Au bonheur des livres - Des institutions et des hommes (… et des femmes)

  • il y a 7 mois
Ancien Premier ministre et président de l’Assemblée nationale (entre autres), Laurent Fabius est aujourd’hui à la tête du Conseil constitutionnel, cette institution essentielle mais mal connue de notre république.

Pour essayer de faire mieux comprendre son rôle et son histoire, il sera l’invité de Guillaume Durand dans « Au bonheur des livres », pour une émission spéciale où il présentera l’histoire du Conseil en bande dessinée : « Dans les couloirs du Conseil Constitutionnel » (Ed. Glénat), un ouvrage étonnant réalisé par Gally (dessinatrice) et Marie Bardiaux-Vaïente (scénariste), également présente sur le plateau.

Pour dialoguer avec Guillaume Durand et ses invités, une autre intervenante de grand renom, journaliste émérite et figure-témoin capitale de la vie politique française depuis plusieurs décennies : Michèle Cotta, qui publie un passionnant livre de portraits et souvenirs, « Ma Cinquième » (Ed. Bouquins).
Rendez-vous sur Public Sénat avec des acteurs décisifs de notre histoire au présent !
Année de Production : 2023
Transcript
00:00 [Générique]
00:18 - Quel bonheur de vous retrouver pour "Au bonheur des livres".
00:20 Nous allons parler de la Constitution, du Conseil constitutionnel.
00:24 Et nous sommes, vous le savez, dans cette émission avec Laurent Fabius.
00:27 Monsieur le Président, bonjour et bienvenue dans cette émission avec Michel Cotta,
00:31 qui publie ses bouquins "Ma cinquième".
00:34 On en parle beaucoup. C'est l'un des livres politiques les plus lus actuellement.
00:38 Le voici, ma chère Michel. Bonjour.
00:40 Et donc, avec cette bande dessinée, voulue à la fois par le président du Conseil,
00:45 mais surtout par Marie Bardieu, vaillante, historienne.
00:49 Et vous avez collaboré, bonjour à vous, avec une dessinatrice pour essayer
00:55 de donner une lisibilité à tous ceux qui vont lire cette bande dessinée
00:58 au fonctionnement du Conseil constitutionnel.
01:00 Car nous sommes dans une actualité extrêmement brûlante à chaque fois.
01:03 On a l'impression que c'est le Conseil qui fait la politique en France.
01:06 Le 25 janvier prochain, on aura des décisions qui vous concernent,
01:10 monsieur le Président, concernant la loi immigration.
01:13 Donc voilà pour la présentation de cette émission.
01:16 Nous sommes dans le fond de la vie politique française.
01:19 Et nous sommes aussi, évidemment, dans l'actualité.
01:22 Je me souviens, Laurent Fabius, que lors d'une des dernières fois
01:25 que nous nous sommes croisés, vous avez demandé
01:27 qu'est-ce que vous aviez eu comme sujet, si ma mémoire est bonne,
01:30 à l'oral de Normand Schiff.
01:32 Vous m'aviez dit, Michel Serres m'avait demandé
01:35 quelle est au fond la définition que vous auriez du héros.
01:37 Est-ce que vous avez l'impression que la politique que traite Michel
01:41 et que vous avez vécue, c'est encore le domaine des héros ?
01:46 Il faut être franc.
01:47 - Mon souvenir de ce qui s'est passé il y a quelques années,
01:52 à mon oral à Normale Sup, est assez limité.
01:55 - Mais attendez, je ne me suis pas trompé.
01:57 - Non, vous n'êtes pas trompé.
01:58 Et c'est là où mon amitié a commencé avec Michel Serres,
02:03 qui depuis, malheureusement, est disparu,
02:04 parce que comme il m'avait mis une bonne note,
02:07 ça lançait bien nos relations.
02:10 Non, pour être sérieux, je crois que le héros,
02:14 étymologiquement, c'est un demi-dieu.
02:17 Est-ce que ce serait la définition des responsables politiques
02:22 du monde entier aujourd'hui ? Je n'en suis pas sûr.
02:24 - Oui, mais vous savez, par exemple,
02:26 Jean-Luc Barré vient d'écrire un premier tome sur le général de Gaulle,
02:29 Michel met à la une le général de Gaulle pour la cinquième,
02:32 il y a quand même cette idée du héros.
02:34 Enfin, je veux dire, dans cette cinquième République
02:37 et la Constitution dont on va parler,
02:39 on voit bien que ce personnage de guerre,
02:42 les généraux, la rébellion, c'est quand même le statut du héros, Michel.
02:46 - Ça commençait bien, en tout cas.
02:48 - Oui, mais c'est le statut du héros.
02:49 - Absolument, c'est d'ailleurs ça qui explique
02:53 qu'après tant d'années, il soit revenu au pouvoir porté
02:56 ou incitant lui-même à revenir au pouvoir.
02:59 Enfin, c'est vrai que c'était quelqu'un qui existait,
03:01 mais on ne l'a plus tellement retrouvé
03:03 sous la cinquième République qu'après.
03:05 - Mais vous êtes formé quand vous dites ça,
03:06 vous avez l'impression qu'il y a deux Gaules
03:08 et tous ceux qui ont suivi,
03:10 qui n'ont pas le même statut que lui,
03:11 qui n'ont pas le même impact sur la société ?
