Jean-François Delfraissy.

  • il y a 8 mois
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00:00 [Musique]
00:05 Bonjour Jean-François Delphrécy, vous êtes professeur d'immunologie clinique,
00:08 vous êtes occupé évidemment de la lutte contre le SIDA pendant très longtemps
00:12 et vous avez été le fameux président du conseil scientifique pendant toute la crise du Covid.
00:17 Vous publiez un livre "Un médecin au front" aux éditions du Seuil,
00:21 témoignage avec Denis Laffey.
00:23 Vous racontez comment au fond aujourd'hui vous vous dites vous, Jean-François Delphrécy,
00:27 qui vous êtes battu contre ce Covid.
00:29 Au fond je suis apparu comme le père fouetard de cette crise.
00:33 Oui c'est un peu vrai, je pense que les français m'ont vu comme,
00:36 voilà, au nom du conseil scientifique, je rappelle que c'est des décisions
00:41 qui étaient prises en commun avec l'ensemble du conseil scientifique,
00:45 m'ont vu comme l'image de celui qui avait conseillé le gouvernement
00:50 et au plus haut niveau du gouvernement pour un certain nombre de décisions
00:54 un peu difficiles, mais on va y revenir.
00:56 Oui, comme par exemple ce 17 mars à 20h,
01:00 vous racontez dans le livre, vous ouvrez votre fenêtre,
01:02 c'est le confinement Paris et Désert et là vous êtes traversé d'un doute
01:06 et vous vous dites "et si on s'était trompé ?"
01:09 Oui c'est la période compliquée de mars 2020 où finalement
01:15 comment on construit l'expertise alors même qu'on est dans un grand phénomène d'incertitude
01:22 et où la science n'est pas encore au rendez-vous.
01:25 Normalement c'est assez simple, il y a d'un côté la science,
01:29 de l'autre côté la décision politique et il ne faut surtout pas mélanger les deux choses,
01:34 on est une démocratie, ce sont les politiques qui décident
01:37 et les experts sont là pour les conseiller.
01:40 En situation de crise, au début de la crise, quand la science n'est pas encore au rendez-vous,
01:45 comment peut-on être expert alors que soi-même,
01:49 eh bien on essaie de regarder ce qui va conduire à la décision la moins mauvaise possible.
01:54 Donc c'est vrai qu'on a poussé le gouvernement à confiner,
01:59 rappelez-vous il n'y a pas que nous qui avons confiné, l'Europe entière a confiné avec des délais.
02:03 Notre rôle a été finalement de "pousser" cette décision extrêmement difficile.
02:10 Avec des doutes parce que vous le reconnaissez, vous n'étiez pas sûr.
02:13 On avait de doutes sur le confinement un peu, de doutes sur l'efficacité du confinement,
02:20 oui on en avait parce qu'on travaillait sur les modèles mathématiques
02:23 avec une série de jeunes biomathématiciens
02:26 qui nous montraient qu'en diminuant de façon drastique les contacts,
02:31 les contacts de chacun d'entre nous,
02:33 et c'est ce qui s'est passé pendant le premier confinement,
02:36 eh bien on allait réduire à partir de début avril.
02:38 Sinon vous dites on craignait 200 000 morts.
02:41 Oui je pense qu'on aurait eu entre 200 et 300 000 décès en France,
02:46 probablement essentiellement parmi les personnes âgées ou les personnes à risque,
02:52 mais qui, vous vous souvenez très bien que vers le 10 avril,
02:56 c'est-à-dire alors qu'on avait déjà pratiquement trois semaines de confinement
03:00 et que nous nous avions prévu que la courbe allait se "casser",
03:04 eh bien on avait, c'est le moment où à l'assistance publique à Paris on a failli craquer,
03:08 où des trains partaient tous les jours sur Rennes, sur Niort, sur Nantes, sur Bordeaux,
03:15 pour transférer les malades les plus graves parce qu'il n'y a eu plus de place.
03:18 L'idée était évidemment d'éviter les morts et d'éviter que le système de soins ne craque.
03:23 Oui mais en même temps vous reconnaissez dans ce livre une mise en place chaotique.
03:28 Au départ, des mesures face à cette épidémie qui étaient nouvelles,
03:32 vous reconnaissez des erreurs dans la composition de ce comité scientifique.
03:36 Ce qu'au fond, c'est là où au fond votre livre est peut-être humain,
03:40 c'est que vous introduisez le doute,
03:43 et au fond on sent qu'il y a eu de profonds doutes.
03:46 Oui bien sûr, on vient de vivre quelque chose d'extraordinaire,
03:51 qu'on a d'ailleurs tendance à oublier,
03:52 il y a une résilience extraordinaire de nos concitoyens,
03:56 mais tant mieux, on voit bien qu'il y a d'autres crises qui sont arrivées et tant mieux.
04:00 Et pourtant, et c'est la raison pour laquelle finalement je me suis lancé dans l'écriture de ce livre,
04:06 il faut qu'on en tire un certain nombre de leçons.
04:08 Et bien sûr qu'on a fait des erreurs,
04:10 mais ça serait ridicule de ma part de ne pas le reconnaître.
04:14 Probablement on aurait dû mettre dans la composition du conseil scientifique
04:17 un vétérinaire plutôt qu'on ne l'a mis,
04:19 ou un spécialiste de la santé mentale des enfants,
04:23 on les a mis, mais on les a mis plus tard.
