Merci à Lionel d’être passé nous voir chez LEGEND ! Lionel Albrieux, lieutenant-colonel des chasseurs Alpins. C’est un ancien du Groupe militaire de haute montagne (GMHM), l'élite militaire en charge du développement des techniques de survie en conditions extrêmes. En 2011 avec son équipe, il a traversé la cordillère de Darwin, au Chili, la dernière terre inconnue de la planète.
Category
✨
PersonnesTranscription
00:00:00On fait 1000 mètres de dénivelé, ça c'est ce que fait un alpiniste pour monter au Mont-Blanc.
00:00:04Nous on l'a fait 18 fois en 30 jours, mais avec en plus 75 kg de matériel, de nourriture et de carburant à transporter.
00:00:1175 kg pour tout le monde ?
00:00:12Pour personne.
00:00:21Non Guillaume, qu'est-ce que tu fais là ?
00:00:23De quoi ? J'ai une nouvelle passion, figure-toi Louis, c'est la peinture, tu vois j'adore ça.
00:00:28Et depuis que je joue à World of Tanks, j'ai une passion pour ces engins mécaniques absolument fabuleux.
00:00:33Et là je fais le mien et je vais le proposer à World of Tanks pour qu'ils l'intègrent dans le jeu.
00:00:39Et tu sais peindre ?
00:00:40Oui, bien sûr, assieds-toi, je vais te montrer, je finis juste un petit bout de canon, tu vas voir.
00:00:44C'est magnifique, il faut avoir un petit peu d'habitude de l'art.
00:00:48Tu visites les musées toi Louis ?
00:00:49J'ai l'œil artistique.
00:00:50Alors regarde, tu vas voir, tu pourrais en voir partout dans les musées.
00:00:59J'ai pas les mots.
00:01:00Bah justement, moi je les sais pour toi, c'est magnifique.
00:01:02C'est catastrophique Guillaume.
00:01:04Bah je vois pas du tout ce qui est mal fait.
00:01:06Je sais pas, tu vois pas une différence là entre les deux images Guillaume ?
00:01:09Ah bah si, y'a pas de soleil, puis là il tire pas, moi il tire.
00:01:12Et puis surtout il est mieux fait, qu'est-ce que je te dise.
00:01:14Y'en a qui est en action, qui bouge, qui vit, comme dans World of Tanks et y'en a un qui bouge pas.
00:01:17Excuse-moi, tu veux que je fasse quoi, que je leur fasse un abonné ?
00:01:19Ah bah non, non, non, pas offrir un abonné, non, ça ça serait une insulte.
00:01:22Non, non, fais ta sponso.
00:01:24Y'a des gens qui seraient très contents de l'avoir Louis.
00:01:26C'est pas parce que tu n'as pas de goût que les gens n'en ont pas.
00:01:28On a des millions de gens qui nous suivent, et y'en a plein qui adorent l'art.
00:01:30Alors toi c'est parce que tu ne visites jamais la Joconde et le Louvre,
00:01:33que tu ne sais pas ce que c'est que l'art.
00:01:35Alors si tu veux je fais la promo et je l'offre après.
00:01:37Voilà, très bien.
00:01:38Alors, je vais vous dire.
00:01:39World of Tanks c'est un jeu de guerre en temps réel.
00:01:41Un jeu d'action mais aussi de stratégie.
00:01:43C'est à vous de planifier vos mouvements, de choisir vos positions
00:01:45et de collaborer en équipe pour remporter la victoire.
00:01:48Vous avez le choix parmi des centaines de modèles de chars
00:01:50et vous pouvez personnaliser leur camouflage.
00:01:52Les graphismes sont super détaillés, ça rend le jeu réaliste.
00:01:54On se croirait vraiment sur un champ de bataille.
00:01:56Le jeu est disponible sur PC et consoles.
00:01:58Et surtout, il est gratuit.
00:01:59Pour commencer à jouer, cliquez sur le lien dans la description.
00:02:01En plus, vous recevrez des bonus en jeu que vous soyez un nouveau joueur
00:02:04ou même si vous revenez sur World of Tanks.
00:02:06Et je vous offre le tableau.
00:02:08En commentaire, vous mettez « tableau »
00:02:10et je l'enverrai à quelqu'un qui sera content d'avoir un objet chez lui,
00:02:13qui a de la valeur.
00:02:16« Tableau » et on commence l'émission.
00:02:18Je ne suis pas d'accord.
00:02:20Bonjour tout le monde et bienvenue sur Légendes.
00:02:22Comme chaque mercredi, vendredi et dimanche,
00:02:24on se retrouve pour une nouvelle vidéo.
00:02:25Aujourd'hui, en interview, on a Lionel,
00:02:27qui est militaire de Haute-Montagne,
00:02:29qui va nous raconter son expédition.
00:02:31Il a emmené un groupe sur la cordillère de Darwin.
00:02:34C'est au sud du Chili et de l'Argentine.
00:02:36C'est une expédition que personne n'avait réussie avant eux,
00:02:39avant les militaires français.
00:02:40C'est les seuls à l'avoir réussie depuis 2011.
00:02:42Personne n'a réussi à la faire.
00:02:44Plus de 250 kilomètres à pied,
00:02:4618 000 mètres de dénivelé.
00:02:48Il va nous raconter tout ça.
00:02:49C'est parti pour l'interview de Lionel.
00:02:52Lieutenant-Colonel Lionel,
00:02:54j'ai traversé avec mes compagnons du groupe militaire de Haute-Montagne
00:02:56la cordillère de Darwin.
00:02:58Une première mondiale qui n'a pas encore été répétée.
00:03:04Voilà, magnifique.
00:03:05Merci Lionel, bienvenue.
00:03:06On se tutoie ?
00:03:08Oui, avec plaisir, oui.
00:03:09OK, comme ça, on est d'accord.
00:03:10Bienvenue, merci.
00:03:11Alors, si vous découvrez l'émission
00:03:12et que vous nous écoutez en podcast audio,
00:03:13sachez que tu es habillé en tri,
00:03:16aujourd'hui, pour ceux qui nous écoutent seulement.
00:03:18Tu es en tri, non pas habituel,
00:03:21ce qu'on a l'habitude de voir, tout vert, etc.
00:03:23Il est blanc, c'est les tris de montagne ?
00:03:25Oui, c'est le tri spécifique des troupes de montagne.
00:03:27Que vous mettez pour les expéditions,
00:03:30mais que tu ne portais pas lors de l'expédition
00:03:32dont tu vas nous parler,
00:03:34l'expédition de Darwin.
00:03:36Sur le fil de Darwin,
00:03:37il y a eu un documentaire qui a été fait,
00:03:39que j'ai eu la chance de voir.
00:03:41C'est assez incroyable,
00:03:43et on te reçoit pour ça, pour que tu nous expliques.
00:03:45C'est une expédition, que vous sachiez,
00:03:47qui n'avait jamais été réussie avant.
00:03:49Ça s'est fait en 2011,
00:03:51et ça n'a jamais été refait depuis,
00:03:53tellement que c'est assez incroyable.
00:03:55On va reparler de ta vie,
00:03:57comme c'est le concept de cette émission,
00:03:58toujours, on part de A à Z,
00:03:59pour comprendre un peu à quel moment
00:04:00et comment tu en es arrivé là.
00:04:02Mais juste, est-ce que tu peux nous redire
00:04:034, 5 chiffres sur l'expédition
00:04:05que tu as faite, pour comprendre un peu ?
00:04:07Alors, si je dois la résumer en chiffres,
00:04:09c'est que c'est une chaîne de montagne,
00:04:11une péninsule,
00:04:13au milieu des flots,
00:04:15qui est sur la grande île de la Terre de Feu,
00:04:17entre le détroit de Magellan
00:04:19et le canal de Beagle,
00:04:21des hauts lieux
00:04:23de la conquête maritime.
00:04:25On est dans les cinquantièmes hurlants,
00:04:27dans les zones où la météo...
00:04:29Il n'y a que des mots qui ne sentent pas la douceur.
00:04:31Mais surtout, ça parle à notre imaginaire collectif.
00:04:33C'est vers le Cap Horn, en gros.
00:04:35C'est à côté du Cap Horn.
00:04:37Et cette chaîne de montagne,
00:04:39elle fait 130 kilomètres à vol d'oiseau.
00:04:41À vol d'oiseau ?
00:04:43À vol d'oiseau. Nous, pour la parcourir,
00:04:45il nous a fallu 30 jours.
00:04:47On a fait 250 kilomètres de traces,
00:04:4918 000 mètres de dénivelé.
00:04:51Attends !
00:04:5318 000 mètres de dénivelé, pour savoir ?
00:04:55Le semi-marathon de Paris, qui a été extrêmement dur,
00:04:57c'était 100 mètres de dénivelé.
00:04:59C'est 500 mètres, à peu près, sur un marathon,
00:05:01je crois, des JO.
00:05:03Vous avez fait 18 000 mètres de dénivelé ?
00:05:05Pour donner une petite comparaison,
00:05:07quand on fait le Mont-Blanc, en ascension,
00:05:09on part du refuge qui est à 3008,
00:05:11pour arriver à 4008, on fait 1000 mètres de dénivelé.
00:05:13Ça, c'est ce que fait un alpiniste pour monter au Mont-Blanc.
00:05:15Nous, on l'a fait 18 fois en 30 jours.
00:05:17C'est presque plus
00:05:19qu'une fois tous les deux jours.
00:05:21Mais avec, en plus, 75 kilos de matériel,
00:05:23de nourriture et de carburant à transporter.
00:05:2575 kilos pour tout le monde ?
00:05:27Par personne.
00:05:29C'est vrai ? C'est pas possible.
00:05:31C'est mon poids, quasiment.
00:05:3375 kilos.
00:05:35Soit on arrivait à le tracter quand les pentes
00:05:37étaient pas trop importantes en une seule fois.
00:05:39Sur une espèce de luge qu'on appelle une pulka.
00:05:41Soit il fallait faire
00:05:43des allers-retours de charges
00:05:45pour porter par charge successive
00:05:47tout ce matériel, toute cette nourriture,
00:05:49tout ce carburant qui nous était indispensable
00:05:51pour être autonome.
00:05:53Le dernier chiffre que je pourrais donner,
00:05:55c'est la vitesse du vent en moyenne
00:05:57est de 80 km heure sur 30 jours.
00:05:59En moyenne ?
00:06:01Il y a des pics à 150.
00:06:03Et puis il y a des journées où on va avoir
00:06:05peut-être 20 km hors de vent,
00:06:07ou des espaces dans la journée, plus précisément,
00:06:09parce que le temps n'est jamais homogène
00:06:11ou continu sur une même journée.
00:06:13Vous le dites, on est dans le documentaire,
00:06:15on va montrer des vidéos, des photos,
00:06:17c'est vraiment génial et on est très fiers
00:06:19qu'Ozy réussisse ça et que ce soit des Français
00:06:21qui l'aient fait. Mais à un moment donné,
00:06:23il y a quelqu'un qui dit dans ton groupe,
00:06:25tu étais le chef de groupe, mais qui dit
00:06:27si je perds cette tente avec un coup de vent,
00:06:29chaque geste peut être vital,
00:06:31chaque erreur, on va en reparler
00:06:33dans deux minutes.
00:06:35Juste avant de reparler de ta vie,
00:06:37pourquoi les autres, là on en parle,
00:06:39ça n'a pas été refait depuis 2011,
00:06:41pourquoi les autres n'ont pas réussi
00:06:43et pourquoi ça n'a pas été fait avant ?
00:06:45Je pense qu'il y a plusieurs facteurs.
00:06:47Le principal, c'est que d'abord,
00:06:49on a fait une très belle communication
00:06:51sur ce qu'on avait fait.
00:06:53Avec notre documentaire,
00:06:55on a montré à quel point c'était
00:06:57et comme il n'y a plus la saveur
00:06:59de faire la première,
00:07:01les gens qui auraient peut-être
00:07:03l'amiac d'y aller, ils se disent
00:07:05allez vivre ça, supporter tout ça
00:07:07avec un risque d'échec potentiel qui reste
00:07:09malgré tout assez élevé, tout ça pour faire
00:07:11seulement la seconde traversée de la Cordillière,
00:07:13je pense que ça joue énormément sur le fait
00:07:15que ça n'a pas été refait.
00:07:17Et pour reprendre ta vie, toi tu es militaire depuis 30 ans,
00:07:19donc chasseur alpin,
00:07:21qu'est-ce que c'est qu'un chasseur alpin ?
00:07:23Je parle à tout le monde ici
00:07:25et aussi à beaucoup de gens qui ne connaissent pas forcément l'armée,
00:07:27qu'est-ce que c'est qu'un chasseur alpin pour comprendre ?
00:07:29Le chasseur alpin, c'est le soldat
00:07:31qui sait combattre en montagne.
00:07:33Et qui par extension,
00:07:35sait combattre à la fois en montagne mais aussi dans les milieux froids.
00:07:37La montagne,
00:07:39c'est aussi très froid l'hiver
00:07:41et on a à peu près tous les savoir-faire pour pouvoir se débrouiller
00:07:43si on va en zone polaire par exemple.
00:07:45Ou alors ça peut être dans un pays
00:07:47pendant qu'il neige très fort,
00:07:49dans certains pays très très froid.
00:07:51Alors bien sûr, ça peut être...
00:07:53Et alors ça peut être aussi de la montagne
00:07:55dans des pays chauds.
00:07:57C'est-à-dire que les chasseurs alpins, ils savent à la fois combattre
00:07:59sur les latitudes nord ou sud
00:08:01très très hautes,
00:08:03là où il fait très très froid,
00:08:05mais ils savent aussi combattre dans, je ne sais pas,
00:08:07dans les pays chauds d'Afrique,
00:08:09en Afghanistan par exemple.
00:08:11En Afghanistan par exemple,
00:08:13où il y a des montagnes.
00:08:15Pas beaucoup de gens le savent, mais il y a des grosses montagnes, il y a de la neige.
00:08:17Mais même par exemple en Arabie Saoudite,
00:08:19en ce moment il y a de la neige, il y a plein d'endroits
00:08:21qu'on n'imagine pas, où il y a des montagnes, etc.
00:08:23Donc ça, vous auriez les compétences,
00:08:25en gros, si jamais un jour il y avait un conflit pour aller vous battre là-bas.
00:08:27On a à la fois les compétences,
00:08:29mais on s'entraîne déjà dans ces pays-là, et souvent avec les parties
00:08:31des pays partenaires.
