Dans son édito du 24/01/2024, Paul Sugy revient sur les problèmes liés à la politique agricole en France.
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00:00 - Oui. - Simplement, c'est vrai que les agriculteurs français restent attachés à l'Union européenne.
00:03 Je l'ai entendu encore hier à côté de Beauvais sur un blocage sur la CES.
00:07 Et pour cause, l'Union européenne subventionne très largement l'agriculture française avec la politique agricole commune.
00:12 Ça représente, je crois, au total 75% du revenu que perçoivent au total les agriculteurs français.
00:18 Alors c'est vrai qu'il y a des inégalités de répartition très importantes entre les gros producteurs et les petits producteurs,
00:23 mais les agriculteurs ne sont pas du tout europhobes tant s'en faut.
00:25 En revanche, c'est vrai qu'il y a un sujet central, c'est que l'Union européenne a fait de la profession des agriculteurs
00:32 le cobaye d'une politique économique inédite depuis quelques années qui leur a été imposée à leur corps défendant.
00:37 C'est la décroissance, contrainte et forcée.
00:40 Sur les tracteurs de l'autoroute A16, comme certainement aujourd'hui sur tous les péages d'autoroutes bloqués,
00:45 il y a deux mots qui reviennent très souvent, comme le refrain légiac d'une profession qui en essaie d'essuyer les plâtres,
00:50 c'est "Green Deal", le pacte vert européen que la Commission européenne va nous laisser en héritage,
00:56 et donc qui a marqué un point de bascule en matière environnementale.
00:59 Il ne faut plus simplement protéger la nature, mais il faut la régénérer, et pour cela notamment laisser 4% des terres en jachères.
01:06 Hier, les jeunes agriculteurs avec qui j'ai pu échanger parfois disaient "eh bien, on a un outil de travail qui est fonctionnel,
01:13 simplement on nous demande de nous en priver en partie",
01:15 c'est comme si CNews décidait sur une partie de son tour d'antenne de ne rien diffuser.
01:18 Bref, c'est le fait économique qu'on demande aux agriculteurs et qui évidemment fait qu'ils regardent beaucoup vers Bruxelles ces derniers temps.
01:24 La France avait demandé plus de souplesse dans l'application de ses normes.
01:28 Oui, mais c'est un jeu de dupe dont il ne faut pas non plus être trop crédule.
01:33 Les maires des agriculteurs ne viennent pas seulement de la Commission européenne.
01:37 Bruxelles les fragilise, mais Paris les achève.
01:39 C'est ce qu'on appelle la surtransposition des normes.
01:41 Donc l'Union européenne décide de normes drastiques, c'est même son rôle principal, la Commission édicte des normes dans tous les domaines,
01:47 mais au moment de les transcrire dans le droit français, l'administration des ministères renforce et complexifie ces normes.
01:52 Et ainsi, au sein d'un même marché européen, les agriculteurs français jouent le même match que les producteurs concurrents des États voisins,
01:58 mais avec des règles différentes.
01:59 Et c'est particulièrement vrai, par exemple, en matière d'utilisation de produits phytosanitaires.
02:03 Les Espagnols mettent du glyphosate, les Français n'ont quasiment plus le droit.
02:05 Le Danemark peut chauffer ses cerfs bio, tandis que les agriculteurs français doivent s'en passer.
02:09 En France, il faut une étude d'impact avant chaque construction de bâtiments d'élevage,
02:13 contrairement aux autres pays européens dans l'ensemble, l'interdiction des néonicotinoïdes aussi, qui est plus stricte en France,
02:19 la construction de projets d'irrigation.
02:20 Enfin, quand l'Union européenne demande de classifier les zones humides qu'il va falloir protéger,
02:24 la plupart des pays définissent 3 à 4 % de surface.
02:27 En France, certains fonctionnaires s'apprêtent, c'est pas encore terminé de négocier,
02:31 mais à définir 30 % des surfaces comme telles.
02:34 Donc, très clairement, les sujets sont européens, mais aussi français.
02:38 C'est très clair, on ne joue pas avec les mêmes règles.
02:41 En tous les cas, c'est ce qu'on entend des rangs des agriculteurs dans les Hauts-de-France d'hier.
02:44 J'entendais donner un exemple très concret dans des villages limitrophes de la frontière belge,
02:48 sur les étals des marchés, vous avez des choux de Bruxelles belges et des choux de Bruxelles français.
02:51 Les belges sont généralement plus gros et moins chers, parce que les règles de production ne sont pas les mêmes.
02:57 Emmanuel Macron a ce mot d'ordre qui revient très régulièrement, il faut agir en européen.
03:02 Mais de fait, quand la France prend des initiatives seule et non pas en européen,
03:06 ce sont les agriculteurs français qui en payent souvent le prix.
03:08 [Musique]
03:10 Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org