Zoom - Matthieu Falcone : Roman : Le fantasme d'un Macron devenu roi

  • il y a 8 mois
Emmanuel Macron se rêverait-il en monarque ? La couverture du roman de Matthieu Falcone "Le roi est nu" va fait rire... ou pleurer. Les traits du chef de l'Etat ont remplacé ceux de Louis XVI sur le tableau de Duplessis. Panache, humour, sagacité : l'auteur signe une uchronie féroce de politique-fiction, une satire radicale de notre société. Après deux quinquennats à la présidence de la République, Michel décide en 2027 de restaurer la monarchie. En devenant le roi Michel Ier, il espère remettre de l’ordre dans un pays en proie à des tensions insoutenables. Envié par son éminence grise, inquiété par un infiltré dans les sphères anarcho-royalistes, parasité par une jeune et jolie identitaire, contesté par des militants de la gauche antilibérale et un influenceur d'extrême droite, le roi Michel conservera-t-il son trône ?

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Transcription
00:00 [Générique]
00:06 Bonjour à tous, bienvenue dans notre Zoom aujourd'hui en compagnie de Mathieu Falcone.
00:10 Bonjour monsieur.
00:11 Bonjour monsieur.
00:12 Mathieu Falcone, écrivain, vous étiez déjà venu nous présenter vos deux précédents romans,
00:18 "Un bon samaritain" et "Campagne", jamais de cent trois, voici le dernier,
00:22 "Le roi est nu", publié chez Albain Michel, à retrouver sur la boutique de TVL,
00:28 comme d'habitude, alors évidemment la première chose qu'on remarque sur votre ouvrage,
00:32 c'est sa couverture, excusez-moi, avec Emmanuel Macron qui a remplacé Louis XVI sur le tableau de Duplessis.
00:42 Vous lui souhaitez le même sort qu'au roi Louis XVI, à Emmanuel Macron ?
00:47 Non, mais écoutez, je crois qu'on a célébré Beninter, là, dernièrement, qui a justement voulu la peine de mort,
00:53 donc à mon avis on n'est pas prêts de voir ça, et non, effectivement, c'est pas ce qu'on lui souhaite,
00:58 néanmoins on peut souhaiter que ça change.
01:03 Alors l'intrigue du livre, on ne va pas rentrer dans le cœur, mais enfin je peux résumer ainsi,
01:08 après deux quinquennats à la présidence de la République, Michel décide en 2027 de restaurer la monarchie.
01:15 En devenant le roi Michel Ier, il espère remettre de l'ordre dans un pays en proie à des tensions insoutenables,
01:21 enviée par son éminence grise, inquiétée par un infiltré dans les sphères anarcho-royalistes,
01:28 parasité par une jeune et jolie identitaire, contesté par les militants de la gauche antilibérale
01:35 et un influenceur d'extrême droite, le roi Michel conservera-t-il son trône ?
01:40 Voilà pour l'intrigue de cet ouvrage, donc, une monarchie restaurée par un référendum,
01:46 cette consultation populaire que les Français n'ont plus connue depuis près de 19 ans.
01:51 Comment vous expliquez le fait que cette procédure soit tombée dans l'oubli à ce point ?
01:58 Écoutez, j'ai l'impression qu'on a quand même une dérive autoritaire et de moins en moins démocratique aujourd'hui,
02:04 quand on voit le déni de démocratie un peu d'Emmanuel Macron, c'est-à-dire que ces lois passent par 49-3
02:10 ou alors, comme on l'a vu sur la loi immigration, finalement il fait censurer par le Conseil constitutionnel
02:15 ce que le Sénat avait ajouté, donc en réalité on a l'impression que les deux chambres ne pèsent plus grand-chose.
02:21 Donc finalement, pourquoi est-ce qu'il se soumettrait à un référendum alors que finalement il n'y a pas grand-chose à faire du peuple ?
02:27 Oui, il n'est pas du tout obligé d'avoir recours au référendum, en fait.
02:30 La Constitution indique que la souveraineté nationale appartient au peuple,
02:35 qu'il exerce par ses représentants et par la voix du référendum,
02:39 il n'écrit nulle part qu'un référendum est obligatoire sous un quinquennat quelconque.
02:45 Non, pas du tout, mais d'ailleurs dans le roman, enfin ce n'est pas Emmanuel Macron évidemment,
02:49 mais un personnage qui peut y faire penser et qui lui fait un référendum
02:54 parce qu'il a envie de changer la Constitution et vraiment d'avoir une espèce de légitimité du peuple dans ce cas précis.
