Fin de vie, dérive parlementaire et nihilisme de l’État

  • il y a 5 mois
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Chaque matin dans son édito, Vincent Trémolet de Villers revient sur l'actualité politique du jour. Ce lundi, il s'intéresse aux débats sur la fin de vie à l'Assemblée nationale.

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Transcription
00:00 L'édito politique sur Europe 1 avec Le Figaro. Bonjour Vincent Trémolet de Villers.
00:04 Bonjour Dimitri, bonjour Anissa, bonjour à tous.
00:07 Dans une semaine Vincent, la loi sur l'aide à mourir arrive dans l'hémicycle.
00:10 Le texte qui sera examiné a été profondément modifié en commission.
00:15 Vous allez nous détailler ça dans un instant.
00:16 Pourtant on se rappelle qu'Emmanuel Macron avait promis une loi d'équilibre.
00:20 Alors est-ce toujours le cas ?
00:21 Non Dimitri, trois fois non.
00:23 C'est ce que disait la présidente de la commission, Agnès Firmin-Lebaudot, à la fin de la semaine dernière.
00:28 C'est ce que disait Annie Vidal, la députée Renaissance qui est elle aussi membre de la commission
00:32 et qui a dit qu'elle refuserait de voter le texte tel qu'il a été transformé.
00:36 En fait, il s'est passé ce qui était prévisible.
00:40 Le chef de l'État a ouvert une brèche et des militants s'y sont engouffrés pour dessiner une loi à leur main.
00:45 Dans cette histoire, on aura finalement plusieurs fois trompé le citoyen.
00:50 D'abord par la sémantique, en refusant de parler de suicide assisté et de thanasie alors que c'était le cœur du projet.
00:55 Ensuite, en supprimant des gardes fous,
00:58 pardon, ensuite en promettant des gardes fous qui ont tous été supprimés.
01:03 À quoi ressemble le texte désormais ?
01:05 Agnès Leclerc a fait le point dans le Figaro, vous allez voir, c'est impressionnant.
01:09 Le pronostic vital engagé à court et moyen terme n'est plus indispensable,
01:14 ce qui donne accès à l'aide à mourir à des gens qui ne sont pas en fin de vie.
01:18 Par exemple, des maladies chroniques comme l'insuffisance rénale sévère ou des cancers avancés
01:22 avec une espérance de vie de plusieurs années pourraient entrer dans le champ d'application du texte.
01:26 La collégialité aussi disparaît, c'est le médecin qui à la fin décide seul.
01:30 La commission a aussi supprimé le consentement,
01:33 c'est-à-dire que les directives anticipées rédigées parfois très en amont pourront suffire.
01:38 La demande orale avant le geste létal ne sera plus indispensable.
01:43 Quant au délai de rétractation de 48 heures, il sera aussi assoupli.
01:47 Vous noterez Dimitri que le consentement est devenu l'élément central de la morale contemporaine,
01:51 mais pour une question de vie ou de mort, il est superflu.
01:54 Vous noterez aussi que le délai de rétractation est imposé par la loi
01:58 pour l'ouverture d'un compte bancaire ou l'abonnement à une plateforme,
02:00 mais que l'on peut s'en passer pour décider de mourir.
02:03 Ce serait drôle si ce n'était pas tragique.
02:05 - Mais comment le gouvernement s'est-il fait dépasser, Vincent ?
02:08 - On hésite entre l'amateurisme et l'hypocrisie.
02:11 Jean-François Delfraissy, le patron du Comité national d'éthique,
02:14 l'a dit lui-même, cette loi n'est qu'une étape.
02:17 Et c'est ce que pensent beaucoup de promoteurs de la loi,
02:19 qui affichent dimanche précaution, mais qui ont un agenda beaucoup moins précautionneux.
02:24 Ce double jeu progressiste est une constante des lois sociétales.
02:28 On promet une loi d'exception, mais on veut aboutir à un principe anthropologique général.
02:34 Concrètement, dans la Commission, c'est la gauche LFI et les jusqueboutistes qui ont pris la main.
02:39 Je vous donne un exemple éloquent.
02:41 La Commission a fait voter un délit d'entrave à l'aide à mourir
02:45 sur le modèle de celui qui existe pour l'IVG.
02:48 Le ministère a donné un avis favorable, mais que recouvre ce délit d'entrave ?
02:53 Est-ce que par exemple les départements de suicidologie,
02:56 qui tentent héroïquement de combattre les idées noires de leurs patients,
02:59 seront coupables d'exercer leur métier ?
03:02 Pour le moment, les maladies mentales sont exclues du texte,
03:04 mais au rythme où ça va, elles ne tarderont pas à y rentrer.
03:06 Et la question que je pose se posera.
03:09 Ce qui est en train de se préparer est grave ici.
03:11 - Mais quels peuvent être les effets politiques de la victoire des jusqueboutistes ?
03:15 - La colère profonde des soignants, la mobilisation des opposants,
03:19 la radicalisation des partisans.
03:21 Un sujet extraordinairement sensible et compliqué
03:24 qui va déchirer inutilement un pays déjà fracturé.
03:27 C'est-à-dire l'exact contraire de ce que voulait Emmanuel Macron.
03:30 Le président désirait un débat apaisé pour une loi d'équilibre.
03:34 On se prépare à une foire d'empoigne sur un sujet vertigineux.
03:38 La loi, je vous le rappelle, pourrait faire entrer l'administration de la mort
03:42 dans le code de la santé publique.
03:43 C'est-à-dire faire un soin de ce qui jusqu'ici était un crime.
03:47 On pouvait penser, c'est mon cas, que même très encadré,
03:50 cette évolution ne pouvait avoir que des conséquences néfastes,
03:53 mais sans aucun garde-fou.
03:55 Cela va créer partout, dans les hôpitaux, les familles, les consciences,
03:59 une inquiétude diffuse et constante pour les plus vulnérables.
04:03 Jean-Pierre Le Goff a trouvé la formule pour décrire ce climat délétère.
04:07 Le sociologue parle à juste titre de nihilisme d'État.
04:11 L'édito politique sur Europe 1. Merci Vincent Trémolet de Villers.

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