Il y a 100 ans Paris accueillait déjà les Jeux olympiques. Si la France de 1924 était à bien des égards différente de celle d'aujourd'hui, ces JO ont soulevé des problématiques communes à celles de 2024 sur le financement, les transports, les équipements ou la sécurité. Cette grande manifestation mondiale s'inscrit dans un contexte sociétal, culturel et politique bien particulier... Paris 1924 c'est la reconstruction après la guerre, le développement du sport de masse, les premières luttes pour la place des femmes dans les épreuves, la « peopolisation » des sportifs. Avec deux grandes absentes : l'Allemagne et la Russie. Ces jeux seront aussi l'occasion de toute une série d'innovations comme le premier village olympique ou la retransmission en direct des épreuves grâce à la TSF.
Nourri d'archives souvent inédites de Gaumont-Pathé, ce documentaire revient sur ces premiers Jeux modernes de l'Histoire qui verront le sacre de Paavo Nurmi, coureur finlandais hors norme ou de Johnny Weissmuller, nageur le plus rapide au monde et futur tarzan au cinéma.
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Nourri d'archives souvent inédites de Gaumont-Pathé, ce documentaire revient sur ces premiers Jeux modernes de l'Histoire qui verront le sacre de Paavo Nurmi, coureur finlandais hors norme ou de Johnny Weissmuller, nageur le plus rapide au monde et futur tarzan au cinéma.
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00:00:00Cette athlète qui titube et s'écroule restera l'une des images fortes des Jeux Olympiques de Paris en 1924.
00:00:22Comme toutes les Olympiades, celle-ci va connaître sa part de tragédie.
00:00:28Lors du Cross Country, la moitié des concurrents est contrainte d'abandonner, vaincue par la chaleur.
00:00:38Cette hécatombe signera la fin de la discipline aux JO.
00:00:42Mais ces Jeux ne se résument pas à se rater.
00:00:46Tout a été fait pour que ce rendez-vous soit au contraire une formidable réussite, un événement mondial spectaculaire.
00:00:54Il y a 100 ans, Paris accueillait déjà les JO.
00:01:01Pour ces Jeux qui vont révolutionner l'Olympisme, les plus grands sportifs ont répondu présents.
00:01:07Le Finlandais Pavo Nurmi, coureur de fond hors norme.
00:01:11L'escrimeur français Roger Ducré.
00:01:14Et le nageur le plus rapide du monde, Johnny Weissmuller, futur Tarzan au cinéma.
00:01:25Leurs exploits ont été immortalisés par les caméras.
00:01:28Et un siècle plus tard, ces images permettent de revivre avec la même émotion la première Olympiade si abondamment fine.
00:01:40Dans les années 20, le sport se démocratise.
00:01:43Et les champions deviennent les nouvelles idoles du public.
00:01:47Comme le boxeur Georges Carpentier et la joueuse de tennis Suzanne Langlène.
00:01:53Vers les années 20, c'est aussi la décennie des femmes.
00:01:56Libres et audacieuses, elles deviennent aviatrices ou voltigeuses.
00:02:01Mais elles doivent encore lutter pour se faire une place dans le domaine sportif.
00:02:09La France de 1924, c'est aussi un pays qui veut oublier les horreurs de la guerre.
00:02:15Et où la jeunesse aspire à s'amuser et à faire la fête.
00:02:19Un bouillonnement, symbole d'une décennie rebaptisée plus tard les années folles.
00:02:28À 100 ans d'intervalle, ces Jeux vont susciter les mêmes débats qu'en 2024.
00:02:34Financement, transport, équipement, prix des places, autant de sujets qui feront polémique.
00:02:41Mais ces Jeux ont aussi été l'occasion de toute une série d'innovations.
00:02:46Du premier village olympique à la retransmission en direct à la radio des épreuves.
00:02:52La France doit se montrer à la hauteur de l'événement, s'affirmer comme une grande nation sportive
00:02:58et faire de ces Jeux un vrai succès populaire et médiatique.
00:03:17En 1921, quand Paris se porte candidate pour organiser les Jeux olympiques,
00:03:23la France est en pleine reconstruction.