03:00 Mais sinon, on voit bien qu'aujourd'hui, on fait assez peu de cas de ce que le peuple a à dire et de ce qu'il voudrait.
03:08 Alors cette monarchie restaurée par Michel, c'est une monarchie constitutionnelle,
03:13 donc avec des élections législatives comme on peut en voir en Espagne, en Angleterre,
03:18 mais beaucoup de Français restent critiques à l'égard de la monarchie en général,
03:23 parce qu'il y a aussi la monarchie absolue de droit divin.
03:26 Comment vous expliquez cette méfiance des Français vis-à-vis de ce régime qui a occupé 1500 ans de son histoire ?
03:33 – Oui, je pense que ça a occupé effectivement 1500 ans, ça a été arrêté très brutalement par la Révolution,
03:40 bien qu'après on ait eu une restauration, mais je pense que les Français sont critiques
03:44 parce qu'on a quand même 200 ans de matraquage un peu intellectuel et historique
03:51 nous expliquant souvent que la monarchie a été le pire des régimes, ce qui n'est pas du tout…
03:56 – Oui, c'était l'obscurantisme, c'était l'artistrat.
03:59 – C'est à la lumière, donc forcément, fatalement, les Français ont un regard critique,
04:05 mais je ne suis pas sûr que les Français soient si contre ce régime en fait.
04:12 – Comment vous expliquez justement que la République ait à ce point besoin
04:17 de matraquer l'ancien régime pour se sentir vivre ?
04:22 – On a besoin toujours d'un mythe fondateur, et en fait c'est un peu ce que dit René Girard,
04:27 c'est-à-dire que le pouvoir s'assoit toujours sur un crime originel,
04:30 donc je pense qu'il y a vraiment ça, on le voit,
04:32 la République s'inscrit dans le meurtre de Louis XVI en fait,
04:36 donc elle a besoin effectivement de décrédibiliser la monarchie pour se maintenir.
04:42 – Elle oublie en revanche d'expliquer dans quel contexte elle s'est instaurée,
04:47 la République, c'était celui de la terreur, des têtes qui roulaient dans les rues de Paris.
04:52 – Oui, ce qui est la deuxième partie de la Révolution, pas forcément la première,
04:56 mais effectivement à partir de 1793 et de la décapitation de Louis XVI,
05:01 on part dans une terreur vraiment effroyable,
05:05 à laquelle met fin finalement Bonaparte d'une certaine manière,
05:09 mais effectivement on est quand même assis là-dessus,
05:11 et notre République repose un peu sur ce mythe fondateur.
05:15 – Quels seraient selon vous les avantages d'une monarchie pour la France ?
05:20 – Écoutez, je pense que…
05:21 – Et même pour tous les pays, c'est quoi l'avantage d'une monarchie ?
05:24 – C'est d'avoir une incarnation, un personnage, un roi ou une reine,
05:28 ça dépend des pays, mais qui incarne quelque chose,
05:30 qui incarne quelque chose de perpétuel et une idée qui soit, qui est.
05:37 D'ailleurs les Anglais, je pense, l'ont bien compris,
05:40 et ça leur permet quand même de maintenir leur pays dans un état d'union à peu près,
05:45 alors que s'ils n'avaient pas ça, je ne sais pas dans quel état ils seraient.
05:48 – Je crois qu'il y avait un sondage il y a quelques mois, quelques années,
05:51 qui démontrait que les Français n'étaient pas forcément hostiles
05:55 à l'établissement d'un régime autoritaire, d'un régime fort.
06:00 Comment vous voulez expliquer cette demande du peuple ?
06:03 – Oui, je pense qu'on a toujours,
06:06 on a eu quand même une longue tradition de pouvoir fort en France,
06:09 et… comment dire les choses ?
06:13 On voit qu'aujourd'hui, tout est un peu vacillant,
06:16 c'est-à-dire que la société est quand même éclatée,
06:17 donc on aurait besoin de quelque chose, d'un pouvoir vertical en fait,
06:20 qui nous unisse et qui nous dirige.
06:22 Là, on a l'impression que finalement, le pouvoir ne dirige rien,
06:26 puisque c'est une forme de capitalisme libéral qui dirige le monde
06:29 et qui avance de lui-même.
06:31 Et Emmanuel Macron, Gabriel Attal, ce sont des garde-fous en fait, de ce régime.
