Aujourd’hui, l’économie numérique croît sept fois plus vite que le reste de l’économie. Mais devancée par la Chine et les États-Unis, l’Europe apparaît à la traîne : fake news, emplois précaires, vol de données... L’hégémonie des géants américains n’est pas sans conséquences. Comment l’Europe peut-elle préserver sa souveraineté et nos libertés sur ce nouveau territoire numérique ?
Certains pays, comme la Suède avec Spotify, et l’Estonie, à la pointe de la sécurisation des services informatiques, ouvrent la voie à de nouvelles possibilités.
Devancée par la Chine et les États-Unis, l’Europe apparaît à la traîne dans le domaine du numérique. Fake news, emplois précaires, vol de données : l’hégémonie des géants américains n’est pas sans conséquences. Pourtant,
Mutations
Du Portugal aux États baltes, de la Norvège aux Balkans, cette coproduction européenne, fruit du "Grand accord documentaire" d’ARTE, arpente un continent à la croisée des chemins, plus interconnecté qu’on ne le croit. À travers des vues aériennes inédites, qui soulignent la diversité des paysages, des animations cartographiques et des rencontres avec des citoyens engagés, la série ausculte six thématiques cruciales pour le futur. Entre décryptage des enjeux et inventaire des réponses envisagées, un vivifiant tour de l’Europe des possibles.
Certains pays, comme la Suède avec Spotify, et l’Estonie, à la pointe de la sécurisation des services informatiques, ouvrent la voie à de nouvelles possibilités.
Devancée par la Chine et les États-Unis, l’Europe apparaît à la traîne dans le domaine du numérique. Fake news, emplois précaires, vol de données : l’hégémonie des géants américains n’est pas sans conséquences. Pourtant,
Mutations
Du Portugal aux États baltes, de la Norvège aux Balkans, cette coproduction européenne, fruit du "Grand accord documentaire" d’ARTE, arpente un continent à la croisée des chemins, plus interconnecté qu’on ne le croit. À travers des vues aériennes inédites, qui soulignent la diversité des paysages, des animations cartographiques et des rencontres avec des citoyens engagés, la série ausculte six thématiques cruciales pour le futur. Entre décryptage des enjeux et inventaire des réponses envisagées, un vivifiant tour de l’Europe des possibles.
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00:00 C'est difficile pour moi d'expliquer à des Allemands la beauté de la digitalisation,
00:12 parce qu'ils n'ont pas encore découvert tous les avantages qu'elle procure.
00:14 Je trouve ça absolument crucial.
00:17 La digitalisation est là.
00:20 Elle va progresser, mais c'est maintenant que nous, les démocraties, nous pouvons dire
00:25 « c'est nous qui allons fixer la direction ».
00:30 Les entreprises sont opaques, on ne sait pas qui est responsable.
00:34 Nous ne sommes pas des esclaves, nous sommes des travailleurs.
00:39 Ce dont l'Europe a besoin maintenant, c'est de ne pas rester prise en sandwich entre les
00:47 États-Unis d'un côté et la Chine de l'autre, ce qui en fait une véritable colonie numérique.
00:52 L'Europe est à la croisée des chemins.
00:58 Notre continent est confronté au plus grand défi qu'il a connu depuis la Seconde Guerre
01:05 mondiale.
01:06 Les réponses que nous apporterons à ces questions urgentes seront décisives pour l'avenir
01:11 des prochaines générations.
01:12 Cette série part à la rencontre de celles et ceux qui préparent ce futur, bouleverse
01:19 nos modes de vie et transforme nos paysages.
01:21 Elle raconte un continent en pleine transformation, plus interconnecté que nous le pensons.
01:27 Notre quotidien évolue à grande vitesse.
01:41 Se parler, se voir, sortir, se diriger, travailler, notre vie entière est bouleversée par la
01:50 révolution numérique.
01:52 Cette transformation s'est encore accélérée avec la crise du Covid.
01:55 Aujourd'hui, l'économie digitale croît sept fois plus vite que le reste de l'économie.
02:02 Les opportunités y semblent infinies.
02:04 Mais ne sous-estimons pas nos limites.
02:07 Dans le monde digital, notre continent est à la traîne.
02:11 Aucun géant du web n'a vu le jour en Europe.
02:14 Saurons-nous rattraper notre retard et prendre en main notre avenir numérique ?
02:19 C'est après une séparation, du coup je me suis dit, bon j'essaye.
02:40 Tout d'un coup, il y a toutes les questions qui arrivent.
02:42 Qu'est-ce que je montre ?
02:43 Comment moi je me présente ?
02:44 Et qu'est-ce que j'ai envie de faire passer ?
02:46 Donc ça c'était hyper difficile de créer ce profil.
02:50 La ville était nouvelle pour moi.
02:54 Je voulais rencontrer de nouvelles personnes et je suis trop timide pour aller dans un
02:57 bar et diriger en "bonjour, c'est moi, comment vas-tu ?"
03:01 J'avais des amis qui voulaient que j'essaye de rebondir un peu après une relation, une
03:07 fin de relation un peu difficile.
03:09 Pour tout et n'importe quoi, nous cliquons, swipons, tapotons sur nos smartphones.
03:16 De plus en plus, les applis organisent notre quotidien et même jusqu'à notre vie intime.
03:22 Un Européen sur dix utilise au moins une appli de rencontre.
03:26 La partie chouette des applications, c'est effectivement de rencontrer des gens qui
03:32 sont hors de mon cercle, amicals.
03:34 Et il y a des fois, c'est le clash d'arriver, de voir la personne et de se dire "ah ben
03:40 non, c'est pas possible".
03:42 On y trouve toutes sortes de personnes.
03:47 Des gens qui cherchent un coup d'un soir, d'autres qui cherchent un ou une troisième
03:51 partenaire pour eux-mêmes et leur petite amie.
03:54 On trouve vraiment de tout.
03:57 Le fait de pouvoir de manière cachée derrière son écran d'ordinateur accéder à des
04:06 centaines voire des milliers de profils de jeunes femmes potentiellement intéressées,
04:12 il y a un côté presque surréaliste.
04:16 Ça me rappelle les machines à sous avec ces images qui tournent et t'envoient un
04:22 message quand tu as une combinaison gagnante.
04:25 Ça correspond à notre désir de sexe et de relations intimes tout en restant à l'affût
04:29 de tout ce qu'il y a autour.
04:31 Et ça peut être très addictif, je pense.
04:38 Je pense que ça a profondément affecté la culture de la communauté gay.
04:43 Je me rappelle quand Grindr a introduit sa technologie de géolocalisation.