00:03:32C'est sur son sol qu'on trouve les Jeux olympiques,
00:03:35les Jeux olympiques de Paris, les Jeux olympiques de Paris,
00:03:39les Jeux olympiques de Paris, les Jeux olympiques de Paris,
00:03:44C'est sur son sol qu'ont eu lieu les bombardements les plus violents lors de la Première Guerre mondiale,
00:03:50laissant la place à un paysage de désolation.
00:03:58Près d'un million et demi d'hommes ont péri au combat.
00:04:05La guerre n'a d'ailleurs pas épargné les sportifs qui avaient été mobilisés.
00:04:10Certains joueurs de l'équipe de France de football ne sont pas revenus détranchés.
00:04:17Le cyclisme, dont la popularité allait grandissante avant 1914,
00:04:22a lui aussi payé cher le prix des combats,
00:04:25avec la disparition de trois anciens vainqueurs du Tour de France.
00:04:34Mais c'est surtout la perte d'un grand coureur de fond que la France pleure,
00:04:38Jean Bouin, qui a laissé son nom à de nombreux stades.
00:04:44Médaille d'argent du 5000 mètres lors des JO de Stockholm en 1912,
00:04:48triple champion du monde de crosse,
00:04:51il a été tué à seulement 25 ans.
00:04:58D'autres s'en sont sortis,
00:05:00mais il rentre terriblement marqué physiquement et psychologiquement.
00:05:05Sur près de 4 millions de blessés,
00:05:08on compte plus d'un million d'invalides et de mutilés,
00:05:11dont le retour à la vie quotidienne s'annonce très difficile.
00:05:18Un long parcours de rééducation commence.
00:05:21Il faut réparer les gueules cassées et les corps estropiés.
00:05:27Pour certains sportifs, ce retour à la vie est quasiment miraculeux.
00:05:34Avec sa mâchoire brisée et ses 22 dents arrachées par un tir allemand,
00:05:38le champion de France Eugène Kriki semblait perdu pour la boxe.
00:05:43Pourtant, 5 ans après la fin de la guerre,
00:05:47cet homme à la mâchoire de fer décroche le titre de champion du monde des poids purs.
00:05:56Le gouvernement français voit dans l'organisation des JO
00:05:59une occasion d'insuffler un peu d'optimisme
00:06:02et de restaurer le prestige national.
00:06:05Pourtant, Paris a dû se battre pour organiser ces JO.
00:06:09Los Angeles aussi est sur les rangs, comme elle le sera pour les JO de 2024.
00:06:14Tout comme Amsterdam, qui a la préférence du comité international olympique.
00:06:23Un homme va tout mettre en œuvre pour que la capitale française soit choisie.
00:06:28Cet homme, c'est Pierre de Coubertin.
00:06:31Historien, spécialiste de pédagogie,
00:06:34il milite pour l'introduction du sport dans les écoles françaises.
00:06:40C'est lui qui, 30 ans plus tôt, a bataillé pour faire revivre les JO.
00:06:45Convaincu de l'importance du sport dans la formation des individus,
00:06:49il souhaite le populariser en organisant un rendez-vous mondial.
00:06:55Cette compétition doit aussi servir à promouvoir la paix.
00:07:01A la tête du comité international olympique,
00:07:04Pierre de Coubertin sait qu'à presque 60 ans, il va bientôt devoir céder sa place.
00:07:09Mais auparavant, il forme un dernier vœu.
00:07:12Que sa ville natale, Paris, organise la prochaine édition des JO.
00:07:18C'est aussi une façon de prendre sa revanche.
00:07:21Paris a déjà accueilli les JO en 1900,
00:07:24mais les épreuves ont été éclipsées par l'exposition universelle.
00:07:29D'ailleurs, à l'époque, ils ne s'appellent pas JO,
00:07:32mais concours internationaux d'exercice physique et de sport.
00:07:37Un véritable camouflet pour Pierre de Coubertin.
00:07:42Alors, quand le CIO finit par accéder à sa demande,
00:07:45le père des JO moderne entend faire de Paris une capitale unique de l'olympisme.
00:07:59Gaston Dumergue ne boute pas son plaisir ce 5 juillet 1924.
00:08:04Dans la tribune officielle, aux côtés de chefs d'État et de têtes couronnées
00:08:08comme le prince de Galles, le prince Carole de Roumanie,
00:08:11le chat de Perse et le futur empereur d'Éthiopie, Haïlé Sélassié,
00:08:16le président de la République assiste, enthousiaste,
00:08:19à la traditionnelle célébration des JO.
