Dans une école du 19ème arrondissement de Paris, Gilles, instituteur depuis 15 ans, constate avec inquiétude l'invasion des écrans dans le quotidien de ses élèves. Il décide de prendre le problème à bras le corps en accompagnant sa classe de CM2, tout au long d'une année, dans une réflexion sur la place des écrans dans notre vie, en vue d'une semaine de classe verte en totale déconnexion. Les rôles des parents et des instituteurs, la question de notre rapport au temps et à la nature, mais aussi les aspects positifs de certains usages numériques viendront alimenter ce cheminement. Au fil de l'année, un formidable échange s'installe entre Gilles et les enfants, révélant leur esprit critique. Année de Production :
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00:00 (musique)
00:15 L'amour de la lecture, c'est le plus beau cadeau que m'ont fait mes parents.
00:20 Les mots et tout ce qu'ils peuvent dire.
00:25 Dans mon enfance, quand je n'avais rien à faire, j'allais jouer dehors.
00:31 Et sinon, je lisais.
00:36 Aujourd'hui, la donne a profondément changé.
00:39 Instituteur depuis 15 ans, mes élèves de CM2 font désormais partie de la génération Alpha.
00:45 Cette génération qui est née avec les smartphones et les tablettes.
00:49 Tous ces écrans qui prennent tant de place dans leur vie.
00:54 Avec les conséquences qu'on connaît.
00:57 Moindre capacité d'attention.
01:01 Appauvrissement du langage.
01:04 Perte du goût de l'effort.
01:07 Isolement.
01:11 Une aptitude à l'attente, à l'ennui.
01:21 L'an prochain, mes élèves rentreront au collège.
01:24 Alors, pendant ces 10 mois, nous allons réfléchir ensemble.
01:28 Inspirés par des experts, afin de les aider à mettre des mots sur un phénomène dont ils sont à la fois acteurs et victimes.
01:38 10 mois, au bout desquels j'espère pouvoir les emmener au contact de la nature.
01:44 10 mois pour tenter de démontrer avec eux que nous pouvons reprendre le contrôle sur les écrans.
01:51 Et finalement, notre but, nous, la classe, c'est de permettre à la société, à d'autres enfants, de bien utiliser les écrans.
02:01 C'est de voir comment on peut les analyser.
02:04 C'est-à-dire comprendre qu'est-ce qu'ils font sur nous.
02:07 Même si un fil invisible, il venait t'accrocher sur le cerveau, juste pour que tu restes devant ton écran, assis, debout, sur le canapé, sur le lit.
02:22 Les enfants, et même les parents, ils peuvent pas vivre sans des écrans.
02:28 C'est leur vie, les écrans. Ils vont se marier avec un téléphone.
02:34 C'est leur vie, ils peuvent pas se détacher.
02:37 Si on les enlève, par exemple, les enfants, ils vont carrément faire une crise pour le téléphone.
02:43 Ça, c'est très vrai. Combien on a des parents qui nous racontent des crises pour les téléphones si on essaye de leur enlever ?
02:49 Et ce qui montre que ça fait penser à quoi ?
02:52 Un fou ?
02:54 Un psychobote ?
02:56 Un psychobate !
03:00 C'est vrai ! Et moi, je trouve que c'est son analyse, et c'est vrai que ça pose une question sur ce qui se passe dans notre cerveau.
03:08 C'est comme les papillons nus. Ils sont attirés par la lumière, et nous, on est attirés par la télé, par les écrans.
03:14 T'as le réflexe, en fait. Tu vois une lumière, en plus, elle va sauter à tes yeux, tu vas le regarder direct par réflexe.
03:24 Cette attention-là est hyper stimulée, mais plus on va stimuler cette attention-là, moins l'enfant va être capable de développer un autre type d'attention qui lui est acquis,
03:35 et qui s'appelle la concentration ou l'attention volontaire.
03:39 On sait qu'aujourd'hui, l'attention moyenne d'un enfant, c'est 8 secondes, parce qu'il passe sans arrêt sur les réseaux sociaux d'un truc à l'autre.
03:45 Et d'ailleurs, c'est intéressant de voir l'évolution des réseaux sociaux.
03:48 Sur Facebook, vous aviez des vidéos de 2-3 minutes. Instagram, 30 secondes, c'est un maximum, et TikTok, c'est 10 secondes.
03:54 C'est-à-dire que plus on va dans les réseaux sociaux qui touchent les plus jeunes, plus c'est court.
03:59 Un enfant, par exemple, qui arrive le matin en classe et qui a fait une petite session de 20 minutes sur un jeu vidéo avant de venir,
04:06 ou un petit film d'animation bien speed, on sait que sa capacité à se concentrer,
04:13 c'est-à-dire à résoudre des problèmes qui nécessitent une attention volontaire, va être diminuée.
04:20 Alors on va démarrer, comme d'habitude, par une petite respiration.
04:24 On va pouvoir fermer les yeux pour pouvoir se concentrer vraiment à fond.
04:30 Et on essaye de ressentir toutes nos émotions tout en respirant.
04:37 Et la respiration profonde nous accompagne, nous aide à ça.
04:44 On relâche les épaules pour essayer de mettre de la relaxation, de la tranquillité, de la sérénité en nous.
04:56 Qu'est-ce qu'on ressent quand on fait ça, quand on fait un petit voyage à l'intérieur de soi, par rapport à un moment où on est devant les écrans ?
05:04 Sur les écrans, je me sens sans fermer les yeux, je suis comme ça.
05:09 Alors que quand je respire, je me sens à l'intérieur de moi, bien.
05:14 On pense à rien, et à la fois on peut dormir.
05:17 Et t'aimes bien dormir ? Bah t'es pas le seul, moi aussi j'avoue que j'aime bien dormir.
05:22 Vous aimez bien dormir aussi, globalement ?
05:24 Oui, quand je respire, t'es dans tes esprits, tu sautes dans les nuages.