04:47 Vous allumez votre téléphone et vous voyez dans un rayon de 100 mètres où ça se trouve
04:55 où se trouvent précisément tous les hommes gays que vous pouvez potentiellement rencontrer.
04:59 C'était un concept tout à fait nouveau et passionnant.
05:03 Avec Julia, les choses que j'avais un peu ressenties dans nos échanges de messages
05:12 se transformaient aussi dans la réalité.
05:14 J'ai senti tout de suite qu'il y avait une vraie alchimie.
05:16 Je pense que j'ai aimé la façon dont tu écrivais et répondais.
05:23 C'était assez léger et facile.
05:25 Mais c'était des heures de travail.
05:27 Nous n'aurions probablement pas pu nous rencontrer sans l'application.
05:33 Comment avez-vous décidé de quitter l'application après votre rencontre ?
05:38 Nous avons décidé que nous serions exclusifs.
05:41 Et à un moment donné, un soir, je crois, on s'est dit on ne l'a pas utilisé depuis
05:46 genre un mois ou quelque chose comme ça, donc supprimons-la.
05:48 Et c'était terminé.
05:50 Mais nous avons décidé de faire des captures d'écran.
05:54 C'est vrai.
05:55 Parce que si on les efface, elles restent sans doute quelque part sur un serveur auquel
06:02 on n'a pas accès.
06:03 Et donc, nous avons décidé de faire des captures d'écran de tous les messages que
06:09 nous nous étions envoyés avant de nous rencontrer physiquement.
06:12 C'est un peu de notre histoire.
06:15 Connaissez-vous vos droits en matière de données personnelles ?
06:19 Absolument pas de mon côté.
06:22 Non, pas du tout.
06:24 Et vous ?
06:25 Absolument pas.
06:26 Et vous ?
06:27 Je ne sais pas non plus.
06:28 Ok.
06:29 Une des choses que vous devez savoir, c'est que vous pouvez demander vos données à
06:33 une plateforme, comme Tinder ou OkCupid.
06:36 Même si on a supprimé l'application ?
06:38 Même si vous l'effacez, elle les garde un certain temps.
06:42 Il y a plusieurs problèmes liés à la protection des données personnelles dans les applications
06:48 des rencontres.
06:49 Par exemple, aucune application ou très peu vérifie l'identité d'une personne.
06:54 Donc, on s'expose à des inconnus.
06:56 On donne beaucoup d'informations sensibles sans savoir qui est de l'autre côté de
07:01 la machine.
07:02 Il m'est déjà arrivé qu'une des photos que j'avais partagées avec quelqu'un
07:07 me revienne par l'intermédiaire de quelqu'un d'autre.
07:09 Et j'ai dit à cette personne « en fait, c'est une photo de moi.
07:13 Je ne suis pas identifiable, mais je sais que j'avais pris la photo.
07:16 » Je pense donc que les enjeux de vie privée sont une question très importante.
07:19 Je garde mon visage séparé de mon matériel sexuellement explicite, au cas où quelqu'un
07:24 le mettrait sur un blog et où ça resterait visible pour toujours.
07:27 Les applications des rencontres sont devenues un lieu où on peut collecter des données
07:33 sensibles et qu'on ne retrouve pas ailleurs, comme le statut VIH, l'orientation sexuelle.
07:39 Ces informations sont vendues à des tiers et aujourd'hui on n'a pas de visibilité
07:44 sur où sont stockées et comment sont gérées ces données.
07:48 Les données sont le carburant des réseaux digitaux.
07:54 Sans elles, rien ne marche.
07:57 Mais ensuite, que deviennent-elles ? Elles ne flottent pas dans l'air.
08:05 Elles circulent via des câbles sous-marins.
08:12 Environ 450 de ces câbles traversent les océans.
08:19 Ces autoroutes numériques relient l'Europe aux États-Unis avant tout, et aussi au reste
08:24 du monde.
08:25 C'est ainsi que circulent nos likes, nos posts, nos achats.
08:29 Toutes ces données et métadonnées sont distribuées par des points d'échange Internet,
08:37 puis stockées dans des milliers de data centers comme celui-ci.
08:40 Ce qui nous paraît léger et quasiment invisible repose en fait sur de gigantesques infrastructures.
08:49 On dit Internet et on pense que c'est un grand réseau, mais en réalité il y a 55
08:56 000 réseaux différents.
08:58 C'est pourquoi on a intégré les échangeurs Internet dans ce concept global de l'Internet
09:08 pour permettre de relier ces nombreuses intersections.
09:11 L'un des principaux points d'échange Internet d'Europe, appelé DECIX, se trouve à Francfort-sur-le-Main,
09:18 dans l'un de ces data centers hautement sécurisés.
09:20 Nous n'avons pas d'ordinateur, mais nous avons des commutateurs.
09:32 Nous organisons l'accès d'un réseau à un autre.
09:35 Le processus est bien sûr entièrement automatisé et extrêmement rapide.
09:43 Nous devons considérer ces échangeurs Internet comme des points d'échange internationaux.
09:50 C'est-à-dire qu'il s'agit de trafic international.
09:55 Si quelqu'un veut envoyer un e-mail d'Italie vers la Russie, il l'enverra probablement
10:02 d'Italie vers le DECIX.
10:04 Et de là, un fournisseur d'accès russe va le récupérer et le transmettre à Vladivostok
10:10 ou ailleurs en Russie.
10:11 C'est un réseau stupéfiant, en perpétuel développement.
10:17 Le socle de toutes nos activités dans le monde numérique.
10:21 Mais l'Europe a un problème.
10:25 La plupart des données sont enregistrées et traitées par des groupes technologiques
10:30 américains et chinois.
10:31 Pour utiliser leurs services, il faut consentir à la collecte de nos données et en laissant
10:37 d'en, nous en perdons le contrôle.
10:38 Les grands groupes peuvent en faire pratiquement ce qu'ils veulent.
10:42 A partir de ce que nous faisons, consommons, pensons, ils peuvent créer des profils virtuels
10:53 pour chacun d'entre nous.
10:54 Et après nous avoir ainsi passé au crible, ils peuvent anticiper et influencer nos décisions
11:02 et même nos opinions politiques.
11:04 Cela s'appelle du micro-ciblage et c'est parfaitement courant.
11:07 Les groupes technologiques font tout pour que nous nous croyions en sécurité quand
11:13 nous naviguons sur le net.
11:14 En réalité, c'est le Far West, la loi du plus fort, avec des effets déstabilisateurs
11:22 parfois massifs.
11:23 Je n'oublierai jamais la première fois où l'un de mes articles a marché, comme
11:34 on dit, c'est-à-dire qu'il a eu un grand nombre de partages et de likes.
11:39 Le titre devait être incroyable.