04:24 Probablement qu'on aurait dû, par exemple,
04:29 pousser encore plus à confiner plus vite,
04:32 entre nos premiers contacts avec l'Elysée,
04:34 une réunion avec l'Elysée décisive qui s'est passée le 12 mars,
04:39 et puis le confinement qui survient quelques jours plus tard.
04:42 Tout gain d'un ou deux jours a été essentiel
04:46 pour éviter un certain nombre de contacts, donc de décès chez les personnes âgées.
04:50 Mais en même temps, vous dites très clairement qu'il n'y a pas eu de tentative
04:55 du pouvoir politique d'influencer vos propres, à la fois, recommandations, on va dire, ou décisions.
05:01 Non, vraiment, le conseil scientifique, rappelons-le,
05:05 a été créé début mars 2020,
05:08 et il a fini ses fonctions le 31 juillet 2022.
05:11 C'est-à-dire qu'on parle toujours du premier confinement,
05:14 on pourrait y revenir si vous le souhaitez,
05:15 mais en fait, il y a eu d'autres épisodes.
05:17 Il y a eu un deuxième confinement à l'automne et à l'hiver 2020,
05:22 puis ensuite, il y a eu cette année 2021 un peu extraordinaire,
05:26 de course entre l'arrivée des variants et des vaccins.
05:29 Eh bien, on a eu donc un dialogue répété,
05:33 il me semble-t-il, dans de bonnes conditions démocratiques,
05:36 chacun gardant le respect l'un de l'autre,
05:40 mais je n'ai jamais reçu un ordre particulier
05:43 pour écrire quoi que ce soit sur la gestion de crise.
05:45 – Mais vous reconnaissez des conseils de défense, vous dites, peu transparents,
05:49 vous reconnaissez avoir été, j'allais dire, bouleversé,
05:52 ou en tous les cas, troublé par la rencontre d'Emmanuel Macron
05:56 avec le professeur Raoult à Marseille ?
05:59 Vous avalez beaucoup de couleuvres.
06:01 – Ecoutez, c'était mon rôle, mon rôle était…
06:04 Voilà, le président de la République m'avait demandé de l'aider
06:07 à porter ce conseil scientifique.
06:08 J'avais d'ailleurs dit qu'il valait peut-être prendre quelqu'un de plus jeune que moi,
06:12 parce que je pensais qu'on était dans une certaine durée de la crise,
06:14 mais je ne pensais pas, là non plus, qu'on serait sur deux ans et demi.
06:18 Finalement, on en était sur deux ans et demi,
06:20 et on n'est pas encore totalement fini, on le voit encore.
06:23 Donc, oui, bien sûr, il y a eu, dans cette relation très très particulière,
06:30 dans une grande crise sanitaire, entre science et politique,
06:34 il y a des moments de tension, c'est clair, mais une fois de plus,
06:38 je pense que la France, on a les chiffres d'ailleurs maintenant
06:41 au niveau sanitaire, s'en est bien sorti,
06:43 c'est-à-dire qu'en termes de mortalité ou en termes de perte de durée de vie,
06:48 on est un des pays qui s'en sort le mieux.
06:50 Il y a d'autres éléments complexes, évidemment,
06:53 mais sur ce marqueur très dur qu'est la mortalité,
06:57 on s'en sort mieux que l'Allemagne, qu'on a souvent cité comme exemple,
07:00 mieux que l'Angleterre, mieux que l'Italie, mieux que l'Espagne,
07:03 et beaucoup mieux que les États-Unis, par exemple.
07:05 Oui, alors lorsque le vaccin arrive, et là encore dans votre livre,
07:10 vous reconnaissez finalement une projection hasardeuse, je vous cite,
07:14 sur le vaccin lui-même, sa capacité à freiner la transmission,
07:19 le temps où ce vaccin pouvait commencer à être efficace,
07:24 et au fond, vous avez beaucoup de doutes sur tout cela.
07:27 Et en plus, au début, vous croyez sincèrement
07:30 que ce vaccin protège de la transmission.
07:33 Oui, le vaccin est arrivé plus vite qu'on ne l'avait imaginé.
07:37 Le temps de gestion de crise, de ces grandes crises,
07:42 sont des crises bien sûr sanitaires, mais elles deviennent très vite des crises sociétales
07:46 et parfois des crises politiques.
07:48 Et le temps de la médecine, le temps de la recherche,
07:51 n'est pas le temps du politique et a fortiori le temps des médias.
07:54 Le temps de la recherche, c'est plusieurs mois, voire deux, trois ans.
07:59 Donc ça a été une excellente surprise
08:02 d'avoir les premiers résultats vers la mi-novembre 2020
08:05 sur les essais de phase 3 avec les vaccins mRNA.
08:08 Vraiment une excellente surprise
08:09 pour l'ensemble de la communauté médicale internationale, pas que la France.
08:13 Et après, eh bien, on a pensé pendant un certain temps
08:18 que ce vaccin allait protéger bien sûr contre les formes sévères et les formes graves,
08:22 et ça, il le fait, il l'a bien fait.
08:25 Mais on a pensé aussi que comme beaucoup de vaccins,
08:28 il allait protéger contre la transmission.
08:30 Et malheureusement, on a eu deux faits négatifs qu'il a fallu observer.