05:31 La méditation et les écrans, les deux on ne pense à rien, mais c'est pas le même silence.
05:37 Moi quand je fais de la respiration, j'ai les esprits tranquilles, et je me sens libre.
05:44 Ah c'est intéressant, toi tu dis que t'es plus libre en fait, quand tu respires, tu te sens plus libre.
05:50 [Bruits de la foule]
06:00 Bonsoir.
06:02 Asseyez-vous librement sur les sièges de devant, puis derrière.
06:09 Bonjour.
06:10 Je pense que c'est le rôle aussi des profs et de l'éducation nationale, que de prévenir les parents.
06:16 C'est tout récent, ça fait dix ans qu'ils existent tous ces écrans qui ont envahi nos vies.
06:20 Donc c'est normal que ce soit seulement maintenant qu'on réalise petit à petit des dangers pires.
06:26 Et c'est pour ça qu'on reçoit Agnès Ducandat qui est médecin spécialiste de cette question,
06:30 qui a écrit le livre "Les tout petits et les écrans, l'épidémie silencieuse".
06:35 Je pense que c'est plus compliqué d'être parent aujourd'hui avec les écrans, que quand les écrans n'existaient pas.
06:39 Et déjà parent, on sait que c'est pas simple.
06:41 On est passé de un écran par foyer il y a vingt ans à dix maintenant.
06:45 Il suffit peut-être que chacun d'entre vous calculie un petit peu combien il y a d'écrans dans votre foyer.
06:50 C'est devenue la première activité des enfants en dehors du sommeil.
06:54 Et votre première préoccupation quand on interroge les parents.
06:58 Ma fille qui a treize ans, elle reste éveillée jusqu'à trois heures du matin à regarder son téléphone,
07:06 pour se réveiller à six heures du matin pour aller à l'école.
07:10 En fait, moi j'élève mes enfants toutes seules, donc j'ai perdu tout contrôle.
07:14 Mes enfants passent énormément de temps sur leur téléphone.
07:18 Il y a une phrase de Socrate qui était écrite sur le temple de Delphes qui disait
07:25 "Connais-toi toi-même et tu connaîtras l'univers et les dieux tout entier".
07:31 Et donc, ce que je voudrais c'est qu'on se connaisse nous-mêmes dans notre utilisation des écrans.
07:37 Chacun d'entre vous va repartir avec ce tableau à remplir, des crayons à papier pour le remplir,
07:47 et, et, et, non ce n'est pas une tablette, ce n'est pas un ordinateur, ce sont des chronomètres.
08:05 Ensemble, on va faire une expérience très importante.
08:08 On va se rendre compte combien de temps on passe sur les écrans. Et moi aussi.
08:14 [Musique]
08:18 [Musique]
08:21 [Chant]
08:45 [Musique]
09:07 30 + 32, ça fait 72, 74, 88.
09:13 Donc, t'en étais à 43, tu rajoutes une heure, 44 heures et 18 minutes.
09:20 Une heure vingt par jour, c'est pas beaucoup par rapport à d'autres, disons.
09:24 En une journée, hein, en une journée, je vais passer 11 heures.
09:28 C'est en tout, moi, 11 heures de toute la semaine.
09:31 Comme moi, vous allez faire les heures et faire un total.
09:37 Ce total, ça va vous donner le nombre d'heures que vous avez passées sur 7 jours.
09:42 Comment on va calculer la moyenne quotidienne ?
09:47 On va convertir d'abord notre résultat en minutes et après on va le diviser par 7.
09:52 Donc, rendez-vous compte que un adulte comme moi passe, devant tous les écrans, mais on verra pourquoi, 7 heures 15 par jour.
10:03 7 heures 05, c'est ça, la moyenne quotidienne.
10:07 Donc, les moyennes en France, je vais vous les donner pour qu'on puisse se situer, nous, par rapport à ces moyennes.
10:16 Un enfant, donc, de 8 à 12 ans, en moyenne, c'est 4 heures 45.
10:25 Par contre, quand il passe de 13 à 18 ans, on monte à 6 heures 45 par jour.
10:35 OK ?
10:36 On va donner notre moyenne quotidienne qu'on a calculée et on va voir, on est en dessous ou au-dessus.
10:43 4 heures 50. 6 heures 30. 1 heure 36. 5 heures 25.
10:48 5 heures 25, on est sensiblement plus haut.
10:51 13 heures 33. 3 heures 47. 1 heure 27. 6 heures 15. 2 heures 48. 47 minutes.
11:00 Je crois que j'ai entendu ça, ils ont promis de créer le temps d'écran.
11:04 Et là, je me suis dit, alors, ça va peut-être changer quelque chose.
11:08 Et là, on a essayé de leur dire, maintenant, vous voyez, même à l'école, il faut diminuer l'écran, ça diminue un peu la concentration.
11:15 Et là, on voit vraiment une grosse différence.
11:20 Ils viennent et ils me disent, maman, attends, peut-être que j'arrête là.
11:22 C'est comme si on me virait dans le fâché.
11:25 Il y avait aussi les SMS, les appels visuaux, les trucs comme ça.
11:29 Et elle s'est rendue compte qu'elle regardait énormément, au final.
11:31 Je passe beaucoup de temps, 6 heures par jour, parce que je suis au foyer, il n'y a pas beaucoup de trucs à faire.
11:40 On n'a pas trop de sorties.
11:42 Et quand je sors de ma chambre, il y a des cris, il y a des insultes.
11:46 Pour ça, moi, je préfère rester sur les écrans.
11:48 C'est un moyen un peu de t'isoler, si j'ai bien compris.
11:51 Je sais pourquoi j'ai passé beaucoup d'heures d'écran par jour.
11:55 En fait, ma soeur, elle ne veut jamais jouer avec moi.
11:57 Parce qu'à chaque fois, quand je lui pose une question, elle me fait quoi, quoi, quoi.