11:42 Cette plante peut tout guérir, confirmé par les médecins ou quelque chose de ce genre.
11:47 Pour 24 heures, j'ai gagné environ 4500 euros.
11:52 Je me suis dit, je pourrais faire ça toute ma vie.
11:56 Fake news, hoax et autres cybermanipulations, ces fléaux ont envahi le net.
12:05 Dans les Balkans, la Macédoine du Nord est devenue une plaque tournante des adeptes du
12:10 clickbait, sorte de démarchage virtuel.
12:12 Faute de perspectives professionnelles, de jeunes webdesigners bien formés créent de
12:20 toutes pièces de faux contenus web.
12:22 C'est le nombre de clics qui paye.
12:24 Une demi-heure de travail par jour me permet de gagner dix fois le salaire moyen.
12:33 Il y a une histoire intéressante, une blague au départ.
12:41 Un article selon lequel la fille d'Obama s'était fait renverser par une voiture.
12:45 L'article est devenu viral.
12:50 C'est à ce moment-là que nous avons réalisé qu'on pouvait faire plus que publier des
12:59 informations totalement non contrôlées et non vérifiées sur la santé et la beauté.
13:05 Et donc on a commencé à vendre des créneaux pour des messages.
13:09 On ne vérifiait pas de quoi parlaient les messages.
13:14 Si on nous payait, on partageait n'importe quel message sur les réseaux.
13:19 C'est surtout sur le marché américain que ces jeunes macédoniens gagnent de l'argent.
13:24 En partageant de fausses nouvelles sur des pages Facebook et Google, ils ont même réussi
13:29 à influer sur l'élection présidentielle de 2016 aux Etats-Unis.
13:34 La rhétorique dans beaucoup de ces messages était pro-républicaine.
13:38 Grâce à l'effet réseau, nous pouvions les partager avec une multitude de gens.
13:44 Du coup, nous avons indirectement influencé les résultats des élections en 2016, quand
13:52 Trump a été élu président des Etats-Unis.
13:56 Google et Facebook étaient soumis à une énorme pression, surtout du fait de l'administration
14:04 américaine.
14:05 Ils étaient au courant pour la propagande sur les réseaux sociaux.
14:09 Mais ils ne nous ont pas stoppés pour autant.
14:12 Pourquoi ne l'ont-ils pas fait ? C'est curieux.
14:15 Il suffisait de débrancher la prise.
14:17 Après l'élection de Trump, je pense qu'il leur a fallu près de sept mois avant de fermer
14:26 toutes nos pages, nos comptes publicitaires, etc.
14:29 Et je suis d'accord avec eux.
14:36 Voici Vélez.
14:39 La ville a acquis le triste surnom de capitale mondiale des fake news.
14:46 Les fake news ont déstabilisé la démocratie américaine, mais elles ont aussi joué un
14:51 rôle dans le Brexit et, à moindre échelle, dans les présidentielles françaises de 2017.
14:56 Jusqu'ici, les États ont peiné à trouver des parades.
15:03 D'autant que des sociétés comme Facebook agissent comme des États indépendants, avec
15:08 leurs propres lois.
15:09 Il existe de nombreux réseaux sociaux.
15:14 Mais la suprématie mondiale de Facebook, aujourd'hui méta, est écrasante.
15:19 Côté commerce électronique, Amazon écrase sans pitié la concurrence.
15:25 Cette hégémonie se retrouve dans presque tous les secteurs du numérique.
15:30 L'infrastructure digitale du 21e siècle a été bâtie par une poignée de sociétés
15:36 américaines.
15:37 L'Europe restera-t-elle à jamais dépendante de ces géants ?
15:39 La Commission a décidé d'infliger à Google une amende de 2,4 milliards d'euros.
15:51 L'Union européenne a infligé à Google une amende record de 5 milliards de dollars.
15:59 2015, l'Union européenne déclare la guerre au monopole de certains géants du numérique.
16:04 C'est la première institution publique au monde à s'y résoudre.
16:07 Afin de rétablir une concurrence loyale, Apple doit jusqu'à 13 milliards d'euros
16:15 de taxes impayées.
16:16 Objectif de l'Union européenne, encadrer les acteurs hégémoniques du marché, les
16:22 obliger à lutter contre les fake news et rendre aux citoyens le contrôle sur leurs
16:26 données.
16:27 Ce qui se passe en ce moment, c'est que la démocratie reprend le contrôle sur des éléments
16:33 fondamentaux.
16:34 Pendant très longtemps, des décisions essentielles ont été prises à huis clos dans des conseils
16:42 d'administration et pas dans notre démocratie.
16:45 L'objectif n'est pas de nier l'aspect commercial des technologies, mais de rappeler
16:51 qu'il est 100% légitime que ce soit nos représentants élus qui décident de l'orientation
16:57 de nos sociétés.
16:58 Les géants du web n'ont pas dit leur dernier mot.
17:05 A Bruxelles, leur lobby est énorme et puissant.
17:09 Chaque année, ils dépensent près de 100 millions d'euros pour infléchir les décisions
17:14 politiques dans leur sens.
17:15 L'Union européenne prépare actuellement deux paquets législatifs historiques.
17:22 Une fois adoptés, ils permettront de lutter plus efficacement contre les contenus illégaux.
17:29 Et les entreprises devront se montrer plus transparentes sur leurs algorithmes internes.
17:34 Mais ce n'est pas tout.
17:36 Nous sommes en train de préparer une législation sur les marchés numériques qui obligera
17:47 ceux qui détiennent un pouvoir significatif sur le marché à le restreindre dans une
17:51 certaine mesure.
17:52 Pour l'instant, nous avons un dossier Amazon qui porte précisément là-dessus.
17:56 Vous êtes un petit commerçant sur Amazon Marketplace.
18:00 Il est vraiment difficile pour vous d'obtenir vos propres données, de connaître ce que
18:04 vos propres clients aiment, mais Amazon Retail, la branche vente au détail, elle obtient
18:08 toutes ces informations.
18:09 Elle sait ce que vous vendez et peut ainsi mieux vous concurrencer.
18:12 Donc, ce genre de choses apparemment très simples, le fait de pouvoir obtenir ses propres
18:18 données, devrait être une conséquence positive de ce que nous mettons en place.
18:21 Les amendes et les directives suffiront-elles ?
18:25 Regardons qui contrôle au niveau mondial les entreprises des technologies de l'information
18:31 et les infrastructures européennes.
18:32 Mauvaise nouvelle.
18:35 Aujourd'hui, 75% du capital des plateformes numériques sont détenus par des entreprises
18:41 américaines, 20% par des Chinois et à peine 4% par des Européens.
