• il y a 11 mois
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00:00 Nous avons choisi de nous arrêter ce matin sur un sujet qui nous concerne tous, celui du logement et de l'immobilier.
00:06 L'immobilier en crise, cette crise va-t-elle s'aggraver ?
00:09 Au contraire, est-ce qu'on va aller vers un début d'amélioration en ce début 2024 ?
00:13 Quelles sont vos difficultés, vos inquiétudes ?
00:16 Que vous soyez propriétaire, locataire, que vous ayez des projets d'achat ?
00:20 Posez-nous vos questions !
00:22 0145 24 7000, application France Inter et FranceInter.fr, onglet Réagir.
00:28 On en parle avec Ingrid Napi, vous êtes économiste, bonjour.
00:32 Bonjour.
00:33 Professeure d'économie immobilière à l'École des ponts et directrice de recherche à l'Institut Louis Bachelier.
00:38 Et Yann Géhano, bonjour.
00:40 Bonjour.
00:41 Président de La Forêt, réseau d'agences immobilières.
00:45 Quel est le tableau d'abord avant de parler de 2024 ? Petit retour sur le bilan 2023.
00:49 Cette année a été celle d'un effondrement, moins de 900 000 logements anciens vendus.
00:55 La première en 7 ans d'après le site Meilleurs agents qui publie son babremettre justement ce matin.
01:00 Et qui parle d'un effondrement, d'une rare violence.
01:03 Vous rependriez ces termes Ingrid Napi ?
01:05 Alors oui, ça a été très violent et ça a été très globalisé, généralisé à l'ensemble de l'industrie de l'immobilier.
01:12 C'est-à-dire à la fois bien sûr les ménages qui acquièrent ou qui louent, mais également les producteurs,
01:18 les promoteurs immobiliers qui ont été vraiment marqués par cette crise.
01:22 Elle n'est pas unique. Pratiquement tous les 15 ans on a des crises immobilières de grande ampleur.
01:28 La dernière étant celle de 2007-2008. Puis il y a eu aussi 91. Il y en a eu d'autres.
01:34 Yann Jeannot, vous êtes en première ligne évidemment.
01:37 Ça veut dire quoi ? Ça veut dire concrètement les annonces restent plus longtemps en vitrine des agences ?
01:44 Vous avez du mal à vendre, à faire des transactions ?
01:47 Alors oui, les délais de vente se sont allongés. On est à 90 jours en moyenne nationale.
01:53 C'est plus de 9 jours en un an.
01:56 Ce qu'on remarque surtout c'est le recul des acquéreurs,
02:00 puisque près d'un Français sur quatre a annulé ou ajourné son projet immobilier en 2023
02:07 dans un contexte d'inflation et d'accès aux crédits plus que difficile.
02:12 Des Français qui renoncent à acheter, des agences qui font faillite,
02:14 des notaires qui licencient aussi comme jamais depuis 30 ans.
02:19 C'est ça la réalité aujourd'hui ?
02:21 Oui, c'est la réalité. Des suppressions d'emplois, des emplois qui ne sont pas remplacés,
02:26 des agences qui pour certaines réduisent la voilure absolument
02:30 et toute une filière immobilière qui est au ralenti.
02:34 Alors les causes sont connues, je vais essayer de les résumer.
02:37 Les taux d'intérêt ont explosé, donc de moins en moins de gens veulent ou peuvent acheter.
02:42 Donc les prix baissent, donc les propriétaires hésitent à vendre et c'est le cercle vicieux.
02:47 Est-ce qu'on peut schématiser comme ça, Ingrid Napi ?
02:49 Alors les causes sont très multiples et complexes en fait.
02:53 On peut schématiser ça au bémol près que les prix ne baissent pas vraiment en fait.
02:56 Donc c'est pas si simple que ça. La crise elle est latente depuis longtemps.
03:00 Ça dépend de quel côté on se met.