12:03 Mes parents, eux, ils travaillent.
12:05 Le week-end, eux, ils n'ont jamais le temps.
12:08 Chez vous, personne ne répond.
12:10 Les parents, alors toi, tu es au foyer, mais tu vois, même dans les familles.
12:13 Je voudrais, papa, non, je n'ai pas le temps.
12:15 Maman, je n'ai pas le temps.
12:17 Personne n'a plus le temps.
12:18 Quand on appelle nos frères et soeurs, ma mère, elle me dit à chaque fois d'appeler mon frère.
12:21 Parce qu'il est resté tellement longtemps sur GTA.
12:24 Il est resté, il est resté.
12:25 Puis après, quand c'était tout froid, il a dit, pourquoi vous ne m'avez rien laissé ?
12:29 Vous m'énervez.
12:31 En fait, ma mère, hier, elle parlait de son travail.
12:34 Et elle, elle est dentiste.
12:36 Et ce n'est pas quelques minutes, elle est sur son téléphone.
12:38 Je lui dis, ton téléphone, c'est comme une carie, en fait.
12:42 C'est une carie au cerveau, c'est tout.
12:45 Moi, j'appelle mon père pour demander si il peut m'aider.
12:48 Il peut arriver dix minutes plus tard.
12:51 On se dit, c'est pour leur travail, tout ça.
12:53 Mais au final, eux aussi, ils se divertissent autant que certains enfants.
12:57 On est d'abord un modèle pour nos enfants qui constatent nos propres pratiques.
13:01 Et qui constatent à un moment que finalement,
13:03 si c'est plus important ce qui se passe sur l'écran de mon père ou de ma mère que ce que je suis en train de lui dire,
13:08 c'est que ça doit être génial ce qui se passe sur ces écrans.
13:10 Ah, l'exemplarité des parents.
13:16 Fais ce que je dis, pas ce que je fais.
13:19 Aujourd'hui, on reçoit Aldebert, qui vient chanter avec la classe.
13:27 C'est là.
13:28 Il a écrit justement une chanson sur nous, les parents.
13:32 C'est quoi ? Rébrancher nos parents.
13:35 Couper un mot de lui.
13:38 On fera connaissance.
13:40 C'est vrai que nous, les parents, souvent, on ne montre pas le bon exemple.
13:49 On arrive rarement à la maison avec un livre à la main.
13:51 Et du coup, Charlie, il est en CM1, lui.
13:56 Donc il n'est pas très loin de vous.
13:58 Avec votre fils.
13:59 Oui, il s'appelle Charlie.
14:01 Il me raconte sa journée d'école.
14:03 Et puis j'écoutais d'une demi-oreille.
14:06 Et il me raconte qu'il est allé chez son pote,
14:09 ils ont fait une cabane, après ils ont fait ci et tout.
14:11 Et puis à un moment, il a bien vu que mon attention
14:13 était beaucoup plus attirée par le téléphone que par ce qu'il me racontait.
14:16 Et donc là, il me dit "Oh, tu m'écoutes là, papa ?"
14:18 Je fais "Oh, ouais".
14:20 Comme il a vu que je n'écoutais pas,
14:22 il a raconté une grosse bêtise, tu vois, dans sa journée.
14:26 Et c'était rigolo.
14:28 Et moi, ça m'a donné l'idée.
14:29 Je me suis dit "Mais oui, mais en fait, c'est ça, je vais faire une chanson là-dessus".
14:31 De plus en plus, la famille, c'est des petits morceaux.
14:50 On est chacun dans sa pièce, avec son écran.
14:53 Et puis après, il y a une espèce de désolation.
14:55 Les parents nous disent "Mais on n'a rien partagé".
14:57 "Qu'est-ce qu'il a fait à l'école ?" Il ne me répond pas.
14:59 L'écran est problématique quand il fait écran à la relation.
15:06 Quand il fait écran au lien.
15:08 Ça nous met dans une bulle.
15:14 Et quand on bouge, la bulle, elle vient avec nous.
15:19 Et du coup, chacun est dans son coin.
15:21 Encore, regardez la télé,
15:23 même si ce n'est pas forcément très intéressant,
15:26 ça peut quand même nous réunir.
15:29 Alors que si on fait chacun de notre côté, c'est encore pire.
15:33 Les écrans font encore plus d'impact.
15:35 On ne peut plus sortir, ne plus parler avec sa famille, ses amis.
15:39 (Cris de la foule)
15:42 Écoutez ça.
15:56 On recevait dans ce service d'urgence des jeunes.
15:59 98%, 99% de ces jeunes, garçons et filles, que je recevais,
16:05 quasiment aucun ne s'est plaint de l'absence de son portable.
16:08 Quelques garçons étaient un peu en manque des jeux vidéo.
16:11 Mais le portable, non, alors qu'ils y passaient le jour d'avant,
16:15 les jours et les nuits, et ça pendant au moins deux ans,
16:18 parce qu'on sait que la période du confinement,
16:20 ça fait basculer dans des utilisations massives.
16:23 Donc la question que je posais, c'est "mais attends,
16:26 pourquoi finalement là, tu t'en passes très bien ?"
16:30 Et la réponse que j'avais à chaque fois,
16:33 "mais madame, c'est parce qu'ici, on n'est pas seul."
16:37 Comment avons-nous laissé tous ces écrans
16:41 pirater ce que nous avons de plus cher ?
16:44 Nos liens, avec nos enfants, nos amis,
16:48 notre famille ou notre amour ?
16:51 Rien ne semble pouvoir leur résister.
16:55 Quelle est cette force d'attraction
16:57 qui nous dépossède de notre volonté et de nos désirs profonds ?
17:01 [Musique]
17:18 Comment on reconnaît quelqu'un qui est dans une addiction,
17:21 qui est addict ?