08:34 Et donc, pour se rendre compte,
08:36 un, que la durée du vaccin, elle était relativement faible
08:40 et en particulier chez les personnes âgées, la durée d'action des vaccins
08:43 et d'où la répétition des doses vaccinales.
08:46 Et là, les gens ont eu du mal à comprendre.
08:48 Et deuxièmement, qu'il avait finalement une capacité faible à limiter la transmission.
08:53 Oui, et ça, vous le dites au ministre de la Santé.
08:56 Vous dites dans ce livre, au fond, qu'on comprend que lui n'infléchit pas sa position
09:00 et continue de considérer que ce vaccin protège de la transmission,
09:05 alors que vous savez que ça n'est plus le cas.
09:08 C'est, enfin, je l'ai dit lors d'une audition au Sénat,
09:12 en disant que probablement, il faudrait se faire vacciner à plusieurs reprises
09:15 et que probablement, le niveau, l'action sur la transmission serait faible.
09:20 Et le ministre de la Santé, qui était lui-même,
09:22 on est en mars ou en avril 2021,
09:26 qui est lui-même dans une stratégie d'arriver à vacciner un pays entier.
09:32 Je ne sais pas si vous imaginez ce que ça peut présenter,
09:35 à la fois en termes de logistique, de messages à passer.
09:38 Dit, écoutez, voilà, c'est un avis du professeur Delfraissy,
09:41 mais on verra bien, en tout cas, on vaccine
09:43 et ce vaccin doit être celui qui doit nous permettre de sortir de là.
09:47 Donc, on avait tous les deux raison, si je peux dire.
09:50 Oui, mais ce n'est pas le message.
09:51 Mais avec des temporalités différentes.
09:53 Mais le message qui était colporté dans les médias,
09:56 d'ailleurs, vous dites, parfois, vous parlez de charlatans sur les plateaux de télévision,
10:00 était aussi celui-là, qui était de dire, ce vaccin protège de la transmission.
10:05 Et on a basé, finalement, la vaccination générale sur cette donnée qui était fausse.
10:10 Oui, c'est vrai.
10:11 Elle s'est avérée, en tout cas, pas fausse complètement,
10:16 parce que ce vaccin protège un peu contre la transmission,
10:19 au début, pendant quelques mois.
10:21 Puis, au bout de quelques mois, il ne protège plus du tout contre la transmission.
10:24 Donc, c'est un verre à moitié plein, un verre à moitié vide.
10:27 Et c'est vrai, mais parce que dans une crise nouvelle de ce type,
10:31 on acquiert les connaissances au fur et à mesure qu'on les construit.
10:36 Et donc, oui, on a pu se tromper.
10:40 J'ai pu me tromper.
10:41 Le Conseil scientifique a pu se tromper.
10:43 Oui, et alors, donc, vous le dites et on continue de dire,
10:48 notamment aux plus jeunes, qu'ils doivent se vacciner
10:51 pour protéger leurs grands-parents de la transmission.
10:54 Et là, vous exprimez aussi des doutes.
10:55 Et vous le dites dans ce livre.
10:57 Vous dites, au fond, est-ce que ces populations,
11:01 est-ce qu'on devait les vacciner ?
11:02 Est-ce qu'on devait au moins fortement les inciter à se vacciner ?
11:06 Et vous dites, au fond, on l'a fait pour protéger des personnes vulnérables
11:10 qui, elles, ne voulaient pas se vacciner.
11:12 Alors, d'abord, les Français, je les en remercie.
11:17 Se sont très largement vaccinés.
11:20 Il y a bien sûr un pourcentage qui est variable selon les tranches d'âge, etc.
11:24 qui ne s'est pas vacciné, mais à la fois spontanément
11:27 ou parce qu'il y a eu le pass sanitaire, puis ensuite le pass vaccinal,
11:30 c'est-à-dire avec de l'obligation, pendant cette période,
11:34 qui n'était plus la recommandation, mais de l'obligation,
11:37 les Français se sont vaccinés.
11:38 Moi, je vous dis très très cash, il y a eu deux mesures majeures
11:42 dans la gestion de crise, vu du côté sanitaire.
11:46 Premièrement, décider, et le plus vite possible,
11:49 du premier confinement en mars 2020,
11:51 pour éviter les décès des sujets les plus fragiles,
11:55 alors qu'on n'avait rien, on ne savait rien,
11:58 et il fallait donc bloquer complètement les contacts interhumains
12:01 pour bloquer l'épidémie.
12:03 Et deuxièmement, il y a eu la vaccination.
12:05 Vous regardez ce qui se passe en Europe,
12:08 c'est-à-dire, je ne suis pas en train de comparer dans le monde entier,
12:10 en Europe, vous regardez l'Europe de l'Ouest et l'Europe de l'Est,
12:13 vous regardez la mortalité dans ces pays,
12:16 mais il n'y a pas photo, c'est-à-dire que les grandes démocraties
12:19 ont gagné parce qu'elles ont été vaccinées,
12:22 parce qu'elles se sont débrouillées pour avoir été opérationnelles
12:25 pour les vaccins, et de l'autre côté, selon les pays de l'Est,
12:29 mais qui sont des pays européens, on n'est pas au bout du monde,
12:33 eh bien, vous avez des taux de mortalité qui sont beaucoup plus importants,
12:36 c'est directement lié au niveau de vaccination.
