• il y a 10 mois
DB - 08-01-2024

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00:00 (Musique)
00:30 -Dites donc, vous en faites des bobines.
00:33 De mon temps, c'était une joie de rouler.
00:36 Pourtant, c'était dur. Les camions braquaient pas.
00:39 Ils chauffaient, ils tombaient en panne.
00:41 Mais ça n'empêchait pas les gars de rigoler.
00:43 Parce qu'ils étaient contents de faire la route.
00:45 Alors aujourd'hui...
00:47 Regardez-moi ces binettes !
00:49 -De votre temps, grand-père,
00:51 il y avait beaucoup de frais et peu de camions.
00:54 -Et les primeurs du Vaucluse, c'est pas pour bientôt.
00:57 En général, à cette époque, la saison est commencée.
01:00 -Avec ce printemps pouli, tout est dans le tard.
01:03 C'est pour ça que toute la route est triste.
01:05 Elle attend.
01:07 Elle attend que les tomates et les slices soient rouges.
01:10 Et en attendant, elle crève de faim et d'ennui, la route.
01:13 J'ai poilotté 5 jours la panique, avant de trouver un chargement.
01:17 -Moins 8. -Ouais, 10.
01:19 -Alors ? -Bonjour, Yann, mon grand.
01:23 -Tu vas pas me dire que Fabre a encore affrété personne aujourd'hui ?
01:26 -De routiers en tout et pour tout. -Tout va bien, qu'il y ait du fret.
01:29 -Ils attendaient depuis une semaine.
01:31 Je peux te favoriser, mais pas te faire passer avant tout le monde.
01:34 Ça se verrait trop. Et Fabre n'accepterait pas.
01:37 -Je suis ton mari. -Mais Fabre, c'est mon patron.
01:40 -Je deviens fou sans rouler.
01:42 8 jours que mon camion moisit sur cette place.
01:45 J'ai pas le moindre argent pour payer ma traite de la fin de mois.
01:48 -Qu'est-ce que tu veux y faire ? Prends patience.
01:51 Une semaine ou deux, les primeurs vont commencer.
01:53 -Je peux plus attendre. Demain, je vais à Carreillon.
01:55 -Ne fais pas cette bêtise. Il est encore trop tôt.
01:58 La route est là-bas.
02:02 Il y a un gage de l'aspirage au prochain de camion.
02:04 Les groupers en profitent pour faire baisser les prix.
02:07 Fabre est au courant. Il m'a dit que tous les gars qui allaient travailler là-bas
02:10 travaillaient à perte. Il vaut mieux de ne pas travailler
02:12 que de perdre de l'argent. Au moins, ton camion, il s'use pas.
02:15 -Demain, je vais à Carreillon.
02:17 -Écoutez ! Écoutez-moi !
02:23 Si nous ne nous montrons pas solidaires,
02:26 on va se faire assassiner !
02:28 Faut faire grève immédiatement !
02:30 Faut qu'aucun routier n'accepte de partir au-dessous d'un certain tarif !
02:34 Si personne ne part, les culs des rues vous supplieront
02:37 de prendre leur salade !
02:39 Écoutez-moi ! Faut être solidaires !
02:43 Faut faire grève immédiatement !
02:46 (sirène de police)
02:49 -Tep ! Dupuis !
03:13 -Ca fait plaisir de te revoir. -Moi aussi, ça me fait plaisir.
03:16 Comment ça va, M. Massacan ? -Comme des vieux.
03:19 Chaque année, on en met un de plus.
03:22 Dis donc, petit, tu t'es mis à ton compte.
03:25 Félicitations. Alors, tu as quitté Mathieu ?
03:29 -Vous ne le saviez pas ? -Non.
03:32 Vous autres, les routiers, vous ne vous intéressez aux paysans
03:35 que quand c'est votre intérêt. L'hiver, on ne vous voit pas souvent par ici.
03:39 -C'est vrai, on devrait venir vous souhaiter la bonne année.
03:41 -Notre que ça ferait plaisir. -Seulement, nous, l'hiver, on travaille.