17:23 T'as plein d'écrans partout dans ta chambre
17:25 et que t'es en train de jouer à un écran
17:28 et tous les autres sont allumés à côté de toi.
17:30 L'addiction, c'est aussi quand notre cerveau a été détrôné,
17:34 c'est les écrans qui ont le pouvoir.
17:36 Quand tu mets une cigarette dans ta bouche
17:38 mais que tu l'allumes pas, ça va rien te faire,
17:40 c'est inoffensif.
17:42 Mais quand tu l'allumes,
17:44 c'est toi qui donne le pouvoir à la cigarette de te détruire.
17:49 Et c'est la même chose pour les écrans.
17:51 Dopamine.
17:58 La dopamine, écoutez bien, c'est l'hormone du plaisir.
18:03 Je mange un très bon gâteau au chocolat que j'adore,
18:07 j'ai plein de dopamine dans le sang carré.
18:09 Plein de dopamine. Ah, j'aime bien.
18:11 Je suis amoureux, etc.
18:13 Je ressens de la dopamine.
18:15 Les gens me disent, t'es vraiment quelqu'un de super,
18:18 je t'aime beaucoup.
18:20 Dopamine, ça fait du bien.
18:22 J'aime bien être aimé.
18:24 Qu'est-ce qui va générer sur les écrans,
18:28 ça, des moments de plaisir,
18:30 où on est, "Waouh, super, je suis content."
18:32 Par exemple, les likes sur les vidéos,
18:34 les commentaires qui disent, "Ouais, et tout,
18:37 je te suis depuis longtemps,
18:40 j'ai abonné à toi et tout."
18:42 Quand tu joues à GTA, par exemple,
18:44 tu braques une banque et tu gagnes beaucoup,
18:48 beaucoup d'argent, t'es content.
18:51 Donc tu viens juste d'avouer,
18:53 mais on ne t'en veut pas, que tu joues à GTA.
18:56 T'as 10 ans, tu sais à quel âge il est interdit ce jeu ?
18:59 À 18 ans.
19:01 Il faut que tu comprennes que tu t'exposes à des images,
19:04 qui sont des images qui ne te donnent pas une très bonne opinion
19:07 de l'humanité et des gens.
19:09 Mais, effectivement, GTA va donner de la dopamine.
19:12 La dopamine, quand on va à la sécurité,
19:14 on va dire, "Ah, mais c'est agréable,
19:16 mais j'ai envie de retourner sur mon jeu
19:18 pour à nouveau ressentir cette dopamine."
19:21 D'habitude, je le punis de Switch,
19:28 mais je laisse un petit peu regarder,
19:30 et là, on a fait zéro écran.
19:32 J'avais l'impression d'être avec un drogué.
19:35 Mais vraiment, j'avais l'impression d'être un toxico.
19:38 Il n'avait pas sa drogue,
19:40 et du coup, ça a été un gros travail.
19:42 Mais c'était dur, vraiment, c'était hyper dur.
19:45 J'étais épuisée.
19:46 Et c'est vrai que c'est dur, franchement.
19:48 Cette histoire d'écran, moi, elle me met à cran.
19:51 - Introduire comme ça un objet addictif
19:54 dans les mains de l'enfant, là, ça pose un problème.
19:57 Parce qu'on a légiféré en d'autres temps, tardivement,
20:00 mais pour des substances addictives,
20:02 pour le tabac, pour l'alcool.
20:04 Et donc, on devra en venir à ça pour le numérique,
20:07 même si ça va nous prendre du temps.
20:09 - Pourquoi Boitulle demande le petit prince
20:11 pour oublier, comme dit le buveur,
20:13 pour oublier quoi, sans qui, le petit prince?
20:15 Qui déjà le plaignait.
20:17 Pour oublier que j'ai honte
20:19 d'avoir le buveur en baissant la tête.
20:21 Honte de quoi?
20:22 - Honte de boire!
20:24 Je veux le buveur qui s'enferma...
20:26 qui s'enferma définitivement dans le silence.
20:29 - Alors, qu'est-ce que vous pouvez me dire sur ce buveur?
20:33 - Comme il sait que c'est pas bon et qu'il ne faut pas boire,
20:37 pour pas... enfin, pour oublier,
20:39 pour faire comme si ça n'existait pas,
20:42 pour vaincre son malheur, il boit.
20:44 Donc au final, c'est un cercle qui se plaint de boire
20:47 et il boit en secours.
20:49 - Très juste un cercle comment?
20:51 - Un cercle vicieux.
20:53 - Un cercle vicieux!
20:55 Vicieux, c'est-à-dire qu'il fait du mal!
20:58 De plus en plus! De plus en plus!
21:00 - C'est comme sur les réseaux sociaux.
21:02 Si tu vas, par exemple, sur Facebook, imaginez,
21:05 tu vas vouloir regarder,
21:07 mais comme la page, elle s'arrête jamais,
21:09 tu vas regarder, regarder, regarder, regarder,
21:12 ben, tu vas jamais t'arrêter.
21:14 - Sachez que quand vous scrollez,
21:16 vous êtes en train de faire comme une machine à sous.
21:19 C'est mon pouce qui scrolle, je scrolle.
21:22 Ah, ça m'intéresse. Ah, ça m'intéresse pas.
21:25 Je passe, je like, je passe et je scrolle.
21:28 Et comme ça n'a pas de fin,
21:30 vous pouvez passer votre nuit, si vous voulez.
21:33 Il n'y a jamais de fin.
21:35 - Bien sûr, ce sont des outils incroyables
21:40 qui nous ouvrent d'innombrables possibilités.
21:43 Mais en même temps, ils nous livrent une guerre.
21:47 Une guerre pour capter notre attention.
21:51 Le patron de Netflix déclare même
21:54 que son seul concurrent, c'est désormais le sommeil.
21:58 (musique douce)
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22:16 - L'attention n'est pas une capacité inscrite
22:20 dans nos gènes, dans nos cerveaux,
22:23 dans nos neurones, etc.