12:38 En même temps, on peut vous dire, vous avez vacciné,
12:40 vous avez demandé à des gens de se vacciner,
12:42 des gens qui n'avaient rien à craindre du Covid et qui ont été injectés,
12:46 en pensant se protéger de quelque chose qui, en réalité, ne les menaçait pas,
12:50 et en pensant protéger les autres, alors qu'en réalité, ils ne les protégeaient pas.
12:54 Alors, ils ne les protégeaient pas autant qu'on leur ait souhaité,
12:58 je redis que les vaccins ont néanmoins une protection
13:02 à la fois sur les formes sévères et les formes graves,
13:04 qui surviennent en général chez les personnes âgées,
13:07 mais il y a des personnes jeunes qui ont fait les formes sévères et les formes graves,
13:09 et qui n'étaient pas obèses, donc d'une part, il y avait un effet de protection,
13:14 et deuxièmement, oui, c'est vrai que sur le double objectif des vaccins,
13:22 protéger contre les formes sévères, ça, on a eu raison et on a gagné.
13:26 Deux, éviter un niveau de transmission de façon large,
13:30 parce qu'il y a de la communication entre les générations,
13:33 entre les petits-enfants, les enfants, les grands-parents,
13:36 et d'ailleurs, ça a été admirable, les petits-enfants,
13:39 avant les grandes vacances ou les vacances de Noël,
13:41 se sont fait souvent de très nombreux autotests
13:43 pour éviter de contaminer leurs grands-parents.
13:46 Eh bien, c'est vrai que le vaccin n'a pas joué ce rôle-là comme on l'attendait.
13:50 Oui, et alors, alors que beaucoup se sont vaccinés
13:53 pensant à des effets qui n'existaient pas,
13:56 il y a des personnes qui étaient, elles, extrêmement,
13:59 je pense que vous l'avez dit, aux obèses,
14:00 qui étaient quand même une très grande partie de ceux qui faisaient les formes graves,
14:04 n'ont pas été, j'allais dire, ciblés.
14:06 Et dans ce livre aussi, vous reconnaissez, au fond, vous l'avez dit,
14:10 et on n'a pas voulu stigmatiser des populations particulières,
14:15 au détriment peut-être d'un intérêt sanitaire général,
14:18 et que, au fond, ces personnes-là n'ont pas été particulièrement
14:22 plus protégées que les autres.
14:24 Oui et non.
14:25 C'est-à-dire que sur le premier confinement,
14:28 c'était une mesure drastique, moyenâgeuse,
14:33 qui, pour marcher, devait toucher tout le monde.
14:36 Donc je n'ai aucun regret, aucun regret,
14:39 parce qu'on a évité une mortalité très importante
14:43 chez les personnes les plus âgées.
14:44 Ensuite, quand est arrivé le vaccin,
14:47 on s'est rendu compte, en effet, on savait mieux
14:50 qui faisait les formes graves.
14:51 Donc on a évoqué l'idée d'avoir une stratégie
14:55 qui était basée sur, un, l'incidence,
14:58 c'est-à-dire qu'il y avait des régions de France
15:00 où le virus circulait plus,
15:02 et deux, le risque, c'est-à-dire basé sur le risque,
15:05 le risque, en particulier, des personnes âgées.
15:07 Chaque fois qu'on a évoqué ça, chaque fois,
15:10 on a eu, je dirais, des cris,
15:12 des cris à la fois des régions,
15:14 disant "mais pourquoi nous, on resterait plus confinés que d'autres ?
15:17 C'est un phénomène qui est national."
15:19 Et deuxièmement, un cri générationnel,
15:22 où quand on a dit "on pourrait peut-être confiner
15:24 plus longtemps les personnes les plus âgées,
15:26 ce qui permettrait de libérer plus vite,
15:28 entre guillemets, pour les personnes les plus jeunes,
15:30 au nom de quoi ? Au nom de l'autonomie, de la liberté,
15:33 eh bien, les personnes ont réclamé d'être confinées
15:36 ni plus, ni moins que les autres.
15:37 – Donc en fait, ceux qui étaient les plus concernés
15:40 ont obligé les autres…
15:42 – On a oscillé dans cette crise…
15:44 – Oui, quelque part, pour ne pas être stigmatisés,
15:46 – Non, c'est à la fois vrai…
15:48 – Et vous avez suivi.
15:49 – Non, on a oscillé dans cette crise
15:52 entre deux grandes valeurs éthiques,
15:54 majeures, et qui ne faut pas opposer,
15:58 qui sont d'une part l'autonomie,
16:00 c'est-à-dire la liberté individuelle,
16:03 qui est une vision très à l'anglo-saxonne,
16:04 disons-le, d'un côté,
16:06 et de l'autre côté, la solidarité,
16:09 c'est-à-dire d'avoir une vision plus collective.
16:12 Et reconnaissez que, au plus haut niveau de l'État,
16:14 le président Macron a dit d'emblée
16:17 qu'il protégerait les personnes les plus fragiles,
16:19 les plus âgées, et que dans la stratégie vaccinale
16:23 que nous avons eue à partir de janvier 2021,
16:26 on a privilégié, souvenez-vous,
16:28 d'abord les EHPAD, les personnes les plus âgées,
16:31 les personnes les plus fragiles.
16:33 Pourquoi ? Par efficacité.