03:44 -Oh, ça va, ça va. Les routiers, vous n'êtes pas malheureux.
03:48 La preuve, c'est que des jeunes chauffeurs peuvent se payer des camions.
03:52 Et quels camions ? Des palas roulants.
03:56 -Ils le peuvent en s'en détendant jusqu'au cou. -Peut-être.
03:59 Mais, si ils en prennent, c'est qu'ils sont sûrs de pouvoir rembourser.
04:03 Il faut qu'un camion rapporte puisqu'il se paye tout seul.
04:08 Comme cette terre donne toute seule des melons.
04:11 Bref. -Bref.
04:14 Alors, qu'est-ce qui t'arrive ? -Vous avez du fret ?
04:19 -Il ne me reste plus grand-chose. -Annoncer la couleur ?
04:24 -Écoute, je vais faire le maximum pour toi, parce que tu débutes.
04:30 Mais, tu sais, petit, cette année, la saison s'annonce mauvaise.
04:37 Évidemment, il me reste encore peu de marchandises à faire monter sur Paris.
04:42 Mais elle ne rapportera pas lourd au routier qui la prendra.
04:47 Eh oui, que veux-tu, petit ? Vous êtes trop nombreux.
04:51 Et les chemins de fer viennent encore de baisser leur prix.
04:54 Le rail est en train de tuer la route.
04:57 Vous ne pouvez pas lutter contre le train.
05:00 Moi, tu sais, je préfère faire travailler la route,
05:04 parce que je préfère faire gagner de l'argent à la route qu'à l'État.
05:09 Mais je ne suis pas le maître.
05:12 Je ne suis que le mandataire des paysans.
05:15 Je dépends d'eux.
05:17 Et s'ils apprennent que je fais partir la marchandise par camion,
05:21 quand ça coûterait moins cher par le train,
05:24 ils iront voir un autre groupeur.
05:27 Et moi, je tomberai dans la misère.
05:31 Mets-toi à ma place, voyant.
05:34 Tu comprends comment ma position est difficile.
05:39 Si encore les routiers rabattaient un peu leurs prétentions,
05:45 ils me faciliteraient le métier.
05:48 Bon, qu'est-ce qu'il y aura à monter ?
05:51 - Trois tonnes. - De quoi ?
05:53 De tout. Des choux, des asperges, des tomates.
05:59 - Combien ? - Pour réunir ces trois tonnes,
06:04 j'ai dû faire du ramassage au moins chez 15 paysans.
06:08 Mais c'est déjà vendu au ras.
06:11 Ça n'attend plus que de partir.
06:14 S'ils nous faisaient affaire, tu charges et tu t'en vas.
06:18 Plus de soucis.
06:20 - Combien ? - Pas cher, malheureusement.
06:28 Combien ?
06:30 10 francs au lieu de 12 ?
06:33 - Tu veux dire 8 au lieu de 10 ? - Vous vous foutez de moi ?
06:37 Oh, petit !
06:39 Si tu me parles comme ça, tu laisses la marchandise et t'adresses ailleurs.
06:43 10 francs, c'est raisonnable comparé aux trains.
06:46 Je livre directement au ras. Vous n'avez pas le transport à la gare.
06:50 L'avantage de la route sur le ras, c'est qu'on fait le porte-à-porte.
06:54 Tu vas pas m'apprendre mon métier, non ?
06:57 Allez, 8 francs, c'est mon dernier prix.
07:00 Oui ? Non ?
07:04 - Décide-toi, ça presse. - Qu'est-ce que je fais avec 3 tonnes ?
07:08 - J'ai un 10 tonnes. - Tu complèteras en allant voir d'autres groupers.
07:12 - A cette heure-ci ? Il est trop tard. - Avec un peu de chance.
07:16 Tu peux encore trouver une automne.
07:19 - A quelle heure il faudrait être au ras ? - Demain, minuit.
07:23 Quoi ? Monter en rapide pour même pas le prix du gasoil ?
07:26 Gardez vos légumes, qu'ils pourrissent.
07:29 Bon.
