alors, je dirais que je n'ai pas entendu de difficultés.
07:08 J'ai beaucoup appris avec le ministère de la Justice, déjà,
07:13 parce que j'ai rencontré des juges, et j'ai appris à décortiquer la complexité des dossiers, parfois.
07:21 J'ai appris à connaître la chambre de cassation, que je n'avais pas eu l'occasion de rencontrer,
07:29 et de voir jusqu'où peuvent aller les dossiers, combien il faut de médiation et de conciliation,
07:38 parfois, pour amener les gens à mieux s'entendre, je dis bien, c'est-à-dire à entendre les messages,
07:46 à écouter, à entendre, à décortiquer, et à prendre chacun à faire un pas,
07:51 d'où le travail de médiation, d'où le décret du gouvernement qu'il a mis en octobre dernier,
07:57 imposer qu'il y ait une médiation impérative, avant de faire un acte d'achat, de vente, etc.
08:03 Et surtout, dès qu'il y a un problème de troubles anormaux de voisinage,
08:11 savoir se parler, dans une société aujourd'hui qui est parfois très individuelle.
08:15 On s'est rendu compte, avec la cour de cassation notamment, qui nous a donné les chiffres,
08:19 finalement, au milieu rural, il n'y a que 3% des dossiers qui arrivent pour troubles anormaux de voisinage,
08:26 sur l'ensemble des dossiers, il y a 3-4% qui concernent le milieu rural.
08:31 Et si vous réfléchissez un petit peu, c'est logique, puisque 80% des gens habitent en périurbain ou en urbain.
08:37 Donc c'est bien, j'achète un appartement au-dessus une pizzeria, et j'ai des nuisances olfactives.
08:44 Or, quand je viens d'acheter l'appartement, je savais qu'il y avait une pizzeria en dessous,
08:47 je savais qu'il y avait un commerce en dessous.
08:49 Donc je suis censé savoir qu'il peut y avoir des nuisances olfactives,
08:53 il peut y avoir des nuisances sonores, donc il peut y avoir des voitures qui rentrent, qui sortent, etc.
08:56 Mais c'est la vie au quotidien, c'est ça que je veux surtout démontrer.
09:01 Le projet est passé au niveau de l'Assemblée nationale, il a été voté à l'unanimité,
09:10 et ensuite il passe au Sénat, et j'espère une CMP conclusive rapide.
09:20 L'an prochain, tout de suite, dès les premiers mois 2024.
09:24 Je dirais que je ne voudrais pas qu'on regarde juste le petit point noir qui ne va pas,
09:32 mais qu'on regarde l'ensemble du territoire français,
09:35 pour que ce texte, cette proposition de loi, concerne l'ensemble des territoires français,
09:44 qu'ils soient urbains ou qu'ils soient ruraux.
09:47 [Musique]

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