16:35 Donc on a bien eu, je dirais, dans cet équilibre
16:39 entre autonomie et solidarité,
16:41 une vision des deux facettes complexes de nos personnalités.
16:45 – Mais en même temps, vous le dites vous-même,
16:47 vous êtes affronté à un mur,
16:48 c'est le mot que vous employez dans ce livre,
16:50 de l'intelligentsia, c'est qu'au fond, vous dites vous,
16:53 vous aviez des principes sanitaires,
16:55 des principes de santé publique,
16:56 et on vous opposait des arguments politiques, quelque part.
17:00 – Qui ne sont pas des arguments politiques,
17:01 qui sont des arguments au nom de la liberté.
17:04 – Oui, même au détriment de l'efficacité sanitaire.
17:09 – C'est un des points importants de cette crise,
17:10 c'est-à-dire que les citoyens,
17:14 ceux jeunes ou plus âgés,
17:16 ont perdu à un moment donné une partie de leur liberté,
17:21 on leur a supprimé une partie de leur liberté
17:23 pour mieux avoir une vision collective
17:25 et défendre la collectivité.
17:28 Et certains en ont fait une affaire de principe,
17:32 et je peux comprendre,
17:34 moi-même j'étais troublé par le fait de supprimer
17:37 ou d'obliger, entre guillemets,
17:39 un certain nombre de décisions sur, par exemple,
17:43 le pass sanitaire que nous avons recommandé
17:46 au gouvernement de prendre,
17:47 puis ensuite toute la discussion sur l'obligation de la vaccination.
17:51 Et on peut comprendre ce type de réaction.
17:54 Et à l'inverse, ne pas le faire
17:58 aurait été, je dirais, condamné,
18:00 finalement, l'ensemble de la population.
18:02 Donc je comprends très bien qu'il y ait eu des doutes,
18:05 je comprends très bien qu'il y ait eu des questionnements,
18:08 et c'est pour ça que maintenant,
18:10 qu'on est arrivé à une barrière immunitaire
18:12 et à un niveau de vaccination suffisamment important,
18:15 il faut quitter la notion d'obligation,
18:17 mais plutôt être dans la notion de recommander.
18:20 Voilà vos risques, vous vous vaccinez,
18:23 vous vous isolez, voilà vos risques,
18:25 mais c'est de la décision individuelle
18:27 et non plus du top d'armes.
18:28 Mais par exemple, concernant les EHPAD,
18:31 vous dites dans ce livre, au fond,
18:32 vous vous êtes posé la question
18:34 et vous vous la posez aujourd'hui,
18:35 et c'est extraordinaire et c'est bien de la poser,
18:37 au fond, on se dit, vous dites, est-ce qu'on a bien fait ?
18:40 Est-ce qu'on n'a pas oublié l'humain dans les EHPAD,
18:44 dans les mesures très dures
18:46 qui ont été prises vis-à-vis des personnes âgées
18:49 pour les protéger, mais avec toutes les conséquences
18:52 que ça a eues pour elles,
18:53 parfois des gens qui en sont morts, derrière ?
18:56 Alors, sur la première partie, c'est-à-dire en mars 2020,
19:01 non, j'assume notre position et ma position personnelle.
19:05 Oui, il fallait avoir un confinement extrêmement dur,
19:09 en particulier dans les EHPAD,
19:11 pour éviter, je dirais, une hécatombe.
19:13 Alors j'entends souvent, on me dit,
19:14 mais vous nous parlez éventuellement de 150 000,
19:17 200 000 morts qui auraient pu survenir,
19:19 mais ils ne sont pas survenus.
19:20 Mais je dis, vous vous rendez compte,
19:22 il y a eu 28 000 décès dans les EHPAD en deux mois,
19:25 en deux mois, malgré un confinement très strict.
19:28 Vous imaginez, sans confinement très strict,
19:30 ce qui aurait pu se passer.
19:31 Donc là, je n'ai pas de regrets,
19:33 c'est une décision qui a été une décision politique,
19:36 comme l'ensemble d'ailleurs au cours de cette crise,
19:38 mais je n'ai pas de regrets d'avoir conseillé.
19:40 À partir de juin 2020, le déconfinement s'est produit,
19:46 et là, c'est là où je m'interroge,
19:48 où en effet, dans un certain nombre d'EHPAD,
19:50 ils sont restés avec des mesures administratives
19:52 extrêmement sévères, dont d'autres, au contraire,
19:55 des directeurs d'EHPAD ont été beaucoup plus ouverts.
19:57 Et j'ai posé la question, en ce moment-là,
19:59 de l'humain versus le sanitaire.
20:01 Et c'est normal, vous savez que la médecine,
20:03 c'est à la fois de la haute technologie,
20:06 et nous sortons de cette crise, ne l'oublions pas,
20:09 parce qu'il y a eu de la recherche,
20:11 parce qu'il y a eu de l'innovation,
20:14 il y a quand même un prix Nobel de médecine
20:15 qui vient d'être donné aux vaccins mRNA,
20:17 aux inventeurs du vaccin mRNA.
20:19 Mais de l'autre côté, la médecine,
20:21 c'est également de l'humain et de l'humanité.
20:23 Mais alors, concernant les soignants dans les hôpitaux,
20:25 vous dites aussi, dans ce livre, encore une fois,
20:28 qu'on savait que le risque de transmission
20:32 par la vaccination n'était que très faiblement impacté.