03:15 - Je ne sais pas si c'est l'impact sur la société,
03:17 mais ils n'ont pas le même impact sur l'histoire,
03:19 en définition, et puis pas le même impact
03:24 sur les gens qui sont autour d'eux,
03:25 sur les relations qu'établissent les Français avec eux.
03:29 Il y en a qui en met plus haut que d'autres, c'est évident.
03:32 - Vous expliquez d'ailleurs dans le livre
03:34 qu'au fond, dans cette attente qu'il a ramenée au pouvoir en 58,
03:40 on a l'impression qu'il y a quand même beaucoup de ruses
03:43 et qu'en fait, il s'y attendait,
03:45 c'est-à-dire que cet effondrement auquel vous avez assisté
03:48 au deuxième étage de l'Assemblée nationale,
03:51 vous, jeune journaliste, vous aviez 20 ans,
03:54 vous avez le sentiment quand même
03:55 que le général de Gaulle était tapis dans l'ombre depuis longtemps,
03:58 qu'il avait des émissaires partout
03:59 et qu'il attendait qu'on l'appelle,
04:00 car la quatrième allait s'effondrer.
04:02 Vrai ?
04:03 - D'ailleurs, oui, tout à fait vrai.
04:05 D'ailleurs, beaucoup me l'ont raconté après.
04:08 Roger Stéphane, par exemple, me racontait,
04:10 il allait dire au général,
04:12 "Retournez, mon général, on vous attend."
04:14 Le général ne disait rien, mais prenez un sourire entendu.
04:17 Et puis par rapport aux autres qui lui disaient,
04:18 "Non, vous ne devriez pas bouger",
04:21 prenez un sourire moins entendu.
04:22 Il y a une grande partie de ruses.
04:24 Je pense pas qu'il y ait eu un complot,
04:27 mais un complot pour faire revenir de Gaulle au pouvoir,
04:30 mais il y a eu la partie de ruses de de Gaulle considérable,
04:34 et de ses amis politiques.
04:35 - Et justement, une mise en scène colossale
04:39 pour la naissance justement de cette Vème République,
04:41 c'est passé à la place de la République,
04:43 mise en scène d'André Malraux,
04:45 donc on pouvait difficilement faire mieux.
04:47 Et nous en sommes donc maintenant à ce Conseil constitutionnel,
04:50 qui est un conseil qui permet justement de vérifier chaque jour
04:55 si la loi est bien respectée.
04:56 Dans les voeux que vous avez prononcés...
04:59 - Non, pas si la loi est bien respectée,
05:00 si la loi est conforme à la Constitution,
05:03 qui est la loi des lois.
05:04 - Absolument, mais c'est justement ce que je voulais introduire
05:07 à propos des voeux que vous avez prononcés récemment,
05:09 c'est-à-dire que vous ne voulez pas, vous comme président du Conseil,
05:12 qu'au fond, le Conseil soit une sorte de chambre d'écho
05:15 de ce qui se passe à l'appui au Parlement, dans l'opinion,
05:17 mais que ce soit le lieu du droit ?
05:20 - C'est la définition.
05:22 Le Conseil constitutionnel, qui comprend 9 membres,
05:26 et qui fait l'objet de cette bande dessinée,
05:28 on va en parler, j'imagine,
05:30 il a une tâche bien précise,
05:32 qui est de vérifier si les lois qui sont votées par les parlementaires
05:36 sont conformes ou pas à la Constitution.
05:38 La Constitution, c'est la loi des lois.
05:40 Bon, il n'a pas d'autre rôle, c'est ça.
05:42 Et donc, il ne se situe pas sur le terrain proprement politique,
05:45 il se situe sur le terrain de la loi.
05:48 Il regarde objectivement, impartialement,
05:50 si la loi est conforme à la Constitution.
05:52 - Mais on vous fait jouer un rôle politique.
05:55 À partir du moment où le président de la République vous saisit,
05:58 la présidente de l'Assemblée nationale vous saisit...
06:00 - Oui, mais nous sommes des hommes indépendants.
06:02 Mon prédécesseur et ami Robert Badinter
06:05 donnait une assez jolie définition de ce que c'est que l'indépendance,
06:10 que vous ne trouverez pas dans les manuels de droit.
06:13 Il disait "Qu'est-ce que c'est qu'un homme ou une femme indépendante ?
06:17 C'est quelqu'un qui n'a rien à redouter et rien à espérer."
06:22 Je trouve que la définition est assez juste.
06:25 Donc nous sommes des juristes, on est là pour ça,
06:27 et compte tenu, en général, de notre âge et de notre parcours,
06:31 nous n'avons rien à redouter, rien à espérer,
06:34 donc nous devons être impartiaux et dire le droit.
06:37 Après, pour ce qui concerne la politique,
06:39 il y a des personnalités qui ont été élues pour ça,
06:42 qui font leur travail, mais nous, nous n'avons pas à entrer là-dedans.
06:45 - Oui, mais vous n'entrez pas là-dedans,
06:47 mais les gens attendent que vous entriez là-dedans,
06:49 puisque au fond, les partis politiques, vous le savez...
06:51 - Ils font leur travail !
06:53 - Ils attendent cette décision du 25 janvier
06:55 avec une impatience considérable.