00:08:33Que ce soit aux Jordanies, aux Émirats Arabes Unis,
00:08:35aujourd'hui, on s'entraîne
00:08:37dans ces milieux-là.
00:08:39Dans les zones froides. T'aimes ça le froid ?
00:08:41Ah oui, j'aime ça.
00:08:43C'est vrai, j'ai mis la clim un peu frais.
00:08:45Mais pour de vrai, je mets toujours très froid.
00:08:47Alors j'aime pas avoir froid, mais le milieu froid
00:08:49est un milieu hyper agréable,
00:08:51et qui est beau
00:08:53pour plein de raisons, d'abord,
00:08:55parce qu'il y a des paysages
00:08:57qui sont très uniformes,
00:08:59et il y a peu de choses qui gâchent la vue,
00:09:01et puis surtout, le froid, c'est aussi
00:09:03le silence, et c'est quelque chose que j'aime.
00:09:05À la montagne ?
00:09:07Là, tu vas nous reparler,
00:09:09mais tu es à Chamonix, aujourd'hui.
00:09:11Tu as passé toute ta vie à la montagne,
00:09:13entouré vraiment de neige, etc.
00:09:15T'as une plénitude que tu trouves
00:09:17nulle part ailleurs, dans la montagne,
00:09:19où il y a encore la nature ?
00:09:21Déjà, chez nous, il y a une plénitude dans la montagne,
00:09:23surtout en hiver, quand il n'y a pas grand monde.
00:09:25Mais par exemple, si on va dans les déserts froids,
00:09:27c'est encore augmenté,
00:09:29parce qu'il n'y a pas de bruit,
00:09:31même pas de bruit de vie.
00:09:33On n'entend pas les oiseaux,
00:09:35c'est très très calme, très plat.
00:09:37C'est particulier.
00:09:39Tu aimes le calme.
00:09:41En 2004, tu rejoins le groupe militaire
00:09:43de Haute-Montagne, le GMHM.
00:09:45Qu'est-ce que c'est ?
00:09:47Le groupe militaire de Haute-Montagne,
00:09:49c'est un laboratoire,
00:09:51de l'armée.
00:09:53C'est un laboratoire qui est composé
00:09:55de 10 militaires,
00:09:57qui pratiquent l'alpinisme d'une forme
00:09:59un peu particulière, on pourrait appeler ça
00:10:01de l'alpinisme de haut niveau.
00:10:03Leur mission, c'est clairement d'aller explorer
00:10:05les conditions climatiques terrestres
00:10:07les plus difficiles,
00:10:09pour en tirer des savoir-faire, développer des matériels
00:10:11qui sont adaptés, de façon à les transmettre
00:10:13aux militaires, et d'augmenter ainsi la capacité
00:10:15de l'armée à aller opérer dans ces milieux.
00:10:17Vous n'êtes que 10 ?
00:10:19On n'est que 10.
00:10:21C'est de la niche de niche.
00:10:23C'est les mêmes qui sont restés depuis des années ?
00:10:25Il y a un roulement.
00:10:27Globalement, la durée de vie
00:10:29de passage d'un alpiniste,
00:10:31c'est de l'ordre d'une dizaine d'années.
00:10:33Il y a des cas exceptionnels
00:10:35de gens qui ont fait presque 20 ans au groupe.
00:10:37Mais en règle générale,
00:10:39quand quelqu'un fait vraiment l'affaire
00:10:41dans l'unité,
00:10:43il reste 10 ans.
00:10:45À 16 ans, avec ton père,
00:10:47tu fais la traversée de la Meige,
00:10:49M-E-I-G-E, dans les Hautes-Alpes.
00:10:51Qu'est-ce que c'est que la Meige ?
00:10:53La Meige, c'est un des plus beaux sommets
00:10:55des Hautes-Alpes.
00:10:59C'est une montagne qui atteint presque
00:11:01les 4000 mètres, mais pas tout à fait,
00:11:03et surtout qui est emblématique de la région,
00:11:05parce qu'à la fois elle est très belle,
00:11:07et c'est aussi une course très recherchée par les alpinistes,
00:11:09parce qu'elle combine la difficulté
00:11:11et l'esthétisme.
00:11:13Tu vas partir avec ton père,
00:11:15vous le faites à deux,
00:11:17et tout ne va pas bien se passer.
00:11:19Vous allez être pris dans un éboulement.
00:11:21Est-ce que tu peux raconter
00:11:23ce qui se passe ?
00:11:25Dans cette course, à un moment très tôt,
00:11:27on doit franchir une grande muraille rocheuse.
00:11:29Au sommet de cette muraille,
00:11:31il y a un glacier suspendu.
00:11:33Ce jour-là,
00:11:35il y a des énormes rochers
00:11:37qui ont descendu,
00:11:39et qui ont balayé
00:11:41toute la face rocheuse.
00:11:43À ce moment-là,
00:11:45j'étais là.
00:11:47C'est une pluie de météorites
00:11:49qui nous tombe dessus.
00:11:51C'est forcément
00:11:53un moment très angoissant, qui fait peur.
00:11:55Une fois,
00:11:57ça a duré quelques secondes,
00:11:59tous les gens qui étaient engagés
00:12:01dans la course ce jour-là et dans cette muraille
00:12:03décident de faire demi-tour,
00:12:05les cordées d'amateurs,
00:12:07dont fait partie mon père.
00:12:09Je me dis que la montagne,
00:12:11c'est ultra dangereux.
00:12:13Cette course, je n'y remettrai jamais les pieds.
00:12:15Finalement,
00:12:17l'année d'après,
00:12:19l'envie était trop forte,
00:12:21j'y suis retourné.
00:12:23J'ai compris que quoi qu'il puisse m'arriver,
00:12:25en montagne, j'aurais toujours l'envie de retourner.
00:12:27C'est vrai ?
00:12:29Comme un fan de vélo, qui va tomber à vélo
00:12:31et qui va remonter après sur son vélo.
00:12:33La montagne, est-ce que c'est l'endroit
00:12:35le plus dangereux pour évoluer ?
00:12:37Là, tu parles d'éboulement,
00:12:39mais tu as 50 possibilités de mourir en montagne.
00:12:41Une chute,
00:12:43une avalanche,
00:12:45est-ce que c'est un endroit vraiment
00:12:47des plus hostiles de la planète ?
00:12:49C'est un des endroits les plus à risque
00:12:51que je connaisse.
00:12:53C'est un peu comme la mer,
00:12:55c'est des milieux où la nature
00:12:57a encore tous ses droits
00:12:59et l'homme, avec tous les moyens dont il dispose,
00:13:01ne peut pas s'en affranchir.
00:13:03Sur le fil de Darwin, le documentaire
00:13:05est disponible en VOD, je vous mettrai le lien
00:13:07pour ceux qui veulent le voir, le louer et le regarder.
00:13:09Comme ça,
00:13:11vous verrez Lionel directement dedans
00:13:13et vous comprendrez ce qu'il a vécu.
00:13:15On va vous montrer dans un instant des images
00:13:17pour vraiment se mettre à leur place.
00:13:19Vous vous préparez ? Vous êtes un groupe de...
00:13:21Vous êtes combien exactement ?
00:13:23Pour partir, on est 6.
00:13:25Vous êtes 6 ?
00:13:27Ce n'est pas un chiffre anodin.
00:13:29Dans notre préparation, on a réalisé
00:13:31que pour enrayer, bloquer
00:13:33la chute de quelqu'un dans une crevasse,
00:13:35surtout avec sa poule 4,75 kg en plus,
00:13:37il fallait être au moins deux personnes
00:13:39à l'extérieur sur la même corde.
00:13:41Si on est en cordée à deux, on n'y arrive pas.
00:13:43En parallèle de ça,
00:13:45pour pouvoir vivre longtemps
00:13:47et se remettre en condition
00:13:49au bivouac,
00:13:51on ne peut pas être à plus de deux par tente.
00:13:53Sinon, après, ça fait trop de promiscuité, trop d'humidité, etc.
00:13:55Donc il fallait que ce soit à la fois
00:13:57un multiple de 3 et un multiple de 2.
00:13:59C'est calculé scientifiquement.
00:14:01Voilà.
00:14:03C'est un vrai boulot avant de partir.
00:14:05Vous êtes 10 dans votre groupe.
00:14:07Comment avez-vous choisi les 6
00:14:09qui allaient partir ?
00:14:11Il y a d'abord toute la préparation
00:14:13qui dure un an, qui permet à chacun de savoir
00:14:15s'il se sent ou pas de s'engager dans cette aventure.
00:14:17Jusqu'au dernier moment ? Jusqu'au dernier moment.
00:14:19Et puis rapidement, dans cette préparation,
00:14:21on se dessine forcément une équipe
00:14:23de gens qui sont très motivés.
00:14:25Des équipes qui ont des impératifs familiaux,
00:14:27qui ont des problèmes.
00:14:29Dans une équipe de 10 qui fait de l'alpinisme
00:14:31très engagé, il y a toujours des gens
00:14:33qui sont blessés ou des gens qui ont besoin
00:14:35de faire un break.
00:14:37Ils ne sont pas dispos sur
00:14:39un an et un mois.
00:14:41La composition s'est faite
00:14:43assez naturellement.
00:14:45Tu as des enfants ? J'en ai aujourd'hui
00:14:47mais je n'en avais pas à l'époque.
00:14:49Il y en avait qui étaient papas ?
00:14:51Oui, il y avait pas mal de gens dans l'équipe
00:14:53qui étaient des pères de famille.
00:14:55Je pense même qu'on n'était que 2 sur les 6
00:14:57à ne pas avoir d'enfant.
00:14:59En réalité, il y avait un risque que vous ne reveniez pas ?
00:15:01Oui.
00:15:03Et ça, c'était calculé, c'était prévu dans votre tête ?
00:15:05C'était parfaitement identifié
00:15:07et parfaitement accepté par tout le monde.
00:15:09Ça faisait partie de la préparation.
00:15:11Sur cette expédition,
00:15:13si quelqu'un se fait une blessure
00:15:15anodine chez nous, par exemple,
00:15:17en France, on tombe dans une crevasse,
00:15:19on se fait une fracture de la jambe,
00:15:21il y a un hélicoptère qui arrive dans les 2 heures,
00:15:23on va à l'hôpital, on est sauvé.
00:15:25Dans la cordillère de Darwin, si quelqu'un tombe dans une crevasse,
00:15:27qui a une fracture du fémur, par exemple,
00:15:29et qui fait une hémorragie,
00:15:31on est sûr qu'il va mourir.
00:15:33Parce que dans cette chaîne de montagne,
00:15:35il n'y a aucun secours possible.
00:15:37Même en hélicoptère ?
00:15:39Même en hélicoptère. Dans la préparation,
00:15:41on a contacté les différentes sociétés
00:15:43qui font du secours en mer. On est à côté du Cap Horn,
00:15:45donc il y a du secours en mer
00:15:47pour les bateaux qui sont en difficulté.
00:15:49Les sociétés d'hélicoptère
00:15:51refusent de voler dans cette chaîne de montagne.
00:15:53Ce qui, évidemment, s'explique
00:15:55parce que c'est à la fois les mêmes vents violents
00:15:57qui sont à 0 mètre d'altitude
00:15:59sur la mer, sauf que
00:16:01cette fois-ci, ils sont en montagne,
00:16:03et ils sont en interférence avec le relief,
00:16:05ce qui fait que ça crée des turbulences incroyables,
00:16:07donc il n'y a aucun aéronef qui prend le risque de voler dans cette zone.
00:16:09Même l'armée de terre
00:16:11ou l'armée de l'air ou
00:16:13une armée française
00:16:15n'aurait pas pu mettre quelqu'un en appui ?
00:16:17Vous saviez que si vous tombiez,
00:16:19vous faisiez une blessure, c'était fini ?
00:16:21Et tout le monde s'est tapé dans la main
00:16:23à ce moment-là pour se dire
00:16:25OK, on y va quand même.
00:16:27Quand on a évoqué tout ça, c'est assez violent
00:16:29parce que les choses induites, on a l'impression
00:16:31qu'elles sont acceptées, mais quand on les verbalise,
00:16:33ce n'est pas la même chose,
00:16:35c'est beaucoup plus violent.
00:16:37Donc après cette séance,
00:16:39par exemple, je ne me souviens plus,
00:16:41c'était il y a quand même 12 ans,
00:16:43mais je pense qu'on a eu un délai de réflexion,
00:16:45de l'ordre d'une semaine,
00:16:47pour que les gens disent OK, c'est clair,
00:16:49je m'engage en l'aventure.
00:16:51Un peu comme un crédit immobilier où ils laissent un mois
00:16:53pour réfléchir, c'est autre chose, mais c'est ça,
00:16:55il faut laisser digérer une décision importante.
00:16:57Ils ont prévenu leur famille
00:16:59ou il y en a qui ne l'ont pas dit ?
00:17:01Alors ils ne l'ont pas exprimé
00:17:03de façon si claire à leur famille.
00:17:05D'abord nos familles, au sein du groupe,
00:17:07elles savent quel est notre métier.
00:17:09Quand on est au groupe de militaires d'haute montagne,
00:17:11c'est pour faire de l'alpinisme engagé.
00:17:13C'est toujours présent.
00:17:15Qu'est-ce que ça veut dire, engagé ?
00:17:17Ça veut dire que quand on se lance dans l'ascension,
00:17:19il y a un moment où on ne peut plus faire demi-tour,
00:17:23et où les risques objectifs sont tels
00:17:25qu'on ne peut pas en revenir.
00:17:31Vous êtes dans des situations dangereuses,
00:17:33acceptées et connues par vos familles.
00:17:35Il y en a qui n'ont pas été très clairs
00:17:37sur la dangerosité de cette mission-là ?
00:17:39Aucun n'a été clair sur ce sujet,
00:17:41parce qu'on sait que nos familles connaissent ce risque.
00:17:43C'est le risque aussi que vivent
00:17:45toutes les familles de guides d'haute montagne.
00:17:47Parce que la montagne,
00:17:49elle tue autant de gens chez nous qu'ailleurs.
00:17:51C'est la montagne aussi dangereuse
00:17:53partout dans le monde.
00:17:55Donc nos familles le savent et l'ont accepté.