20:36 Or, on a continué de sanctionner
20:38 ceux qui ne voulaient pas se faire vacciner.
20:40 Vous dites, au fond, en réalité,
20:41 cette vaccination ne les protégerait qu'eux-mêmes.
20:43 Et alors là, le principe de liberté se pose.
20:47 Oui, mais ce principe de liberté se pose.
20:49 Mais je suis également très clair dans le livre,
20:50 comme je l'ai été d'ailleurs de façon officielle.
20:54 Personne n'est obligé d'être soignant dans un hôpital.
20:57 Vous faites un autre métier.
20:59 C'est un très beau métier, le métier que vous faites,
21:01 celui de la presse.
21:03 Quand on est soignant dans un hôpital,
21:05 on a un certain nombre de responsabilités
21:08 de protéger les autres.
21:09 Et pour protéger les autres, il faut se protéger soi-même.
21:12 Donc ça ne me choque absolument pas.
21:14 Un, qu'on ait rendu obligatoire la vaccination chez les soignants.
21:18 Et deux, qu'on ait pris des mesures strictes
21:20 pour les gens qui n'étaient pas vaccinés.
21:22 Oui, vous dites aussi dans ce livre, Jean-François Delphrécy,
21:25 qu'évidemment, le vaccin n'est pas un bien commun mondial,
21:29 que c'est une affaire d'intérêt privé.
21:32 On a bien vu, par exemple, que Pfizer a fait accepter
21:36 par les États qui s'approvisionnaient de son propre vaccin
21:39 qu'ils dégageaient leurs responsabilités préalablement,
21:43 puisque ce vaccin n'avait pas l'antériorité suffisante pour cela,
21:46 sur les éventuels effets secondaires.
21:49 Au fond, est-ce qu'on a pris des risques à ce niveau-là ?
21:53 Est-ce qu'on a pris des risques, y compris en faisant vacciner des gens
21:56 qui n'avaient pas besoin de l'être ?
21:58 Écoutez, l'OMS retient pour l'instant autour de 20 millions de morts
22:06 liées à la pandémie Covid.
22:08 Avec probablement beaucoup de trous dans la raquette
22:10 sur un certain nombre de grands pays, comme le Brésil, comme l'Inde,
22:13 et probablement aussi au niveau de la Chine.
22:16 Donc on est probablement à beaucoup plus que cela.
22:19 Pour arrêter une pandémie, moi, je ne connais pas d'autre mesure
22:22 que de mettre au point un vaccin.
22:25 Si le vaccin n'existe pas avant, forcément, c'est un nouveau vaccin.
22:29 Si c'est un nouveau vaccin, il y a des tas de points d'interrogation qui existent.
22:33 Est-ce que ces nouveaux vaccins mRNA ont-ils des effets secondaires ?
22:37 La réponse est oui.
22:38 Et on les a observés, il n'y a jamais eu autant de surveillance
22:42 qu'avec la surveillance de ces vaccins mRNA,
22:44 pas seulement en France, mais sur l'ensemble des grandes démocraties.
22:47 Y aura-t-il des effets secondaires à long terme ?
22:50 Je n'en sais rien.
22:51 On n'a pour l'instant pas de recul.
22:52 On a un recul de trois ans.
22:56 L'évaluation du risque sur cinq ans, sur dix ans,
22:59 je ne vois pas pourquoi, spécialement, il y aura un risque particulier.
23:02 Je ne vois pas pourquoi, mais je ne le sais pas.
23:05 Il va falloir attendre et surveiller.
23:07 Mais vous avez la même chose, la même chose,
23:10 avec tout l'ensemble des nouveaux médicaments.
23:12 Et Dieu sait s'il y a de l'innovation thérapeutique en ce moment.
23:15 Un médecin qui vous dirait qu'avec un nouveau médicament,
23:17 il n'y a pas d'effet secondaire, ce médecin, vous mentirez.
23:20 Tous les nouveaux médicaments ont des effets secondaires.
23:23 Là où c'est complexe avec un vaccin,
23:25 c'est qu'on n'est pas dans le traitement de quelque chose,
23:28 mais dans la prévention de quelque chose.
23:30 Et il faut donc que la personne, que le citoyen,
23:33 s'en empare comme son affaire personnelle.
23:35 Oui, mais au-delà, et ça aussi, vous ne le cachez pas dans le livre,
23:39 il y a tous les effets, finalement, des décisions qui ont été prises.
23:42 Par exemple, sur les diagnostics qui n'ont pas été faits de maladies
23:46 qui peuvent avoir des conséquences à plus ou moins long terme
23:49 sur d'autres décès.
23:51 Et puis, le problème de la santé mentale, notamment de la jeunesse.
23:54 Vous donnez des chiffres graves sur les tentatives de suicide
24:00 et sur, finalement, des conséquences qui n'ont pas été
24:03 véritablement prises en compte ou pas assez prises en compte.
24:06 Non, je ne peux pas te laisser dire ça.
24:08 Elles ont été prises en compte.
24:09 Si nous avons fait rentrer une pédopsychiatre
24:13 dans le conseil scientifique dans un deuxième temps,
24:15 c'est qu'on avait pleinement conscience de ça.
24:17 Donc, il nous fallait bien une expertise également dans ce domaine.