00:08:233088 sportifs, représentant 44 nations, défilent sur la piste.
00:08:30Seuls 29 pays étaient représentés lors des Jeux d'Anvers, 4 ans plus tôt.
00:08:37Pour la première fois, le président de la République
00:08:40et le président de l'Assemblée nationale de l'Olympique de Paris
00:08:43s'intéressent à l'Olympique de Paris.
00:08:45Pour la première fois, la Pologne, l'Équateur, l'Irlande
00:08:50ou encore l'Uruguay participent aux JO.
00:08:54L'Allemagne est absente, bannie depuis la Première Guerre mondiale.
00:08:59L'Union soviétique n'est pas présente non plus,
00:09:02considérant les Jeux comme un symbole
00:09:04de la dégénérescence bourgeoise de l'Occident.
00:09:08C'est la France qui est la seule à participer aux JO.
00:09:11C'est la France qui présente le plus d'athlètes en compétition,
00:09:14devant les Américains et les Britanniques.
00:09:18Si les femmes ouvrent la marche de la délégation,
00:09:21elles demeurent très largement minoritaires dans l'ensemble du cortège.
00:09:26135 femmes au total, sur plus de 3000 athlètes,
00:09:30soit 4% des participants.
00:09:36Le porte-drapeau des Français,
00:09:38c'est Géo André, l'athlète complet,
00:09:41comme le surnomme la presse sportive de l'époque.
00:09:45Avec un geste inspiré du salut romain de l'Antiquité,
00:09:48il prête serment au nom de tous les participants.
00:09:58C'est Gaston Doumergue qui déclare l'ouverture des Jeux
00:10:01et le comte Clary, président du Comité national olympique,
00:10:05loue dans un discours très lyrique le stade de Colombe,
00:10:08un stade édifié pour la plus grande gloire du sport,
00:10:11du sport régénérateur des races,
00:10:14bienfaiteur de l'humanité.
00:10:18Ce stade de Colombe, situé au nord-ouest de Paris,
00:10:21va accueillir les épreuves phares de la compétition.
00:10:25Pourtant, ce n'était pas le premier choix des organisateurs.
00:10:29La ville, à 8 km des portes-drapeaux,
00:10:32était jugée trop éloignée pour attirer le public.
00:10:35Et surtout, elle a l'image d'une banlieue populaire,
00:10:38avec ses usines,
00:10:40à l'opposé de la vision romantique de Paris
00:10:43que la France entend mettre en avant.
00:10:49Au moment de l'attribution des Jeux,
00:10:52la capitale française rêve d'un tout autre site.
00:10:55Elle envisage la construction, à côté de Paris,
00:10:58d'un stade de Jeux,
00:11:00de 100 000 places.
00:11:03Au début des années 1920,
00:11:05le sport est devenu un spectacle
00:11:08et de plus en plus de pays se dotent d'un grand stade.
00:11:13Pour les Jeux Olympiques de 1908,
00:11:16Londres a fait construire le White City Stadium,
00:11:19avec plus de 90 000 places.
00:11:22Paris espère faire encore plus grand.
00:11:25Mais le projet est rapidement abandonné
00:11:28car jugé trop cher.
00:11:30L'heure est aux économies.
00:11:35Après la guerre,
00:11:37l'Etat a dû s'endetter pour financer la reconstruction.
00:11:40Et il ne peut pas satisfaire
00:11:42toutes les demandes du comité organisateur.
00:11:46La fragilité des finances publiques
00:11:49s'accompagne d'une très forte inflation.
00:11:52La ville de Paris rechigne, elle aussi,
00:11:55à voter les subventions promises
00:11:58et souhaite que le terrain alloué pour les JO
00:12:01coûte le moins cher possible.
00:12:03Il va donc falloir faire
00:12:05avec les infrastructures déjà existantes.
00:12:08Le conseil municipal propose de mettre à disposition
00:12:11le stade Pershing du bois de Vincennes.
00:12:15Mais le comité olympique français
00:12:18préfère le parc des Princes.
00:12:20S'engage alors un bras de fer
00:12:22qui va durer près d'un an.
00:12:25Voyant les Français dans l'impasse,
00:12:28les Etats-Unis vont même jusqu'à proposer
00:12:31de reprendre la main
00:12:33en organisant les jeux à Los Angeles.