06:57 - Oui, mais je pense que vous voulez m'entraîner
06:59 sur un terrain où je n'irai pas aujourd'hui.
07:01 Bon, nous avons été saisis d'une loi qu'on appelle "immigration",
07:05 nous prendrons notre décision le 25 janvier,
07:09 puisque c'est la date que j'ai annoncée.
07:11 - Sur un certain nombre de points ou sur l'ensemble du texte ?
07:13 - Nous sommes saisis, donc nous répondrons, bien sûr.
07:16 - Je recommence, sur l'ensemble du texte ?
07:18 - Je recommence.
07:20 - C'est un petit jeu, vous me connaissez, je suis taquin.
07:23 - Oui, bon, revenons à ce qu'est le Conseil constitutionnel.
07:26 Le Conseil constitutionnel a été créé par de Gaulle.
07:29 C'est une innovation de la Ve République,
07:32 et ça existe dans toutes les démocraties avancées.
07:35 C'est-à-dire que ce sont les parlementaires élus qui votent la loi.
07:38 Très bien.
07:40 Mais, au-dessus de la loi, il y a la loi des lois,
07:43 qui est la Constitution.
07:45 Et les parlementaires, ils font leur travail,
07:48 mais il faut bien qu'il y ait un organisme
07:50 qui vérifie si, oui ou non, la loi est conforme à la Constitution.
07:54 Et dans toutes les démocraties avancées,
07:56 cet organisme, c'est la Cour constitutionnelle, le Conseil constitutionnel.
07:59 C'est ça, notre rôle. Rien de plus, rien de moins.
08:02 Et souvent, on nous saisit, et à ce moment-là,
08:06 ou bien nous disons, la loi est tout à fait conforme à la Constitution,
08:09 pas de problème, ou bien nous disons,
08:12 eh bien, non, il y a un problème,
08:14 parce que la loi n'est pas conforme à la Constitution.
08:16 Et, autre chose, je cite à nouveau mon ami Robert Badinter,
08:22 il n'y a pas de rapport entre notre décision
08:25 et la question de savoir si la loi est bonne ou mauvaise.
08:27 Robert Badinter dit souvent,
08:29 "Une loi inconstitutionnelle, par définition, elle est mauvaise,
08:33 "parce qu'elle est contraire à la Constitution."
08:35 Mais une loi qu'on peut juger mauvaise,
08:37 elle peut être très constitutionnelle.
08:39 Et nous, notre terrain, c'est, c'est conforme ou pas à la Constitution.
08:42 C'est le droit, voilà.
08:44 – Alors comment vous avez conçu, alors d'abord, vous vous êtes mise en scène,
08:47 c'est ça qui est assez amusant dans le principe de cette BD,
08:51 pour écrire donc dans les couloirs du Conseil constitutionnel,
08:54 car le moins qu'on puisse dire, et c'est vrai,
08:56 et d'ailleurs c'est aussi, d'une certaine manière,
08:59 relaté par les questions que je posais à Laurent Famus,
09:01 les gens ont quand même une connaissance très très approximative
09:05 du Conseil constitutionnel, du fonctionnement du Conseil constitutionnel,
09:09 et des possibilités de recours qu'on peut avoir,
09:12 soit à titre collectif, soit à titre individuel,
09:14 à l'égard du Conseil constitutionnel.
09:16 – C'est exactement ce qui m'intéressait, en fait, d'amener au grand public,
09:20 faire œuvre de pédagogie et de transmission, si vous voulez,
09:23 pour expliquer en fait ce qu'est cette petite maison,
09:26 parce qu'en fait il n'y a pas grand monde dedans, et moi-même…
09:29 – Combien ? – Pardon ?
09:30 – Combien sont-ils ?
09:31 – Une soixantaine, soixante-quinze ?
09:33 – Oui, on est tout compris, alors il y a neuf membres,
09:35 et puis il y a des collaborateurs, au total nous sommes 70, 75.
09:38 – Voilà.
09:39 – Et ce qui n'est pas énorme, parce que depuis l'extérieur,
09:42 on ne sait pas tout ça, et donc dans les couloirs,
09:45 parce qu'effectivement avec la dessinatrice Galie,
09:48 nous avons visité, nous avons pu interviewer, interroger,
09:52 prendre témoignages de toutes les personnes…
09:54 – Ça rappelle que vous êtes historienne,
09:56 que vous avez déjà écrit justement sur la politique,
09:58 donc c'est quand même un domaine que vous connaissez.
10:00 – Ah oui, oui, et puis je suis passionnée par ça,
10:02 voilà, c'est vraiment… vous parliez de Robert Battenter,
10:04 je le connais aussi, j'ai fait une thèse dessus,
10:06 donc voilà, ce sont mes sujets de fond,
10:10 moi ce qui m'intéresse, c'est les mécanismes,
10:12 les détricoter, et de les amener, en fait si je fais de la BD,
10:15 c'est pour ça, de les amener au grand public,
10:17 si vous voulez, au public le plus large possible.
10:19 – Mais alors justement, puisque nous sommes au Bonheur des Livres,
10:22 et qu'il s'agit aussi de parler de littérature,
10:24 et la BD c'est de la littérature, fondamentalement,
10:28 si vous deviez expliquer en trois points le Conseil constitutionnel
10:31 aux gens qui nous regardent, vous leur diriez quoi ?