07:31 Je vais téléphoner à Carillon pour demander un camion à moitié chargé.
07:36 Il y a sûrement un routier que ça arrangera.
07:40 Et toi, tu partiras une autre fois ?
07:43 A moins que...
07:49 - A moins que ? - A la réflexion.
07:53 Je peux te donner encore 7 tonnes.
07:56 7 et 3, 10, tu fais le plein.
08:00 - Mais... - Oui ?
08:04 - Mais à 7 francs au lieu de 8. - Ah non, tout de même pas.
08:08 - 6 francs. - Salaud.
08:12 - Vieil crapule. - Tu insultes l'homme de mon âge ?
08:15 Fous-le camp avant que je t'ouvre le crâne.
08:18 J'avais bien que vous alliez morceler le fret pour tirer les prix.
08:21 Que je ne te revoie plus ici.
08:23 Que je meurs sur le cou si je te fais travailler encore une fois dans ma vie.
08:27 - Je prends le tout à 7 francs. - Non, tout à 6 francs.
08:33 - 7 francs. - 10 tonnes à 6,50, ça va ?
08:38 - 6,75, c'est mon dernier prix. - Non, j'ai dit 6,50.
08:45 Et avec ma femme, on te donne la main à charger.
08:48 Salaud. Si vous aviez pas des cheveux blancs.
08:51 Je savais bien qu'on finirait par s'entendre.
08:55 Pour le moment, vous êtes les plus forts.
09:06 Mais si un jour on peut se venger, vous rigolerez plus.
09:09 On n'a pas le droit d'exploiter des gens comme ça.
09:11 Et les paysans ? Tu crois qu'on les exploite pas, dit ?
09:15 Tu sais à quel prix on nous prend nos asperges et nos tomates ici.
09:19 Et tu sais combien elles sont revendues, quelques heures après, dans les épiceries de Paris.
09:24 - Alors... - Alors, c'est pas de notre faute si elle t'en intermédiaire.
09:27 Et tant pis, c'est pas la nôtre non plus.
09:29 Nous on voit que vous. On s'attaque à ce qu'on voit.
09:32 - C'est dégueulasse. - Non, c'est l'offre et la demande.
09:36 L'offre et la demande.
09:38 En tous les cas, dis-toi personne le prix que j'ai accepté.
09:41 T'en fais pareil. D'autres ont fait bien pire.
09:46 Si tu savais tout.
09:48 Mais je suis discret.
09:50 Allez, viens vite que je te fasse tes papiers.
09:53 Ah, je dois te faire signer un engagement.
10:00 Comme quoi tu dois une amende mandataire, si tu n'es pas au ralenti demain soir à minuit.
10:06 Un jour vous me paierez ça.
10:08 En attendant, je te paie déjà le pastis, si tu veux.
10:11 A ta santé.
10:18 A la santé des routiers.
10:20 A la vôtre. A la santé des paysans.
10:23 A une bonne grève des chemins de fer, quand les fruits bien mûrs ne peuvent pas attendre.
10:26 Ah, parle pas de malheur.
10:28 Et attention.
10:33 Demain, minuit, dernier délai.
10:36 Où tu payes le dédié.
10:39 [Musique]
10:42 [Musique]
10:45 [Musique]
11:14 Un coup de pompe.
11:16 Ça va passer.
11:17 C'est le mauvais moment, quand le jour s'allève.
11:19 Tu veux pas dormir une heure ?
11:20 Si je m'endors, je me réveille plus.
11:22 Bah, tu te mets sur le divan dans le couloir et je te secoue quand tu veux.
11:25 Pas le temps.
11:26 Tu montes en rapide ?
11:28 Oui.
11:29 Minuit au val ?
11:30 Sous peine d'amende.
11:31 T'es seul au volant ?
11:32 Je voudrais pas être à ta place, mais tu vas pas t'amuser.
11:34 Allez, salut. Je te paierai la prochaine fois.
11:36 Oui, au revoir.
11:39 [Musique]
11:42 Bon, on y est.
11:49 Je vous aime tout de même.
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