00:12:36La solution viendra finalement d'un acteur privé,
00:12:39le Racing Club de France.
00:12:41A l'époque, le Racing,
00:12:43c'est le plus grand club omnisport de l'ouest de Paris.
00:12:46Il propose d'aménager son terrain de Colombes
00:12:49en échange de la moitié des recettes des JO.
00:12:53C'est donc bien Colombes
00:12:55qui sera le centre névralgique des jeux.
00:12:58Baptisé aujourd'hui Yves-du-Manoir,
00:13:01ce stade reste à l'honneur en 2024
00:13:04en accueillant les JO pour la 2e fois
00:13:07avec les épreuves de hockey sur gazo.
00:13:10Mais en 1924, Colombes reste un choix par défaut
00:13:13et son éloignement pose un problème de transport
00:13:16car c'est déjà l'une des préoccupations majeures
00:13:19des organisateurs.
00:13:23La presse ne manque d'ailleurs pas une occasion
00:13:26de les épingler à ce sujet.
00:13:28On redoute des embouteillages monstres sur les routes
00:13:31permettant d'accéder au nord de Paris.
00:13:34Plusieurs pistes sont alors envisagées.
00:13:37D'abord, prolonger une ligne du métro.
00:13:40Depuis la fin du 19e siècle,
00:13:43Paris s'est doté d'un réseau
00:13:46qui compte à présent une dizaine de lignes.
00:13:49Elles permettent de se déplacer facilement
00:13:52mais uniquement intramuros.
00:13:57Cette extension du métro sera rapidement abandonnée.
00:14:02On envisage également un train aérien,
00:14:05un projet qui reste lui aussi sans suite.
00:14:10On va finalement opter pour la mesure la plus simple
00:14:13et la moins chère.
00:14:15Le renforcement de la voie ferroviaire
00:14:18et l'aménagement d'une gare à proximité du stade.
00:14:25Ces améliorations ne seront pas sans conséquences
00:14:28pour les usagers puisque le prix du billet
00:14:31aller-retour entre la gare Saint-Lazare et Colombes
00:14:34va être multiplié par 3,
00:14:37passant de 1,70 francs à 5 francs.
00:14:42Pour éviter l'accueil des transports en commun,
00:14:45les plus malins vont préférer se rendre au stade
00:14:48par leurs propres moyens.
00:14:55La capitale voit fleurir de nouveaux engins
00:14:58comme cet ancêtre du scooter.
00:15:01Baptisée la Scootamota,
00:15:04cette sorte de patinette à moteur
00:15:07réservée à ceux qui possèdent un bon équilibre
00:15:10remporte un vif succès.
00:15:13Cette trottinette qui ressemble à celle
00:15:16qui circule dans la capitale aujourd'hui.
00:15:19Parfaitement maniable et pratique à transporter.
00:15:24On ne sait pas si la cohabitation avec les piétons
00:15:27posait déjà problème,
00:15:30mais elle permet de gagner rapidement Colombes.
00:15:37Avec les travaux du stade et la construction
00:15:40de tennis commence également la mise en place
00:15:43d'une installation qui va révolutionner les Jeux.
00:15:46Le Village Olympique, le premier du genre.
00:15:49Une soixantaine de petites maisons en bois
00:15:52sont construites pour loger les athlètes du monde entier.
00:15:58Cette cité est dotée d'un bureau de poste,
00:16:01d'un salon de coiffure et même d'un restaurant.
00:16:05Mais cela ne suffit pas à faire taire les critiques
00:16:08sur le confort très sommaire des baraquements
00:16:11boudés par certaines délégations.
00:16:14Les Britanniques décident d'embaucher leurs propres cuisiniers.
00:16:17Les Américains vont préférer le château de Rocancourt
00:16:20dans les Yvelines.
00:16:34La question de l'hébergement est cruciale.
00:16:37Avec ses 3 millions d'habitants contre à peine 2 millions aujourd'hui,
00:16:40Paris connaît une grave crise du logement.
00:16:47Comment la capitale, qui manque déjà de place pour ses habitants,
00:16:50va-t-elle pouvoir accueillir les dizaines de milliers
00:16:53de touristes attendus pour les Jeux ?
00:16:57Certains hôteliers peu scrupuleux ont trouvé la solution
00:17:00en expulsant leurs locataires.
00:17:03Ils en profitent au passage pour augmenter leurs tarifs.