18:47 C'est un grave problème pour notre continent.
18:50 Pourquoi l'Europe n'a-t-elle rien produit de comparable à Google ou Microsoft ?
18:54 Je pense que la raison pour laquelle l'Europe n'a pas favorisé ces entreprises géantes
19:01 provient d'erreurs que nous avons faites il y a peut-être une décennie.
19:04 Parce que si on veut faire grandir une entreprise, on a besoin d'un grand marché.
19:10 Et si on veut faire grandir une entreprise, on a besoin de beaucoup de capital risque.
19:14 Or, aucun de ces deux éléments n'était présent il y a 10 ans en Europe.
19:19 Alors qu'aux États-Unis, vous aviez un marché unique, numérique, très unifié,
19:27 avec deux langues, l'anglais américain et l'espagnol, et un marché des capitaux
19:34 avec des investisseurs experts en technologie.
19:37 L'Europe a commencé à rattraper son retard.
19:48 Les investissements dans le secteur des start-up affluent, notamment sous l'impulsion de
19:53 la Banque européenne d'investissement.
19:54 Stockholm, la capitale suédoise, pourrait servir de modèle.
20:01 Ici, la scène des start-up et des investisseurs est particulièrement dynamique.
20:05 Ce succès est lié à celui de la plateforme musicale Spotify qui est née ici.
20:10 Sophia Bens faisait partie du noyau dur de l'équipe de Spotify quand l'entreprise
20:18 a percé.
20:19 Quand j'étais chez Spotify, on offrait des bières au bureau le vendredi pour pouvoir
20:25 rencontrer des gens intéressants.
20:26 C'était un peu l'embryon de la scène tech de Stockholm, pour nous en tout cas à cette
20:30 époque.
20:31 Mais il n'y avait ni conférences, ni espaces de rencontres ou de travail partagé, pas
20:37 d'accélérateurs et pas de hub.
20:39 Aujourd'hui, Sophia travaille pour Cherry Ventures, un fonds de capital risque.
20:43 En tant que capital risqueur, vous êtes à l'affût du prochain géant technologique.
20:48 Le fonds pour lequel je travaille investit principalement dans des start-up européennes.
20:53 Quand vous travaillez dans une start-up technologique et que vous voulez vous lancer en Europe,
20:58 c'est un peu un défi.
20:59 Parce que c'est très différent selon que vous déployez un produit en Espagne, en
21:03 Allemagne ou en Norvège.
21:05 Au cours de mes 8 ans chez Spotify, nous nous sommes lancés sur un certain nombre de marchés.
21:11 Nous avons beaucoup appris et j'ai eu l'impression qu'après nous être lancés sur les marchés
21:15 européens, nous avons acquis tant de connaissances.
21:18 Que même si le lancement américain a été un gros morceau coriace, nous étions mieux
21:23 équipés pour le faire.
21:25 Parce que nous avions commencé par l'Europe.
21:28 Quand j'ai rejoint Spotify, j'avais 25 ans.
21:42 Et je n'avais personne avec qui échanger des idées, personne autour de moi qui avait
21:45 un parcours similaire.
21:46 Et ça m'a manqué.
21:48 C'est pour ça que je tiens beaucoup à offrir cela aux créateurs en qui j'investis.
21:52 Je pense qu'une des principales raisons pour lesquelles Spotify a pris tant d'ampleur,
22:03 c'est à cause des fondateurs.
22:04 Ils étaient déterminés à construire une grande entreprise et à ne pas vendre trop
22:08 tôt.
22:09 Et je suis vraiment impressionnée de voir comment leur enthousiasme a donné naissance
22:13 à une énorme entreprise venant d'Europe.
22:15 L'effet que cela a eu sur l'écosystème en général est incroyablement inspirant.
22:21 Il y a constamment des entreprises qui se créent et donc des personnes prêtes à se
22:26 lancer dans de telles aventures.
22:27 Je pense que cela plante le décor et cela montre concrètement que c'est possible.
22:33 Il n'y a plus d'excuses.
22:35 Aujourd'hui, on investit 20 fois plus dans les start-up européennes qu'il y a 10 ans.
22:39 115 milliards de dollars en 2021.
22:41 C'est considérable, mais toujours trois fois moins que les 330 milliards investis
22:45 aux Etats-Unis cette même année.
22:46 Ces enjeux de financement ne sont pas le seul défi.
22:51 Pour accroître son indépendance digitale, l'Europe doit résoudre un autre problème,
22:56 celui des puces électroniques.
22:58 Omniprésentes dans tous nos appareils, elles sont majoritairement importées d'Asie.
23:03 L'Europe produit à peine 10% de ces puces.
23:05 L'histoire fait parfois des détours amusants.
23:11 Ici, à Dresde, l'ex-Allemagne de l'Est a jadis testé ses premiers microprocesseurs.
23:16 Et c'est ici que l'Europe va peut-être réussir à combler son retard.
23:20 En 1961, un institut de microélectronique a été fondé ici, puis une université technique
23:34 spécialisée dans ce domaine, et cela a donné naissance à de nombreuses industries.
23:38 Après les changements politiques de 1989, et grâce à une stratégie économique avisée
23:44 au niveau de la région, ce potentiel a été maintenu et développé.
23:48 Dresde est maintenant le plus grand centre de microélectronique d'Europe.
23:55 On y trouve tout ce qui est nécessaire pour une telle industrie de haute technologie.
24:00 C'est pourquoi on l'appelle la Silicon Saxony, un peu comme la Silicon Valley californienne.
24:08 À Dresde, nous avons environ 70 000 travailleurs spécialisés dans tous les secteurs de la
24:20 microélectronique.
24:21 C'est un immense potentiel auquel nous avons accès.
24:23 La demande explose.
24:28 Mais pour cause de Covid, les difficultés d'approvisionnement frappent l'Europe autant
24:32 que le reste du monde.
24:33 En Asie, il y a eu bien plus de soutien dans ce domaine de la part des gouvernements ces
24:39 dernières années.
24:40 Et en Europe, maintenant, nous sommes en train d'accélérer ce processus.
24:44 Comment faire pour que nous puissions avoir accès à tout moment à ces microprocesseurs,
24:48 et comment faire pour que nous ne dépendions pas uniquement d'autres pays, et aussi des
24:52 moyens de transport lointains ?
24:53 La sécurité des données est un aspect supplémentaire.
24:59 Nous voulons être sûrs que les puces que nous installons sont exactement celles que
25:05 nous voulions, et que ce ne sont pas des puces qui espionnent d'une manière ou d'une autre.
25:10 La révolution digitale place l'économie européenne devant un défi titanesque.
