Peut-on sauver la démocratie ? - La chronique de Céline Pina - Vidéo Dailymotion

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Transcript

00:00 - Il est 8h13, dans un instant on va revenir évidemment sur la composition du gouvernement et la surprise d'Atti,

00:06 notamment dans ce gouvernement de Gabriel Attal, on va commenter ça avec l'ensemble de nos éditorialistes ce matin.

00:12 Et Emmanuel Grégoire aussi, le premier adjoint à la mairie de Paris, qui sera l'invité de Jean-Jacques Bordin tout à l'heure à 8h30,

00:17 et évidemment qu'il y a des choses à dire, j'imagine, un peu sur Rachida Dati, qui est à la mairie de Paris, principale opposante, d'Anne Hidalgo.

00:26 Céline Pinard, bonjour. - Bonjour.

00:29 - En ce début d'année, vous souhaitez aussi nous parler d'un livre de Timothy Snyder, c'est sur, grosso modo, les démocraties en fait dans le monde, où allons-nous ?

00:37 Et il vient d'être traduit, le titre c'est "La route pour la servitude, Russie, Europe, Amérique", qui recèle une prédiction bien sombre.

00:47 De quoi s'agit-il alors ?

00:48 - Et oui, finalement, la violence islamiste nous a conduit à privilégier une lecture du monde selon un acte nord-sud.

00:54 Et avec Timothy Snyder, finalement, c'est un affrontement bien plus classique qui est remis à l'ordre du jour, l'affrontement Est-Ouest.

01:01 Avec en filigrame cette question, pouvons-nous encore sauver la démocratie ?

01:06 Donc pour Snyder, l'affrontement actuel qui oppose la Russie aux pays européens et aux Etats-Unis

01:12 est lié également à la manière différente dont Russes et Occidentaux pensent la politique.

01:17 Les Russes seraient dans une politique d'éternité, tandis que les Occidentaux sont dans une politique d'inéluctabilité.

01:24 Dans les deux cas, nous serions dans une impasse.

01:27 - Alors comment on définit ces deux politiques ?

01:29 - Alors la politique d'inéluctabilité définit le positionnement à l'Ouest.

01:33 Elle conduit à penser qu'on ne peut changer les choses qu'à la marche.

01:35 On ne peut agir finalement, il faut s'adapter.

01:39 En Europe et aux Etats-Unis, par exemple, l'adaptation à la mondialisation est vue comme nécessaire,

01:44 sans qu'il semble y avoir un moyen de peser sur la façon dont on peut le faire et sur les objectifs à atteindre.

01:52 Finalement, jamais le but des sacrifices demandés au peuple n'est formulé,

01:56 et le choix des peuples apparaît peu pris en compte.

01:59 On a l'exemple du référendum de 2005.

02:02 Les démocraties se sont donc dépolitisées,

02:05 les dirigeants ne comprennent plus l'imaginaire de leur peuple, ni les passions qui les agitent.

02:09 Et pire même, selon Timothy Snyder,

02:12 le développement des réseaux sociaux et des fake news empêche que soit posé le rapport à la vérité,

02:17 qui est indispensable à toute démocratie.

02:19 Du coup, les débats tournent à l'excommunication réciproque,

02:23 et en même temps que l'impuissance politique,

02:25 les revendications deviennent elles de plus en plus radicales.

02:29 D'où la pente glissante sur laquelle nous sommes engagés.

02:32 - Et qu'est-ce que c'est que cette politique d'éternité à propos des Russes,

02:36 qui caractériserait leur mentalité alors, Russes ?

02:39 - Alors en fait, elle placerait le peuple dans une situation de victimisation éternelle.

02:43 Pour Poutine, le destin glorieux de la Russie est empêché par les mêmes forces qui sans cesse reviennent.

02:49 Et ces forces sont les forces de l'Ouest.

02:52 Le temps est selon les Russes une sorte de cercle qui renvoie sans cesse les mêmes menaces du passé.

02:57 Cela se traduit par un rêve d'empire où l'Occident est l'ennemi éternel

03:01 qui empêche la Russie de faire régner l'ordre à ses frontières.

03:05 Le projet impérialiste russe est donc parfaitement assumé et parfaitement menaçant

03:10 puisqu'il a déterminé qu'il empêchait de se réaliser.

03:13 En face, aux Etats-Unis et en Europe, il n'est pas pris au sérieux.

03:17 Or, ce rêve identitaire dépasse les intérêts strictement économiques.

03:21 C'est d'ailleurs peut-être pour cela qu'il n'est pas compris par un Occident

03:25 où les gestionnaires ont remplacé les politiques.

03:27 - Bon, dites-moi, l'auteur fait un constat quand même, Timothy Snyder, là,

03:31 très pessimiste de notre situation.

03:33 - Franchement, il est vrai que le constat n'est pas riant.

03:36 Mais Hölderlin disait "là où croient le péril, croient aussi ceux qui sauvent".

03:41 Alors on va l'espérer.

03:42 La culture européenne n'est pas nédière, les peuples ont des ressources,

03:46 la volonté politique peut revenir.

03:49 Nous n'éviterons pas l'effort, ça c'est ce que nous dit Snyder.

03:52 Mais cet effort peut encore être fécond.

03:54 Bref, la démocratie peut être sauvée,

03:57 mais d'ores et déjà cela implique que les sociétés soient prêtes à prendre des risques pour elles.

04:02 En fait, cela implique qu'elles y croient.

04:04 Et pour reprendre un des termes exécrables qui pullulent dans certains titres d'articles,

04:09 il faut que la démocratie redevienne inspirante.

04:12 Et c'est déjà un sacré vœu pour cette rentrée.

04:14 - Merci Céline Pinar.