22:25 L'attention, c'est une capacité qui se forme
22:28 et qui se déforme.
22:30 Donc, l'éducation a pour rôle de former les attentions.
22:33 - Nous, comme vous avez dit, de regarder
22:35 des shorts, bah, moi, je suis allée sur YouTube.
22:38 Sauf qu'en fait, la dernière fois,
22:40 j'étais en train de regarder des shorts.
22:42 Du coup, ça m'a mis directement sur des shorts.
22:45 Et je suis tombée sur un short bien.
22:47 Du coup, j'ai défilé et j'ai pas eu le temps de regarder.
22:50 C'est pas sorcier.
22:51 - Faut que tu te rappelles, quand tu fais ça,
22:54 que tu es le dindon de la farce, le jouet des algorithmes.
22:57 Ils sont là, "Hum, je suis content, Sofia,
22:59 "elle vient de passer 1h30 sur les shorts.
23:01 "Là, je suis content, je fais plein d'argent."
23:04 Et c'est toi qui as perdu ton temps.
23:06 - A l'autre bout, y a des ordinateurs qui savent
23:08 que vous aimez les vidéos de petits chats
23:10 et ils vont vous envoyer, quand vous scrollez
23:12 sur Facebook ou sur YouTube, des vidéos de petits chats.
23:15 Le but, c'est que vous soyez le plus possible sur l'écran.
23:17 Et entre 2 vidéos de petits chats, qu'est-ce qu'ils envoient ?
23:19 De la publicité.
23:20 - Ce principe de l'économie de l'attention, en fait,
23:23 il est un petit peu inhérent aux sociétés de consommation
23:26 et à l'économie consumériste,
23:28 puisqu'il s'agit fondamentalement d'orienter les attentions,
23:31 donc les désirs, les envies, les besoins des téléspectateurs,
23:35 qui sont aussi des citoyens,
23:37 en vue de la consommation de divers produits ou marchandises.
23:41 Eh bien, ils ne s'investissent pas dans des relations sociales,
23:44 dans des activités collectives.
23:46 - Si le cerveau, on le laisse face à un écran
23:49 où il s'entraîne pas, parce que, par exemple, il est là,
23:52 il regarde la télé, il est comme un corps qui bougerait pas,
23:57 et donc, à ce moment-là, on risque d'être...
24:02 d'avoir un cerveau tout mou.
24:04 - Et si tu restes que sur ton canapé comme ça
24:08 et que tu commandes à manger
24:11 et que tu commandes pizza, hamburger, kebab...
24:15 - Qu'est-ce qui va se passer ?
24:17 - Bah, tu grossis, et après, ça devient dangereux pour ta santé,
24:21 parce que tu es obèse et tu veux pas faire de sport, du coup.
24:25 - On ne bouge pas. Ça s'appelle la sédentarité.
24:29 - L'appartement, il est petit.
24:31 On s'envoie quand même des textos, alors que tu peux te lever,
24:34 aller dans la chambre et dire ce que tu voulais dire.
24:37 - Qu'est-ce que ça signifie, ça, le fait que, dans les familles,
24:40 maintenant, on se lève même plus, on va même plus parler,
24:42 on va se communiquer par textos ?
24:44 - Bah, c'est qu'on a la flemme de se lever.
24:46 - Quand on envoie un SMS à quelqu'un,
24:49 on va parler en abrévation pour lui dire "Salut",
24:53 on va marquer "SLT".
24:55 - Quel est le but, à ton avis, de ces abréviations ?
24:58 - Bah, on a la flemme de marquer tout le mot, alors que...
25:01 - Bah, dis donc !
25:03 - Il reste quelques lettres à marquer, mais on a la flemme.
25:05 - Ça fait beaucoup la flemme, hein, les écrans !
25:07 - Si elle raccourcit les mots, c'est parce que, comme ça,
25:09 elle se fatigue pas des pouces.
25:11 - Une crampe aux pouces ! On va avoir une crampe aux pouces !
25:15 Non, c'est vrai que ça fait peur.
25:17 - Oh non, regarde, je...
25:22 - Pour quelqu'un qui a toujours regardé les écrans beaucoup
25:26 et qui s'est dit un jour...
25:28 "Je vais arrêter de regarder les écrans, ça me prend trop de temps",
25:32 eh bah, il va pas faire ça, parce que c'est trop difficile de lire,
25:37 c'est trop... C'est plus facile de regarder la télé,
25:41 de juste regarder, de s'affoler dans le canapé,
25:44 plutôt que lire, essayer de comprendre.
25:47 - C'est plus difficile de lire, ça demande plus d'effort,
25:50 certaines choses. Les écrans, c'est facile.
25:53 C'est la même chose que de manger des gâteaux tout faits,
25:56 pas bons pour la santé, bien sucrés.
25:59 C'est plus facile que de manger un fruit qu'on a pelé.
26:02 Donc on choisit ce qu'il y a de plus facile.
26:05 C'est ça, le piège des écrans.
26:07 - Tout plaisir n'est pas à rechercher, et toute peine et tout effort n'est pas à fuir.
26:11 Parce que certains plaisirs vont nous conduire à un malheur,
26:15 lorsqu'il y a des plaisirs immédiats qui peuvent être très agréables,
26:18 comme l'alimentation. Et puis il y a des peines qu'il faut accepter,
26:21 des efforts qu'il faut faire, parce qu'ils nous conduisent à un bonheur supérieur.
26:24 Et les 2 exemples les plus forts, c'est le sport.
26:27 Dans le sport, des fois, on souffre, nos muscles ont mal, on randonne,
26:30 c'est difficile, mais après, quel bonheur, une fois qu'on arrive au sommet,
26:33 parce qu'on progresse. Ça demande un effort.
26:36 Alors qu'on est complètement passif dans les réseaux sociaux,
26:39 il n'y a aucun effort.