10:34 Après tout ce travail qui a été fait.
10:36 – Alors je dirais déjà que c'est en fait,
10:39 la Constitution, le Conseil constitutionnel,
10:41 c'est le cœur de la démocratie,
10:43 et qu'il faut être vraiment vigilant par rapport à ça,
10:45 quand il y a des attaques contre le Conseil constitutionnel,
10:47 on ne se rend pas compte à quel point on attaque la démocratie,
10:50 et ça c'était vraiment… je suis arrivée avec ça,
10:52 et ça n'a fait que confirmer, si vous voulez,
10:54 avec tout ce que j'ai vu, et avec les personnes,
10:57 voilà, avec qui j'ai pu échanger.
10:59 Il y a la question de la QPC, que je trouve vraiment passionnante,
11:03 n'importe qui… – Il faut redire de quoi il s'agit.
11:06 – La question prioritaire de constitutionnalité,
11:08 donc vous, demain, Guillaume Durand, moi, Michel Cotta,
11:12 nous pouvons tous aller, si nous estimons qu'il y a une loi
11:16 qui atteint nos droits et libertés.
11:18 – Michel et moi nous y songeons très sérieusement, depuis hier matin.
11:23 Je ne vous dis pas sur quoi.
11:25 – Alors il y a toute une démarche avant que ça n'arrive,
11:28 à la QPC du Conseil constitutionnel,
11:30 si c'est validé, en tout cas, voilà.
11:33 Donc nous, on a pu assister à des QPC,
11:36 on en donne certains exemples,
11:38 alors c'est à la fois très technique,
11:41 et en même temps c'est très vaste,
11:43 on peut parler de n'importe quel sujet,
11:44 donc ça c'était super intéressant aussi,
11:46 de voir comme ça tout ce panel qui pouvait être discuté.
11:50 Voilà, pour moi, il y avait vraiment ça,
11:53 le fait que les citoyens puissent s'emparer, en fait,
11:56 de cet espace-là, que le Conseil constitutionnel,
11:59 il nous appartient à tous, en fait.
12:01 – Je confirme tout à fait ce que vient de dire notre autre piste.
12:04 – Merci M. le Président.
12:05 – Non mais pourquoi moi j'ai souhaité,
12:08 j'ai fait appel à Cléna qui a travaillé complètement librement,
12:11 le Conseil constitutionnel, vous l'avez dit l'un et l'autre,
12:14 les gens savent que ça existe,
12:15 mais ils ne savent pas exactement comment ça fonctionne, etc.
12:18 Et donc, si on veut, et ça c'est ma responsabilité
12:21 en tant que président de cette institution,
12:24 expliquer au grand public, il faut trouver les mots
12:27 et les techniques qui permettent d'expliquer.
12:29 Et notamment pour le jeune public, la BD, c'est remarquable.
12:33 Et donc, les deux autrices ont été en liberté dans le Conseil,
12:37 elles nous ont accompagnés, par exemple,
12:39 quand on se déplace en région, puisqu'on tient des audiences aussi en région,
12:43 elles ont fait, elles ont interviewé qui elles voulaient, etc.
12:47 Elles ont vécu avec nous, et elles disent,
12:50 c'est pour ça que le titre "Dans les couloirs du Conseil"
12:53 explique exactement votre travail, qui est un travail libre,
12:57 mais qui est extrêmement informatif.
12:59 – Michel, est-ce que vous avez le sentiment, justement,
13:02 que dans le contexte actuel, il y a des partis politiques
13:07 qui ont l'intention, ou qui aimeraient, à l'occasion, justement,
13:11 de ce qui s'est passé pour les retraites,
13:13 ou de ce qui va se passer sur l'immigration,
13:15 de faire au fond sauter la Ve République,
13:17 ou à laquelle vous consacrez justement cet ouvrage ?
13:20 – Oui, je pense qu'il y a...
13:22 – Parce que c'est une question fondamentale,
13:24 parce que le renvoi, il est là.
13:26 – Du côté des extrêmes, c'est évident.
13:28 D'ailleurs, Jean-Luc Mélenchon ne s'en cache pas.
13:30 Il écrit des livres là-dessus, sur la suppression,
13:34 et c'est vrai aussi, de Marine Le Pen, aujourd'hui.
13:39 Mais alors, ce qui est curieux dans la vie politique,
13:42 c'est que, évidemment, quand une décision plaît à l'extrême droite
13:46 et qu'elle est critiquée par le Conseil constitutionnel,
13:49 l'extrême droite se lève et dit...
13:51 – Sur l'immigration, on est en plein,
13:53 puisque finalement, le rassemblement sénat a voté ce que le Sénat avait voulu,
13:58 et maintenant, la gauche veut absolument que Laurent Fabius
14:02 et tous ceux qui travaillent au Conseil constitutionnel
14:04 annilent tout ce qui a été voté par le Sénat.
14:07 – Pas annilent, peut-être tout ce qui a été voté,
14:09 mais enfin, annilent une bonne partie, en tout cas.
14:11 – Ce que la gauche souhaite, en tout cas.