24:21 Deuxièmement, dans les chiffres que je vous donnais tout à l'heure
24:24 sur l'évaluation, deux chiffres possibles.
24:26 La mortalité liée au Covid, là, c'est bien le Covid,
24:31 ou au contraire, la perte plus ou moins grande
24:33 d'espérance de durée de vie.
24:36 C'est-à-dire que vous prenez une population d'un peuple,
24:39 d'une nation et vous regardez s'il a perdu,
24:42 quelle que soit la cause, de mois d'espérance de durée de vie.
24:47 Vous citez le chiffre de trois mois.
24:48 Et alors, en France, on a perdu trois mois.
24:50 Aux États-Unis, 2,6 ans.
24:53 Oui, mais ça ne prend pas en compte les futurs morts, peut-être ?
24:56 Qui montrent bien.
24:57 Diagnostics qui n'ont pas été faits, des traitements de maladie.
24:59 C'est quelque chose qui est à court terme.
25:01 On ne peut pas aller plus loin.
25:03 On sait que sur les cancers, la prise en charge des cancers,
25:06 c'est fait dans d'excellentes conditions en France.
25:09 On sait aussi qu'en termes de prévention, de dépistage,
25:12 probablement pendant la période de mars, avril, mai 2020,
25:16 on a probablement pris un peu de retard sur tout ce qui a été dépistage
25:20 d'un certain nombre de maladies.
25:21 C'est vrai également dans le VIH, c'est vrai dans le diabète.
25:23 On a perdu un peu de retard.
25:25 Donc oui, mais c'est une crise extraordinaire.
25:29 Moi, je veux bien qu'on m'explique ce qu'il fallait faire avec
25:32 deux ans et demi de retard, parce que vous avez tous en tête
25:36 maintenant les connaissances qu'on a maintenant.
25:39 Mais c'est extraordinaire cette crise.
25:42 Donc il nous a fallu avancer en tâtenant.
25:45 Et la santé mentale des Français,
25:47 qui est un des points posés sur la table, et je vous l'accorde.
25:51 Deuxièmement, l'état du système de santé en France.
25:53 Croyez-moi que le Covid a révélé ça, mais il était déjà existant.
25:57 Il y avait déjà des problèmes sur l'organisation de la psychiatrie
25:59 en France avant le Covid.
26:01 Mais est-ce que vous ne vous dites pas au fond, parfois,
26:03 cette gestion un peu trop surdelle du politique face à cette crise,
26:07 parfois trop autoritaire, a brisé ou abîmé le lien de confiance
26:11 avec la science et que quelque part, ça a fait d'ailleurs le terreau
26:15 de mouvements complotistes qui continuent encore aujourd'hui
26:18 à douter de tout ce qui a été fait.
26:20 Vous avez le sentiment, vous dites au fond,
26:23 la science en est sortie renforcée.
26:24 C'est ce que vous dites dans ce livre.
26:26 Mais on peut vous dire aussi, finalement, la confiance dans la science.
26:28 Qu'en est-elle maintenant ?
26:30 Non, c'est une très bonne question.
26:32 Ça ne date pas du Covid.
26:34 Je m'étais occupé des états généraux de la bioéthique en 2018
26:38 et j'avais déjà ressenti cette notion de la science,
26:42 "so what" et où est-ce qu'elle nous mène ?
26:45 Et de confiance dans la médecine et dans la science qui était déjà ébranlée.
26:49 Je pense que Covid a majoré ce phénomène.
26:53 Et on sait tous que pour gérer les grandes crises,
26:55 ce qu'il faut, c'est garder la confiance.
26:57 Et je vois bien qu'il y a un doute qui existe sur une fraction
27:01 qui est minoritaire, minoritaire de la population,
27:04 mais qui pose la question du doute sur ce qui s'est fait
27:08 et du doute sur le progrès.
27:09 Et c'est ça que j'ai envie de donner, de dire aux jeunes.
27:12 Oui, on a tâtonné, on a même fait des erreurs.
27:17 Des problèmes aussi d'intégrité, d'intérêt peut-être avec des labos, etc.
27:22 Vous pouvez me réinterroger là-dessus, l'intérêt labo, il est zéro.
27:26 Donc, je sais que j'ai été fouillé là-dessus.
27:29 Mais il y a eu des médecins, je le dis, sur des plateaux de télévision,
27:31 qu'on pu avoir cette confusion d'intérêt.
27:33 Et donc, l'idée même qu'il est normal que des médecins de haut niveau
27:39 puissent discuter avec des laboratoires sur ces nouvelles molécules
27:43 qui sont en train d'arriver ou sur les nouveaux vaccins qui sont arrivés.
27:46 Et il faut faire très attention, en particulier quand on est en charge
27:50 de mission publique, de faire extrêmement attention à ça.
27:53 Je l'ai fait et le Conseil scientifique l'a fait.
27:55 Je vous rappelle que nous avons fait plus de 300 réunions
27:58 et que nous n'étions pas rémunérés.
28:00 Oui, mais un mot quand même, vous dites, je répète,
28:02 vous dites les tartuffes qui passaient sur les plateaux des chaînes d'information continue.
28:07 Vous regardiez la télé, vous étiez dans quel état Jean-François Delphrésy ?
28:10 Vous dites, vous entendiez des absurdités, des mensonges.
28:15 Il y avait d'abord les plateaux, certains plateaux de télévision
28:19 et en particulier de télévision en continue.