26:46 Chacun sur son écran, dans sa bulle tout confort,
26:50 quelle place reste-t-il pour la parole, pour la lecture ?
26:55 Comment faire société quand on n'a plus les mots ?
27:00 Si nous ne savons plus parler, s'il ne nous reste que la neuve langue et les emojis ?
27:07 Aujourd'hui, il y a de plus en plus d'études scientifiques qui montrent
27:13 que le nombre de mots dont disposent les gens pour parler,
27:18 et particulièrement les enfants, il n'arrête pas de baisser, de se réduire,
27:23 comme peau de chagrin. Peau de chagrin, ça se réduit de plus en plus.
27:27 Qu'est-ce qui risque de se passer dans un monde où on a de moins en moins de mots ?
27:31 C'est vrai que ça va être une catastrophe,
27:34 parce que si personne ne sait parler,
27:38 dans la rue, tout le monde va vouloir te taper.
27:42 Pourquoi ceux qui parlent le moins bien dans l'école,
27:46 c'est toujours ceux qui ont des embrouilles à la récré,
27:49 et ceux qui parlent bien, ils n'ont jamais d'embrouille, pourquoi ?
27:52 Parce qu'ils ne savent pas dialoguer.
27:54 On a besoin du langage pour s'exprimer,
27:56 on a besoin de lui pour dire ce qu'on ressent, ce qu'on pense,
28:00 pour savoir expliquer quelque chose,
28:02 parce que c'est très important, vu que sinon on renferme en soi ce qu'on ressent.
28:06 Si on ne peut pas se comprendre, on va tout mal comprendre,
28:10 on va mal interpréter les choses.
28:12 Si on s'exprime moins, tout le monde sera un peu bête,
28:17 et les hommes intelligents, qui sont souvent les hommes de politique,
28:21 vont pouvoir nous faire croire des choses qui ne sont pas du tout vraies,
28:25 si on n'est pas intelligent.
28:28 Dans une dictature, on n'a pas le droit d'expression,
28:32 le seul moyen d'être libre, c'est de penser ce que l'on veut,
28:36 sauf que quand on n'a pas les mots, on ne peut rien penser au final.
28:40 C'est super juste.
28:42 Au fond, à la racine de tout, il y a notre pensée.
28:47 Et Pierre Bourdieu, c'est un sociologue qui a démontré
28:51 que ceux qui parlaient bien, c'est eux qui allaient avoir un rôle important dans la société,
28:56 et donc que finalement, le langage et bien s'exprimer, c'est le pouvoir.
29:00 C'est vrai que le langage, c'est un super pouvoir.
29:03 Le langage, on ne peut jamais le perdre, on va le garder pour toute notre vie,
29:07 ça va servir pour quelque chose.
29:10 Pour tout !
29:12 Moi aussi, ceux qui parlent bien, ils peuvent être violents avec les mots.
29:19 Joli ! Il est vrai que les mots peuvent faire presque aussi mal que des coups de poignard.
29:25 Il y a des gens qui sont blessés par les mots, presque comme par des armes.
29:30 Parfois, en tant que personne, on entend des choses qui ne sont pas très bien.
29:36 Et comment on réagit à des paroles blessantes ?
29:38 Tu dois t'exprimer avec tes mots, mais si tu n'y arrives pas, laisse passer.
29:44 Donc si tu n'y arrives pas, mais en fait c'est là où il faut travailler le langage à la A,
29:48 parce que le langage te permet de réagir.
29:51 Si on a été blessé, on a été humilié, on est vexé,
29:54 mais qu'on ne peut pas se défendre parce qu'on n'a pas les mots, c'est terrible !
29:58 Imaginons que tu disputes avec une de tes amies par message,
30:03 et tes mots, en fait, tu ne les contrôles pas.
30:06 Donc tu les écris et tu ne les penses peut-être pas.
30:10 Donc tu les envoies et les mots, enfin, les mots, ils restent.
30:14 Il faut faire attention à ce qu'on écrit, en particulier sur les réseaux.
30:18 Ne croyez pas que c'est comme discuter en classe,
30:21 où on peut discuter et dire librement des bêtises, ou de temps en temps, on peut se tromper.
30:24 Par contre, si vous le faites sur les réseaux, c'est tout le temps que vous aurez l'étiquette
30:28 "Il a dit une grosse bêtise, elle a dit une grosse horreur, et ce sera pour toujours."
30:33 Mon frère, il a écrit quelque chose sur les réseaux sociaux qu'il ne fallait pas,
30:36 et après j'ai eu des problèmes avec des gens, après les gens ils voulaient me frapper,
30:40 ils ont dit "Viens, rejoins-moi là, tout ça, tout ça, viens, je vais démarrer, tout ça, tout ça, viens, je vais te tuer."
30:47 Ah ! On a le témoignage du danger des réseaux.
30:51 Donc vous voyez, vous avez vraiment l'exemple, et son frère il a eu des ennuis, il a dû regretter quand même d'avoir fait ça.
30:56 On entend souvent que la technologie elle est neutre, et puis ça dépend ce qu'on en fait finalement,
31:00 on peut éplucher des carottes ou assassiner son voisin avec un couteau.
31:05 En fait, non, la technologie n'est pas neutre.
31:08 Le penseur de la technique Jacques Ellul disait que la technologie elle est ambivalente,
31:12 elle n'est ni positive, ni négative, ni neutre.
31:15 Elle est toujours à la fois positive et négative.
31:18 Internet c'est un peu comme un parc public, on pourrait dire, voilà, il y a des trucs, des endroits peut-être un peu dangereux,
31:23 je ne sais pas, là où il fait sombre, et la nuit, et puis des endroits très sympas où on va courir dans la pelouse.
31:28 Est-ce qu'on laisserait nos enfants jouer dans un parc public, qui est un endroit à la fois très dangereux et très sympa ?