14:13 – Voilà, donc ça veut dire que, de toute façon,
14:15 la position du Conseil constitutionnel est inconfortable,
14:17 mais elle est très inconfortable,
14:19 puisqu'elle se pose de temps en temps à la gauche, de temps en temps à la droite,
14:22 mais enfin, moi, je remarque qu'une décision du Conseil constitutionnel
14:26 n'est pas... Les gens râlent, mais...
14:29 – Après la retraite, ça a été très tranquille, finalement.
14:31 – Bon, d'accord, mais la décision est passée.
14:33 – Oui, absolument.
14:34 – Le rouleau compresseur, il y a quand même un rouleau compresseur du Conseil.
14:37 – La Constitution, dans le titre VII, qui est concentré au Conseil constitutionnel,
14:41 dit que nos décisions s'imposent à tous.
14:43 Bon, alors, certains, selon leurs affinités,
14:47 peuvent considérer que telle décision est bonne, telle décision est mauvaise,
14:50 mais nous, nous n'avons pas entraîné, nous disons le droit.
14:53 – Oui, mais il est à craindre, quand même, que certains aient tendance
14:58 à utiliser le droit pour faire de la politique.
15:02 – Ça peut arriver.
15:03 – Ronsard disait qu'il n'y avait rien de plus fugitif, Laurent Fabius, que la jeunesse.
15:07 Vous avez été le premier ministre le plus jeune de la Ve République,
15:11 et maintenant c'est Gabriel Attal.
15:13 Est-ce que vous considérez que c'est fondamentalement un bouleversement dans la société,
15:17 puisque vous l'avez connu, ou est-ce que c'est tout simplement une volonté d'Emmanuel Macron
15:22 de sortir d'une situation compliquée et d'essayer de rajeunir ?
15:26 Parce qu'au fond, le président Mitterrand a été avec vous dans la même situation.
15:30 – C'est assez amusant, parce qu'on m'a très gentiment mis sur mon bureau
15:34 deux titres du journal Libération.
15:38 L'un que j'ai vu récemment, Libération, titre, je crois, "M. Macron se nomme à Matignon".
15:47 Et ils ont fait exactement le titre, le même titre, lorsque moi j'étais nommé,
15:51 en disant "Mitterrand se nomme à Matignon".
15:54 Donc, bon, très bien.
15:55 – Vous êtes le plus placé, quand même.
15:57 – Le seul commentaire que je puis faire, c'est qu'il paraît que jusqu'à la nomination de M. Attal,
16:04 j'étais recordman de la jeunesse.
16:06 – Pareil, il paraît pas, c'est la vérité.
16:08 – Et comme j'aime beaucoup le sport, je dirais, et cette phrase certainement sera méditée,
16:12 "les records sont faits pour être battus".
16:14 – Pour être battus.
16:15 – Voilà, très bien.
16:16 Et je n'irai pas dans d'autres commentaires.
16:18 – On voit bien que depuis le début de la Ve République, on dit toujours,
16:22 Michel Debray, premier ministre de De Gaulle, racontait que De Gaulle ne s'occupait vraiment
16:26 que des choses importantes et que c'est lui qui faisait tout le reste.
16:29 Ça a beaucoup changé, et effectivement, on a tendance à projeter sur le Premier ministre
16:34 quand on est président, ses volontés, etc.
16:37 Mais vous disiez, Laurent Fabius, vous, ça a commencé par, vous êtes nommé par Mitterrand,
16:43 mais ça finit par lui, c'est lui, et moi, c'est moi.
16:46 – Non, tout votre livre est parfaitement exact, mais là, il y a une petite erreur chronologique
16:54 que font beaucoup de commentateurs et que vous connaissez, d'ailleurs.
16:57 Bon, on va pas raconter l'histoire qui est très distante, mais c'est vrai que je suis nommé,
17:02 j'étais très jeune, j'avais été avant le directeur de cabinet de Mitterrand,
17:06 et donc les sondages sont vraiment… crèvent le plafond,
17:12 et je fais une émission qui s'appelait "L'heure de vérité", avec François de Vérieux, etc.
17:19 – Et avec Gilbert.
17:21 – Avant d'aller à l'émission, j'ai un rendez-vous avec François Mitterrand,
17:26 dont on discute, on était très proches, très amis, et il me dit "comment ça va ?" etc.
17:32 Je lui dis "écoutez, ça va bien", c'était au mois de septembre, je crois, de 84,
17:36 donc quelques mois après avoir été nommé, et je lui dis "non, ça va bien,
17:42 mais il y a quand même un problème, c'est que les gens considèrent
17:45 que je suis encore votre directeur de cabinet", et ils me disent "ah oui, vous avez raison".
17:49 Et donc, qu'est-ce qu'on pourrait faire ?
17:51 Je me dis "je vais à l'émission "L'heure de vérité",
17:53 et peut-être on pourrait essayer de trouver une formule pour expliquer que, bien sûr…
17:59 – Vous voulez dire que c'est une création commune ?
18:01 – Attendez, je suis très loyal, mais enfin j'ai ma propre personnalité.
18:05 Et il était donc dans son bureau, je revois très bien ça,
18:08 moi j'étais de l'autre côté du bureau, il avait son stylo, il écrivait toujours au stylo,
18:13 et est-ce que c'est lui qui a écrit ou moi qui ai écrit ?
18:16 On a conçu ensemble la formule "lui c'est lui, moi c'est moi".
18:20 – Vous savez que c'est la première fois que vous le racontez ?