03:03 La crise c'est d'abord une crise qui a au moins une bonne quinzaine d'années
03:06 quand on voit la hausse des prix de l'immobilier qui font que les taux d'effort des ménages,
03:10 même les prix non-accédants à l'époque lorsque le taux d'intérêt était très bas,
03:14 ont bénéficié des conditions d'achat de logements favorables.
03:19 Donc on a un engouement, une augmentation des prix
03:22 pratiquement multipliée par trois en l'espace de 15 ans
03:25 alors que les revenus des ménages n'étaient pas à cette hauteur.
03:28 Aujourd'hui on parle de crise dans l'autre sens, c'est-à-dire qu'en fait
03:31 on s'aperçoit qu'on ne peut plus devenir propriétaire aussi facilement
03:35 et donc c'est toute l'industrie du logement, de la construction du logement neuf qui est affectée.
03:40 Moi je voudrais quand même revenir sur un autre segment qui est celui de la rénovation.
03:43 On est enfin en train de changer de paradigme et ça c'est très important à comprendre.
03:48 Mais on a eu une période faste anormale de 20 ans.
03:52 Formidable pour la plupart des personnes qui ont pu acquérir leur logement
03:56 mais on le voit que cette période a été quand même assez anormale
03:58 et elle a en fait entraîné à la fois des hausses de prix,
04:03 une activité considérable sur les marchés immobiliers
04:06 et 20 ans c'est une génération.
04:08 Donc on oublie que c'était difficile avant
04:12 et aujourd'hui on se retrouve avec des conditions qui sont
04:14 bon 4% de taux d'intérêt, on a quand même connu bien plus, c'était en 2003.
04:21 Mais on a l'impression que ce n'est pas pensable.
04:23 Donc il faut revoir un peu et prendre de la hauteur je dirais, c'est important.
04:26 Justement les taux d'intérêt, facteur déterminant et qui intéresse bien sûr
04:30 les auditeurs d'Inter qui nous écoutent ce matin.
04:34 Yann Jannot, ils sont à combien à peu près en ce moment ?
04:37 Alors on est autour de 4,25%.
04:39 Ce qui est important c'est de refaire un peu l'histoire en effet,
04:42 de revenir deux ans en arrière.
04:43 Il y a deux ans on empruntait à 1%.
04:46 Oui c'est un taux historiquement bas.
04:47 Et concrètement qu'est-ce que ça veut dire ?
04:49 Ça veut dire qu'il y a deux ans un ménage qui était en mesure de rembourser
04:52 1000 euros par mois pouvait prétendre emprunter 210 000 euros.
04:56 Deux ans après pour cette même mensualité, ce même ménage ne peut plus emprunter
04:59 que 160 000 euros.
05:01 Donc son pouvoir d'achat immobilier a reculé de 25% et s'est allé extrêmement vite.
05:07 Je suis d'accord avec ce qui vient d'être dit, en effet des taux d'intérêt 4%.
05:10 On a déjà vu ça par le passé, mais c'est la brutalité de la hausse finalement
05:15 qui a gelé les transactions immobilières.
05:17 Alors comment tout cela va évoluer ?
05:18 On va parler des prix évidemment, mais d'abord sur ces taux d'intérêt,
05:22 question simple, réponse j'imagine un peu plus complexe.
05:25 Est-ce qu'ils vont baisser ? Est-ce qu'ils vont finalement revenir à un niveau
05:31 qui sera plus acceptable pour des acheteurs potentiels qui pourraient avoir ces derniers
05:36 mois renoncés à acheter une grippe ?
05:38 Peut-être en 2024, comment vont évoluer ces taux d'intérêt ?
05:41 Qui peut le dire réellement ?
05:42 Les taux d'intérêt sont notamment déterminés par la politique des banques centrales,
05:46 et notamment la BCE en Europe, qui analyse de manière très précise l'inflation.
05:52 L'inflation a baissé, donc on peut se dire que les taux d'intérêt vont baisser.
05:56 Maintenant il faudrait peut-être reprendre les origines de cette inflation.