25:18 Les services, marchands et non-marchands, et même les processus de fabrication, sont
25:23 de plus en plus numérisés et interconnectés.
25:25 Mais pour que tout cela fonctionne, il faut que les échanges de données soient absolument
25:30 sécurisés.
25:31 Or, de ce côté, il reste du chemin.
25:33 Francesco Bonfilio est un visionnaire.
25:40 Il dirige GaiaX, l'un des projets les plus audacieux dans le domaine des infrastructures
25:45 digitales.
25:46 Son but ? Développer une infrastructure européenne garantissant la sécurité des
25:51 échanges de données entre divers secteurs industriels et producteurs de contenu.
25:55 Aujourd'hui, GaiaX relie déjà 14 centres nationaux et 324 des principales entreprises
26:04 du continent.
26:05 La seule façon d'améliorer nos vies, d'améliorer la façon dont nous voyageons, vivons, étudions
26:14 et travaillons, c'est de partager les données et de les partager en autant d'acteurs que
26:18 possible.
26:19 Mais nous devons le faire en toute sécurité.
26:23 Et nous devons disposer de lieux où nous pouvons stocker nos données en toute confiance,
26:29 exactement comme les banques où nous déposons notre argent.
26:31 GaiaX encourage une approche fédérative, coopérative, en connectant les nombreuses
26:37 ressources déjà présentes en Europe, mais qui seules ne seraient pas en mesure de résister
26:42 aux grands monopoles numériques que nous voyons se développer actuellement dans le
26:46 monde.
26:47 Nous sommes en train de développer un logiciel qui pourra connecter les ordinateurs, les
26:55 centres de données et les clouds informatiques actuels.
26:57 Ce logiciel fonctionnera à partir d'infrastructures préexistantes.
27:01 Il garantira l'identité de ceux qui voudront accéder aux données, tout en définissant
27:07 les règles pour y avoir accès.
27:08 Avec lui, nous allons pouvoir reprendre le contrôle de nos données.
27:14 Pour comprendre l'enjeu de cette sécurisation de nos données, regardons le secteur du
27:19 tourisme.
27:20 Imaginons une personne qui voyage dans différents pays avec différents moyens de transport.
27:24 A l'avenir, elle pourra payer, s'enregistrer et s'identifier une seule fois pour tout
27:30 son voyage.
27:31 Les agences de voyage, compagnies aériennes et autorités de contrôle aux frontières
27:35 utiliseront une seule et même plateforme.
27:37 Mais pour rendre cela possible, la personne doit permettre l'accès à ces données dès
27:42 le début du voyage.
27:43 Des données qui auront été sécurisées grâce à la technologie blockchain utilisée
27:48 par GaiaX.
27:49 De quoi garantir la traçabilité pour chaque accès et chaque modification.
27:53 Cela signifie que lorsque vous et moi utiliserons un service GaiaX, où il est écrit que ce
28:00 service est sécurisé et où il est écrit que ces données ne peuvent être utilisées
28:04 que par vous ou d'autres personnes définies par vous, vous pouvez être certain que le
28:11 service fonctionnera effectivement de cette manière.
28:14 J'appelle ça la régulation par l'automatisation.
28:17 C'est une grande révolution.
28:19 C'est une grande révolution parce que c'est une sorte de démocratie numérique que nous
28:24 créons dans un monde qui jusqu'ici était dérèglementé.
28:26 Cela donnera à l'Europe la possibilité, pour une fois, d'être la première dans le
28:34 domaine de la transformation numérique.
28:36 Et cela donnera également aux entreprises européennes l'opportunité de faire naître
28:40 une nouvelle économie et de récupérer une part du marché qui se développe aujourd'hui
28:44 hors de l'Europe.
28:45 L'économie numérique européenne ne peut pas encore rivaliser avec celle des Etats-Unis
28:53 et de la Chine.
28:54 D'après l'Union européenne, pour devenir compétitif, il nous faudrait investir 1250
29:01 milliards d'euros dans la transformation digitale en 10 ans.
29:04 Jusqu'ici, le Fonds de relance de l'Union européenne n'a prévu qu'un dixième de
29:11 cette somme.
29:12 Pourtant, certaines régions européennes ont pris une nette avance.
29:18 En matière de numérisation, aucun pays au monde n'est plus avancé que l'Estonie.
29:24 Pourquoi la transformation a-t-elle si bien fonctionné ici, à la pointe nord-est de
29:30 l'Union européenne ? En quoi ce pays balte avec ses 1,3 millions d'habitants est-il
29:35 si différent ?
29:36 Le but de cette initiative, c'est de supprimer chez les filles la peur de la technologie,
29:46 de la physique, de la chimie et des mathématiques.
29:50 On nous a suggéré d'inclure les garçons à partir de l'automne.
29:58 Levez la main si vous voulez que les garçons nous rejoignent.
30:03 Levez la main si vous ne voulez pas que les garçons se joignent à nous.
30:08 C'est ma fille, elle est la raison pour laquelle cet événement a lieu et pour laquelle partout
30:15 en Estonie, les filles dans les écoles étudient la technologie.
30:18 Elle est aussi l'une des instructrices, car ici, les enfants plus âgés apprennent
30:26 aux autres.
30:27 Pendant 5 ans, Tavi Kotka a été directeur des services d'information du gouvernement
30:42 estonien.
30:43 C'est aussi un entrepreneur actif dans le numérique.
30:46 Cette alliance entre privé et public est typique de l'Estonie.
30:52 J'aime faire de grandes choses, c'est vrai.
31:03 C'est pour ça que je suis devenu responsable pour le numérique du gouvernement.
31:07 Si vous êtes un haut fonctionnaire gouvernemental, l'influence que vous avez sur la société
31:12 est bien plus grande que celle d'un PDG de, disons, chez Deutsche Telekom ou d'une
31:17 grande banque ou quelque chose comme ça.
31:18 Quand je pense à combien j'ai obtenu de l'Union européenne pour l'Estonie et
31:25 le secteur des technologies de l'information, ou au changement que nous avons provoqué
31:29 avec la résidence numérique et d'autres choses comme ça, ce n'était pas un one-man
31:33 show, c'était toujours un travail d'équipe.
31:37 Exemple particulièrement réussi de cette transformation digitale, le système de santé
31:43 estonien.
31:44 Ici, les hôpitaux, le personnel médical et les laboratoires sont tous connectés les
31:48 uns aux autres.
31:49 La possibilité de communiquer au sein du système médical estonien est très utile.
31:56 L'accès précoce à ces informations nous permet de mieux traiter les patients.
32:01 L'ambulance en est un bon exemple.