18:22 – Je ne sais pas, mais… – Ah, la 6 !
18:24 – Bon, très bien. – J'ai Louisine !
18:26 – Alors, oui, je le sais.
18:28 Donc, arrive l'émission, et ça fait partie des formules improvisées
18:33 qui ont été soigneusement préparées, je crois que ça, ça n'a pas changé,
18:37 et donc à un moment où vraiment nous étions tous les deux en symbiose,
18:42 François de Virieux, je crois, me pose la question,
18:44 et je dis "lui c'est lui, moi c'est moi", bon, ça passe absolument inaperçu.
18:48 Très bien, donc c'était 3 ou 4 mois après ma nomination.
18:52 Ensuite, plusieurs mois plus tard, arrivent quelques difficultés,
18:56 notamment ce qu'on appelait l'affaire Jaruzelski,
18:59 Jaruzelski qui était le président polonais,
19:03 qui était venu en France dans des conditions difficiles,
19:06 moi j'étais très sensible à questionner le droit de l'homme, etc.
19:08 Bon, on n'était pas tout à fait sur la même longueur d'onde
19:10 par rapport à François Mitterrand.
19:12 Bon, et donc, ça crée une petite tension, et puis après, bon, la tension…
19:17 Et avec le recul, les gens disent "mais au fond, Fabius,
19:23 il a voulu se distancier de Mitterrand, puisqu'il a dit "lui c'est lui, moi c'est moi",
19:27 mais pas du tout, c'était 6 mois avant.
19:30 Voilà la vérité historique.
19:32 – Ce qui est très intéressant dans le travail que vous avez fait,
19:35 qui en plus a été agréable à lire, etc.,
19:38 c'est que vous expliquez, d'une façon que je crois tout à fait juste,
19:42 quelle est l'évolution de l'histoire et du rôle du Conseil.
19:46 Bon, qui au départ avait été créé par de Gaulle,
19:51 bon, comme un progrès démocratique, mais en même temps, à l'époque,
19:55 et je ne crois pas me tromper en disant cela, et ne pas être excessif,
19:58 le Conseil était là, si jamais le Parlement n'avait pas agi
20:03 exactement comme le voulait l'exécutif,
20:06 bon, eh bien, le Conseil était là pour sanctionner.
20:08 Et puis, avec des étapes que vous expliquez très bien,
20:12 1971, 1974, etc., et la QPC,
20:15 le Conseil est devenu une institution indépendante,
20:18 comme les autres conseils.
20:19 Donc, vous le faites d'une façon qui est très attrayante,
20:23 mais en même temps, c'est la vérité historique.
20:25 Et ça arrive dans beaucoup d'institutions.
20:28 Aujourd'hui, le Conseil n'est pas le même que ce qu'il était
20:31 au moment de la création.
20:33 – Oui, parce qu'il y a une évolution et du Conseil,
20:35 et du milieu politique face au Conseil.
20:38 – Oui, exactement.
20:39 – Et le malentendu avec le grand public, qui pense encore
20:42 que le Conseil constitutionnel est un instrument politique.
20:45 Vous en parliez vous-même, alors que pas du tout.
20:48 Et ça, vraiment, moi, je le savais un peu,
20:51 mais encore une fois, j'en ai eu confirmation.
20:54 Ce que disait le président Fabius, le seul sujet, en fait,
20:57 c'est est-ce que la loi est en lien avec la Constitution ou pas ?
21:01 Le reste, ça n'a aucune valeur.
21:05 Et par exemple, sur les retraites, bon, on peut être en désaccord,
21:11 mais il se trouve qu'on soit en désaccord ou pas,
21:14 la question, c'est la constitutionnalité, en fait, de cette loi-là.
21:18 C'est le seul débat et le seul sujet.
21:21 – Vous prenez aussi l'exemple de l'IVG ?
21:23 – Oui, oui, qui devrait être constitutionnalisée, d'ailleurs, bientôt.
21:29 – Je voudrais donner des exemples concernant le livre de Michel,
21:33 je disais tout à l'heure de Michel Cotta,
21:35 qui fourmille évidemment d'informations que vous avez recueillies.
21:39 Par exemple, d'abord, Laurent Fabius,
21:41 vous avez préparé avec François Mitterrand le fameux débat
21:44 qui est celui, donc, "L'homme du passé".
21:48 Vous avez un peu tendance à reprendre le refrain d'il y a 7 ans,
21:51 "L'homme du passé, quel dommage que vous soyez devenu,
21:54 depuis l'homme du passé",
21:55 là encore, on est dans l'écriture de quelque chose qui a été prévu.
21:58 Il y a une chose que j'adore, Michel, c'est quand, à un moment de l'heure,
22:02 un interpelle, évidemment, le président,
22:05 que va devenir François Mitterrand,
22:07 et qui a dit lors du débat "on va nationaliser toutes les banques",
22:10 et Mitterrand répond "oui, j'ai un petit peu exagéré",
22:13 ce qui prouve quand même l'extraordinaire légèreté
22:16 de la perception qu'il pouvait avoir, j'allais dire, du champ économique.