06:37 – Alors, votre roi Michel, vous l'expliquez dans votre roman,
06:40 est détesté par toute une partie des Français,
06:44 ce qui peut nous faire penser à une certaine actualité,
06:47 une certaine réalité en tout cas pour nous autres Français.
06:50 Est-ce qu'un chef d'État doit, selon vous,
06:52 toujours chercher à se faire aimer de son peuple ?
06:55 – Non, pas du tout, je ne pense pas.
06:57 Je pense que ce n'est pas du tout le rôle,
07:00 enfin c'est comme le rôle d'un père, on n'est pas là pour se faire aimer,
07:03 même si évidemment c'est toujours mieux d'être aimé,
07:05 mais le chef de l'État devrait être là pour incarner quelque chose,
07:09 donner une ligne et tenir son pays malgré vents et marées.
07:15 Et là je pense qu'effectivement on est dans une politique aujourd'hui
07:18 où les chefs d'État aimeraient se faire aimer,
07:21 donc vont sur les réseaux sociaux, sur un tas de choses.
07:24 En fait, ce n'est pas du tout ça qu'on leur demande.
07:26 – Oui. Un personnage de votre roman explique que Michel,
07:30 donc ce nouveau roi, est supérieurement intelligent,
07:33 c'est aussi parfois ce qu'on entend dans la bouche de certains journalistes
07:37 quand on parle d'Emmanuel Macron,
07:39 il vous dit que tout ce qui lui avait jamais été reproché,
07:41 c'était de n'avoir pas de colonne vertébrale.
07:44 Avoir de l'intelligence sans colonne vertébrale,
07:47 est-ce que ce n'est pas un petit peu l'apanage
07:49 de notre personnel politique aujourd'hui en France ?
07:52 – Oui, malheureusement je pense que c'est ça, oui.
07:54 – Quand on voit tous ces anciens ministres qui,
08:01 avant d'arriver dans le gouvernement d'Emmanuel Macron,
08:03 disaient qu'il n'avait pas de colonne, qu'il n'avait pas de projet,
08:06 et puis finalement ils sont rentrés au gouvernement comme les autres.
08:10 – Oui, oui, mais j'ai l'impression que c'est le problème
08:12 de la plupart des partis politiques aujourd'hui.
08:14 C'est-à-dire qu'on a des esprits bien formés, qui réfléchissent très vite,
08:18 mais on ne sait pas très bien par quoi ils sont animés,
08:20 sinon par la conquête du pouvoir.
08:22 – Oui, il n'y a que ça qui les attire selon vous,
08:24 ce n'est pas forcément la paix du gain, c'est la paix du pouvoir.
08:28 – Je pense que c'est surtout la paix du pouvoir, oui.
08:30 Je ne dis pas qu'il n'y en a pas d'honnête
08:32 qui aimerait apporter des choses pour la France,
08:35 mais est-ce que le système n'est pas organisé
08:37 de manière à ce qu'il perde cette volonté au fur et à mesure qu'il progresse ?
08:40 C'est le problème des appareils politiques, si vous voulez.
08:43 C'est qu'il faut monter, et puis petit à petit,
08:45 on perd un peu de son désir premier.
08:48 – On a vu Rachida Dati rentrer au ministère de la Culture récemment,
08:53 elle avait dit il y a quelques années, en parlant du parti présidentiel,
08:58 c'est un parti avec des traîtres de droite et un parti avec des traîtres de gauche.
09:02 Donc en fait, la trahison, c'est l'apanage du fonctionnement de nos élites politiques.
09:09 – Ecoutez, c'est elle qui le dit, visiblement,
09:12 ça ne la dérange pas de rentrer dedans,
09:14 donc c'est comme ça que ça doit se passer.
09:17 – Michel avait habilement contribué à la crétinisation des jeunes esprits français
09:23 par la propagation plus délétère qu'un virus, le réseau social TikTok.
09:29 Pourquoi les chefs d'État, les chefs de gouvernement
09:33 auraient intérêt à abétir leur peuple ?
09:36 – Je ne sais pas s'ils ont intérêt, si c'est vraiment quelque chose qu'ils recherchent,
09:39 mais on peut quand même se le demander,
09:41 quand on voit l'état d'élabrement de l'éducation nationale et de l'école,
09:44 en fait, depuis pas mal de décennies,
09:46 et effectivement, c'est toujours plus facile de manipuler des esprits faibles
09:50 et de diriger un pays qui s'abreuve de réseaux sociaux et de télé
09:54 et d'émissions plus ou moins abétissantes.