00:17:07Pour éviter cette spéculation,
00:17:10on crée un nouvel office en charge du logement.
00:17:13Cet organisme s'occupe de mettre en relation
00:17:16les particuliers qui veulent louer une chambre chez eux
00:17:19et les voyageurs étrangers.
00:17:22Cet ancêtre d'une plateforme bien connue aujourd'hui
00:17:25va faciliter les séjours à Paris et permettre aux passionnés
00:17:28d'assister aux grands spectacles du sport.
00:17:33En 1924, la discipline reine des JO,
00:17:36c'est déjà l'athlétisme,
00:17:39et en particulier le 100 mètres.
00:17:42Et en 1924,
00:17:45le pays qui domine ces épreuves,
00:17:48ce sont déjà les Etats-Unis.
00:17:51Pourtant, ce sont pas seulement les Jeux,
00:17:54mais aussi l'athlétisme.
00:17:57Les Jeux de Paris,
00:18:00ce sont déjà les Etats-Unis.
00:18:03Pourtant, ce 7 juillet, jour de la finale,
00:18:06les Américains vont être mis en difficulté.
00:18:09Sur la ligne de départ,
00:18:12dans les starting blocks qui n'ont pas encore été brevetés,
00:18:15le britannique Harold Abrahams
00:18:18prend place aux côtés des deux favoris américains.
00:18:22Abrahams va créer la surprise
00:18:25en étant le coureur le plus rapide de la course.
00:18:28En 10 secondes et 6 dixièmes,
00:18:31le britannique décroche la médaille d'or
00:18:34en égalant le record olympique.
00:18:37Un autre britannique, Eric Liddell,
00:18:40va lui aussi se faire remarquer.
00:18:43D'abord, en renonçant aux 100 mètres,
00:18:46car les premiers jeux de Paris
00:18:49se tiennent un dimanche, jour du Seigneur,
00:18:52et pour ce fervent chrétien,
00:18:55impossible de renoncer au repos dominical,
00:18:58même pour une médaille olympique.
00:19:01Liddell se rattrapera le 11 juillet,
00:19:04un vendredi,
00:19:07en s'imposant lui aussi
00:19:10face aux Américains dans le 400 m.
00:19:13Il racontera aux journalistes
00:19:16« J'ai couru les premiers 200 m
00:19:19aussi vite que j'ai pu,
00:19:22et pour les 200 m suivants, avec l'aide de Dieu,
00:19:25j'ai couru encore plus vite. »
00:19:28Les exploits d'Abrahams et Liddell
00:19:31seront au cœur de l'intrigue
00:19:34du célèbre film aux 4 Oscars,
00:19:37Les chariots de feu.
00:19:46Si les Américains ont dû s'incliner
00:19:49sur le 100 et le 400 m,
00:19:52ils auront leur revanche sur le 200 m et le 400 m.
00:20:00La presse relaie les exploits de ces athlètes
00:20:03et le pays tout entier s'enflamme.
00:20:06Car depuis une dizaine d'années,
00:20:09les Français se mettent au sport
00:20:12et les Anglais et les Américains
00:20:15se mettent au sport.
00:20:18Avant la guerre,
00:20:21la France compte peu d'adeptes.
00:20:24Le sport n'est pas considéré
00:20:27comme une affaire sérieuse.
00:20:30Sur 40 millions d'habitants,
00:20:33quelques 400 000 personnes seulement,
00:20:36de milieux très aisés,
00:20:39y consacrent du temps.
00:20:43Pour s'occuper entre deux batailles
00:20:46et pour oublier l'horreur des combats,
00:20:49les soldats se mettent à l'exercice physique.
00:20:52Les officiers ont compris
00:20:55que le sport pouvait aider les troupes
00:20:58à tuer leurs cafards.
00:21:01Ils demandent qu'on leur envoie
00:21:04des gants de boxe et des ballons.
00:21:07Pour les poilus, originaires le plus souvent de la campagne,
00:21:10c'est l'occasion de toucher pour la première fois
00:21:13un ballon de foot ou de rugby.
00:21:16Ils sont initiés par les soldats britanniques.
00:21:23En 1917, le phénomène prend encore de l'ampleur
00:21:26avec l'entrée en guerre des Américains
00:21:29qui vont importer la notion de compétition.
00:21:36Des rencontres sont organisées
00:21:39par les équipes militaires.