00:17:57D'aller leur rajouter encore une couche supplémentaire,
00:17:59un stress supplémentaire,
00:18:01ça voudrait dire à la fois les stresser sur l'ambiance,
00:18:03sur la durée de l'expédition excessivement,
00:18:05ce qui ne serait pas bien,
00:18:07et en plus ça porterait atteinte
00:18:09à la vie normale des gens de l'équipe.
00:18:11Parce que quand on sait que notre famille vit mal quelque chose
00:18:13et qu'elle en stresse,
00:18:15on n'est plus bien dans sa tête.
00:18:17Donc vous partez,
00:18:19pas d'enfants pour toi à l'époque.
00:18:21Tu es le chef d'équipe.
00:18:23Comment ça se décide ?
00:18:25C'est à main levée ?
00:18:27Parce que tu es le plus gradé ?
00:18:29Ça c'est naturel, c'est la structure militaire du groupe.
00:18:31Au groupe militaire de haute montagne,
00:18:33comme partout dans l'armée, il y a un chef,
00:18:35il y a une pyramide de grades.
00:18:37Moi je suis le chef du groupe,
00:18:39j'ai été le chef du groupe pendant 6 ans,
00:18:41et sur les 11 ans que j'ai passé au groupe,
00:18:43les 5 premières années, j'étais l'adjoint du chef.
00:18:45Donc il y a le chef, l'adjoint du chef,
00:18:47et après il y a le reste de l'équipe.
00:18:49Si jamais tu en viens à décéder,
00:18:51dans une mission comme ça,
00:18:53est-ce que c'est prévu qu'il y ait
00:18:55un autre qui prenne ta place, puis un autre ?
00:18:57Vous avez déjà prévu les plans A, plan B, plan C,
00:18:59tout est calé ?
00:19:01Il n'y a pas un rang décliné
00:19:03jusqu'au dernier survivant,
00:19:05mais il y a un plan général
00:19:07qui existe, pareil dans les armées,
00:19:09tous les gens qui sont en responsabilité,
00:19:11on a un adjoint qui doit prendre
00:19:13le relais si jamais il se passe quelque chose.
00:19:15Chez nous au groupe c'est pareil,
00:19:17moi j'ai un adjoint, et s'il m'arrive un malheur,
00:19:19c'est lui qui prend le relais,
00:19:21et après s'il lui arrive un malheur à lui,
00:19:23n'importe quel membre de l'expédition
00:19:25doit être en mesure de prendre le relais.
00:19:27On va parler après, il y a eu des tentatives,
00:19:29c'est ça, avant vous, qui ont échoué,
00:19:31toutes, vous ça a failli
00:19:33échouer dans le sens où, quand on regarde
00:19:35le documentaire, on se rend compte que
00:19:37vous avez fait que un quart, je crois,
00:19:39au bout de X jours,
00:19:41et en fait il faut calibrer par rapport à la nourriture,
00:19:43mais on va en reparler après,
00:19:45est-ce qu'il y a un point de non-retour ?
00:19:47Tu sais que tu arrives à telle zone, si jamais
00:19:49t'es pas à telle zone par rapport à la nourriture, il faut absolument faire demi-tour.
00:19:51Alors il n'y a aucun retour pratiquement,
00:19:53je dirais qu'il y a un retour possible peut-être les trois premiers jours,
00:19:55mais après on n'est plus dans le retour,
00:19:57on est dans sortir de la Cordillière,
00:19:59par une de ses côtes,
00:20:01sud ou nord,
00:20:03le plus rapidement possible.
00:20:05Quand on vous voit,
00:20:07on voit que c'est des profils
00:20:09de gens assez
00:20:11secs, finalement,
00:20:13assez fins, un peu comme des marathoniens,
00:20:15gros cardio, j'imagine quand même,
00:20:17pour tirer, faire des 8 millimètres
00:20:19de dénivelé, vous vous entraînez
00:20:21beaucoup, c'est quoi les entraînements
00:20:23pour faire une mission comme ça ?
00:20:25Alors, pour la mission, il n'y a pas d'entraînement
00:20:27physique spécifique, c'est
00:20:29finalement l'entraînement
00:20:31normal, exigé
00:20:33d'un membre du groupe pendant toute sa
00:20:35période de présence au groupe.
00:20:37Au GMHM, les gens
00:20:39font de l'alpinisme en permanence,
00:20:41ils s'entraînent tout le temps, c'est comme des sportifs
00:20:43de haut niveau, c'est un peu dans la même image,
00:20:45sauf qu'on n'a pas ce statut-là.
00:20:47Donc il n'y a pas de préparation physique spécifique.
00:20:49Et est-ce qu'on vous voit
00:20:51tirer des, je ne sais plus
00:20:53comment tu appelles ça, le nom exact,
00:20:55vous traînez un traîneau,
00:20:57un poulka,
00:20:59c'est réparti de manière équilibrée ou c'est en fonction
00:21:01du poids de chacun pour partir ?
00:21:03Tu vois, chacun prend ses trucs
00:21:05à lui, ou il y en a un qui prend le matériel médical,
00:21:07l'autre la bouffe ?
00:21:09Non, la règle dans cette expédition, c'était que
00:21:11tout le monde aurait exactement le même poids pour que
00:21:13tout le monde soit sur le même pied d'égalité.
00:21:15Il n'y a pas quelqu'un qui porte plus que d'autres, etc.
00:21:17Après, en cours d'expé,
00:21:19il aurait pu y avoir des
00:21:21bascules de poids
00:21:23si quelqu'un avait été plus fatigué que les autres.
00:21:25Mais on savait très bien que
00:21:27pour réussir, il fallait que tout le monde soit au top
00:21:29et à partir du moment où on s'est dit, tiens,
00:21:31au milieu de l'expé, je vais commencer à porter les affaires
00:21:33de untel ou untel,
00:21:35ça ne peut pas fonctionner.
00:21:37Vous avez des contacts avec votre famille quand vous partez ?
00:21:39Oui. Comment ?
00:21:41Par téléphone satellitaire.
00:21:43Vous vous captez quand même ?
00:21:45On est parti avec deux téléphones satellitaires.
00:21:47Il y en a un qui est tombé en panne le troisième jour.
00:21:49C'est rassurant, ça.
00:21:51Ce qui a remis pas mal en cause
00:21:53nos procédures de déplacement,
00:21:55puisqu'au départ, on avait pris surtout deux téléphones
00:21:57à la fois pour être sûr d'en avoir un qui fonctionne tout le temps,
00:21:59mais aussi pour garder un lien entre
00:22:01les deux cordées, quand on avait envisagé,
00:22:03comme c'est un terrain inconnu et qu'on n'avait pas
00:22:05de carte précise, de faire des...
00:22:07D'expliquer les groupes ?
00:22:09De diviser le groupe et d'aller faire des explorations
00:22:11à droite à gauche pour trouver les bons passages.
00:22:13Donc ça, à partir du troisième jour, on a su
00:22:15qu'on ne pouvait plus le faire en gardant le lien.
00:22:17Ce n'était plus possible.
00:22:19Est-ce qu'il y a un médecin ? Parce que tu sais,
00:22:21tu te casses la jambe, mais tu peux avoir un petit bobo.
00:22:23Est-ce qu'il y a un médecin parmi vous
00:22:25pour un doigt qui se tord,
00:22:27pour des trucs un peu plus petits ?
00:22:29Non. On a une formation
00:22:31en secourisme. Alors il y a Dimitri,
00:22:33Dimitri Munoz, qui fait partie du groupe,
00:22:35qui lui est pompier volontaire et qui a plus
00:22:37d'expérience, mais il n'est pas infirmier,
00:22:39il n'est pas médecin. Et clairement,
00:22:41on sait quand on part qu'il va falloir qu'on se fasse
00:22:43absolument rien. Et ça, ça a
00:22:45un impact aussi sur nos procédures.
00:22:47Comment on se déplace,
00:22:49le niveau de prise de risque qu'on accepte dans le déplacement.
00:22:51Est-ce que tu as fait,
00:22:53avant de parler exactement de l'expédition,
00:22:55est-ce que tu t'es entraîné
00:22:57en faisant l'Everest, par exemple ?
00:22:59Je sais qu'il y en a plein qui... Tu rigoles ?
00:23:01L'Everest, c'est le truc apparemment
00:23:03qui est impossible, etc. Est-ce que
00:23:05vous vous êtes entraîné sur une mission comme ça ?
00:23:07Non. Non. Alors l'Everest,
00:23:09en dehors de cette mission, je l'ai
00:23:11proposé comme expédition
00:23:13aux gens du groupe, et ça n'a intéressé
00:23:15absolument personne.
00:23:17Pourquoi ?
00:23:19Parce que l'ADN du groupe,
00:23:21c'est l'exploration
00:23:23en montagne, c'est de faire des choses nouvelles,
00:23:25c'est de faire des choses qui n'ont pas encore été faites.
00:23:27C'est tout l'intérêt de cette pratique.
00:23:29Aller faire l'ascension de l'Everest
00:23:31à un sommet
00:23:33qui aujourd'hui est parcouru par des
00:23:35expéditions commerciales, avec
00:23:37une corde qui part du camp de base
00:23:39et qui arrive au sommet,
00:23:41ça ne représente pas de défi intéressant
00:23:43pour des gens qui font ce type
00:23:45d'alpinisme, du coup,
00:23:47ce n'est pas un sommet qui a été retenu dans nos projets.
00:23:49Un peu trop facile ?
00:23:51Je ne dirais pas que c'est trop facile, mais trop commun,
00:23:53trop parcouru, trop connu.
00:23:55Il y a une recherche de l'inconnu qui est claire,
00:23:57l'alpiniste, il aime l'aventure.
00:23:59L'aventure, quand tout est connu de par avance,
00:24:01elle existe encore un petit peu,
00:24:03mais elle est limitée. Tu dis qu'il y a des cordes maintenant
00:24:05qui sont mises en place, tu n'as plus qu'à suivre le projet, c'est ça ?
00:24:07Oui, bien sûr. Comme sur tous les sommets,
00:24:09il y a plusieurs sommets à plus de 8000,
00:24:11il y en a 14 dans le monde, mais il y en a plusieurs
00:24:13dans lesquelles il y a des expéditions,
00:24:15on appelle ça commerciales, c'est-à-dire des agences
00:24:17avec des guides qui emmènent des clients.
00:24:19Dans ces concéditions-là,
00:24:21tous les camps sont reliés par
00:24:23des cordes fixes. Et finalement,
00:24:25il suffit de s'attacher sur la corde et de la remonter
00:24:27pour trouver le camp suivant.
00:24:29Comme dans une via ferrata où tu vas t'accrocher sur un truc en fer.
00:24:31Voilà, exactement.
00:24:33Une ligne de vie, c'est ça ? Une ligne de vie.
00:24:35Il y a des images,
00:24:37je ne sais pas si toi tu as déjà vu,
00:24:39de gens qui sont décédés lors d'expéditions.
00:24:41Il paraît qu'il y en a encore, d'ailleurs,
00:24:43sur le chemin pour aller à l'Everest, etc.
00:24:45Est-ce que toi, tu en as vu sur Darwin,
00:24:47quand tu as fait cette expédition,
00:24:49d'anciens qui auraient essayé ?
00:24:51Non. Non, d'abord parce que ça n'avait pas été fait.
00:24:53Après, il y a quand même
00:24:55certaines secteurs de la cordillère...
00:24:57Non, mais tu aurais pu tomber sur des vieux cadavres
00:24:59d'il y a centaines d'années, tu vois.
00:25:01On n'a vu absolument aucune trace de passage humain
00:25:03ou d'anciennes tentatives,
00:25:05ou d'anciennes expéditions.
00:25:07D'abord, elles sont très espacées dans le temps,
00:25:09très sauvages, avec les tempêtes, etc.
00:25:11Il ne reste rien.
00:25:13Tu penses que tu as été un des premiers humains à marcher
00:25:15sur ces zones-là ? Probablement.
00:25:17Il y a des secteurs où il me semblait qu'avec mes cinq compagnons,
00:25:19on était les premiers à passer là, c'est sûr.
00:25:21C'est incroyable.
00:25:23C'est quand même quelque chose d'émouvant quand on le vit.
00:25:25Tu te dis que je suis la première personne
00:25:27à poser mon pied là, c'est incroyable.
00:25:29Parce que même depuis que l'humain existe,
00:25:31avant, ils n'avaient pas
00:25:33de matériel ni rien, c'était impossible.
00:25:35Et puis peut-être aussi qu'ils n'en avaient pas l'intérêt.
00:25:37C'est-à-dire qu'aujourd'hui...
00:25:39Ils avaient autre chose à foutre.
00:25:41Ils cherchaient à manger.
00:25:43On parle d'humains et tout,
00:25:45mais est-ce que tu as croisé dans une expédition aussi dure
00:25:47des animaux dangereux ?
00:25:49Un ours ?
00:25:51Un bouc ?
00:25:53Dans cette chaîne de montagne, il n'y a pas de vie animale.
00:25:55Il n'y a pas de vie animale du tout ?
00:25:57Elle est quasiment 100% glaciaire.
00:25:59La seule chose qu'on ait pu observer,
00:26:01c'est des oiseaux. On en a vu trois fois.
00:26:03On a vu un condor.
00:26:05Le premier ou le deuxième jour...
00:26:07Encore un peu bas.
00:26:09On a vu un tout petit oiseau dans un endroit
00:26:11qu'on appelle dans l'expédition la vallée verte,
00:26:13qui est le seul endroit où on redescend
00:26:15assez bas en altitude et on sort du domaine glaciaire.
00:26:17Même si là, on est entièrement dans la neige.
00:26:19Visuellement, on ne se rend pas compte,
00:26:21mais sur la carte, on le sait.
00:26:23Et puis, pratiquement le dernier jour.
00:26:25Il paraît,
00:26:27tu me diras si c'est vrai ou non,
00:26:29mais sur Twitter, le jour où j'ai vu un post passer,
00:26:31c'était marqué qu'on pouvait,
00:26:33quand on mourait de froid,
00:26:35avoir des...
00:26:37On s'enlevait nos vêtements parce qu'on avait
00:26:39des bouffées de chaleur
00:26:41juste avant de mourir de froid.
00:26:43On a des bouffées de chaleur et on se déshabille,
00:26:45on se met nu. Est-ce que c'est vrai, ça ?
00:26:47J'en sais rien.
00:26:49J'en sais rien.
00:26:51Je ne sais même pas comment on peut l'imaginer.