09:57 – C'est le laisser-faire du libéralisme, c'est ça ?
10:00 – Oui, je pense que c'est ça.
10:02 – On fait confiance à l'homme pour tout, en chaque situation ?
10:05 – On fait confiance et puis surtout, on ne lui demande pas vraiment son avis.
10:09 Donc autant que les gens soient divertis, donnant lui du pain et des jeux,
10:12 et puis continuons à le diriger comme on a envie de le diriger, en fait.
10:16 – Michel évoque aussi dans votre ouvrage les menaces qui guettent la France,
10:21 je les cite, un climat de révolte, la désagrégation de lieux,
10:25 la déstabilisation du monde par la Russie et la Chine,
10:29 mais au fond, est-ce que ce n'est pas ce dont les Français rêvent ?
10:33 D'une désagrégation de lieux, d'un climat de révolte sociale,
10:36 on est au bord de tout ça.
10:38 – Oui, on ne peut pas dire qu'on en rêve, je ne sais pas si vous en rêvez,
10:41 mais en tout cas, je ne pense pas qu'on ait envie d'une guerre civile,
10:44 personne n'a jamais envie de ça.
10:46 En revanche, effectivement, je pense qu'il y a une envie
10:49 que les choses explosent pour pouvoir passer à autre chose.
10:52 Et parce que là, on comprend bien qu'on arrive dans une impasse,
10:55 ça devient compliqué, on voit bien que le climat se déraille,
10:58 que tout est un peu branlant, mais on continue à courir vers le mur,
11:02 tout en sachant que le mur arrive.
11:04 Donc, je pense que beaucoup de gens se disent vivement que le mur arrive.
11:08 – Vous évoquez les scandales de corruption,
11:11 on a pu voir le Qatar Gate qui avait frappé le Parlement européen,
11:16 mais tout ça, ça passe toujours comme une lettre à la pote,
11:19 vous expliquez ça comment ?
11:21 – Je pense qu'on se dit tous, pour la plupart, qu'on n'a aucun pouvoir là-dessus,
11:25 et que finalement, on a l'impression que même quand on vote,
11:28 de toute façon, si on vote mal, on va nous faire re-voter,
11:31 on va nous faire repasser les lois,
11:33 comme par exemple le traité de Lisbonne, etc.
11:35 Donc finalement, on a tous les bras qui nous entombent,
11:39 que peut-on faire en fait ?
11:41 – Et puis même quand on vous évoquait aussi l'ascension
11:44 d'une néo-fasciste à la tête de l'Italie,
11:46 qui était passée comme une lettre à la poste.
11:48 De toute façon, c'était un petit peu le cas avec M. Tsipras en Grèce,
11:52 qu'on mette des personnalités dites populistes à la tête du pays,
11:56 qu'est-ce que ça change ?
11:57 – Oui, qu'est-ce que ça change ?
11:59 Puisque de toute façon, c'est globalement l'Union européenne qui va diriger,
12:02 qui elle-même est quand même un vassal des États-Unis.
12:05 Enfin, on est dans un monde globalisé, où le capitalisme est très puissant,
12:10 et en fait, on est obligé d'obéir à ces lois.
12:13 Et je pense que ça soit Mme Mélanie ou autres,
12:16 sont finalement obligés de se plier à la réalité,
12:19 qui est que le marché domine, et que de toute façon,
12:21 il faut faire fonctionner les économies, et donc les entreprises,
12:25 et donc en réalité, le pouvoir de décision est très mince.
12:31 – On avait vu à quel point M. Tsipras n'avait pas réussi
12:34 à relever le défi de la dette de son pays.
12:37 Je ne sais plus comment on avait appelé l'alliance du FMI,
12:41 de l'Union européenne, et…
12:44 – Oui, j'ai perdu le rappel.
12:46 – Je ne me souviens plus du terme, enfin on voit bien,
12:48 et aussi aujourd'hui avec Mme Mélanie,
12:50 qui n'arrive pas à combattre l'immigration dans son pays.
12:54 Vous évoquez aussi que Michel a ce combat de la réconciliation
13:01 pour faire aimer la République et l'Europe.
13:04 Ces deux notions, comment vous expliquez qu'elles soient
13:08 tombées aussi bas dans l'esprit des Français ?