32:03 Nous avons une e-ambulance, ce qui signifie que l'ambulance n'utilise pas de tableau
32:12 papier, mais un iPad.
32:14 Si nous connaissons déjà le code d'identification du patient, alors, avant même que l'ambulance
32:20 n'arrive chez lui, on a accès à ses antécédents médicaux.
32:23 Nous pouvons voir ses maladies, ses prescriptions, s'il est vacciné.
32:30 L'hôpital est immédiatement informé de l'arrivée d'un patient et peut s'y préparer
32:35 à l'avance.
32:36 La protection des données médicales est un enjeu fondamental si on veut garder le contrôle
32:44 de sa vie privée.
32:45 En Estonie, les règles en matière de santé sont très claires.
32:49 Voici mon carnet de santé.
32:55 Ici, je peux voir les noms de tous les médecins et infirmières qui ont consulté mes données.
33:03 Si je vois un nom que je ne reconnais pas, je peux porter plainte et demander pourquoi
33:09 ils ont consulté mes données.
33:10 S'il n'y a pas d'explication valable, cette personne va en prison.
33:15 C'est aussi simple que ça.
33:17 C'est ainsi qu'on obtient la transparence et que l'on comprend qu'on peut avoir confiance
33:23 dans le fait de confier ces données à d'autres infirmières et médecins.
33:27 Cela signifie que la peur de la numérisation, la peur de perdre le contrôle de ces données,
33:35 cette peur devient injustifiée.
33:37 Alors pourquoi l'Estonie est-elle si avancée en matière de numérisation ? Les raisons
33:46 sont à la fois historiques et géographiques.
33:48 À Londres, je m'occupais de plateformes engagées dans le combat pour la démocratie.
33:57 L'Estonie a souffert quand elle s'est libérée de l'Union soviétique et que nous avons dû
34:02 reconstruire une nouvelle économie.
34:04 Nous voulions être différents de l'Union soviétique.
34:08 Ce qui nous handicap en Estonie, c'est que nous avons beaucoup de terres.
34:15 Nous sommes plus grands que la Suisse ou le Danemark, mais nous ne sommes pas nombreux.
34:19 Nous avons beaucoup de petits villages et de bourgs où il est très difficile d'offrir
34:26 certains services de manière efficace, comme les services bancaires et administratifs.
34:30 Cela créait des problèmes.
34:37 Nous avons réalisé que nous aurions besoin de pousser les gens à utiliser l'Internet
34:41 et les outils numériques.
34:42 Avec Israël, l'Estonie détient aujourd'hui le record mondial de licornes par habitant,
34:49 c'est-à-dire des start-up valorisées à plus d'un milliard de dollars.
34:52 E-Estonia est devenu l'emblème de son économie numérique, qui pèse un quart du PIB du pays.
34:58 Nous sommes au centre de présentation E-Estonie.
35:05 Notre organisation a été créée il y a plus de dix ans.
35:09 Notre objectif principal est de partager la réussite de l'Estonie dans la digitalisation.
35:14 Le centre accueille environ 11 000 personnes chaque année.
35:16 Au niveau du secteur public, nous rencontrons principalement des ministres et des présidents.
35:23 Nous aidons les pays à atteindre en matière de numérisation le même niveau que l'Estonie.
35:29 Le principal objectif de l'Estonie est d'être proactive.
35:34 Cela signifie que nous voulons offrir des services aux gens avant même qu'ils n'y
35:38 aient pas de chance.
35:39 Un bon exemple de ce genre de services, ce sont les allocations familiales.
35:48 Quand un bébé naît à l'hôpital, tout est automatique.
35:51 Les parents n'ont pas besoin d'aller chercher l'acte de naissance dans un bureau.
35:55 Après l'enregistrement de la naissance, ils reçoivent automatiquement une notification
35:59 leur demandant leur compte en banque sur lequel les allocations seront transférées.
36:03 Tous les services sont en ligne, qu'il s'agisse de soins de santé, d'éducation,
36:13 de finances, peu importe.
36:15 L'Estonie ne pourra jamais revenir aux papiers.
36:20 C'est impossible.
36:21 Les systèmes ne fonctionnent plus de cette façon.
36:23 C'est pourquoi nous avons créé des ambassades de données, localisées en dehors du pays.
36:31 Si une cyberattaque massive ou quelque chose de ce genre se produit, nous pourrons relancer
36:36 l'activité depuis l'extérieur de nos frontières.
36:38 Tahavi Kotka parle d'expérience.
36:45 En 2007, l'Estonie a été le premier pays à subir officiellement une cyberattaque de
36:52 la Russie voisine.
36:53 Depuis, l'Etat balte est aux avant-postes de la défense cyber de l'OTAN.
37:00 Avec sa vision d'une société totalement numérisée, le gouvernement va même jusqu'à s'affranchir
37:09 de l'idée de frontière nationale.
37:10 La résidence électronique, c'est comme une citoyenneté numérique.
37:17 Vous pouvez créer une entreprise, vous pouvez la faire tourner ou la fermer.
37:22 Aujourd'hui, nous comptons environ 90 000 e-résidents.
37:27 Nous avons ainsi réussi à ouvrir notre économie à de nombreuses personnes.
37:34 Ce n'est que le début, nous sommes encore en train d'explorer cet univers.
37:39 L'Estonie montre comment la transition digitale de tout un pays peut réussir.
37:45 Ici, engagement privé et public se conjuguent l'un à l'autre pour un bénéfice mutuel.
37:52 Mais il existe d'autres expériences prometteuses sur le continent.
37:57 Notre démocratie digitale n'a jamais été une démocratie Facebook.
38:04 Cliquez ici et la démocratie fonctionnera.
38:08 La ville de Barcelone a lancé un projet radical et porteur d'avenir.
38:13 Ici, les outils numériques sont conçus pour renforcer la démocratie locale.
38:18 Notre idée de la démocratie numérique a toujours été un hybride entre des espaces
38:26 physiques, des quartiers, des régions et une démocratie numérique qui place en son
38:31 centre les droits des personnes, la vie privée des personnes et surtout la capacité d'exercer
38:37 un pouvoir sur les décisions publiques.
38:40 Cela fait longtemps que l'italienne Francesca Bria défend la participation citoyenne.
38:45 En charge des systèmes d'information de la mairie de Barcelone, elle a lancé ce programme
38:50 il y a 6 ans.
38:51 Un jour, mon téléphone a sonné.
38:55 A l'autre bout de la ligne, il y avait Ada Colau qui venait d'être élue maire de Barcelone.
39:01 A Londres, je m'occupais de plateformes qui utilisent la technologie pour développer
39:11 de nouvelles formes de démocratie participative.