00:26:53Parce que quand quelqu'un meurt de froid,
00:26:55c'est dans des situations dramatiques.
00:26:57Moi, j'ai un souvenir en tête,
00:26:59mais sur lequel je n'étais pas présent.
00:27:01La personne qui est décédée,
00:27:03avant de mourir,
00:27:05elle était dans un délire profond.
00:27:07Ça, par contre, c'est documenté, c'est connu.
00:27:09C'est-à-dire qu'au moment où il y a la perte de connaissance,
00:27:11il y a toute une période où la personne est dans un délire,
00:27:13on ne sait pas lequel,
00:27:15parce que vu qu'elle est en train de délirer,
00:27:17on ne peut pas discuter, échanger,
00:27:19on n'a aucun moyen de mesurer ce qu'elle ressent.
00:27:21Et dans ce délire,
00:27:23elle peut déchirer, arracher les choses qui se passent autour d'elle,
00:27:25mais on ne sait pas pourquoi.
00:27:27Après, la personne perd connaissance
00:27:29et puis c'est la fin.
00:27:31Mais de savoir pourquoi ? Est-ce qu'elle a trop chaud ?
00:27:33Je n'en sais rien.
00:27:35Comment on meurt de froid ? On s'endort ? Comment ça marche ?
00:27:37On est exposé au froid,
00:27:39on n'arrive plus à se protéger,
00:27:41le corps n'arrive plus à lutter pour se réchauffer,
00:27:43la température centrale
00:27:45baisse et quand elle atteint
00:27:47la zone des 35 degrés, on commence à entrer dans l'hypothermie.
00:27:49C'est-à-dire que là, on est en dessous,
00:27:51on est en situation vraiment critique
00:27:53et plus on descend
00:27:55et plus on...
00:27:57on va vers
00:27:59une sorte de perte de connaissance,
00:28:01on perd connaissance.
00:28:03Certains disent qu'on s'endort,
00:28:05c'est juste qu'on est dans une sorte de coma
00:28:07et puis le corps continue à se refroidir
00:28:09et puis au bout d'un moment, tout s'arrête.
00:28:11Vous avez eu combien en température ?
00:28:13C'était quoi votre pic ?
00:28:15Vous aviez un thermomètre sur vous, j'imagine, pour voir comment il faisait tout le temps.
00:28:17C'était aussi le but, j'imagine,
00:28:19de tester tout ça
00:28:21et de mesurer. Vous avez eu combien ?
00:28:23Ce n'est pas des températures extrêmes.
00:28:25Sur Darwin, on devait avoir
00:28:27plutôt dans les moins 15,
00:28:29moins 20 au plus froid.
00:28:31Plutôt la nuit, c'est aussi bas.
00:28:33En journée, c'était plutôt entre les moins 10.
00:28:35Et avec
00:28:37peut-être une journée ou deux où on a eu des pics de température
00:28:39assez élevés, même une journée, on est allé dans le positif.
00:28:41Ah bon ?
00:28:43À tel point que François, il a
00:28:45failli faire un coup de chaleur
00:28:47et perte de connaissance.
00:28:49C'est vrai ? Un degré ?
00:28:51Quand ton corps s'est habitué, c'est ça ?
00:28:53En plein effort physique, un effort très violent.
00:28:55Moins 15, c'est très froid quand même.
00:28:57Mais là, il devait faire un ou deux degrés.
00:28:59En tout cas, on était dans une combe,
00:29:01une sorte de cuvette
00:29:03où
00:29:05la température du soleil se concentrait.
00:29:07Et ça, c'est
00:29:09vraiment anecdotique.
00:29:11Faire un coup de chaleur à deux degrés, c'est la seule fois où on a eu vraiment chaud.
00:29:13Le médecin ne te croit pas quand tu arrives.
00:29:15Et tu disais,
00:29:17il s'agit des cinquantièmes hurlants.
00:29:19C'est l'attitude la plus dangereuse ?
00:29:21C'est une zone qui est
00:29:23à l'origine identifiée par les
00:29:25navigateurs parce que
00:29:27c'est un endroit où, quand on regarde
00:29:29la sphère
00:29:31de la planète Terre,
00:29:33à cette latitude-là, il y a une seule terre.
00:29:35C'est
00:29:37le sud de l'Argentine et du Chili,
00:29:39la grande île de la Terre de Feu.
00:29:41Les dépressions font le tour de la planète sur un océan.
00:29:43Il n'y a rien qui les freine, il n'y a rien qui les arrête.
00:29:45Les vents sont du coup très violents.
00:29:47Et la Terre,
00:29:49la grande île de la Terre de Feu
00:29:51prend les dépressions de plein fouet, à pleine vitesse.
00:29:53Il y a les quarantièmes rugissants.
00:29:55Et les cinquantièmes hurlants.
00:29:57Et il y a un proverbe marin.
00:29:59Tu le connais ? Non.
00:30:01Il dit, sous 40 degrés, il n'y a plus de loi.
00:30:03Mais sous 50 degrés, il n'y a plus de Dieu.
00:30:05C'est que
00:30:07c'est quand même une zone assez compliquée
00:30:09à vivre. Et juste, vous montez à combien
00:30:11en altitude au maximum
00:30:13qu'on imagine ? C'est pas très haut.
00:30:15C'est 2400 mètres.
00:30:17Vous arrivez le premier jour,
00:30:19vous avez 70 kilos de matos sur vous.
00:30:21Vous avez prévu votre nourriture ?
00:30:23Oui.
00:30:25C'est prévu comment ?
00:30:27C'est comme un marathon, t'as ta petite gourde
00:30:29de pulpe, de fruit, on se gèle.
00:30:31Est-ce que c'est au gramme près ?
00:30:33Est-ce que c'est au kilo près ? Comment vous faites ?
00:30:35Toutes les rations alimentaires
00:30:37sont empaquetées par journée.
00:30:39C'est au gramme près.
00:30:41Au point qu'on a même, par exemple,
00:30:43quand on achète, je sais pas,
00:30:45on a des matos paléophilisées
00:30:47qui sont dans un étui alluminisé
00:30:49qui était trop lourd pour nous,
00:30:51donc on a déconditionné tous les produits
00:30:53qu'on avait achetés, on les a reconditionnés
00:30:55dans des films plastiques
00:30:57beaucoup plus fins pour gagner en poids
00:30:59sur le poids des emballages.
00:31:01Ça, ça nous a pris
00:31:03une à deux journées,
00:31:05on a fait ça à Punta Arenas,
00:31:07au sud du Chili,
00:31:09avant de prendre le bateau pour rejoindre la Cordillière.
00:31:11On a passé une bonne journée
00:31:13à faire tout ça, à tout peser,
00:31:15tout mesurer, au gramme près, on retirait
00:31:17tout ce qui était superflu.
00:31:19Et après, dans notre poulka, on avait
00:31:21nos 30 sachets qui représentaient
00:31:2330 jours de nourriture.
00:31:25Donc en fait, chaque jour qui passait,
00:31:27tu t'allégeais ? Voilà, absolument.
00:31:29Et donc t'épluchais pas les bananes non plus ?
00:31:31T'avais pas de produits frais ?
00:31:33Non. Les seuls produits
00:31:35entre guillemots et frais qu'on avait,
00:31:37c'était pas des fruits, bien sûr,
00:31:39c'est du saucisson et un morceau de fromage.
00:31:41Donc on avait par jour une rondelle de saucisson.
00:31:43C'est vrai ?
00:31:45C'est pour le plaisir, ça ?
00:31:47C'est pour le plaisir. Pour le moral aussi, non ?
00:31:49Oui, ça c'est indispensable.
00:31:51À l'armée, ils disent qu'il faut toujours bien manger,
00:31:53et c'est très important, ils appellent le messe.
00:31:55Et d'ailleurs, quand l'expédition
00:31:57commençait à être dure sur le plan alimentaire,
00:31:59peut-être même encore avant,
00:32:01une des obsessions de la journée,
00:32:03c'est de se dire vivement ce soir, au bivouac,
00:32:05que je mange ma rondelle de saucisson.
00:32:07Ça a l'air fait comme ça, mais c'est vrai.
00:32:09Ah oui, c'est que c'est vraiment dur, quand même.
00:32:11Et pour l'eau, tu fais fondre de la neige, j'imagine ?
00:32:13Oui.
00:32:14Tu vas pas emmener de l'eau, c'est très lourd.
00:32:16Pas de risque de diarrhée, de tous ces trucs-là ?
00:32:18Non.
00:32:19On n'a jamais eu de souci de s'étendre.
00:32:21Après, je pense que, pour des gens qui ne sont pas habitués,
00:32:23la première confrontation,
00:32:25c'est de l'eau de fonte qui est assez déminéralisée,
00:32:27il peut y avoir des problèmes de diarrhée, etc.
00:32:29Mais quand le corps est habitué,
00:32:31après, il n'y a plus aucun souci.
00:32:33Vous êtes entraîné avant de partir, à boire de la neige ?
00:32:35Non, c'est pas avant de partir,
00:32:37mais c'est dans notre vie d'alpiniste.
00:32:39Ça nous est arrivé très tôt de commencer à boire de la neige,
00:32:41alors peut-être que quand j'avais 15 ans,
00:32:43j'ai eu peut-être des diarrhées.
00:32:45Mais une fois que l'organisme est habitué, il n'y a plus aucun souci.
00:32:47Oui, c'est juste une question d'habitude.
00:32:49Et là, vous partez avec des prototypes de marques
00:32:51qui font pour vous, c'est ça ?
00:32:53Oui.
00:32:54Une veste qui s'appelle Millet, la marque ?
00:32:56Par exemple.
00:32:57Qui a été rebaptisée, d'ailleurs, après Darwin Jacket.
00:33:00Vous testez les marques, parfois, justement ?
00:33:02Vous testez les vêtements pour les marques, pour l'armée ?
00:33:04Alors, ça fait partie des procédures,
00:33:08ou des process du groupe.
00:33:10C'est de travailler avec des marques pour à la fois
00:33:12tester leurs équipements, pour connaître
00:33:14ce qui existe dans le civil, on va dire,
00:33:18pour s'en inspirer pour le militaire,
00:33:20mais aussi de développer avec ces marques-là,
00:33:22quand elles en ont envie, des produits spécifiques,
00:33:24plus adaptés à nos besoins, mais qui, finalement,
00:33:26sont aussi adaptés aux besoins de bien d'autres personnes.
00:33:28Et donc, c'était le cas avec la société Millet,
00:33:30avec laquelle on avait une longue histoire de partenariats,
00:33:34et c'est arrivé plusieurs fois sur des expéditions,
00:33:37qui nous fabriquent des prototypes de vêtements
00:33:40pour l'expert en question, et plus tard,
00:33:43qu'ils exploitent ces prototypes à des fins commerciales.
00:33:45Et donc, vous avez votre smartphone, on le disait avant,
00:33:48juste vos familles, quand vous les appelez,
00:33:50vous avez un rendez-vous fixe ?
00:33:52Vous savez qu'à le soir, par exemple, à 22h,
00:33:54vous appelez vos familles ?
00:33:55Non, surtout pas.
00:33:56Surtout pas, pourquoi ?
00:33:57Ça, c'est la règle en expédition, en tout cas,
00:33:59je l'ai vécu, moi.
00:34:00C'était, on appelle une fois par semaine les familles,
00:34:03et jamais ni le même jour, ni à la même heure,
00:34:05de façon à ne pas créer un rythme
00:34:08qui ferait que si la troisième semaine,
00:34:11le mardi soir à 18h, on ne peut pas téléphoner
00:34:13parce qu'on a eu une avarie, parce qu'on est dans la difficulté, etc.
00:34:16En France, les familles ne commencent pas à s'angoisser
00:34:18en se disant, oh là là !
00:34:19Ça fait 24h que je ne l'ai pas eue, c'est long !
00:34:21Donc, on téléphone vraiment à des moments
00:34:25totalement irréguliers, mais en moyenne,
00:34:27une fois par semaine, sans donner d'habitude.
00:34:29Il y a un bateau de pêche qui vous dépose,
00:34:31premier jour, au pied de la Cordillère.
00:34:36Qu'est-ce qui te marque en arrivant ?
00:34:38La solitude.
00:34:40Le côté, il n'y a pas la trace d'une empreinte humaine,
00:34:46il n'y a pas une cabane, pas un port,
00:34:49pas un anneau d'amarrage, il n'y a rien.
00:34:51C'est le monde sauvage à l'état pur.
00:34:55Est-ce que ça te fait peur ?
00:34:58Est-ce qu'il y a un moment donné où tu te dis,
00:35:00qu'est-ce que je fous là ?
00:35:01Alors, on ne se dit pas qu'est-ce qu'on fout là,
00:35:03parce que ça fait quand même un an qu'on y travaille
00:35:05et on veut tous y aller, mais c'est impressionnant.
00:35:07Et surtout, au moment où le bateau
00:35:12fait demi-tour et s'en va,
00:35:15là, vraiment, on ressent encore plus ce côté solitude
00:35:20et on se dit, OK, là, on y est.
00:35:23On y est, c'est parti.
00:35:25C'est assez impressionnant.
00:35:26Est-ce qu'il y a des moments de détente
00:35:28où il n'y a même pas le temps de rigoler,
00:35:30de se dire, les gars, incroyable, etc.,
00:35:32où c'est vraiment concentré pendant 30 jours ?
00:35:35Alors, il y a des moments où on blague beaucoup,
00:35:38mais l'humour, les blagues,
00:35:41c'est pour détendre les situations tendues.
00:35:44OK, OK.
00:35:46Il n'y a pas de véritable moment de détente
00:35:50pendant 30 jours, on est en veille permanente,
00:35:52on est concentré en permanence.
00:35:54Même la nuit, on est à l'écoute des bruits du glacier
00:35:58parce qu'on dort, en général,
00:35:59on est en bivouac sur le glacier,
00:36:00donc il y a les crevasses,
00:36:01il y a les craquements du glacier, etc.
00:36:03On écoute les chutes de neige,
00:36:04les avalanches qui coulent à droite, à gauche,
00:36:07et on est en état permanent d'éveil.
00:36:10Est-ce qu'il y en a un du groupe
00:36:13qui, à un moment donné, craque
00:36:15sur une expédition aussi longue ?
00:36:17Ça peut être complètement compréhensible
00:36:19de se mettre à pleurer, d'avoir les nerfs qui lâchent,
00:36:21d'avoir besoin de faire une pause,
00:36:23de se reposer une heure.