22:21 – Je ne suis pas sûre de ça, parce qu'il savait bien sûr
22:24 que la nationalisation allait poser problème,
22:27 ne serait-ce qu'au patron, il le savait très bien,
22:31 mais il ne voulait pas, ça prouve qu'il ne voulait pas,
22:34 il me semble, j'interprète, face jusqu'au bouddhiste,
22:40 qui disait "attention, tout doit être nationalisé à 100%",
22:47 et puis face à l'équipe de Michel Rocard, et d'ailleurs de Delors,
22:51 entre nous, qui disait "il vaudrait mieux que ce soit 51%,
22:54 ça coûterait moins cher et ça laisserait tout le monde",
22:57 Delors qui immédiatement...
22:59 – Il voulait dire "c'est l'esprit de nationalisation qui marche,
23:03 c'est pas dans le détail, on ne va pas rentrer en détail",
23:06 il dit modestement "oui, j'ai un peu exagéré",
23:08 Delors lui dit "enfin, monsieur le président, tout de même,
23:11 vous n'êtes pas allé trop loin".
23:12 – Oui, mais vous décrivez dans la foulée un mot roi,
23:14 Premier ministre, avant Laurent Femus, qui lui est d'entrée très inquiet,
23:19 il a le sentiment que la France va être attaquée,
23:22 le franc va être attaqué, que Delors est déjà aux manettes
23:25 pour essayer justement de remonter la pente,
23:28 et que ça va devenir extrêmement compliqué.
23:30 – Et lorsque Pierre Morat dit ce jour-là à François Mitterrand
23:33 "attention, vous savez, le franc s'en va, il faut faire quelque chose",
23:39 Mitterrand lui dit "c'est le jour du Panthéon, où il est couronné au fond par la paix",
23:45 il dit "pas maintenant, Pierre, pas maintenant",
23:47 est-ce qu'il trouvait que c'était peut-être pas le moment
23:49 d'y poser des problèmes, et qu'il voulait être content,
23:53 tout simplement, d'avoir été élu ?
23:54 – Je voudrais vous poser une question à tous les trois
23:56 sur cette fameuse 5ème République, que vous connaissez par cœur,
23:59 Michel, puisque vous la suivez depuis le début,
24:02 et que vous avez étudiée, madame, est-ce que vous avez l'impression
24:06 qu'elle est éternelle, je veux dire que c'est la structure
24:10 de la politique française pour l'éternité,
24:12 ou est-ce que à un moment, je ne parle pas du côté partisan,
24:16 c'est-à-dire Mélenchon ou Marine Le Pen qui actuellement
24:20 veulent peut-être y mettre un terme, mais est-ce que vous avez l'impression
24:22 qu'on sera toujours dans le même contexte pour des gens
24:25 qui ont 15-16 ans aujourd'hui, Laurent Fabius ?
24:28 – Écoutez, moi j'ai, compte tenu du parcours que j'ai fait,
24:33 une spécificité, qui est que j'ai dirigé le pouvoir exécutif
24:39 comme Premier ministre, j'ai présidé l'Assemblée nationale
24:44 plusieurs fois, et aujourd'hui je préside le Conseil constitutionnel,
24:47 donc je vois à peu près comment ça fonctionne.
24:50 Et puis j'ai vu, comme ministre des Affaires étrangères,
24:55 les réalités internationales, et je connais les réalités nationales
24:59 et aussi locales, puisque j'étais maire,
25:01 donc ça m'a permis d'avoir quand même certains regards.
25:04 – Et alors ?
25:05 – Et alors, je constate d'abord que la Constitution française,
25:10 c'est celle qui a la longévité la plus grande de l'histoire de France.
25:15 – Donc la réponse est plutôt oui.
25:17 – Donc, et je crois que la stabilité, de ce point de vue-là, est un atout.
25:22 Je vous donne un exemple, pour ne pas être long.
25:25 Lorsque je discutais avec mes collègues ministres des Affaires étrangères,
25:30 quand vous discutez à 5 ou 6 d'un problème concret,
25:36 si vous savez que le ministre qui est en face de vous,
25:42 si vous pressentez qu'il ne sera plus là dans 3 mois,
25:46 ce n'est pas lui qui va gagner le débat.
25:49 Si vous savez en revanche qu'il y aura une stabilité,
25:52 sinon de lui, du moins de la ligne politique,
25:55 ça c'est un atout pour un pays.
25:57 Alors, ça ne veut pas dire que tout est parfait,
25:59 et on ne peut pas avoir exactement la même pratique aujourd'hui qu'il y a 50 ans,
26:04 et en particulier il y a une volonté de participation plus grande,
26:07 donc il y a peut-être des ajustements à faire,
26:09 mais l'instabilité c'est quand même pour moi un atout.
26:14 - Michel, avez-vous le sentiment que nous sommes partis pour une éternité de Vème République ?
26:18 Il y aura un deuxième tome.
26:20 - Oui, il y aura un deuxième tome,
26:22 mais les ajustements qui ont été apportés depuis changent la nature de la Vème République.
26:28 C'est mieux de faire ça par petits bouts,
26:31 donc de faire évoluer la Constitution plutôt que d'en changer.
26:35 C'est vrai que les quinquennats changent profondément les choses.
26:42 - Et est-ce que l'historienne a le même point de vue ?
26:45 - Déjà, en tant que personnelle, je ne crois pas aux éternités, tout simplement.