06:00 Elle a été notamment marquée par une inflation par les coûts,
06:03 notamment la crise ukrainienne, la crise alimentaire, la crise énergétique également,
06:08 une inflation aussi par le problème des stocks.
06:12 Aujourd'hui quand on regarde, on vient d'en parler à l'instant avec l'invité précédent,
06:18 les tensions géopolitiques sont quand même extrêmes,
06:24 aussi bien au Moyen-Orient que plus loin encore à l'Est.
06:28 Et donc tout problème politique de ce genre va engendrer des pénuries, des complexités,
06:34 on le voit bien dans la mer Rouge,
06:37 donc des problèmes d'acheminement des matières, des aliments, des marchandises.
06:42 Donc il y a potentiellement toujours menace sur les taux d'intérêt.
06:45 Donc impossible de dire s'ils vont réellement baisser de manière significative en 2024, Yann Jeannot ?
06:51 Non, il est peu probable qu'ils baissent de manière significative en 2024.
06:55 A priori les niveaux hauts vont être atteints dans les mois qui arrivent,
07:02 mais on restera certainement sur 2024 sur ces mêmes niveaux de taux d'intérêt.
07:06 Alors le ministère de l'économie et la Banque de France viennent justement, début décembre,
07:11 d'assouplir les règles pour faciliter l'accès à un prêt, avec notamment la possibilité d'avoir un prêt
07:17 sur 27 ans au lieu de 25 pour un achat avec des travaux importants.
07:21 Je vous vois hocher la tête, Yann Jeannot.
07:25 Est-ce que ces mesures sont suffisamment importantes pour faire repartir la machine ? Non ?
07:29 Non, ce sont des mesures plutôt cosmétiques.
07:32 La production de crédit immobilier a chuté de plus de 40% en 2023
07:39 et ce sont les critères HESF qui sont devenus contraignants depuis maintenant deux ans,
07:43 mais de manière contracyclique, qui empêchent notamment l'accès au crédit,
07:49 ainsi que la volonté ou la frilosité plutôt de certaines banques d'aller vers l'immobilier
07:55 et avec une vision très sélective de leurs clients.
07:59 C'est-à-dire que les banques accordent de plus en plus difficilement des prêts ?
08:05 Oui, accordent difficilement.
08:06 Les prix mots excédents sont écartés, les ménages modestes qui ne peuvent pas non plus
08:11 se constituer un apport pour garantir une bonne gestion,
08:15 une gestion bon père de famille, sont également mis de côté.
08:18 Et on voit beaucoup de profils qui étaient financés il y a deux ans,
08:21 aujourd'hui qui se voient opposés à un refus de financement.
08:24 Et ça a des conséquences aussi sur la location.
08:26 Je voudrais qu'on parle de la location tout à l'heure.
08:28 Mais d'abord, puisque les crédits ne vont pas sans les prix, évidemment,
08:33 ces deux notions sont liées.
08:35 Est-ce que les prix au mètre carré, je me retourne à nouveau vers vous,
08:38 Yann Jannot, puisque vous êtes président du réseau d'agences immobilières La Forêt,
08:43 est-ce que les prix au mètre carré ont commencé à baisser ou pas ?
08:47 Oui, ils ont commencé en 2022, ils avaient commencé dans certaines régions.
08:50 En 2023, la baisse se généralise, en tout cas, ou s'étend.
08:55 Moins 3,9% de baisse des prix au niveau national, jusqu'à 6 ou 7% sur des grandes métropoles.
09:03 On voit encore certaines villes qui résistent, c'est le cas de Marseille, de Nice, de Lille.
09:09 Mais en tout cas, cette tâche d'huile de baisse lente des prix, c'est surtout ça le message, semble s'étendre.
09:16 Vous disiez tout à l'heure Ingrid Napi, pourtant les prix ne baissent pas vraiment, pourquoi ?