00:36:25Est-ce qu'il y en a qui craquent ?
00:36:26Oui, bien sûr.
00:36:27On le voit en plus dans le film,
00:36:28parce qu'on ne s'en cache pas.
00:36:29Je fais comme si je ne l'avais pas vu,
00:36:31donc je te pose des questions pour que tu respires.
00:36:32Il y a François qui craque
00:36:34le soir du jour de la punition.
00:36:37Alors, la punition.
00:36:38On va revenir sur ça après.
00:36:40Qu'est-ce que la punition ?
00:36:41On va regarder un extrait,
00:36:42et je vais vous montrer ça,
00:36:43mais qu'est-ce que la punition ?
00:36:44Qu'est-ce que tu appelles la punition ?
00:36:45La punition, c'est le jour
00:36:47où on aurait pu tous y passer.
00:36:51À cause de quoi ? Des vents ?
00:36:52À cause du vent, à cause de la neige,
00:36:55à cause des conditions de manière globale.
00:36:57Qui étaient merdiques ?
00:36:58Qui étaient très, très merdiques.
00:37:00Vous n'arrivez même pas à mettre les tentes ?
00:37:03Alors, on n'arrive même pas à se parler.
00:37:06C'est-à-dire que, déjà,
00:37:07à la distance à laquelle on est tous les deux,
00:37:09ce n'est même pas la peine d'en parler,
00:37:11mais en se rapprochant, quand on parle,
00:37:13la voix ne porte pas en dehors de la bouche,
00:37:16tellement les vents sont violents.
00:37:18Et le problème, c'est que le vent plus le froid,
00:37:20c'est ce qu'on appelle le ressenti dans la météo,
00:37:23ça décuple, en fait, le froid.
00:37:24Absolument.
00:37:25Donc, même s'il fait moins 17,
00:37:26mais si tu as un vent à 150,
00:37:28tu disais tout à l'heure,
00:37:29c'est une catastrophe, même pour ton corps.
00:37:31Ça, typiquement, c'est les conditions parfaites
00:37:34pour faire une hypothermie.
00:37:35Pour s'endormir.
00:37:36Pour s'endormir et ne jamais se réveiller.
00:37:38Et là, à ce moment-là, tu as peur, toi ?
00:37:40Enfin, peur, tu te dis,
00:37:41là, c'est possible que ça se passe mal.
00:37:43Alors, moi, j'ai eu peur,
00:37:44mais pas à cause du mauvais temps,
00:37:45à l'instant où on le vit.
00:37:46J'ai eu peur, dans cet épisode-là,
00:37:48à un moment où je perds le contact
00:37:50de la cordée qui est devant.
00:37:52Et là où je me dis,
00:37:53là, on est en train de faire de la merde.
00:37:57Parce que...
00:37:58La cordée, c'est quoi ?
00:37:59C'est une corde entre vous ?
00:38:00On a deux cordées,
00:38:01c'est-à-dire qu'on est encore...
00:38:02Trois fois deux ?
00:38:03La cordée, c'est ce qui relie
00:38:04chaque individu à une corde.
00:38:05Non, deux fois trois.
00:38:06On a deux fois trois.
00:38:07On est déjà bien engagé dans le mauvais temps,
00:38:09on est en train de traverser une pente
00:38:11très raide et très chargée en neige.
00:38:14Et on doit passer un des ponts rocheux.
00:38:16La cordée qui est devant dit,
00:38:17OK, on va faire une reco pour jeter un coup d'œil.
00:38:21Ils laissent leur poule qu'il y a sur place
00:38:22et ils partent en marchant,
00:38:23enfin, ils partent avec les skis,
00:38:24mais le plus léger possible.
00:38:26Et là, je me dis,
00:38:27là, on fait n'importe quoi.
00:38:28Avec les conditions qu'il y a en ce moment,
00:38:30ils peuvent disparaître
00:38:31et on les retrouvera jamais.
00:38:33Et là, je pense que j'ai un vrai moment
00:38:35de peur et d'angoisse.
00:38:36Peut-être qu'au final,
00:38:37ça a duré dix minutes ou un quart d'heure.
00:38:39Moi, j'ai eu l'impression
00:38:40que ça a duré une heure.
00:38:41Et là, clairement, j'ai compris
00:38:43qu'on était allé trop loin.
00:38:45Et en plus, en tant que chef,
00:38:47tu dois dire que tu as la responsabilité.
00:38:49On pense surtout à sa responsabilité humaine.
00:38:51Oui, c'est ça, c'est ça.
00:38:52Dans ce sens-là, c'est qu'il décède,
00:38:54tu dis que tu es chef.
00:38:55Bien sûr, j'étais mauvais
00:38:56parce que j'aurais dû les arrêter
00:38:57et leur dire non, stop, c'est trop,
00:38:59on va tout de suite faire demi-tour.
00:39:00Ce qu'on a fait immédiatement
00:39:01dès qu'ils sont revenus.
00:39:02Attends, la question d'un novice,
00:39:03je n'y connais rien,
00:39:04mais tu dis qu'on a fait deux fois trois personnes.
00:39:07Pourquoi vous n'êtes pas accrochés tous les six ?
00:39:10Après, il n'y a pas de raison.
00:39:12Alors si, il peut y avoir des raisons techniques.
00:39:14D'abord parce que dans l'encordement,
00:39:18il y a les pulkas aussi
00:39:19qui sont encordés aux hommes.
00:39:22Et après, pour s'encorder à six,
00:39:25si jamais il y a une cordée,
00:39:28par exemple un individu qui perd l'équilibre
00:39:30et qui part dans une pente
00:39:31et qui entraîne les autres,
00:39:32il ne vaut mieux pas qu'il entraîne les six personnes.
00:39:34C'est bien qu'il y ait encore une cordée valide
00:39:36pour les rechercher et les secourir.
00:39:38Là, on a l'extrait du film.
00:39:40On va le regarder ensemble.
00:39:42C'est le troisième jour.
00:39:44Nous l'avons baptisé le jour de la punition.
00:39:46Là, on est en train d'installer les tentes.
00:39:48Du moins, d'essayer de les installer.
00:39:49Là, par exemple,
00:39:50on va revenir sur ça,
00:39:51mais vous faites des trous.
00:39:53Tu fais des trous dans la neige
00:39:54pour installer la tente, c'est ça ?
00:39:55En plus, excuse-moi,
00:39:56mais je ne voyais pas bien.
00:39:57Là, on est en train de creuser un trou
00:39:59pour juste se créer un espace de discussion.
00:40:02Un endroit où on va pouvoir parler et s'entendre.
00:40:05Juste pour discuter ?
00:40:06Voilà.
00:40:07On en est là.
00:40:08Dans l'absolu,
00:40:09ce trou pourrait peut-être aussi nous permettre
00:40:11de nous abriter pour survivre.
00:40:13Mais la neige est tellement dure
00:40:15que même après deux heures de bataille pour creuser,
00:40:19on se retrouve dans une tanière,
00:40:21dans un endroit où on sait qu'on ne pourra pas passer la nuit.
00:40:24Si on passe la nuit là,
00:40:26on va en ressortir dans un très mauvais état.
00:40:29Par contre, cet abri,
00:40:31il nous met à l'abri du vent,
00:40:33il nous permet de discuter entre nous
00:40:35et d'établir comment on va procéder en sortant du trou
00:40:38pour aller poser notre camp quelque part.
00:40:40Il y a un vent énorme là.
00:40:44Je ne comprends pas comment vous avez réussi
00:40:47à installer une tente.
00:40:49Déjà une tente au camping,
00:40:50on met une heure et demie à planter les sardines là.
00:40:53Comment vous arrivez à planter la tente
00:40:55avec un vent pareil et qu'elle tienne ?
00:40:57C'est des tentes spéciales ?
00:40:59Non, c'est des tentes prévues pour les expéditions d'alpinisme.
00:41:03On ne savait pas qu'on allait y arriver.
00:41:05On s'est dit que c'était le seul moyen de s'en sortir,
00:41:07c'est d'essayer de le faire.
00:41:09Quand on est ressortis de ce trou,
00:41:12on avait prévu toute la coordination,
00:41:14c'est-à-dire qu'on pouvait agir sans avoir besoin de discuter.
00:41:17Ce qui est important parce qu'avec le vent qu'il y a,
00:41:19on ne peut pas échanger.
00:41:21On s'était préparés, on s'était coordonnés.
00:41:24Quand on est sortis, chacun savait ce qu'il devait faire
00:41:27et comment on allait procéder.
00:41:29On est repartis en cherchant la zone la plus propice
00:41:31à poser des tentes, la plus plate possible.
00:41:33Ce qu'on ne voit pas sur la vidéo, c'est que ce n'est pas plat du tout.
00:41:35On est dans une pente assez importante.
00:41:37Après, on savait comment on allait s'organiser entre nous
00:41:40pour monter la tente, c'est-à-dire qu'on a monté les tentes
00:41:43une par une, en se mettant à six par tente
00:41:45pour les tenir, pour que rien ne s'envole
00:41:47parce que la moindre chose est arrachée par le vent.
00:41:51Qui filme ?
00:41:53Cette image, c'est moi qui l'ai filmée.
00:41:56Toute l'expédition est filmée par nous, les gens du groupe.
00:41:59C'est François qui filme et moi.
00:42:01Il n'y a pas de cadreur ?
00:42:02Il n'y a pas de cadreur.
00:42:03Il n'y a pas de place pour…
00:42:04De toute façon, il y a de la place pour personne d'autre que nous
00:42:06dans cette expédition parce qu'il fallait que tous les membres
00:42:08de l'expédition soient capables de prendre la direction
00:42:10de l'expédition à n'importe quel moment.
00:42:13Donc, on n'a pas de médecin, on n'a pas de cadreur,
00:42:16on n'a pas de fusilier, on n'a rien de tout ça.
00:42:18Tout ça, c'est nous qui le faisons nous-mêmes.
00:42:19Là, tu as envie d'aller filmer au moment où, déjà,
00:42:21vous avez du mal à vous dire si vous allez survivre ?
00:42:24Ce qui me motive, c'est que j'ai conscience qu'on est en train
00:42:27de faire quelque chose qui est hors norme,
00:42:29qu'il faut absolument ramener un témoignage
00:42:32parce que les récits écrits des gens qui ont fait
00:42:35des trucs absolument incroyables, on en a lu plein avant de partir.
00:42:38On n'est jamais certain que ce soit vrai.
00:42:40Il y a beaucoup de littérature dans l'exploration
00:42:43et je voulais qu'on ramène une preuve absolue
00:42:50de ce qu'on avait réalisé.
00:42:53On n'aurait pas été cette équipe-là,
00:42:55on serait peut-être restés là-haut.
00:43:00Après avoir démonté le camp, au bout d'une demi-heure
00:43:02de progression, la météo s'est vraiment dégradée.
00:43:04Les vents étaient tellement violents qu'on a décidé
00:43:08de faire demi-tour et d'essayer de retrouver l'emplacement
00:43:11de bivouac qu'on avait abandonné le matin pour remonter
00:43:13les tentes, se mettre à l'abri.
00:43:15Et on n'a pas pu, on a été bloqués sur place
00:43:18par les conditions météorologiques.
00:43:23On n'arrive tellement plus à se parler,
00:43:25il y a le stress qui monte, on ne comprend plus
00:43:27ce qui nous arrive, on est dans quelque chose de nouveau.
00:43:29Tout le monde en parle, d'une tempête de vent,
00:43:31à Darwin on sait qu'il y a du vent,
00:43:33mais quand on ne l'a pas vécu, on ne se rend pas compte.
00:43:35Il a quel âge ? Il l'avait quel âge à l'époque ?
00:43:37Il y en avait qui étaient plus jeunes que d'autres ?
00:43:39Je ne sais pas, il devait avoir dans les 24 ans.
00:43:42C'est le plus jeune de l'équipe.
00:43:44Et tous les mecs qui sont avec vous sont extrêmement fiables ?
00:43:46Oui.
00:43:47C'est-à-dire que tu les connaissais par cœur,
00:43:49tu savais que tu pouvais leur faire confiance,
00:43:51tu pouvais se faire confiance à 100% sans arrière-pensée.
00:43:54Ça vous a rapproché de faire ça ?
00:43:56Oui, bien sûr, forcément.
00:43:58On est déjà très proches quand on part.
00:44:00C'est sûr que c'est un souvenir d'une aventure commune
00:44:05qui est extrêmement puissant,
00:44:07il y en a que je croise plus souvent,
00:44:09d'autres que je croise régulièrement,
00:44:11on en reparle inévitablement.
00:44:13Toujours de façon un peu simple,
00:44:15on n'aime pas trop rentrer dans le détail,
00:44:17c'est toujours un peu émouvant encore.
00:44:19Là, on vous voit creuser vraiment.
00:44:21On ne pouvait pas communiquer, on ne pouvait pas prendre de décision.
00:44:23Donc on a creusé un trou.
00:44:30On a creusé, on s'est posé dans notre trou,
00:44:33il y a eu quelques minutes où on ne se parlait pas,
00:44:38et je pense que chacun devait se dire
00:44:40« là c'est chaud, là ».
00:44:41On pense juste à survivre.
00:44:43On pense juste à survivre.
00:44:46On a été trempé, il y a une espèce de neige qui s'infiltre de partout.
00:44:50Après ça va vite, on peut vite avoir des gelures.
00:44:53Dimitri était quand même pas loin,
00:44:54il n'arrivait pas à se réchauffer,
00:44:55donc il a pu changer par exemple.
00:44:57J'avais fait pas mal la trace.
00:44:58J'allais vous demander comment vous changez,
00:45:00pour changer de vêtements,
00:45:02vous avez prévu juste deux tenues par exemple,
00:45:04si vous êtes mouillé le soir, comment vous faites pour faire sécher ?
00:45:07Alors déjà on a pris très très peu de vêtements,
00:45:09puisque c'est du poids,
00:45:10donc globalement on a juste
00:45:13un ou deux slips de rechange,
00:45:15un collant et un sous-vêtement de rechange.
00:45:19On a quasiment rien.
00:45:20Et on fait sécher nos vêtements le soir,
00:45:23sous la tente, dans la tente.
00:45:25Comme on n'a pas de source de chaleur autre que notre corps,
00:45:27finalement on fait sécher les vêtements sur nous.
00:45:29C'est vrai ?
00:45:30Oui.