26:49 En revanche, oui, on voit qu'elle est stable,
26:52 on voit qu'elle peut avoir une certaine souplesse,
26:55 on peut tout à fait la critiquer,
26:56 et personnellement, je suis la première à critiquer.
26:59 Il y a quand même des choses qui se sont produites.
27:01 Vous parliez du passage du septennat au quinquennat,
27:03 et moi je ne suis pas pour le quinquennat,
27:05 mais on ne va pas ouvrir un débat là-dessus.
27:07 Et autre chose, c'est quand même une Constitution
27:10 qui a permis de faire rentrer la loi pour l'abolition de la peine de mort,
27:13 justement dedans, et ça c'est assez fondamental pour moi.
27:17 Donc on voit que sur les droits humains, sur les droits et libertés,
27:20 on peut vraiment toucher à des choses qui sont conséquentes pour nous,
27:26 et qui, dans ce cadre-là, en plus, sont liées quand même à l'Union européenne.
27:30 Donc je dirais qu'on fonctionne aussi dans quelque chose de plus vaste, si vous voulez.
27:35 On ne peut pas...
27:36 C'est difficile aujourd'hui de parler que de la France,
27:39 sans voir un petit peu au-delà de ça, à quoi on appartient.
27:42 – Ce qui est assez curieux avec vous, Laurent Fabius,
27:44 c'est que depuis un certain temps, vous peignez,
27:46 vous écrivez essentiellement sur la peinture, notamment sur les polyptiques.
27:50 – Polyptiques ?
27:51 – Oui, polyptiques, c'est ce que j'ai dit aujourd'hui.
27:53 – Oui, oui, mais quand j'ai dit...
27:55 – Ça veut dire que vous êtes déjà parti ailleurs ?
27:58 – Je suis ici.
28:00 Mais c'est vrai que j'aime beaucoup la peinture,
28:03 bon, et que... mais en même temps, je ne mélange pas les genres.
28:06 Aujourd'hui, je suis président du Conseil constitutionnel,
28:08 je ne suis pas peintre.
28:10 Mais l'une des raisons pour lesquelles, dans mon dernier livre,
28:15 j'ai choisi de ne pas appeler ça "polyptiques", mais "tableau pluriel",
28:20 c'est que lorsque je parlais à mes amis de faire un livre sur les polyptiques,
28:26 qui sont donc les oeuvres avec panneaux multiples,
28:29 ils entendaient "politique".
28:31 Ils disaient "Ah, tu vas encore faire de la politique ?"
28:33 Je disais "Non, polyptique".
28:34 Et à ce moment-là, je voyais dans leurs yeux une espèce d'interrogation.
28:37 – Il faut changer d'avis.
28:39 – Non, non, il y a des Y quelque part, mais combien il y en a-t-il,
28:43 et où les met-on ?
28:44 Et donc, j'ai préféré appeler ça "tableau pluriel".
28:47 – Est-ce que vous avez le sentiment, Michel, ce sera ma dernière question,
28:50 que justement, les deux parties qui vont scinder ce travail
28:55 sur la Ve République publiée aux éditions bouquins sont d'inégal intérêt ?
29:00 C'est-à-dire de l'accession, justement, de la Ve République de Gaulle
29:04 jusqu'à l'élection de Mitterrand,
29:06 et puis après, justement, de Mitterrand jusqu'à aujourd'hui,
29:09 on ne peut pas dire que c'est à la même intensité ?
29:11 – Non, je pense qu'il y a une intensité, il y a toujours de l'intensité,
29:15 on a toujours eu des périodes, de 68,
29:20 qui a été quand même une grande période, qui n'a pas duré longtemps,
29:23 mais enfin, dont le général de Gaulle, dont Georges Pompidou,
29:26 est sorti victorieux, il y a quand même des moments,
29:31 et les premiers moments de François Mitterrand, président,
29:36 les premiers moments de... – Que vous racontez, d'ailleurs.
29:39 – C'est quand même des...
29:42 Après de Gaulle, il y a eu une Ve République
29:44 qui a eu autant d'importance que la première partie, je pense.
29:48 – Merci à tous les trois d'être venus.
29:50 Je rappelle le livre de Michel Cotta, qui s'appelle "Ma Ve",
29:53 aux éditions bouquins, vous trouverez évidemment
29:56 des conversations infini-historiques, importantes,
30:00 et bien évidemment, le point de vue de Michel,
30:02 sur la Ve de Michel Cotta, donc, sur la Ve République,
30:06 puisque c'est un livre qui est à la fois très informé,
30:09 qui est un livre personnel, voulu par Laurent Fabius,
30:12 mais réalisé par Marie Bardio-Vaillant et par Galli,
30:17 dans les couloirs du Conseil constitutionnel.
30:20 Voici donc cette BD qui est publiée chez Glenive,
30:23 qui va vous permettre de vous informer le mieux possible
30:26 sur une institution qui est fondamentale
30:28 pour justement la Ve République, dont on attend le 25 janvier
30:32 une décision extrêmement importante concernant la loi immigration.
30:36 Le président Fabius n'a pas voulu en dire plus,
30:39 je ne peux pas le torturer,
30:41 donc nous allons passer à une émission suivante la semaine prochaine.
30:44 Merci à tous les trois d'être venus. – Merci à vous.
30:46 – J'ai été ravi.
30:48 [Musique]

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