04:16 [Musique]

04:19 - Il y a deux spécialistes de la géopolitique et de la démocratie en face,

04:23 Jean-Baptiste Noé et Guillaume Bigaud.

04:25 Un mot, qu'est-ce que vous en pensez, Jean-Baptiste Noé ?

04:28 - Je partage son constat, la démocratie n'est jamais acquise.

04:31 La démocratie, ce n'est pas uniquement le fait de voter,

04:33 c'est aussi la liberté, la liberté de la presse, la liberté éducative, la liberté de parler.

04:38 Et ça, c'est un combat qui est perpétuel.

04:40 Et pour moi, les principaux ennemis ne sont pas tant l'extérieur,

04:42 ce n'est pas tant la Russie et la Chine, c'est nous-mêmes.

04:45 Quand vous avez un effondrement du niveau scolaire,

04:47 comment est-ce que vous voulez qu'ensuite les gens élisent ?

04:49 Élire, ça veut dire choisir.

04:50 Il faut choisir en étant un homme rationnel, en ayant un peu de culture.

04:53 Donc ça, c'est un danger pour la démocratie.

04:56 Egalement, quand vous êtes des atteintes à la liberté de la presse,

04:58 quand il y a des attaques aussi contre les parents qui veulent enseigner librement à leurs enfants.

05:03 Ça, c'est tous ces éléments qui sont des attaques de la démocratie

05:06 qui viennent de l'intérieur même de la France.

05:08 - Et des attaques qui viennent aussi, ce que dit donc Snyder,

05:12 c'est des fake news, des réseaux sociaux aussi, Guillaume Bigot.

05:16 - Ah, ça, ce n'est pas faux.

05:17 Mais je prolonge ce que vient de dire Joëtte Snowé,

05:20 c'est-à-dire que la démocratie, le pire ennemi de la démocratie,

05:23 notamment de la démocratie occidentale, c'est elle-même.

05:26 Le péril, il est à l'intérieur.

05:28 Et c'est une vision très américaine qui charge un peu les démocratures

05:32 ou les populismes extérieurs et le sud global qui relève la tête,

05:36 qui est accusée dans ce livre.

05:38 D'ailleurs, le livre a le même titre qu'un livre de Hayek en 1944.

05:41 Et en fait, moi, je pense que la démocratie, elle est d'abord en péril interne.

05:44 Souvenez-vous du panier des déplorables aussi, dont parlait Madame Clinton.

05:48 Souvenez-vous de Juncker, parce qu'on construit l'Union européenne contre la démocratie,

05:51 qui disait "on ne peut pas voter contre les traités".

05:53 Quant à la démocratie sur le plan international,

05:55 qui sinon les Etats-Unis, gendarmes du monde,

05:57 ont commencé par devenir des voyous eux-mêmes en attaquant l'Irak ?

06:00 Quant à ceux qui contestent le Brésil et l'Inde,

06:03 je vous signale, ce sont des démocraties.

06:04 Il n'y a pas que des régimes autoritaires qui contestent l'hégémonie américaine.

06:07 - Oui, mais il y a différents types de démocraties quand même.

06:10 Elles sont à trois niveaux, non ?

06:12 - Ce qui est intéressant, c'est qu'en fait, pour avoir finalement tout le panel,

06:17 il faudrait lier ce qu'écrit Snyder à ce qu'écrit Yasha Mounk,

06:20 qui lui, va complètement démolir l'idée de wokisme

06:23 en expliquant que le wokisme tue la démocratie de l'intérieur.

06:27 Et donc, il y aurait ces deux représentations.

06:29 - Pourquoi le wokisme tue la démocratie de l'intérieur ?

06:31 Parce qu'à la base, le wokisme,

06:33 c'est plutôt d'éveiller un peu les consciences pour mettre un peu d'égalité, quoi.

06:37 - Alors en fait, parce qu'il empêche l'universalisme.

06:40 C'est-à-dire que derrière cet éveil des consciences,

06:43 on en arrive très rapidement à une forme de lutte contre les discriminations

06:47 dans lesquelles les signes extérieurs les plus basiques,

06:50 comme la couleur de peau, deviennent identitaires et indépassables.

06:54 Et à partir du moment où vous faites de la couleur de peau, par exemple,

06:58 une des bases de l'appréhension d'un individu,

07:00 vous ne pouvez plus avoir de logique universaliste.

07:03 Vous la tuez vous-même.

07:05 Et en fait, c'est ce qu'il explique, c'est-à-dire le délire de pureté

07:08 amène à des délires de distinction

07:11 qui font qu'il n'y a plus d'égalité réellement possible.

07:13 - Bon, on va continuer dans un instant avec vous trois.

07:17 Évidemment, il est 8h20 sur Sud Radio.

07:20 J'aimerais avoir votre regard sur ce nouveau gouvernement Attal.

07:23 Conseil des ministres tout à l'heure à 11h.

07:26 Alors, ils sont 14 pour l'instant autour de Gabriel Attal.

07:30 Ce sera sans doute élargi, bien sûr.

07:31 Il y en a qui attendent en réserve.

07:33 Qu'est-ce que vous en pensez ?

07:34 On dit coup de barre à droite.

07:36 Est-ce que c'est de la vraie droite ou pas ?

07:39 Vous allez me dire ça dans un instant sur Sud Radio.

07:41 Il est 8h20 et les auditeurs aussi qui pourront s'exprimer tout à l'heure

07:44 après Emmanuel Grégoire qui sera l'invité,

07:46 le premier adjoint à la mairie de Paris,

07:48 qui sera l'invité de Jean-Jacques Bordin dans une dizaine de minutes.

Peut-on sauver la démocratie ? - La chronique de Céline Pina

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