39:14 Elle m'a demandé, voulez-vous venir à Barcelone pour y mettre en œuvre les choses que vous
39:20 faites là-bas ? La question de la technologie est une question politique, j'en suis intimement
39:28 convaincue.
39:29 La technologie n'est pas le problème.
39:33 Les questions sont d'abord sociales, elles sont économiques, politiques et aussi écologiques.
39:39 La plus grande expérience que nous ayons faite portait sur la participation démocratique.
39:49 Nous avons créé une plateforme appelée Décidim Barcelona.
39:54 Décidim est une plateforme numérique destinée à faciliter l'engagement des citoyens.
40:03 Elle est conçue pour qu'ils puissent participer numériquement mais aussi être informés
40:10 sur tous les événements sur place.
40:11 Au cours des 4 dernières années, toutes sortes de processus de participation ont été
40:18 créés, plans de mobilité, plans urbanistiques, conception d'espaces publics.
40:25 Cette première expérience nous a permis de décider des priorités de Barcelone à
40:31 partir des besoins réels des habitants.
40:35 Le logement comme droit fondamental pour tous, le développement d'un nouveau modèle
40:43 d'urbanisme appelé Superilla.
40:46 Si les Superillas ont pu voir le jour, c'est grâce aux citoyennes et citoyens engagés
40:53 dans Décidim.
40:55 Ce sont eux qui ont élaboré le nouveau plan de mobilité de la ville.
41:02 Ils ont sélectionné 120 croisements à partir desquels rues et carrefours ont été fermés
41:08 à la circulation, arborés et rendus aux riverains.
41:17 40 000 personnes ont participé à la planification stratégique de l'ensemble de la ville au
41:22 cours des 4 dernières années.
41:24 Environ 70% des propositions des citoyens ont été approuvées et ces propositions
41:28 vont continuer d'évoluer et de faire l'objet d'un suivi.
41:31 On peut donc dire que Décidim a une grande influence sur les politiques de la ville.
41:36 Après que nous ayons créé Décidim ici à Barcelone, il a été immédiatement utilisé
41:41 à Helsinki, en Islande, à Madrid, à Turin, à Milan, à Rome.
41:46 Il y a maintenant plus de 80 villes qui utilisent le Décidim de Barcelone, de nombreux pays
41:51 à travers le monde.
41:52 C'est presque devenu une plateforme européenne de démocratie participative.
41:57 Il y a cette expérience en cours à Barcelone, je pense qu'elle a été bien menée, mais
42:03 ce n'est pas suffisant.
42:04 Nous devons la transformer en un modèle pour une Europe qui ne renonce pas à être
42:09 une alternative aux géants technologiques de la Silicon Valley et à leur autoritarisme
42:14 numérique qui envahit nos vies et qui ne laisse aucune place à la démocratie, à
42:20 l'engagement et aux libertés fondamentales.
42:22 Merci Francesca.
42:29 Jusqu'ici, la numérisation a surtout profité aux grandes zones urbaines.
42:36 Mais elle impacte aussi les régions rurales isolées qu'elle peut connecter aux zones
42:40 de gisements d'emploi.
42:41 C'est en conduisant à travers l'Irlande rurale et en voyant des petites villes qui
42:50 visiblement se détérioraient et les rues principales qui semblaient mortes que je me
42:56 suis demandé comment résoudre ces problèmes.
42:59 Bien avant le Covid, en Irlande, une initiative citoyenne avait décidé de lutter contre
43:04 la désertification des zones rurales.
43:07 Objectif, aider les gens isolés à télétravailler plutôt que de déménager.
43:10 Tracy Keogh est la fondatrice de Grow Remote.
43:14 Grow Remote est une organisation de développement communautaire qui rend le travail à distance
43:19 à la fois visible et accessible.
43:20 Dire « il n'y a pas de travail ici » est une attitude défaitiste.
43:23 Ce que nous devrions dire c'est « il y a des emplois partout » et moi, je suis ici.
43:28 De fait, Grow Remote met en relation des personnes à la recherche d'un emploi et les emplois
43:34 vacants en formant les gens à mieux télétravailler.
43:37 Par travail à distance, nous entendons des emplois indépendants de leur localisation,
43:45 donc pas des emplois freelance, de l'auto-entrepreneuriat, juste de l'emploi.
43:49 Comment ça va Mike ?
43:51 Bonjour, comment vas-tu ?
43:52 T'as trouvé un nouvel emploi ?
43:54 Oui, merci, oui, je suis devenu ingénieur senior.
43:56 Incroyable, c'est génial.
43:58 Oui, je suis assez content.
44:00 J'aurais jamais cru que je serais capable de travailler à distance.
44:04 Donc j'ai juste décidé de postuler selon mes qualifications et voilà.
44:08 Pensez qu'il y a 55 000 emplois vacants aujourd'hui qui pourraient atterrir ici,
44:14 si seulement les gens étaient au courant.
44:16 Nous avons aussi beaucoup de gens qui sont du coin, qui seraient parfaits pour les emplois
44:21 à distance comme le mien.
44:23 Il n'y a aucune raison que les autres ne puissent pas faire exactement comme moi.
44:26 Pas besoin d'aller dans une grande ville pour décrocher un bon travail, c'est possible
44:30 où qu'on soit.
44:31 Oui, c'est l'idée.
44:32 Il y a une statistique en Irlande que le gouvernement utilise.
44:37 Pour chaque emploi créé par nos institutions, on en crée deux dans la communauté, dans
44:42 un café, dans une librairie, et c'est là que nous recommençons à ramener la vie.
44:46 Quand une ville redevient attrayante, il y a plus de revenus disponibles.
44:49 Joanne Ozzie, qui a un poste de direction à la Banque Nationale d'Irlande, est une
44:55 fervente défenseuse de gros remotes et une amie de Tracy.
44:58 Parfois, les gens disent « comment faites-vous pour gérer une équipe à distance ? » « Comment
45:03 pouvez-vous avoir des échanges francs ? » Mais je me sens personnellement bien plus connectée
45:07 avec mon personnel qu'auparavant.
45:08 Je supervise 800 collègues, je leur parle sur Skype, Zoom, Teams, et en fait, je me
45:13 sens plus connectée et c'est juste fantastique.
45:15 Combien de temps supplémentaires passes-tu dans ta communauté locale ?
45:18 Comment ça se passe ? Je passe probablement la plupart de mes soirées
45:22 sur le terrain de football.
45:23 Je suis impliquée dans mon marché fermier local, je participe au groupe de ma communauté
45:27 locale.
45:28 Ça a changé ma vie, complètement changée.
45:30 Il y a deux ans, j'étais probablement assise dans une chambre d'hôtel à Dublin, à travailler
45:34 tard le soir, alors que maintenant, j'ai une vie, ce qui est génial.