09:21 Alors, il y a un mécanisme classique économique qu'on appelle l'effet de cliquet,
09:25 c'est-à-dire un effet psychologique où on préfère attendre et de se dire que les mauvais mois vont passer
09:33 et que le marché reprendra, parce qu'il y a toujours une demande, on le voit bien.
09:36 Donc on se dit que potentiellement il y a une demande, il y a un besoin de se loger.
09:40 Donc on attend, on attend de voir aussi les mesures fiscales qui vont être appliquées aux différents types de produits.
09:46 Juste sur Paris, je vous pose la question, il n'y a pas que Paris évidemment, mais c'est un chiffre qui est toujours symbolique.
09:53 10 000 euros du mètre carré, on est en dessous aujourd'hui, est-ce que c'est significatif ?
09:58 Est-ce que c'est révélateur d'une réalité plus globale ?
10:01 9 855 euros du mètre carré, en tout cas au sein des agences du réseau La Forêt,
10:06 avec des arrondissements qui les uns derrière les autres basculent sous la barre des 10 000 euros.
10:12 Donc en effet, ça traduit la dynamique des prix immobiliers en France.
10:16 J'en viens donc à la grande question, Ingrid Napi, vous qui êtes économiste et qui avez une vue globale sur l'économie immobilière,
10:23 est-ce que vous déconseillez d'acheter ? Est-ce que vous déconseillez aux propriétaires de vendre ?
10:28 Qu'est-ce qu'il faut dire aux gens qui nous écoutent ce matin ?
10:30 Alors je n'ai pas ce pouvoir-là, mais en tout cas, ce qui est sûr peut-être pour revenir sur les propos,
10:35 c'est qu'on a vu une baisse des prix, notamment pour les logements les plus énergivores.
10:40 Donc c'est plutôt ça qui a tendance à être mis sur le marché.
10:46 Donc ce sont les passoires thermiques, en fait ?
10:49 Oui, voilà, ce sont ces passoires thermiques. Alors attention, parce que qu'est-ce qu'on entend par passoire thermique ?
10:53 En tout cas, il y a des classes de DPE. Aujourd'hui, on parle des G+ qui sont interdits à l'allocation.
10:57 Donc on voit que beaucoup de ménages commencent à se poser la question, dans le cadre de leur investissement locatif,
11:02 est-ce qu'il n'est pas temps de vendre ces logements locatifs, surtout s'il faut les rénover ?
11:09 Et le calendrier est en train d'avancer très vite, les échéances s'accélèrent.
11:14 Donc c'est plutôt cette classe-là qui, actuellement, est proposée à la vente.
11:20 Donc je voudrais vous reposer la question, puisque si je vous comprends bien,
11:24 les taux d'intérêt vont baisser, mais pas de manière spectaculaire.
11:28 Les prix ont commencé à baisser, mais pas suffisamment pour inciter les gens à revenir vers leur projet d'achat auquel ils auraient renoncé.
11:36 Alors qu'est-ce qu'il faut dire aux gens qui nous écoutent ce matin ?
11:38 En fait, il faut comprendre qu'il y a un changement total de paradigme dans le cadre d'un calendrier qui est mis en place à l'échelle mondiale,
11:47 suite à l'accord de Paris en 2015, c'est-à-dire qu'il faut lutter contre le réchauffement climatique.
11:52 Et le bâtiment, et notamment l'exploitation du bâtiment, c'est plus de 30% des émissions de gaz à effet de serre, un peu moins que les transports.
12:00 Et donc la politique aujourd'hui, toutes les politiques européennes et de la plupart des pays signataires de l'acte de Paris,
12:06 c'est de réduire les émissions de gaz à effet de serre liées au bâtiment, que ce soit l'exploitation, donc de lutter contre les épaves dites thermiques,
12:14 que ce soit aussi les façons de construire.
12:16 Donc aujourd'hui, il faut comprendre que plutôt de parler de construction neuve qui va être réduite, aussi en raison de l'artificialisation des sols,
12:23 je sais que ce n'était pas très agréable à entendre généralement, mais c'est quand même, si vous me posez la question,
12:29 c'est de comprendre aujourd'hui que le paradigme, il est sur la rénovation.