31:34 On voit bien qu'on aurait envie de les accompagner pour que ça soit moins dangereux,
31:38 et puis de les laisser libres là où c'est vraiment très sympathique.
31:41 Et c'est ça tout l'enjeu qu'il faut réussir à faire, ce qui est évidemment, éminemment complexe,
31:45 dans un monde qui en plus est en mouvement et en innovation technologique permanente.
31:49 Comme l'a dit Philippe Ibrix, l'écran c'est comme un parc où il y a un côté sombre,
31:55 où il ne faut pas y aller parce que tu risques de plonger dedans et de jamais en sortir.
32:01 Et quoi comme pas, comme côté sombre par exemple ? Qu'est-ce que tu connais où il ne faut pas aller sur Internet ?
32:06 Les réseaux sociaux.
32:07 [Musique]
32:23 Tous conformes, tous en forme et dans la norme.
32:28 Comment rester soi-même sous la pression constante du regard des autres ?
32:34 À l'heure des réseaux sociaux, comment construire l'estime de soi ?
32:39 [Musique]
32:41 Qui se souvient un peu de l'histoire de Narcisse ? Narcisse est un personnage de la mythologie.
32:47 C'est quelqu'un qui est aveuglé par son reflet et il voit une rivière.
32:51 Qu'est-ce que tu veux dire aveuglé par son reflet ?
32:53 Il s'adore, il se trouve sublime et il voit une rivière et son reflet.
33:00 Donc il veut s'approcher de ce reflet et il se noie dans la rivière.
33:05 Il se noie dans la rivière parce qu'il se noie dans son reflet.
33:08 Il se regarde toujours sur la rivière comme les influenceurs, il se regarde toujours sur leur écran.
33:16 C'est drôle parce qu'en fait Narcisse, il se regarde dans la rivière, il s'admire et la rivière elle, elle s'admire dans les yeux de Narcisse.
33:25 C'est comme s'il s'admirait dans un miroir ou sur une photo ou dans une vidéo.
33:31 Parfois on doit faire des milliers de photos parce qu'on est trop moche, on dit qu'on est moche.
33:35 Après on doit recommencer par être beau parce qu'on est encore moche.
33:38 En fait on n'apprécie jamais les choses qu'on fait dans les écrans.
33:42 Parfois on ne se sentait pas bien, on se trouvait moche un peu.
33:46 Moi aussi un jour ça m'est arrivé mais après je me suis rendu compte que les influenceurs,
33:50 ils ne servaient à rien, ils ne réfléchissaient pas assez à ce qu'ils faisaient.
33:53 En fait on veut ressembler, on veut être plus beau que les influenceurs.
33:57 Et du coup au final on veut toujours être plus beau que les autres,
34:01 sauf qu'on imagine les autres plus beau qu'ils ne le sont vraiment.
34:04 Du coup on veut toujours être plus beau sur chaque photo et en fait on ne peut pas.
34:07 Vous imaginez si on ressemble tous à quelques chanteurs ou chanteuses,
34:11 tout le monde dans la même coupe, enfin quel monde inintéressant.
34:15 Vu qu'on ressemble à tout le monde, personne ne nous voit.
34:17 Il vaut mieux qu'on soit différents pour qu'on vous remarque.
34:20 Parfois j'ai peur que les gens ne m'aiment pas, ils ne veulent pas être mes amis.
34:24 Parfois je me sens seul.
34:27 Et tu as peur d'être seul ? Pourquoi tu as peur d'être seul ?
34:32 Parce que je préfère plutôt être avec des gens qui m'aident, qui m'aiment
34:36 et aussi qui m'accompagnent tout le temps.
34:39 Nos enfants ont besoin de nous face aux écrans.
34:45 Pour les contrôler et les limiter bien sûr.
34:48 Mais aussi pour les guider vers tous les trésors qu'ils recèlent.
34:53 Toute mon enfance, ma mère m'a emmené voir les grands classiques
34:57 dans les cinémas du quartier latin.
35:00 Et si je fais des films aujourd'hui, c'est en souvenir de cette magie du 7e art.
35:06 En mémoire de toute cette beauté que nous avons partagée.
35:11 Mais en ce temps-là, l'écran était fixe, temporaire et collectif.
35:18 Aujourd'hui, il est mobile, permanent et individuel.
35:25 De très grand, il est devenu tout petit, mais incroyablement accaparant.
35:32 Si nous n'y prenons garde, l'hypnose peut ne jamais cesser.
35:38 - Qu'est-ce qu'il y a d'autre qu'on peut faire et qui est important pour nous,
35:46 mais que les écrans piratent ?
35:49 Ils prennent ce temps.
35:51 - On peut lire au moins 3 livres, 4 livres.
35:54 On sort moins alors qu'il fait beau, qu'on peut faire plein d'activités.
35:58 Par exemple, on peut faire de la trottinette, du roller, du vélo.
36:02 - Limiter les écrans, ils vont finir, peut-être pas le premier jour,
36:05 mais ils vont finir par faire autre chose.
36:08 - J'ai enlevé le fil de raison, il me dit qu'il n'y a plus de raison.
36:12 Je dis que c'est Bouygues, pas moi.
36:15 A la rentrée de mois de septembre, ils ont resté à moi sans télé.
36:19 Ils ont bien joué, ils ont bien lu les livres, ils étaient sages.
36:23 Pas sur l'écran, j'étais contente.
36:25 - Je ne connais pas d'autre façon de guérir un comportement addictif
36:29 qu'en enlevant l'objet d'addiction.
36:32 - Sur quoi on est en train de regarder ces interviews ?
36:35 - Sur un écran.
36:37 - Sur un écran. Est-ce que ça nous rend plus bêtes de regarder ça ?
36:41 - Non. - Intelligents, plutôt.
36:43 - Intelligents, plutôt.
36:45 Donc, c'est toujours pour rappeler que l'écran, ça dépend de ce qu'on en fait.