13:12 – Oui, elles sont tombées bas parce que je pense
13:14 que les dirigeants eux-mêmes ne les respectent plus,
13:17 qu'on a des nids de démocratie en permanence,
13:21 et qu'en fait aujourd'hui l'image de l'Union européenne
13:24 qui nous a été vendue comme l'espace de paix,
13:27 en réalité on voit bien que ce n'est pas ça,
13:29 c'est plutôt une administration pléthorique,
13:31 des lois qu'on ne comprend pas,
13:32 enfin on l'a vu avec la révolte des agriculteurs dernièrement,
13:36 c'est-à-dire que tout le monde en a assez de ces lois européennes
13:40 qui s'appliquent au pays de manière aveugle,
13:43 les mêmes lois en Grèce ou en Irlande,
13:45 enfin on voit bien que ça ne tient pas.
13:47 – Sur la République, vous dites aussi,
13:48 "elle n'a aucune assise car dépourvue de transcendance",
13:52 cette transcendance expliquez-nous ?
13:55 – C'est-à-dire qu'on a bien vu la Révolution française
13:58 a décapité le roi mais aussi la religion
14:01 et aussi tout ce que la personne du roi a incarné en fait,
14:06 et donc la République a essayé de se déifier elle-même,
14:11 – De s'inventer sa propre transcendance.
14:14 – Voilà, et on voit bien que ça ne fonctionne pas,
14:15 et qu'aujourd'hui on arrive dans une société multiculturelle
14:17 où en fait tout est égal, tout se vaut,
14:20 donc finalement plus personne n'est plus rien, ne vaut rien,
14:23 donc ça ne fonctionne pas parce qu'on n'a rien
14:25 qui transcende et qui verticalise ça.
14:28 – La République dans les droits de l'homme qu'elle s'était dictée
14:32 avait quand même expliqué, c'est dans le préambule des droits de l'homme
14:36 qu'elle se place sous l'autorité de l'être suprême,
14:38 il pourrait y avoir une transcendance,
14:40 mais pourquoi elle ne marche pas cette transcendance
14:42 sous l'autorité de l'être suprême ?
14:44 Est-ce que c'est Dieu l'être suprême ?
14:45 – Oui, parce qu'en fait tout ça c'est de la parodie,
14:47 enfin on voit même la déclaration des droits de l'homme
14:49 est très intéressante, mais c'est quand même une,
14:52 comment dire, une désagrégation de l'esprit de l'évangile en fait,
14:55 c'est ça en simplifié, donc on prend un être suprême
14:58 qui est une entité désincarnée qui n'existe pas
15:01 et on essaie de recréer une religion sans Dieu en fait.
15:04 – C'est un ersatz quoi.
15:05 – C'est un ersatz, voilà, de même que le roi de mon roman
15:09 est un ersatz de roi.
15:11 – Vous écrivez ceci, "le système était en bout de course,
15:14 tout le monde le savait", alors dans votre roman
15:18 comme dans notre vie publique,
15:20 pourquoi tous les partis politiques sont aux abois ?
15:24 – Alors je ne sais pas s'ils sont tous aux abois,
15:26 mais c'est quand même assez compliqué pour la plupart des partis aujourd'hui,
15:30 à part peut-être le RN qui, pour l'instant,
15:33 mais bon on verra aux européennes,
15:35 je pense que les partis sont aux abois
15:38 parce qu'on ne croit plus vraiment à ce qu'ils incarnent
15:40 et que justement ce sont devenus des machines en fait
15:42 qui avancent un peu sans âme.
15:44 – C'est des petites boutiques quoi.
15:46 – C'est des petites boutiques ou des grosses boutiques.
15:48 Je pense qu'Emmanuel Macron a réussi à faire exploser
15:51 beaucoup de ses partis et donc ils ont beaucoup de mal
15:54 à se reconstituer et comme on est à une époque
15:56 très individualiste et très éclatée,
15:59 je pense que ça devient même difficile en fait d'organiser un parti
16:02 et de fonctionner avec un esprit de parti.
16:05 – Vous dites ça à propos du peuple,
16:07 il a été presque entièrement absorbé par la petite bourgeoisie
16:11 mondialisée. Alors, ces français qui se trouvent
16:14 en dehors de cette petite bourgeoisie mondialisée,
16:17 comment vous les définiriez ?