12:32 Et on le voit bien avec les mesures annoncées, on va inciter les crédits pour rénover.
12:37 On va inciter en fait la transformation d'un parc qui est obsolète.
12:41 On va écouter Lisa justement, dans un instant, qui a une question au Standard Inter sur cette question de la rénovation.
12:47 Simplement en un mot, Yann Géhannot, vous qui êtes agent immobilier, qu'est-ce que vous dites aux gens ?
12:53 Est-ce qu'il faut attendre tout simplement qu'on soit propriétaire, qu'on soit acheteur potentiel ?
12:58 Il ne faut pas perdre de vue qu'un projet immobilier est intimement lié à un projet de vie.
13:03 On se m'emménage, on a des enfants, les enfants quittent la maison, on change de région pour un nouvel emploi.
13:10 Donc l'achat immobilier n'est pas un achat en bourse.
13:14 Il est quasiment toujours conditionné à ces projets de vie.
13:18 Et ces projets de vie ne s'arrêtent pas.
13:21 Donc les Français continuent et ont tous envie de devenir propriétaires,
13:24 d'avoir un patrimoine locatif pour préparer leur retraite.
13:27 Et s'ils peuvent une résidence secondaire pour profiter de leurs enfants et de leurs petits-enfants.
13:31 Voilà, faut-il vendre en 2024 ou attendre, nous dit Charlène sur l'application France Inter ?
13:37 Vous dites en fait que ça dépend des moyens de chacun, des projets de chacun.
13:41 Oui absolument, si on a besoin de réemployer également, réemployer les fonds, il faut vendre.
13:47 Si on est bien dans son logement et qu'on n'a pas un besoin impérieux de vendre son logement, on peut rester dedans aussi.
13:52 Question essentielle, donc je vous le disais, au Standard Inter avec Lisa qui nous appelle de Lyon.
13:57 Bonjour Lisa.
14:00 Est-ce que vous êtes avec nous ?
14:02 Oui.
14:02 Stable pour vous.
14:03 Bonjour Lisa, vous nous entendez ?
14:06 Oui bonjour.
14:07 Vous êtes en direct et on vous écoute.
14:08 Question sur la rénovation énergétique, c'est ça ?
14:11 Oui, tout à fait.
14:13 C'est-à-dire que moi actuellement je suis dans une petite surface,
14:17 un appartement qui fait 25 mètres carrés dont je suis propriétaire et qui est une passoire thermique.
14:24 J'ai voulu récemment déménager et donc mettre en vente mon studio.
14:31 Alors d'une part les conditions de vente sont très compliquées, les conditions de prêt sont très compliquées.
14:37 Donc je n'ai pas eu la possibilité de concrétiser mon achat.
14:41 Ce qui veut dire que si ma situation professionnelle change et que je suis amenée à déménager,
14:47 malgré l'impossibilité de pouvoir vendre mon appartement, je vais me retrouver dans une autre location.
14:54 Et donc mon appartement actuel, je ne vais pas pouvoir le louer tout simplement
15:00 parce que la législation me l'interdit.
15:03 Donc ça veut dire que je vais devoir sortir mon appartement du réseau de location légal,
15:10 le mettre en Airbnb ou éventuellement le mettre en sous-location.
15:16 Ce qui veut dire que ça va être très inconfortable pour moi
15:19 parce que je vais me retrouver avec des locataires potentiellement plus compliqués à gérer avec des loyers.
15:27 Les locataires qui vont être à l'intérieur vont se retrouver dans l'insécurité parce qu'ils seront en dehors d'un bas illégal.
15:34 Et pour autant, je ne vais pas pouvoir rentrer dans la légalité, ni pour eux ni pour moi.
15:41 Ne pas pouvoir vendre mon appartement parce que je ne pourrai pas en acheter de nouveau.
15:45 - Et c'est le serpent qui se meurt la queue.