28:21 Je cite très clairement que la chaîne CNews et ses subsidiaires
28:28 ont joué un rôle très malsain dans cette affaire parce qu'ils ont privilégié à l'information,
28:34 ils ont privilégié la dispute et la controverse
28:38 et que les autres chaînes de télé en continue,
28:40 pour garder une certaine forme d'audience, ont été obligés de suivre.
28:43 Et ça a été très malsain à partir de, je dirais, de septembre 2020.
28:48 Et je pèse mes mots, je suis pour la liberté de la presse bien sûr,
28:52 mais il y a un moment donné dans une crise où chacun doit avoir aussi une éthique
28:56 de son propre mode de fonctionnement. Donc je suis très clair là-dessus.
28:59 Deuxièmement, sur les médecins, oui, on a vu des dérapages.
29:03 On a vu des gens qui n'avaient aucune expertise, qui tout d'un coup ont pris la grosse tête.
29:07 Qui avaient parfois des conflits d'intérêt.
29:09 Et qui pouvaient avoir des conflits d'intérêt. Et bien sûr que ça existait.
29:13 Et puis on a surtout eu les réseaux sociaux,
29:17 et qui continuent, on le voit bien sur d'autres crises,
29:19 et on le voit bien juste aujourd'hui, actuellement, l'importance majeure des réseaux sociaux.
29:24 Nous avions décidé, mais c'est peut-être aussi une erreur de notre part,
29:27 de ne pas aller sur les réseaux sociaux, de ne pas répondre.
29:29 Parce que d'abord on était une petite équipe, on n'avait pas les moyens,
29:33 et puis on n'a pas voulu rentrer dans les réseaux sociaux.
29:36 Mais ils ont joué sûrement un rôle majeur.
29:38 Et il faut y réfléchir pour les prochaines crises.
29:41 Comment se monte la communication en temps de crise à ce niveau-là ?
29:45 - Oui. Merci Jean-François Delphrécy.
29:46 Je voudrais ajouter ce livre, c'est extraordinaire,
29:48 parce qu'au fond vous introduisez cette notion, je le répète, du doute.
29:52 Et finalement vous introduisez de l'humanité dans quelque chose dont vous reconnaissez,
29:56 que vous avez tâtonné, dont vous reconnaissez des erreurs.
29:59 Et c'est important aujourd'hui de dire, voilà, la science c'est ça aussi.
30:03 Ça peut être débattu, mais au fond ce sont des hommes et des femmes.
30:10 - Oui, bien sûr. L'histoire de ceux qui ont trouvé les équipes,
30:16 qui ont trouvé les vaccins à Méréna est une très belle histoire,
30:18 avec les doutes et aussi le fait qu'ils n'ont pas été reconnus tout de suite loin de là.
30:24 Et puis, si vous voulez, moi j'ai une longue expérience de ces crises.
30:29 Les gens disaient pourquoi Delphrécy, Covid, etc.
30:32 Mais parce que je suis un bébé avec des cheveux blancs de l'histoire du VIH,
30:36 qui reste la grande pandémie.
30:38 Et on voit bien que, bien sûr, on a besoin de l'innovation et de la nouvelle technologie.
30:44 Mais fondamentalement, dans la gestion de ces crises,
30:46 et je dirais dans la médecine en général, ce dont on a besoin le plus c'est d'humanité.
30:51 - Merci Jean-François Delphrécy, président du Comité national d'éthique.
30:55 Et au fond ce livre est là pour ça, "Médecin au front, publié au seuil",
30:58 ce témoignage avec Denis Laffey.
31:00 Et il est important ce témoignage là.
31:03 Il est important de revenir, parce qu'on passe trop vite à la suite.
31:05 Vous dites au fond, oui mais regardons ce qui s'est passé pour l'avenir.
31:10 Parce que oui, ça peut recommencer.
31:12 - Ah bien sûr, ça peut recommencer.
31:14 Et probablement, d'abord Covid n'est pas fini.
31:18 Et on voit bien, y compris en ce moment, vous avez tous autour de vous
31:22 des personnes qui font la Covid, mais ça se passe bien parce qu'on a une barrière
31:26 soit naturelle, soit vaccinale, qui nous protège.
31:29 Mais un variant peut de nouveau arriver.
31:32 Et puis, je ne voudrais pas terminer sur une note pessimiste, mais
31:36 imaginez qu'on ait d'ici quelques années, le plus loin possible,
31:41 mais en raison de tout ce qui arrive, des changements climatiques,
31:44 des mouvements de migratoires, des crises géopolitiques qui surviennent,
31:47 un virus qui, au lieu de toucher préférentiellement les personnes âgées,
31:53 toucherait préférentiellement les enfants.
31:56 Il faut beaucoup qu'on y réfléchisse,
31:59 avec les mesures extrêmement difficiles qui seraient à prendre.
32:02 Donc oui, c'est un métier d'anticiper et c'est une responsabilité de nos gouvernants.
32:09 Et c'est pour ça qu'il faut investir fondamentalement dans la recherche fondamentale.
32:13 Merci Jean-François Delphrécy pour ce témoignage.
32:15 Un médecin au front, votre témoignage, donc, qui publie vos éditions du Seuil.
32:19 Merci beaucoup d'avoir été avec nous.
32:21 [Musique]