00:45:31Ça veut dire qu'ils ne sèchent pas ?
00:45:32Si, ils sèchent,
00:45:33parce que quand même le corps dégage une certaine chaleur.
00:45:35Quand on est sous la tente à l'abri du vent,
00:45:37malgré tout avec la chaleur corporelle,
00:45:39le peu d'humidité qui est stockée dans les sous-vêtements,
00:45:42il finit par s'échapper.
00:45:44La nourriture que vous emmenez sur vous
00:45:46pendant une expédition aussi longue,
00:45:47pendant un mois,
00:45:48elle gèle tout le temps,
00:45:49à part une fois un ou deux degrés,
00:45:50mais elle ne gèle pas la bouffe ?
00:45:52C'est aussi pour ça qu'on prend du lyophilisé,
00:45:54parce qu'à la fois c'est plus léger,
00:45:55mais à la fois il n'y a pas de risque de gel.
00:45:59Tu ne manges rien d'autre que du lyophilisé ?
00:46:01Non.
00:46:02En plus du lyophilisé,
00:46:03on a quelques barres énergétiques.
00:46:05Et puis on a une rondelle de saucisson
00:46:08et 20 grammes de fromage.
00:46:11C'est ton seul plaisir gustatif.
00:46:14Pour l'hygiène, vous vous lavez comment ?
00:46:17On ne se lave pas.
00:46:19C'est difficile de se laver.
00:46:21Déjà, produire de l'eau coûte de l'énergie,
00:46:24de l'énergie humaine,
00:46:25mais surtout du carburant.
00:46:27On est partis en mesurant au gramme
00:46:29ce qu'on allait emporter.
00:46:30Donc même en carburant,
00:46:31on a évalué notre besoin en carburant
00:46:34pour faire à manger
00:46:35et pour faire de l'eau pour boire,
00:46:36ce qui est vital.
00:46:37On n'a pas de carburant
00:46:39pour faire une bassine d'eau chaude
00:46:41pour se laver.
00:46:43On n'a pas prévu de se laver.
00:46:45Après, on peut faire une petite toilette
00:46:47avec un fond de casserole d'eau chaude.
00:46:49Oui, qui reste.
00:46:50Mais ça reste vraiment la petite toilette...
00:46:53Oui, de chat.
00:46:54Voilà.
00:46:55C'est ça, c'est ça.
00:46:56Ah oui, c'est le minimum, vraiment.
00:46:58Tu dois être content de rentrer après aussi.
00:47:00Quand t'arrives.
00:47:02Donc la punition,
00:47:04elle dure combien de temps ?
00:47:06La punition, c'est la journée et la nuit.
00:47:09Mais la partie punition, c'est vraiment la journée.
00:47:11Une fois qu'on arrive réussi à monter les tentes
00:47:13dans l'après-midi et qu'on est dessous,
00:47:15on retrouve une forme de confort.
00:47:19On n'est pas du tout confortable
00:47:21parce qu'en plus les tentes sont écrasées,
00:47:24battues par le vent, etc.
00:47:26Mais on n'est plus directement exposé au vent
00:47:29et puis on peut mettre quelque chose de chaud,
00:47:32on peut se mettre dans le duvet,
00:47:33on peut se préparer à manger.
00:47:34Donc là, on retrouve déjà un peu de confort.
00:47:38La punition, c'est vraiment la partie
00:47:40où on est dehors exposé
00:47:41et on ne sait pas si on va s'en sortir.
00:47:43Là aussi, on a pris cher.
00:47:44Vous avez un petit but à gaz ?
00:47:46On a des petits réchauds à essence.
00:47:48Parce que le gaz, c'est pas très efficient
00:47:51dans les conditions froides ou d'altitude.
00:47:55Et en termes d'emport,
00:47:57l'essence est beaucoup plus rentable.
00:47:59Par exemple, je peux transporter un litre d'essence
00:48:01dans une bouteille d'eau type...
00:48:03Et ça pèse rien.
00:48:05Une bouteille de gaz pour 250 ml de gaz,
00:48:08j'ai toute l'enveloppe métallique que je transporte.
00:48:10Vous devez réfléchir à chaque chose comme ça,
00:48:13c'est incroyable.
00:48:14Quand vous êtes le soir,
00:48:16vous avez juste le temps de dormir,
00:48:18vous avez quand même le temps un peu de parler,
00:48:20ne serait-ce que d'autres choses.
00:48:21Enfin, pas d'autres choses,
00:48:22parce que vous ne faites que ça.
00:48:23Mais est-ce que vous avez le temps
00:48:24d'avoir des discussions avec ton binôme ?
00:48:27Notamment sur la première partie du séjour,
00:48:31jusqu'au 13e jour où on prend vraiment cher
00:48:34et jusqu'au 14e jour.
00:48:35C'est-à-dire que là, en 14 jours,
00:48:37on a progressé de 27 km à vol d'oiseau
00:48:42sur un parcours qui en fait 130.
00:48:45Donc on n'a quand même pas fait grand-chose.
00:48:47On a fait un quart et on a passé 14 jours.
00:48:51C'est-à-dire que...
00:48:52La moitié ?
00:48:53Pratiquement la moitié de notre nourriture.
00:48:55Donc toutes les journées du 2e jour au 14e jour,
00:48:59c'est des journées difficiles,
00:49:01avec beaucoup de tensions, etc.
00:49:02On est véritablement concentrés du matin au coucher
00:49:05sur ce qu'il faut faire,
00:49:06avec beaucoup de préoccupations
00:49:07sur ce qu'on va faire le lendemain.
00:49:08Il n'y a pas beaucoup de sujets de discussion en ex.
00:49:11Les sujets de discussion en ex,
00:49:12ils vont arriver plus tard dans l'expé,
00:49:14quand on commence à se sentir un peu libérés,
00:49:17quand ça va mieux,
00:49:18quand on arrive à avancer vite.
00:49:20Est-ce qu'il y a des engueulades ?
00:49:22Est-ce qu'il y a des moments,
00:49:23des gars qui perdent leur sang-froid ?
00:49:24Vous n'avez pas filmé,
00:49:25mais des moments qui peuvent se comprendre parfois,
00:49:27de peur, de mélange de stress ?
00:49:29Il n'y en a pas eu beaucoup.
00:49:30Il y en a eu une ou deux.
00:49:31Mais ce n'est pas non plus...
00:49:32Il y a eu une ou deux engueulades,
00:49:34des fois pour des choses un peu...
00:49:35Toujours pour des choses insignifiantes.
00:49:37La tranche de saucisson.
00:49:38La tranche de saucisson,
00:49:39mais qui, finalement,
00:49:40se résolvent assez rapidement
00:49:41parce que le reste du groupe intervient
00:49:43pour apaiser...
00:49:45Ah, tout de suite ?
00:49:46Tout de suite.
00:49:47C'était un brief de départ ?
00:49:48De dire s'il y a des engueulades, des machins,
00:49:50il faut que tout le monde accepte ?
00:49:51Non, je pense que c'est une prise de conscience
00:49:53de tout le monde
00:49:54qu'on ne peut pas se permettre
00:49:55d'avoir de la zizanie dans le groupe
00:49:58sur quelque chose qui demande autant de...
00:50:00Concentration.
00:50:01Concentration et de travail d'équipe.
00:50:03Vous avez accéléré le rythme, après,
00:50:04ou c'est devenu plus facile ?
00:50:05Comment vous avez rattrapé 130 km ?
00:50:07Vous n'en étiez qu'à 30, à peu près, 27.
00:50:10Sur la moitié du temps,
00:50:11quand vous avez rattrapé ça ?
00:50:12Eh bien, le terrain est devenu plus facile.
00:50:14Voilà.
00:50:15D'une part, on a eu des journées
00:50:16de météo plus clémentes.
00:50:19Et là, on s'est aperçus
00:50:21qu'on pouvait se déplacer beaucoup plus vite.
00:50:24Mais c'est entièrement lié au fait
00:50:26que le terrain était plus simple
00:50:28et la météo plus clémente.
00:50:30Après, vous arrivez au 20e jour,
00:50:32crête du mont Darwin, justement.
00:50:34Vous arrivez au moment crucial de la traversée.
00:50:35C'est entre le mont Shipton et le mont Darwin.
00:50:38Il y a une espèce de crête.
00:50:39Vous avez un choix.
00:50:40Vous passez par la face nord.
00:50:42On vous voit, en fait, voter dans une tente.
00:50:44Chacun votre tour,
00:50:45parce qu'il y a deux chemins possibles.
00:50:46Tout se fait en vote,
00:50:47tout se fait en décision de groupe ?
00:50:49Tout se fait en réflexion de groupe.
00:50:51Voilà.
00:50:52Où chacun doit exprimer son avis.
00:50:53Ce n'est pas le chef qui décide tout seul ?
00:50:54Ce n'est pas le chef qui décide tout seul.
00:50:56Parce qu'il faut que la solution soit construite.
00:50:59Une fois qu'elle est construite,
00:51:00chacun s'exprime sur son adhésion ou pas.
00:51:04Il faut que tout le monde adhère vraiment
00:51:06à la solution choisie
00:51:07pour être sûr que chacun mettra 100% de ses capacités
00:51:10à la réalisation de cette option
00:51:12et que dans les moments...
00:51:14Si jamais on a fait une erreur,
00:51:15ça peut arriver,
00:51:16ou si ça tourne mal,
00:51:18il n'y aura pas de dissension au sein du groupe
00:51:20avec des gens qui vont dire
00:51:21« Ouais, mais moi, je l'avais dit,
00:51:22ce n'était pas ça qu'il fallait faire. »
00:51:24Avec quelqu'un qui traîne des pieds.
00:51:25Il faut que tout soit parfaitement assumé par tout le monde.
00:51:28Il y a François qui dit
00:51:29« Moi, je veux rentrer chez moi. »
00:51:31Il dit ça en rigolant,
00:51:32mais il le pense un petit peu à un moment,
00:51:34et après...
00:51:37Ce moment-là, il est assez impressionnant,
00:51:39très impressionnant.
00:51:40Vous longez une crête,
00:51:41il y a tout votre matos.
00:51:43Il ne faut pas avoir le vertige à ce moment-là,
00:51:44mais de toute façon,
00:51:45il n'y en a aucun qui l'a dans le groupe,
00:51:46j'imagine, vu votre métier.
00:51:49Un extrait du film,
00:51:50vous êtes vraiment dans le vide.
00:51:52Là, tu n'as pas peur de, justement,
00:51:53l'éboulement, un morceau de neige qui se détache ?
00:51:56Non.
00:51:57Pourquoi ?
00:51:58D'abord, parce que l'arête,
00:52:00elle est impressionnante,
00:52:01mais elle nous paraît saine.
00:52:03Oui, vous êtes des très gros professionnels de la montagne.
00:52:06On a une bonne expérience.
00:52:07Tu sens si ça sent mauvais ou pas.
00:52:08Avant d'y aller avec les pulkas sur le dos,
00:52:10il y a une cordée qui l'a parcouru en mode léger.
00:52:14Ces grosses meringues de givre,
00:52:17et nous qui passons dessus avec nos pulkas,
00:52:19c'est hallucinant.
00:52:23Ce qui est impressionnant,
00:52:24c'est que de part et d'autre,
00:52:25les pentes sont très importantes
00:52:26et descendent directement sur la mer.
00:52:28C'est un endroit où la cordillère est extrêmement fine.
00:52:30C'est pour ça qu'il n'y a pas beaucoup de choix sur l'itinéraire.
00:52:32Vous n'avez pas à contourner, par exemple.
00:52:36Là, par exemple, c'est vraiment le vide.
00:52:38Là, c'est le vide,
00:52:39et c'est encore plus raide en dessous.
00:52:40En sachant que là, tu as pas loin de 70 kg,
00:52:43tu dis 75 kg de matériel.
00:52:45Donc là, la pulka est fortement allégée
00:52:47pour pouvoir l'attracter et absorber ses balancements.
00:52:50Mais en revanche,
00:52:51on a fait deux fois le trajet sur l'arête
00:52:54parce que la majorité du poids,
00:52:56il est porté dans le sac à dos.
00:52:59Et la pulka, elle est quasiment vide.
00:53:00À ce moment-là, vous changez le serre.
00:53:02Ah oui, oui, oui.
00:53:03On fait des allers-retours sur l'arête.
00:53:04Même si on sait que la marche est haute à droite,
00:53:07la marche est haute à gauche,
00:53:08on ne le voyait pas très bien
00:53:10et puis on était tellement concentrés
00:53:11que le vide, tu l'oublies.
00:53:13On a l'habitude de ça.
00:53:14T'es concentré sur ton pied gauche,
00:53:16il doit se poser là,
00:53:17ton pied droit, il doit se poser là.
00:53:19Je pense que pour tous les membres de l'Expé,
00:53:21c'est un des plus beaux moments
00:53:22de sa vie d'alpiniste.
00:53:24C'est le vide vraiment absolu.
00:53:26À la fois, c'est absolument incroyable
00:53:28comme arête suspendue comme ça au-dessus du vide.
00:53:31Et en plus, pour nous,
00:53:32c'est le moment clé de l'expédition.
00:53:35En franchissant cette ligne de crête,
00:53:38on sait qu'on a réussi.
00:53:39Là, c'est le premier moment
00:53:40où tu arrives à profiter vraiment et avoir…
00:53:43Non, il y a eu des moments avant
00:53:44qui étaient plaisants,
00:53:45mais on avait toujours la pression
00:53:48de se demander si on allait y arriver ou pas.
00:53:50Là, tu sais que si tu passes ça,
00:53:51c'est gagné ?
00:53:52Là, on sait qu'on a gagné.
00:53:53Ce passage de pique, il dure combien de temps ?
00:53:56Alors, il dure deux jours.
00:53:59Ce passage qui est filmé,
00:54:00lui, il ne dure pas deux jours
00:54:01parce que l'arête n'est pas toujours aussi effilée.
00:54:03Parfois, elle est un peu plus large.
00:54:05Mais globalement,
00:54:06cette arête qui s'étend entre le mont Chilton
00:54:08et le mont Darwin,
00:54:09qui sont les deux plus hauts sommets de la Cordillière,
00:54:11on les parcourt en deux jours.
00:54:13Et on y passe deux nuits.
00:54:14Après cette arête,
00:54:15vous commencez à amorcer la descente.
00:54:17Vous voyez la photo qui s'affiche.