15:47 On comprend effectivement la situation un peu kafkaïenne dans laquelle vous vous trouvez Lisa chez vous à Lyon.
15:55 La rénovation énergétique, c'est quelque chose qui met beaucoup de propriétaires dans une sorte d'insécurité.
16:02 - Oui, dans l'embarras, le cas de l'auditrice est significatif.
16:08 En tout cas, on voit que d'un côté, elle a une difficulté à accéder au financement pour acheter un nouveau logement,
16:14 qu'elle n'a pas nécessairement les moyens pour mener la rénovation énergétique du logement qu'elle occupe actuellement.
16:20 Et puis elle pointe aussi du doigt un certain nombre de particularités de ce marché.
16:26 Ça a été évoqué, je vais peut-être mettre mon logement en Airbnb,
16:30 puisqu'en effet, les locations courte durée ou saisonnières,
16:32 elles ne contribuent pas au réchauffement climatique de la planète visiblement,
16:37 puisque ne sont pas frappées des mêmes interdictions.
16:40 Donc en effet, on marche sur la tête.
16:41 - Ingrid Napi, vous êtes d'accord avec ça sur la rénovation ?
16:43 - Sur ce dernier point, tout à fait.
16:45 Là, il y a un véritable fossé entre le parc classique et le parc locatif meublé qui échappe à cette réglementation.
16:54 - La rénovation énergétique, c'est aussi créateur d'emplois, de richesses ?
16:58 - Oui, alors justement, mais c'est créateur d'emplois...
17:01 - C'est du positif ?
17:02 - Oui, c'est même plus que positif.
17:03 Oui, tout à fait, c'est même aujourd'hui un cap nécessaire si on veut atteindre,
17:08 ne pas dépasser du +1,5 degré de réchauffement à 2100.
17:13 On sera peut-être certainement plus là, mais en tout cas, c'est indispensable pour les générations futures.
17:18 Donc de toute façon, on s'y est engagé.
17:20 Donc il faut rénover.
17:21 Le problème, c'est qu'en effet, ça devient complexe.
17:24 Qu'est-ce qu'on fait de son logement quand on est à l'intérieur,
17:26 qu'on veut le rénover, notamment par l'intérieur ?
17:29 Et si on ne peut pas aller vers un autre logement ?
17:33 Création d'emplois, oui.
17:35 Le problème également de cette rénovation, on le voit, il y a une vitesse qui va être mise en place.
17:41 C'est de passer à 900.000 logements rénovés par an à partir de 2030.
17:45 On accélère le mouvement, on a des rénovations très légères.
17:49 Donc aujourd'hui, on parle de rénovation globale, notamment pour avoir accès à ma prime rénov'.
17:53 Et là, on s'aperçoit qu'on n'a pas les entreprises, on n'a pas les artisans.
17:57 Seulement 10% des artisans sont reconnus garants de l'environnement, ce qu'on appelle le label RGE.
18:02 Donc il y a un manque de formation, et notamment de formation courte.
18:06 Donc là, il y a un appel pressant pour former les jeunes, notamment dans ce secteur-là de la rénovation,
18:12 de former également des ingénieurs dans cette branche.
18:17 Alors, en fait, on parle de perte d'emploi dans l'ancienne industrie de l'immobilier,
18:23 si on peut le dire ainsi, vers la nouvelle industrie de l'immobilier, qui est la rénovation.
18:26 En fait, on change de paradigme.
18:28 Il y a une révolution qui est une révolution industrielle.
18:30 On le sait déjà avec, par exemple, la construction hors-site.
18:33 On en a beaucoup parlé également, mais qui est une construction qui est beaucoup plus capitalistique,
18:38 c'est-à-dire qui utilise beaucoup moins de main-d'œuvre.
18:40 La construction traditionnelle sur le site, qui est d'ailleurs fortement émettrice de gaz à effet de serre et de déchets,
18:47 est en train d'être dépassée.
18:49 On ne construit plus dans ces conditions-là.