36:51 (Musique)
37:06 - Les temps modernes de Charlie Chaplin, on a été émus, on a vécu des choses.
37:12 On a vu de la beauté.
37:14 - Mais la chose qui est bizarre avec les écrans, c'est que, par exemple,
37:18 tu regardes les shorts, tu les oublies rapidement,
37:20 mais les films émouvants, émotionnels, tu les oublies pas, en fait.
37:24 - On dit souvent que moi, ce qu'on dit, les enfants, ils sont captivés
37:28 si moi, je raconte quelque chose qui m'a touché, parce qu'ils sont émus à leur tour.
37:32 Par exemple, quand, je vais vous parler d'Albert Camus et de son instituteur,
37:38 vous sentez que je suis ému, et donc vous êtes tout de suite beaucoup plus capté,
37:42 votre attention, vous dites, ah, le prof, il dit un truc, ça le touche.
37:47 (Musique)
38:16 - Mais c'est bien beau de dire qu'il faut aider les enfants à moins regarder les écrans,
38:20 mais pour ça, il faut leur proposer autre chose.
38:23 Et donc, si on veut aider les jeunes à quitter l'addiction des écrans,
38:27 il faut susciter en eux, comme le dit Spinoza, un désir supérieur,
38:31 c'est-à-dire les motiver vers un affect supérieur,
38:34 quelque chose qui leur donne plus de plaisir que le plaisir qu'ils vont trouver dans leurs écrans,
38:38 parce que c'est aussi un refuge par rapport à tout ce qui les ennuie dans la vie.
38:41 - Il y a une chose que je voulais vous annoncer,
38:43 parce que là, on va pouvoir faire vraiment l'expérience,
38:46 pendant 10 jours, de ne plus avoir d'écran.
38:49 On a eu, écoutez bien, j'avais eu un refus vendredi, je ne vous ai pas dit,
38:55 mais je venais d'avoir au téléphone, on m'a dit, il n'y a pas de classe découverte,
38:59 c'est un algorithme, un programme qui a décidé que vous n'avez pas de classe découverte.
39:02 - Hein ? - Là, j'ai appelé, j'ai dit, c'est pas possible, ça ne va pas se passer comme ça.
39:07 J'ai dit, ce n'est pas normal que ce soit un programme et pas des humains,
39:11 nous on est une classe, on a un super projet,
39:13 et ils ont dit, bon, on va trouver une classe, et ils ont trouvé une classe découverte !
39:18 - Ouais ! Ouais ! Ouais ! Ouais !
39:22 - Voilà, donc, on ira, on sera dans l'est, au milieu de la nature,
39:27 et on aura 10 jours pour vivre des moments ensemble sans aucun écran.
39:35 - Mais c'est vrai !
39:37 - Vas-y, viens, on va te montrer.
39:39 - Là, on va être plus joli, on va être plus joli.
39:41 - Après, ça va venir, on verra.
39:43 - C'est vrai, il est en mode...
39:45 - Tiens, tu vois, tu vois !
39:47 - Ah ah ah !
39:49 - C'est un bonheur !
39:52 - C'est un bonheur !
39:54 [ Musique ]
40:10 - On est arrivé au centre, maintenant, vous allez pouvoir vous éclater,
40:14 mais la condition, c'est, on va laisser les portables pour les 10 jours qui viennent,
40:19 vous les aurez qu'une fois le samedi.
40:22 - Allez, on met les téléphones dans le panier, doucement.
40:27 [ Musique ]
40:48 [ Chant ]
41:17 [ Chant ]
41:41 - J'entends rien !
41:43 [ Chant ]
41:57 - Les enfants, aujourd'hui, sont principalement exposés à des univers absolument,
42:03 complètement maîtrisés et artificialisés,
42:06 où ils ne sont plus du tout en prise avec la réalité,
42:10 avec ce surgissement, justement, du vivant, de la nature,
42:13 cet imprévu, tout cet émerveillement.
42:16 Et donc, il y a absolument besoin de se reconnecter à cette prise du réel.
42:22 [ Chant ]
42:49 - J'ai aimé entendre les oiseaux, et à un moment, j'ai aussi eu l'impression
42:53 que j'entendais les arbres, le vent.
42:56 Ça m'a fait bizarre, parce que là, on entre dans la forêt,
42:59 je trouvais ça très beau, mais je m'étais pas vraiment concentré.
43:02 Et là, j'ai vraiment senti la nature.
43:06 - Donc, c'est comme si, jusque-là, t'as l'impression que t'avais une partie de ton cerveau
43:09 qui était trop occupée à autre chose pour vraiment sentir la nature ?
43:12 - Je me disais, je regardais juste l'image, je regardais juste l'effet,
43:16 je trouvais ça beau, mais j'allais pas chercher plus loin.
43:19 On sent la présence de toute la nature, des arbres, tout ça,
43:22 alors qu'en photo, on a juste une image.
43:25 Si, par exemple, t'as jamais vu une forêt, que le premier jour, tu viens,
43:29 tu vois, t'entends les chants d'oiseaux et les arbres,
43:35 ben, ça va changer au bout, tu t'auras plus l'habitude.
43:39 - Et ça t'a fait quoi, là ?
43:42 - Ben, ça, ça va... C'est comme si j'étais libre.
43:45 - Tu ressens de la liberté ?
43:47 - Wow !
43:49 - Je crois pas !
43:51 - Non, non, si on s'approche, ils sont...
43:54 - Ouais, c'est un peu...
43:56 - Non, non, non, non, non, non.
43:59 - Au revoir, le renard ! - Au revoir !
44:01 - Au revoir !
44:02 - Et ça t'a fait quoi, de le voir ?
44:05 - Euh... Ben, j'étais choquée.
44:08 - Enfin, j'étais contente. - Ouais.
44:12 - J'étais aussi effrayée, à la fois.
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