00:54:18On vous voit slalomer sur une pente à 3 degrés
00:54:21sur 27 kilomètres.
00:54:23Là, ça doit être agréable.
00:54:24Là, on y a cru.
00:54:25C'est-à-dire que sur les premiers kilomètres de glisse,
00:54:28on était vraiment heureux.
00:54:30C'était vraiment des petits cris de joie, etc.
00:54:33Mais la Cordillière s'est vite rappelée à nous.
00:54:36C'est-à-dire qu'en réalité,
00:54:37on a vite été arrêté par une grosse chute de seracs.
00:54:40Qu'est-ce que c'est qu'une chute de seracs ?
00:54:42Une chute de seracs, c'est un endroit...
00:54:43Alors, le glacé, c'est une rivière,
00:54:44sauf que c'est une rivière qui est gelée.
00:54:46Voilà.
00:54:47La rivière peut avoir une profondeur de 50 centimètres,
00:54:50mais surtout, sur les glaciers,
00:54:51c'est plutôt de l'ordre de 70 à parfois
00:54:54plusieurs centaines de mètres d'épaisseur.
00:54:56Et quand cette rivière gelée,
00:54:58elle fait un...
00:55:00Par exemple, elle plonge comme une cascade
00:55:04à cet endroit-là.
00:55:05Comme l'eau, elle est gelée,
00:55:07elle n'a aucune souplesse,
00:55:08et elle se craquelle.
00:55:09OK.
00:55:10Ça craque.
00:55:11Et du coup, toutes ces fissures qui se forment,
00:55:12ce sont comme des grosses crevasses.
00:55:15Et au bout d'un moment,
00:55:16avec la verticalité de la chute d'eau,
00:55:18qui est de la glace,
00:55:19les blocs de glace tombent.
00:55:22Et ça fait des...
00:55:23Ils tombent, voilà.
00:55:24Donc, on appelle ça une chute de seracs.
00:55:27D'accord.
00:55:28Et donc, vous êtes bloqué.
00:55:29Et là, on est bloqué.
00:55:30Et finalement, on ne va pas faire 27 kilomètres
00:55:34sur une pente à 3 %
00:55:35pour descendre tranquillement jusqu'en bas.
00:55:37Ce n'est pas une piste bleue non plus.
00:55:38Il va falloir remonter, chercher,
00:55:41trouver un nouvel itinéraire,
00:55:42contourner la chute de seracs.
00:55:44Et ça va nous amener à faire une nuit supplémentaire
00:55:46qu'on n'avait pas imaginé à ce moment-là
00:55:48sur le glacier de la Cordillière.
00:55:51Vous arrivez,
00:55:52après avoir parcouru 250 kilomètres,
00:55:55donc en 30 jours,
00:55:56vous n'avez plus de nourriture ?
00:55:58Il vous en reste un peu d'avance ?
00:55:59Non.
00:56:00En fait, il nous reste beaucoup de nourriture
00:56:01parce que le 13e jour,
00:56:04après on s'est pris la journée,
00:56:07la grosse correction,
00:56:09le lendemain,
00:56:10on a fait une journée de repos sous la tente,
00:56:12le 14e jour,
00:56:13et on a réfléchi à ce qu'on allait faire,
00:56:15comment on allait le faire, etc.
00:56:17Et dans tout ce qu'on a établi,
00:56:19on s'est dit à partir de maintenant,
00:56:20comme on a beaucoup de retard,
00:56:22parce qu'on avait comme fait
00:56:23qu'un quart du parcours
00:56:24avec la moitié de la nourriture,
00:56:25on avait décidé d'économiser
00:56:27journellement de la nourriture
00:56:29pour essayer de durer plus longtemps.
00:56:31De se rationner ?
00:56:32Voilà.
00:56:33Donc on a commencé à se rationner.
00:56:34Ce qui a été difficile
00:56:36parce qu'après avec des journées d'efforts,
00:56:38on souffre de la faim, etc.
00:56:41Mais quand on franchit la rête
00:56:45qu'on a vue sur la vidéo,
00:56:47on la franchit finalement
00:56:48dans un temps optimal.
00:56:50On ne s'attendait pas
00:56:51à pouvoir la franchir aussi rapidement.
00:56:52Et là, on a tellement économisé de nourriture
00:56:54que c'est l'opulence.
00:56:56Là, on a beaucoup à manger.
00:56:58Donc les repas qui suivent cette traversée,
00:57:00ce ne sont pas des orgies,
00:57:02mais ça s'en rapproche.
00:57:04C'est des orgies de bouffe
00:57:05lyophilisée, calmons-nous !
00:57:07Non mais ça fait du bien !
00:57:08Quand on peut manger un sachet de plus,
00:57:09on a l'impression que c'est...
00:57:10C'est Noël !
00:57:12Vous parlez de quoi quand vous arrivez ?
00:57:14Qu'est-ce qui se passe ?
00:57:16Déjà, on ne parle pas.
00:57:18Au début, on ne parle pas.
00:57:19Les premières minutes, on ne parle pas.
00:57:20On savoure.
00:57:21On savoure le plaisir.
00:57:23Et puis, on parle de l'expé.
00:57:28Vous êtes silencieux d'émus.
00:57:29Oui, on est très silencieux.
00:57:30Chacun est un peu dans sa bulle.
00:57:34Parce qu'émus, parce que usés ?
00:57:36Oui, parce qu'émus,
00:57:37il y a un peu de tout.
00:57:38Après, on est usés.
00:57:39Comme au marathon.
00:57:40Beaucoup plus dur, évidemment.
00:57:42Mais quand tu finis un marathon,
00:57:43il y en a qui pleurent.
00:57:44Il y en a qui ne pleurent pas.
00:57:46Tout le monde se dit...
00:57:48Parce que c'est l'aboutissement.
00:57:51Et puis, au bout de quelques minutes,
00:57:53on commence à échanger,
00:57:55à parler un peu de tout,
00:57:57mais surtout de l'expé qu'on vient de vivre.
00:58:00Peut-être qu'on commence à parler
00:58:02de ses doutes, à ce moment-là.
00:58:04C'est là où on commence à dire
00:58:05que ce jour-là, ça avait été difficile
00:58:08ou j'ai eu l'impression de vivre ça.
00:58:10Et on échange sur des choses
00:58:11qu'on n'aurait pas dit pendant l'expé
00:58:12pour ne pas atteindre le moral des autres,
00:58:14par exemple.
00:58:15Oui, pour ne pas les inquiéter.
00:58:16Parce que dans l'expé,
00:58:19personne ne confie ses inquiétudes aux autres
00:58:20parce que ce n'est pas positif
00:58:21de partager ses inquiétudes.
00:58:23Ça ne peut que générer
00:58:25ou encourager l'autre
00:58:26à avoir les mêmes inquiétudes.
00:58:28Ce n'est pas faux, ça.
00:58:30Vous appelez vos familles ?
00:58:33Oui.
00:58:34Oui, tout de suite, quand même.
00:58:35Est-ce qu'il y en a qui pleurent de bonheur ?
00:58:38Qui relâchent ?
00:58:39Je n'ai pas vu.
00:58:40Non, on n'a pas pleuré.
00:58:41C'est vrai ?
00:58:42En fait, pendant toute la traversée,
00:58:44je me dis que quand on va arriver,
00:58:46ça va être comme dans les films.
00:58:47On va arriver à l'océan,
00:58:48on va mettre les bras au croix,
00:58:49on va se tomber dans l'eau,
00:58:50tous les images d'épinal qu'on a.
00:58:52En fait, il n'y a rien de tout ça qui se passe.
00:58:54C'est-à-dire qu'on arrive,
00:58:55on a juste envie de se poser,
00:58:57de regarder le paysage
00:58:58et de se dire, c'est fini.
00:59:00Demain, il n'y a pas besoin de se lever.
00:59:03Il n'y a pas besoin de plier la tente.
00:59:05Il n'y a pas besoin de faire chauffer de la neige
00:59:07pour avoir de l'eau.
00:59:12Ensuite, vous finissez par arriver
00:59:13à votre destination finale.
00:59:14C'est dans la baie de Yendegaya.
00:59:20Vous dormez où ?
00:59:22On dort dans une cabane.
00:59:23Toujours pas de chambre d'hôtel ?
00:59:25Non, il n'y a pas de ville, il n'y a pas d'hôtel.
00:59:28Il y a deux cabanes,
00:59:30une qui est totalement désertée
00:59:32et une autre qui est habitée
00:59:33par un Chilien qui vit là tout seul
00:59:37ou épisodiquement en couple,
00:59:40toute l'année.
00:59:41C'est un vrai gesteur.
00:59:44C'est l'homme de la pampa
00:59:46qu'on imagine l'image d'Epinal.
00:59:50C'est un rude qui ne parle pas beaucoup
00:59:53et qui mène une vie incroyable.
00:59:57Ensuite, vous rentrez à l'ambassade.
00:59:59C'est l'ambassade qui vous a réservé des chambres d'hôtel.
01:00:01L'ambassade française ?
01:00:02Oui, l'ambassade française à Santiago du Chili.
01:00:05Ils vous ont payé une chambre d'hôtel ?
01:00:06Oui, c'est sympa.
01:00:07C'est sympa ?
01:00:08Qu'est-ce que ça fait de dormir dans une chambre d'hôtel ?
01:00:12C'est quelque chose qu'on n'avait pas imaginé avant.
01:00:16Le fait de rentrer dans une chambre d'hôtel
01:00:17et de se retrouver seul,
01:00:18on s'est tous senti mal à l'aise.
01:00:20C'est vrai ?
01:00:21Parce qu'il nous manquait notre compagnon.
01:00:24Ah, waouh !
01:00:26En fait, on a échangé.
01:00:29Au petit-déjeuner, on s'est tous retrouvés.
01:00:31Quand je suis rentré dans ma chambre,
01:00:32la plus grosse envie que j'ai eue,
01:00:34c'est de ressortir et d'aller chercher un gars
01:00:36et de lui dire, tu viens dormir avec moi ?
01:00:37C'est vrai !
01:00:39Ah, waouh !
01:00:40Parce que tu t'habitues à la présence,
01:00:41tu vis à deux pendant un mois ?
01:00:42Oui, je pense qu'on s'était tellement habitués
01:00:46à vivre ensemble.
01:00:47Incroyable !
01:00:48Plus que sur n'importe quel autre expé.
01:00:49J'en ai fait plein des expé.
01:00:50J'ai fait une vingtaine d'expéditions
01:00:51un peu partout dans le monde.
01:00:53J'ai jamais ressenti des choses aussi fortes.
01:00:55Que là-bas ?
01:00:56Que là-bas.
01:00:57T'as fait l'Himalaya, t'as fait plein de choses.
01:00:58Je suis allé en Himalaya.
01:00:59Oui, t'as fait beaucoup de choses.
01:01:00Je suis allé un peu partout.
01:01:01C'est la première fois où tu retrouves ce...
01:01:04Ça fait un peu frère d'armes, quoi.
01:01:05Non, mais complètement, bien sûr.
01:01:07C'est comme un retour de mission.
01:01:09On était habitués à vivre avec des gens
01:01:10pendant quatre mois ou pendant six mois.
01:01:12Et puis, d'un seul coup, ces gens ne sont plus là.
01:01:14Alors, il faut un petit sas de décompression.
01:01:16C'est ce qui se fait sur le plan militaire.
01:01:18Ils font ça.
01:01:19Ça ne le faisait pas avant.
01:01:20Voilà, et ça, c'est important
01:01:21parce qu'il faut sortir tout doucement
01:01:23du conditionnement dans lequel on s'est mis
01:01:25pour la mission.
01:01:28Et le lit ?
01:01:30C'est agréable ?
01:01:31Ouais, le lit, c'est agréable,
01:01:32mais finalement, pas plus que le matelas.
01:01:36C'est vrai ?
01:01:38Est-ce que si c'était à refaire, tu le referais ?
01:01:41Est-ce que t'aurais envie de refaire un truc comme ça ?
01:01:43Non, parce que ça a déjà été fait.
01:01:48Est-ce qu'il reste des choses à faire ?
01:01:49Parce que le monde, petit à petit,
01:01:50va être parcouru de plus en plus par l'homme,
01:01:53à part sur ces zones, évidemment,
01:01:54très arides ou très dures.
01:01:58Est-ce qu'il reste des choses à faire ?
01:02:00Je pense qu'il restera toujours des choses.
01:02:01Après, plus ça avance,
01:02:05plus les choses ont été découvertes
01:02:06et moins il reste des projets d'ampleur
01:02:10comme ont pu en connaître nos anciens
01:02:13avec la première du Pôle Nord,
01:02:14la première du Pôle Sud, etc.
01:02:16C'était des jeunes pépites
01:02:17qu'on puisse encore faire une première
01:02:19de ce type-là en 2011.
01:02:23Vous avez le droit à quelques jours de repos après ?
01:02:25T'as pris des vacances ?
01:02:26Tu t'es reposé, physiquement ?
01:02:27Moralement, même ?
01:02:31Le repos n'est pas lié aux jours de vacances.
01:02:34Il est lié à la capacité à faire un vrai retour à la normale,
01:02:38psychologiquement,
01:02:40à 100%, à se relâcher.
01:02:42Et ça, c'était très différent en fonction des individus.
01:02:46Il y a des gens qui ont relâché la pression en rentrant,
01:02:49ou quelques semaines après.
01:02:51Pour d'autres, ça s'est produit plusieurs mois après.
01:02:54Ah oui, c'est vrai.
01:02:55Il a fallu quand même…
01:02:56Comme un trauma, quoi.
01:02:57Comme un trauma, sûrement, oui.
01:02:59Il faut le temps de récupérer longuement.
01:03:01François, il a arrêté la montagne après ça ?
01:03:05Non, il n'a pas arrêté la montagne.
01:03:07Il a quitté le groupe et il a quitté l'armée.
01:03:11C'est vrai ?
01:03:12Mais c'était programmé.
01:03:13Il avait dit que ce serait sa dernière expédition.
01:03:16Et il n'avait pas le souhait de poursuivre sa carrière militaire.
01:03:19Aujourd'hui, il travaille comme guide d'haute montagne
01:03:23et beaucoup aussi comme B.E. de parapente.
01:03:27Tu sais si d'autres personnes ont prévu de refaire la même chose que vous ?
01:03:30Est-ce qu'on vous a appelé pour avoir des conseils ?
01:03:32Alors, sur l'instant, on a été contactés.