18:52 Aujourd'hui, on construit avec des emplois qualifiés, hors-site.
18:56 Et c'est tout un secteur de l'industrie qui est très lourd, qui a été très créateur d'emplois,
19:01 qui est en train de changer, qui va vers un secteur de la rénovation où tout est à créer.
19:05 Donc une révolution qui a des conséquences très directes,
19:08 et on l'entend dans les questions de nos auditeurs et nos auditrices,
19:12 sur les propriétaires, sur ceux qui hésitent ou renoncent à acheter,
19:17 et sur les locataires, parce qu'à l'arrivée, et vous le disiez tout à l'heure,
19:20 il y a un Jeannot, il y a ceux qui renoncent à acheter, donc qui vont sur le marché de la location.
19:24 Et à l'arrivée, les locataires les plus modestes ne trouvent pas d'appartement, de maison pour se loger.
19:30 C'est ça la conséquence aujourd'hui ?
19:32 C'est même pire que ça, puisque les signaux qui sont envoyés depuis plusieurs années
19:37 aux investisseurs particuliers sont assez négatifs.
19:41 Donc les investisseurs qui se retirent doucement du marché locatif,
19:46 donc un parc locatif qui ne continue pas de se développer,
19:51 une offre locative qui n'existe pas, et des locataires en place qui finalement se rendent compte
19:54 qu'ils ne peuvent pas acheter, sont bien dans leur logement, donc qui restent dans leur logement.
19:58 Donc une durée d'occupation également qui augmente de 5 à 6 mois uniquement sur l'année 2023.
20:04 Donc il n'a jamais été aussi difficile de devenir propriétaire pour la première fois, les primes ou accédants,
20:08 mais il n'a jamais été aussi difficile non plus de devenir locataire,
20:11 puisque le marché est totalement figé, deux chiffres chez La Forêt,
20:16 +26% de candidats à la location en 2023, -28% de biens à la location sur le marché.
20:23 C'est dire l'extrême tension sur le parc locatif.
20:26 Les prix à la location vont baisser en 2024, augmenter, vous avez un regard là-dessus déjà ou pas ?
20:32 Alors ils sont encadrés déjà dans beaucoup de communes, ils sont réglementés,
20:37 on ne décrète pas non plus un prix à la location comme on a envie de le faire,
20:42 mais c'est sûr qu'il y a des tentations dans les secteurs qui sont libres,
20:45 une tentation d'orienter les prix à la hausse parce qu'en effet on a une demande extrêmement importante
20:50 face à très peu d'offres, une pénurie d'offres locatives.
20:52 Un mot sur un élément déterminant qu'on a déjà abordé en partie, Ingrid Napie,
20:56 celui des locations meublées saisonnières type Airbnb,
21:00 ça c'est un enjeu majeur de régulation, est-ce que les pouvoirs publics font assez pour réguler ?
21:08 De manière générale ça commence à être régulé, en France on a du retard,
21:12 et je pense que les JO ne sont pas... c'est pas un facteur anodin,
21:16 je pense qu'on va attendre la fin des JO, parce que justement les JO,
21:20 avec les JO on n'a jamais vu autant de meublées mises en location,
21:26 donc c'est un des points importants.
21:28 Oui, on voit bien aussi par rapport au secteur locatif traditionnel où les loyers sont réglementés,
21:33 et je dirais c'est heureux aussi parce que les logements, les loyers avaient augmenté de manière importante auparavant,
21:39 mais moins important quand même que les prix,
21:41 on voit bien que le logement locatif meublé échappe aux critères de rénovation
21:46 et permettent de dégager des rendabilités considérables.
21:49 Donc le marché est faussé par un segment très restreint mais quand même très puissant,
21:55 notamment très puissant dans les villes où il y a une très forte demande,
21:58 notamment les villes universitaires, les villes touristiques, les villes frontalières et notamment à Paris.