16:19 – Ce sont des personnages qui sont à la marge
16:21 et c'est justement la plupart des personnages
16:23 que j'ai dans le roman qui en fait
16:25 essaient de sortir de ça et de reprendre leur destin en main
16:28 et de ne plus être des êtres chosifiés
16:31 par un marché et par un esprit petit-bourgeois.
16:35 Et donc ce sont des personnes qui sont en fait en sécession
16:38 et en révolte et qui ont envie de changer les choses
16:41 mais c'est évidemment extrêmement compliqué.
16:43 – Alors, face à Michel, il y a ce youtubeur,
16:47 Elmo Jo, qui se prend pour le dernier roi des Visigoths,
16:50 qui a un vocabulaire assez fleuri.
16:53 Comment vous est venu ce personnage ?
16:55 – Ce personnage évidemment m'est venu en observant des gens sur YouTube,
17:00 notamment Papacito, qu'on peut voir sur YouTube
17:03 et autres dans ses livres, etc. – Il a une grosse chaîne autour du coup.
17:06 – Il y a un gars qui a cette espèce de style un peu viril, viriliste,
17:11 un peu de rappeur blanc, enfin il y a un truc comme ça
17:14 très identitaire, affirmé, et qui parle par punchline.
17:22 Et donc je trouvais que c'était vraiment un personnage,
17:24 je trouve, représentatif de son époque
17:26 et qui était intéressant à reconstruire dans le livre.
17:29 – Alors il est un peu grossier, Elmo Jo, il dit ceci
17:33 "On veut un roi avec des couilles au cul, qui soit les siennes.
17:36 Ce que nous voulons c'est un roi laid et malin comme Louis XI."
17:39 Donc vous avez vraiment repris le glossaire,
17:43 comme on pourrait dire, de Papacito, qui n'a pas la langue dans sa poche.
17:47 – Non, et puis vraiment, c'est prendre le contre-pied de l'époque
17:50 où on a des personnages très lisses, très propres, très beaux,
17:53 et lui en fait il me dit "Mais nous on veut quelqu'un qui soit incarné
17:56 et on s'en fiche de son physique et de son image."
17:59 – Aujourd'hui vous dites les Français ils votent pour des vedettes.
18:02 – Je pense qu'il y a un petit peu de ça, oui.
18:04 Mais ça fait longtemps en fait, on est vraiment dans une époque
18:07 de la société du spectacle, même avant, moi je me souviens des grandes tantes
18:12 qui disaient "Mais je vote pour Chirac parce qu'il est beau."
18:14 Enfin on a toujours eu ça, donc évidemment c'est le problème de la télévision.
18:19 – Et dans votre fiction, comme dans la réalité,
18:22 les Français attendent souvent un homme providentiel pour les sauver.
18:26 Qu'est-ce que ça dit des Français, cet attentisme ?
18:31 – Peut-être justement ce dont on parlait, cette absence de père,
18:35 d'incarnation, de roi, de figure en fait qui prédomine
18:39 et donc on a envie que quelqu'un vienne nous sauver.
18:42 Alors je ne sais pas si c'est un peu enfantin et puéril mais…
18:46 – Parce qu'on en a eu peut-être aussi, c'est pour ça qu'on les attend.
18:49 – On en a eu aussi. – Oui, on a eu Jeanne d'Arc,
18:51 c'était une femme, on a eu Napoléon, on a eu De Gaulle.
18:54 – Et donc on attend toujours, on a l'impression que les Français,
18:56 mais j'ai l'impression que même dans le sport c'est souvent comme ça en France,
18:59 on attend d'être dos au mur pour se réveiller et puis d'un coup
19:01 remettre un coup de collier et repartir.
19:03 – Vous pensez que les Français seraient capables aujourd'hui
19:05 de se prendre en main et d'assurer leur destin eux-mêmes,
19:07 individuellement et puis collectivement ?
19:09 – Oui, je pense, moi je n'ai pas du tout de désespoir en fait.
19:13 Il faut espérer et je pense qu'on y arrivera,
19:16 on a passé des périodes beaucoup plus difficiles de l'histoire.
19:19 Je ne sais pas quel sera l'élément déclencheur,
19:21 mais je suis sûr que les Français vont reprendre leur destin en main
19:24 et que ça va changer.
19:26 – "L'Empereur est nu", c'est le titre de votre roman,
19:29 excellent d'ailleurs, publié chez Albain Michel,
19:32 à retrouver sur notre boutique.
19:33 Merci à vous Mathieu Falcone. – Merci beaucoup.
19:35 (Générique)

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