01:03:34Même déjà à Santiago du Chili, on a fait une conférence de presse.
01:03:37Il y a une équipe chilienne qui avait déjà dans son palmarès
01:03:41pas mal de belles traversées,
01:03:43qui avait rêvé de le faire,
01:03:45qui n'avait pas réussi à monter l'expé,
01:03:47qui nous a demandé tous les éléments pour y aller.
01:03:49Et puis finalement, ils n'y sont pas allés.
01:03:51Même les Chiliens eux-mêmes, c'est vraiment dur dur.
01:03:55Tu es reparti dans de grandes expéditions.
01:03:57Juste deux ans après, au Tibet, au Chichapangma,
01:04:016 500 mètres, plus de 2 mètres de neige vous tombent dessus
01:04:04en moins de 48 heures.
01:04:07Tu as eu envie d'y retourner tout de suite ?
01:04:10Alors, je pense que oui, parce que ce sont des choses différentes.
01:04:13Autant personne n'avait envie de retourner faire une traversée
01:04:15comme la traversée de Darwin, et surtout pas la traversée de Darwin,
01:04:17puisqu'on est de l'affaire.
01:04:19Mais dès l'année suivante, on est reparti en expé en Inde,
01:04:23dans l'Himalaya.
01:04:24Et là, ce n'était pas sur le Chichapangma,
01:04:26mais sur une belle ascension.
01:04:27On a fait un sommet sur une montagne qui s'appelle le Kamet,
01:04:30qui a valu au groupe de recevoir un piolet d'or,
01:04:32qui est la plus haute distinction.
01:04:34C'est un peu les Césars de l'alpinisme.
01:04:38Et ça, c'était juste tout de suite après,
01:04:40parce qu'on est attiré par un nouveau défi.
01:04:45C'est presque addictif.
01:04:49En 2014, vous recommencez l'ascension,
01:04:51une ascension après un échec,
01:04:53donc l'échec de 2013, c'est ça ?
01:04:55C'est ça.
01:04:58Alors ça, c'est le Chichapangma.
01:04:59C'est ça, Chichapangma.
01:05:00C'est un des 14 8000 qui se trouve au Tibet.
01:05:03Et ça, c'est un épisode qui, pour moi,
01:05:06est vraiment important, même pour le groupe,
01:05:09mais pour le groupe au sens large,
01:05:10c'est-à-dire le groupe depuis sa constitution.
01:05:15Juste avant que j'arrive au GMHM, en 2003,
01:05:19le groupe est parti pour cette ascension
01:05:22et il y a eu un accident.
01:05:24Il y a deux membres du groupe qui sont morts.
01:05:27De ton groupe ?
01:05:28Oui, j'étais pas encore.
01:05:29Il y a deux membres du groupe qui meurent sur cette expédition.
01:05:31Ça a quand même été un véritable traumatisme.
01:05:34Derrière cette affaire,
01:05:35beaucoup de grimpeurs ont quitté l'équipe.
01:05:37Ils ont été remplacés.
01:05:38Je fais partie de ceux qui sont arrivés
01:05:40pour remplacer justement les gens
01:05:42qui avaient décidé de s'en aller.
01:05:45Et cet épisode dramatique,
01:05:47malgré tout, même si l'équipe avait été renouvelée,
01:05:49c'est quand même resté un traumatisme pour l'équipe.
01:05:53Et l'objectif, c'était en 2013, 10 ans après,
01:05:56de retourner là-bas.
01:05:58C'est ce que je m'étais fixé comme objectif.
01:06:01Pour faire cette ascension, pour tourner la page.
01:06:05Tourner la page pour pouvoir après se relancer
01:06:08sur des belles expéditions d'altitude.
01:06:10En 2013, on n'a vraiment pas eu de chance.
01:06:12On était à 6 500 mètres d'altitude sur le camp de base
01:06:17et on a pris un épisode de mauvais temps
01:06:20qui ressemble à de mousson.
01:06:21Et là, en espace de 48 heures,
01:06:23il a dû tomber 2,50 mètres de neige.
01:06:26Et vous avez réussi ?
01:06:28On a surtout réussi à s'enfuir.
01:06:30La deuxième fois ?
01:06:31Et l'année suivante, on y est retourné.
01:06:33En sachant que suite à l'épisode de 2013,
01:06:36on s'est enfui de la montagne, mais en mode survie.
01:06:40On a abandonné une grande partie de notre matériel
01:06:43qui est resté en place sur les camps.
01:06:46Mais là, par exemple, t'as pas peur ?
01:06:49Le peur de quoi ?
01:06:51De mourir, par exemple.
01:06:53Oui, bien sûr, il y a toujours cette peur.
01:06:55Mais ça, c'est la peur naturelle de l'alpiniste.
01:06:59C'est la peur qui lui évite de faire des bêtises,
01:07:02qui est nécessaire d'ailleurs.
01:07:04Parce que celui qui n'a pas peur,
01:07:06je pense qu'il ne vit pas très longtemps.
01:07:08Il finit par dépasser le raisonnable.
01:07:12Donc, il y a toujours cette petite peur.
01:07:14C'est celle qui nous guide sur la voie de la sagesse,
01:07:17de la prudence, etc.
01:07:18Mais ça ne nous empêche pas d'avoir le goût de l'aventure.
01:07:22Un peu de la prise de risque aussi,
01:07:24de nous guider.
01:07:26D'aimer l'adrénaline quand même.
01:07:30Tu avais des enfants à ce moment-là ?
01:07:31Non.
01:07:32Ou toujours pas ?
01:07:33Ah si !
01:07:34En 2014, la deuxième ?
01:07:36En 2013, ma femme est enceinte.
01:07:39Et en 2014, c'est la deuxième.
01:07:41Mais la deuxième fois où on y va, je suis papa.
01:07:44Et la deuxième fois, vous réussissez ?
01:07:46Alors moi, je ne suis pas dans les cordées.
01:07:47Pour moi, c'est clair, j'ai eu aussi un déclic
01:07:49en devenant père de famille.
01:07:51J'ai pu vu l'engagement sous le même angle.
01:07:54Et je suis resté dans mon rôle de chef d'expédition
01:07:57en tant que patron du groupe.
01:07:58Mais là, de chef d'expédition qui gère la partie
01:08:01camp de base, sécurité, etc.
01:08:04Et je ne faisais clairement pas partie des cordées
01:08:07qui devaient faire l'ascension.
01:08:08Ah oui, t'es resté en bas,
01:08:11dépréparé, comme un coach de foot.
01:08:13En fait, le rôle de chef d'expédition,
01:08:15à vrai dire, ça ne devrait pas être de grimper.
01:08:17Ça devrait être de gérer toute la partie logistique,
01:08:20entraînement, sécurité et médicale de l'expédition.
01:08:25Alors, avant, comme beaucoup de mes prédécesseurs,
01:08:29j'avais toujours le goût de faire partie des cordées.
01:08:31Mais ce n'est pas forcément ce qui est le plus judicieux.
01:08:36Mais ça, je ne le savais pas.
01:08:38Ça, je l'ai découvert en 2012,
01:08:41quand on fait le camet.
01:08:43Là, on part sur deux itinéraires différents.
01:08:46Il y a une partie du groupe qui va sur l'ouverture
01:08:48dans une face vierge.
01:08:49Et moi, je pars avec deux autres grimpeurs
01:08:51pour répéter une voie qui avait été ouverte
01:08:54vingt ans auparavant
01:08:56et qui n'avait jamais été répétée.
01:08:59Et pendant l'ascension,
01:09:02on perd le contact radio
01:09:04avec les gens qui sont dans l'autre face.
01:09:07Ce qui me met un énorme stress
01:09:09parce que j'imagine forcément le pire.
01:09:11Et donc, moi, j'abandonne l'ascension,
01:09:14ce qui oblige aussi mes deux compagnons
01:09:15de redescendre avec moi.
01:09:17Et on redescend au camp de base,
01:09:19on se yote à la jumelle.
01:09:21D'abord, on va fouiller le bas de la face
01:09:24pour être sûr de ne pas retrouver des camarades en bas
01:09:27ou pour porter secours peut-être
01:09:29à des gens qui seraient blessés
01:09:30pour les aider à redescendre.
01:09:33On ne voit rien d'anormal.
01:09:35En retournant au camp de base,
01:09:37on regarde à la jumelle
01:09:38et on s'aperçoit que les mecs sont en train de grimper
01:09:39et que tout a l'air de bien se passer.
01:09:41Mais on n'a plus de contact radio avec eux,
01:09:43plus de contact satellitaire non plus.
01:09:46Et là, je prends conscience que finalement,
01:09:48ma responsabilité de chef,
01:09:50ce n'est pas d'aller faire un sommet
01:09:51pendant que les autres vont faire un sommet.
01:09:53C'est d'être à l'endroit où on peut observer,
01:09:56coordonner les supports, etc.
01:09:59Et c'est pour ça aussi qu'après, en 2013-2014,
01:10:02je me sens beaucoup moins impliqué.
01:10:03Mais déjà en 2014,
01:10:04j'ai décidé que de toute façon,
01:10:05mon boulot, ce n'est pas de faire le sommet,
01:10:07c'était de gérer l'expédition.
01:10:09Aujourd'hui, qu'est-ce que tu fais ?
01:10:11Alors aujourd'hui,
01:10:12je suis à l'école militaire d'Haute-Montagne.
01:10:13Cette école, c'est aussi là
01:10:14que j'ai commencé ma carrière militaire
01:10:15puisque il y a 30 ans,
01:10:17je me suis engagé comme jeune civil.
01:10:19Je suis arrivé à l'école
01:10:20et j'ai débuté ma carrière ici.
01:10:22Aujourd'hui, j'y suis encore.
01:10:24C'est mon troisième passage.
01:10:26J'ai plein de fonctions dans cette école.
01:10:29On a une multicascade à l'armée.
01:10:31Mais une de mes fonctions, notamment,
01:10:32c'est de mettre au profit
01:10:34toutes mes compétences acquises
01:10:35pendant toutes ces années
01:10:36au groupe militaire d'Haute-Montagne,
01:10:38mais pas que,
01:10:39pour faire évoluer les équipements
01:10:42de l'armée de terre,
01:10:44plus particulièrement de notre brigade,
01:10:46mais aussi de toutes les unités
01:10:47qui auraient besoin de s'engager,
01:10:48pourquoi pas, dans le milieu froid.
01:10:50Donc, de faire évoluer ces équipements
01:10:52en faisant des...
01:10:54On a une cellule d'innovation
01:10:56qui permet de récupérer
01:10:58le retour d'expérience
01:11:00des corps de la brigade
01:11:01qui vont s'entraîner parfois
01:11:02dans le grand froid avec nos alliés,
01:11:04comme en ce moment,
01:11:05il y a l'exercice Call-Response
01:11:07qui se fait en Norvège,
01:11:09où on s'entraîne
01:11:10avec plein de pays de l'OTAN.
01:11:13Donc, prendre les retours d'expérience
01:11:15de ces unités,
01:11:16les retours d'expérience du GMHM,
01:11:18des travaux menés avec le CEATEC,
01:11:20par exemple,
01:11:21le Centre à l'énergie atomique de Grenoble,
01:11:23avec lequel on travaille beaucoup,
01:11:25et développer des futurs équipements
01:11:28qui vont nous aider
01:11:29à mieux nous engager
01:11:30dans ces milieux difficiles.
01:11:31Voilà, ça c'est une partie
01:11:32de mon boulot aujourd'hui.
01:11:33Tu prépares le futur, quoi.
01:11:34On prépare le futur.
01:11:35Pour les futurs soldats
01:11:36qui arriveront, etc.
01:11:39Je mettrai les liens
01:11:40de l'école de Haute-Montagne
01:11:41et tout ça,
01:11:42si tu veux bien,
01:11:43en cliquable sous la vidéo
01:11:44pour ceux que ça intéresse
01:11:45et ceux qui ont envie d'aller.
01:11:46Il faut être forcément,
01:11:47pour s'engager là-dedans,
01:11:48il faut être forcément solide
01:11:50sur ses appuis en montagne.
01:11:51Il faut être un enfant de la montagne.
01:11:53On peut arriver,
01:11:54découvrir un peu tout ça
01:11:55à 18 ans, 20 ans ?
01:11:56On peut arriver vierge
01:11:57de toute expérience en montagne
01:11:58et devenir un soldat de montagne.
01:11:59C'est important, ça,
01:12:00parce qu'il y en a
01:12:01qui ça peut faire rêver
01:12:02mais qui ne sont pas nés à Chamonix.
01:12:03Oui, bien sûr.
01:12:04Moi, je ne suis pas né à Chamonix.
01:12:05Moi, je suis né à côté d'ici.
01:12:06Je suis né à Levalois-Péret.
01:12:07Ah, c'est vrai ?
01:12:08Voilà.
01:12:09Et j'ai grandi à Paris.
01:12:10Donc, je ne suis pas l'enfant de la montagne.
01:12:13Et tu t'es devenu.
01:12:14Et je suis devenu, voilà.
01:12:16Merci beaucoup, Zanet, d'être venu.
01:12:18Merci mille fois d'être venu jusqu'à nous.
01:12:20C'est un plaisir de t'avoir
01:12:21et une fierté aussi d'entendre
01:12:23une belle histoire comme ça
01:12:25de militaires qui se sont dépassés,
01:12:26d'un groupe d'hommes français
01:12:27qui se sont dépassés
01:12:28et qui ont fait quelque chose
01:12:29que personne n'avait réussi
01:12:30ou pu faire avant.
01:12:32Donc, félicitations pour ça.
01:12:33Je vous mets le lien de la vidéo,
01:12:35si vous voulez aller le voir,
01:12:36le film documentaire en VOD
01:12:38qui s'appelle Sur le fil de Darwin.
01:12:39Il est en cliquable sous la vidéo, les amis.
01:12:41N'hésitez pas à commenter
01:12:42pour nous dire ce que vous en avez pensé,
01:12:43si vous voulez.
01:12:44À liker la vidéo,
01:12:45ça nous aide vraiment sur le référencement.
01:12:47À mettre la petite cloche comme ça
01:12:48quand il y a une nouvelle vidéo
01:12:49qui sort tous les mercredis,
01:12:50vendredis et dimanches.
01:12:51On se retrouve ici sur Légendes.
01:12:52Gros bisous à tous et à très vite.
01:13:05❤️ par SousTitreur.com