22:03 Revenons sur un sujet essentiel et qui intéresse énormément les auditeurs et les auditrices d'Inter,
22:10 parce qu'il y a beaucoup de questions à la fois sur l'application de France Inter et au Standard.
22:13 Bonjour Isabelle.
22:15 Oui bonjour.
22:16 Question vous aussi sur la rénovation de votre logement.
22:20 Oui, alors j'ai habité longtemps dans une petite maison proche d'un lieu parisien
22:25 et puis la vie a fait que je suis partie en province et j'ai mis cette maison en location.
22:30 Je suis très motivée pour accompagner la rénovation énergétique avec ce grand objectif de la survie de la planète
22:39 et j'ai voulu trouver des entreprises, donc je suis à 600 kilomètres de cette maison maintenant.
22:45 Je me suis appuyée sur le site de l'État, France Rénov',
22:49 donc c'est une opération que j'ai démarrée il y a un ou deux ans maintenant et qui est achevée,
22:53 pour installer tout simplement une VMC, pour pouvoir profiter des aides.
22:57 Le artisan doit être certifié RGE, donc à un certain niveau de qualité, ce que je comprends.
23:03 Eh bien je n'ai pas trouvé.
23:04 Le site de France Rénov' ne donne que des mauvaises piles d'entreprises qui soit ne répondent pas,
23:10 soit on s'aperçoit que c'est le même numéro avec des adresses différentes,
23:13 enfin des gens qui n'ont pas l'air très sérieux.
23:16 Et j'ai enfin trouvé un seul artisan qui n'était pas RGE, qui a pu faire les travaux.
23:22 Et là je me suis dit, mais c'est un parcours du combattant,
23:26 je n'ai pas eu d'aide de l'État mais c'était à la limite secondaire,
23:29 comment trouver les artisans de qualité ?
23:32 Et puis maintenant j'ai le projet d'isoler par extérieur,
23:34 que que je fais ? Mon voisin va s'y mettre d'accord que je prenne 15 centimètres sur son terrain ?
23:40 Ce manque de main d'œuvre et ces situations parfois très complexes qu'on évoquait tout à l'heure
23:46 et vous en parliez Ingrid Nappi, Yann Jeannot, simplement ça c'est une situation
23:50 à laquelle les propriétaires dont vous vous occupez sont confrontés,
23:54 ils ne trouvent pas ni d'aide ni d'artisan.
23:58 C'est le quotidien des Français, il y a moins de 60 000 entreprises qui ont ce label en France,
24:03 ce label RGE, il en faudrait au moins 240 000, donc il faudrait multiplier par 4.
24:08 Pourtant les enjeux et le calendrier n'a pas changé,
24:12 beaucoup de Français veulent, pourraient potentiellement,
24:16 mais sont démunis face aux autorisations administratives,
24:20 face à la copropriété, face au voisinage comme ça a été évoqué,
24:24 à la capacité de trouver des entrepreneurs,
24:28 à avoir des devis également dans un contexte inflationniste et à maîtriser un délai.
24:34 - Ingrid Nappi, question très large et à laquelle je vais vous demander de répondre très rapidement,
24:39 il nous reste 20 secondes, cette révolution,
24:43 est-ce qu'on a une idée de la manière dont elle va se terminer ?
24:48 On assiste aujourd'hui à un changement de paradigme, vous le disiez.
24:52 - C'est le début, ce n'est pas la fin. - Où est-ce qu'on va ? Et sur combien de temps ?
24:55 - C'est le début, ça prendra du temps, ce n'est certainement pas la fin,
24:58 donc on n'a pas d'horizon pour l'instant, c'est nécessaire
25:01 et ça demande un effort collectif, aussi bien de l'enseignement,
25:05 on parle de la formation, de la jurisprudence,
25:09 il y a une réflexion collective à avoir.
25:11 - Ingrid Nappi, économiste de l'immobilier, professeure à l'école des Pons,
25:15 merci beaucoup et merci à vous également, Yann Géhano,
25:17 président du réseau d'agence La Forêt.

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