Pascal Praud revient pendant deux heures, sans concession, sur tous les sujets qui font l'actualité. Aujourd’hui, le politologue et universitaire Benjamin Morel est invité au micro d'Europe 1 pour apporter son analyse sur la façon dont le Rassemblement national est arrivé en tête des élections européennes ce dimanche 9 juin. Il revient notamment sur la stratification de son électorat.
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Retrouvez "Pascal Praud et vous" sur : http://www.europe1.fr/emissions/pascal-praud-et-vous
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00:00Europe 1, 11h, 13h, Pascal Praud et vous.
00:08À 12h06, Benjamin Morel nous a rejoint, vous le connaissez, il intervient régulièrement.
00:14Vous êtes professeur à l'université, professeur de sciences politiques.
00:18Droit public, sciences politiques.
00:20Et vous n'êtes pas professeur de micro, manifestement.
00:24Non, j'ai quelques problèmes en la matière.
00:26Mais heureusement Géraldine Hamon est là, politologue, maître de conférences en droit public.
00:30Bon, deux ou trois choses que je voulais vous faire écouter.
00:32D'abord, nous sommes le 7 mai 2017 et Emmanuel Macron parle au soir de son élection.
00:37C'est la première fois qu'il est élu.
00:40Et je veux enfin avoir un mot pour ceux qui ont voté aujourd'hui pour Madame Le Pen.
00:48Ne les sifflez pas.
00:51Ils ont exprimé aujourd'hui une colère, un désarroi, parfois des convictions.
01:02Je les respecte.
01:04Mais je ferai tout durant les cinq années qui viennent
01:09pour qu'il n'y ait plus aucune raison de voter pour les extrêmes.
01:18Bon, manifestement, ça n'a pas marché.
01:22Je ne suis pas persuadé que les gens qui ont voté pour Marine Le Pen hier ou pour Jordan Bardella
01:27pensent précisément qu'ils votent pour des extrêmes.
01:30Je pense qu'ils ont le sentiment de voter simplement pour un parti
01:35qui répond à leurs interrogations sur la sécurité, sur l'identité,
01:40sur nombre de choses.
01:43Contre l'wokisme, contre beaucoup d'éléments avec lesquels ils ne se reconnaissent plus en France.
01:55C'est vrai.
01:56Contre l'Europe fédérale, bien sûr.
01:58Contre Macron, bien évidemment.
02:00Contre Madame Van der Leyen.
02:01Contre la bordélisation du pays.
02:03Contre l'immigration incontrôlée.
02:06J'ai l'impression qu'ils ont plus voté bien souvent non
02:09qu'une adhésion à un parti, fût-il le Rassemblement National.
02:16Donc je n'ai pas le sentiment, et je vais poser la question tout de suite à Benjamin Morel,
02:20qu'ils ont voté précisément pour un parti d'extrême droite.
02:25Non, clairement.
02:26C'est aujourd'hui plus tout à fait le sujet,
02:28et quand on parle du Rassemblement National,
02:30on a un parti qui s'inscrit dans ce qu'on appelle les droites populistes au niveau européen.
02:33Ce qui est très intéressant dans la sociologie électorale de ce qui s'est passé hier,
02:36je ne parle pas de la dissolution, mais vraiment du résultat des européennes,
02:39ce n'est pas tant le niveau du RN qui soit à 30, 31, 32, 33 %,
02:43ça n'aurait pas fondamentalement changé la donne,
02:45c'est la diversification de son électorat.
02:47Naguère, l'électorat du Rassemblement National,
02:49était très stratifié sociologiquement,
02:51que ce soit en termes de revenus ou en termes d'âge.
02:53Là, on voit que c'est un parti qui perce dans toutes les catégories.
02:57Diplômés, CSP+, retraités,
02:59qui Naguère était totalement à perdre.
03:01Et comment vous expliquez ça ?
03:02Il y a plusieurs éléments.
03:04D'abord, on voit que ce parti s'est dédiabolisé
03:06et s'est également crédibilisé.
03:08La stratégie de la cravate à l'Assemblée Nationale
03:10fait qu'une partie de l'électorat de droite
03:12pouvait partager un certain nombre de valeurs
03:14sur l'immigration, etc. avec le RN,
03:16mais jugé que ce parti n'était pas en capacité demain
03:18de prendre le pouvoir et de l'assumer réellement.
03:20Aujourd'hui, cette période-là est en partie terminée.
03:22Mais vous ne pensez pas qu'au-delà de tout ça,
03:24c'est surtout parce que ceux qui sont au pouvoir depuis 30 ans
03:28ne répondent pas précisément
03:30aux interrogations que se posent les Français.
03:32C'est-à-dire que les gens,
03:34manifestement, c'est ce que nous disait tout à l'heure
03:36une dame de Brest, elle nous dit
03:38« Brest a changé ».
03:40Vous prenez les enquêtes d'opinion.
03:42On dit que la France se droitise, c'est moins évident.
03:44Quand vous prenez les enquêtes sur l'appartenance politique
03:46des Français, les Français sont paumés.
03:48En grande majorité, droite, gauche.
03:50En revanche, il y a deux points sur lesquels ils sont clairs.
03:52Ils veulent plus de social, et en effet,
03:54sur les sujets identité et migration,
03:56il y a des options plus à droite.
03:58Ça ne veut rien dire, d'ailleurs, à droite.
04:00Être sécuritaire, c'est d'être à droite ?
04:02Ils veulent plus de sécurité ?
04:04Vous traduisez ça en disant...
04:06On est d'accord, Pascal.
04:08La question, c'est
04:10le programme du RN aujourd'hui
04:12parvient à conjuguer les deux.
04:14Vous prenez, par exemple, la droite LR ou Éric Zemmour.
04:16Vous avez une option libérale.
04:18Vous n'allez pas chercher les classes populaires avec ça.
04:20Vous prenez la gauche, il n'y a pas de sujet sur la migration.
04:22L'AFI avait fait faire un sondage par Harris
04:24avant les dernières présidentielles
04:26en ne sondant que ses propositions économiques.
04:28Bilan, 70% des Français étaient d'accord
04:30avec les propositions.
04:32L'AFI est arrivée sur les plateaux en disant
04:3470% des Français sont d'accord avec nous.
04:36Sauf qu'en fait, il n'y avait que les propositions économiques.
04:38La force de Marine Le Pen, c'est qu'elle parle de social
04:40et d'immigration.