45:38 Gros remotes veut aider les gens à avoir un avenir choisi, chez eux, avec des vrais
45:46 contrats de travail.
45:47 De quoi faire rêver les quelques 28 millions d'Européens employés aujourd'hui par des
45:54 plateformes Internet.
45:55 En 2025, il y en aura 15 millions de plus.
46:00 Des emplois souvent précaires, à commencer par la livraison à domicile.
46:04 Auto-entrepreneurs, travailleurs à la tâche, les coursiers n'ont en général que très
46:09 peu de droits et aucune sécurité.
46:11 Nous n'avons pas d'assurance, nous ne sommes pas couverts et il n'y a pas de contrat.
46:18 Donc, fondamentalement, on ne peut pas louer un logement.
46:20 Malgré cette absence de protection sociale, ces travailleurs sans droits livrent quotidiennement
46:26 des milliers de repas.
46:27 Les entreprises sont opaques, on ne sait pas qui est responsable, on ne sait pas qui les
46:35 gère.
46:36 Quand on a des problèmes, on ne sait pas à qui s'adresser.
46:39 Après avoir fui le Nigeria, Osa et Romosele vivent depuis 6 ans en Italie, à Milan.
46:45 Toujours en attente d'un titre de séjour permanent, Osa est l'un des 60 000 livreurs
46:49 à vélo du pays.
46:50 Un de mes amis, Angelo, m'a donné une brochure sur l'organisation d'un mouvement appelé
46:56 "Des droits pour les coursiers".
46:58 Ça m'a vraiment intéressé parce que personne ne parlait de ça.
47:01 Nous n'avions personne pour nous représenter au niveau national et nous avons fait notre
47:08 première manifestation.
47:09 Nous voulons être appelés des travailleurs, pas juste des coursiers.
47:21 Nous avons donc décidé d'utiliser ce moment pour faire comprendre que nous ne sommes pas
47:26 des esclaves mais des travailleurs et que nous méritons certains droits.
47:29 Nous avons créé ce mouvement et nous sommes heureux que tous les Italiens soient venus
47:38 nous soutenir et que nous ayons gagné.
47:40 Pour l'instant, c'est juste Just Eat qui a décidé d'offrir des contrats permanents.
47:48 C'est un début, mais nous voulons plus que ça.
47:51 Je suis un des chanceux qui a obtenu un contrat permanent.
47:55 Mais nous nous battons aussi pour les droits des autres, pas seulement les nôtres.
47:59 Nous nous battons aussi à l'échelle européenne et même mondiale parce que nous avons des
48:07 amis dans différents pays qui vivent la même chose.
48:10 Partout en Europe, les livreurs se mobilisent.
48:14 Soutenus par le Parlement européen, ils veulent être reconnus comme travailleurs à part
48:19 entière, comme en Italie, en Espagne, aux Pays-Bas.
48:23 Clairement, la révolution digitale accentue les inégalités, souvent au détriment des
48:27 plus faibles socialement.
48:28 J'ai la conviction que ça va changer.
48:32 Surtout maintenant que la digitalisation progresse.
48:36 Les choses changent dans la plupart des pays.
48:39 Il y a même des robots qui livrent la nourriture.
48:41 Alors, eh bien, je pense qu'il y aura un changement.
48:48 Il y aura un changement.
48:52 Très bientôt, nous pourrions devenir superflus.
48:55 En Estonie, les startups préparent déjà cet autre avenir.
49:06 Celui où le livreur humain deviendra optionnel.
49:08 Cela n'a rien de futuriste.
49:13 Le robot n'est pas un jouet.
49:15 Nous avons transporté ou accompagné plus d'un million huit cent mille colis.
49:20 L'Europe est importante pour notre développement futur.
49:27 Nous allons bientôt nous lancer dans de nombreuses villes.
49:34 Nous pouvons imaginer à l'avenir un monde divisé en deux.
49:41 Il y aura ceux qui reçoivent des ordres des robots et ceux qui diront aux robots ce qu'ils
49:46 doivent faire.
49:47 Et je comprends que l'ambition des Estoniens est d'être de ceux qui diront aux robots
49:51 ce qu'ils doivent faire et non l'inverse.
49:54 Une étude récente de McKinsey a évalué l'avenir du travail dans l'Union européenne.
50:01 Résultat, l'automatisation pourrait faire disparaître 21 millions d'emplois d'ici 2030.
50:06 En même temps, elle en créerait 23 millions d'autres.
50:09 Des perspectives existent donc, mais pas nécessairement les mêmes pour tout le monde.
50:13 C'est difficile pour moi d'expliquer à un Allemand la beauté de la digitalisation,
50:26 parce qu'il n'a pas encore découvert tous les avantages qu'elle procure.
50:29 À quel point ta vie devient plus simple, le temps que tu gagnes en ne courant plus
50:34 partout en vain, parce que tout est automatisé.
50:36 On peut dire que l'Allemagne ou la Suisse n'ont pas vraiment encore commencé à numériser
50:46 à fond leur pays.
50:47 Mais si nous comparons les systèmes numériques, la capacité à automatiser différents services,
51:01 on voit que l'Europe occidentale a 10 à 15 ans de retard par rapport à la Scandinavie.
51:10 Dans la grande compétition numérique, l'Europe ne rattrapera peut-être pas les États-Unis
51:22 et la Chine.
51:23 Mais son ambition est de faire en sorte que la transformation digitale renforce la souveraineté
51:28 de ses citoyens et leur garantisse la protection de leur vie privée.
51:32 Cela devrait être une mission fondamentale pour les premiers ministres, parce qu'il
51:43 est essentiel qu'en tant qu'humains, nous sachions à quoi nous avons affaire.
51:47 Sinon, nous risquons de n'être que des pions générant des données et non des citoyens
51:54 qui agissent.
51:55 Pour moi, l'essentiel, c'est que les gens se sentent responsabilisés.
52:02 Ce sont mes données, je les ai créées, je les possède, je les contrôle.
52:07 Et aussi que nous, en tant que société, décidions de ce que nous voulons faire de
52:13 la technologie, afin de rester une société d'humains et non une société technologique.
52:20 Le potentiel existe.
52:25 A l'Europe de profiter de la prochaine vague de transformation et renforcer sa compétitivité
52:29 et son indépendance.
52:30 L'avenir numérique est entre nos mains.
52:33 Merci.
52:40 Merci.
52:47 Merci.
52:54 Merci.
53:01 Merci.
53:08 Merci.
53:16 Merci.
53:21 Merci.
53:28 Merci.
53:34 Merci.
53:40 [SILENCE]