00:21:42L'une d'elles va même faire l'événement le 8 avril 1917.
00:21:45Ce jour-là, un match de rugby
00:21:48oppose la France et la Nouvelle-Zélande.
00:21:51Pour la première fois,
00:21:54les spectateurs français assistent
00:21:57à une étrange danse guerrière, le haka.
00:22:05La Nouvelle-Zélande ne fera qu'une bouchée de la France
00:22:08qui a battu 40 à 0.
00:22:11Mais cette défaite a peu d'importance
00:22:14face à l'immense foule venue assister à la rencontre.
00:22:17Après la guerre,
00:22:20cet engouement pour le sport ne se démentira plus.
00:22:34Le 11 novembre 1918,
00:22:37une foule en liesse envahit les rues de la capitale.
00:22:40Elle célèbre la nouvelle qu'elle attendait depuis 4 ans.
00:22:43Les prisonniers retrouvent enfin la liberté.
00:22:49Désormais, il faut organiser le retour
00:22:52de plusieurs millions de soldats dans leur foyer.
00:22:55Ce qui est loin d'être une mince affaire.
00:22:58Cette démobilisation va durer 2 ans.
00:23:03Pour faire patienter les anciens combattants,
00:23:06on organise une grande manifestation sportive.
00:23:12Au début de l'été 1919, des Jeux interalliés
00:23:15se tiennent dans le bois de Vincennes, au stade Pershing,
00:23:18dont la construction vient tout juste de s'achever.
00:23:211500 soldats de 18 nations
00:23:24s'affrontent, sans armes cette fois,
00:23:27pour décrocher une médaille.
00:23:30Une compétition qui résonne comme une répétition générale
00:23:33des Jeux que Paris organisera 5 ans plus tard.
00:23:45Désormais, le sport n'est plus réservé à une élite.
00:23:48Mais il se diffuse dans les couches
00:23:51les plus populaires de la société.
00:23:54Devant des foules impressionnantes,
00:23:57on organise dans tout le pays des meetings d'athlétisme.
00:24:04Des courses de vélo,
00:24:07comme le surprenant critérium cycliste
00:24:10des porteurs de journaux.
00:24:13Ou encore des matchs de hockey sur gazon.
00:24:16On découvre de nouveaux sports,
00:24:19comme le volet que les soldats américains
00:24:22ont importé pendant la guerre.
00:24:25Les Français se passionnent pour des activités étonnantes.
00:24:33Des courses de patin-cycle ont lieu au bois de Boulogne.
00:24:39Cet ancêtre du roller permet de contenter
00:24:42autant les adeptes du patin et du ski
00:24:45que de la bicyclette.
00:24:48La Seine constitue aussi
00:24:51un formidable terrain de jeu pour les Parisiens.
00:24:54Ces engins ne s'appellent pas encore des pédalos,
00:24:57mais des nautilettes
00:25:00qui permettent de faire d'agréables balades sur l'eau.
00:25:03On se paie même le luxe de se baigner dans la Seine.
00:25:06Chaque année,
00:25:09la traversée de Paris à la nage
00:25:12réunit des dizaines de professionnels et d'amateurs
00:25:15pour le plus grand bonheur du public
00:25:18qui se presse le long des berges.
00:25:21Le sport se démocratise
00:25:24et il laisse émerger de nouveaux héros.
00:25:31A l'image des vedettes de la chanson
00:25:34et des stars de cinéma,
00:25:37les grands sportifs sont adulés par le public.
00:25:40Le boxeur Georges Carpentier,
00:25:43premier Français à être sacré champion du monde Milourd,
00:25:46est l'une des personnalités les plus connues à l'époque.
00:25:49Il n'hésite pas d'ailleurs
00:25:52à faire le show devant la caméra
00:25:55qui le suit jusqu'aux Etats-Unis
00:25:59La presse s'intéresse à leurs exploits sportifs
00:26:02mais aussi à leur vie privée.
00:26:05Quelques années plus tard,
00:26:08les journalistes vont s'inviter au mariage de Jules Ladoumeg,
00:26:11spécialiste de la course de fond,
00:26:14sacré 4 fois champion de France.
00:26:17Chez les femmes,
00:26:20la première grande vedette s'appelle Suzanne Langlain,
00:26:23un nom bien français qui se transforme en Langlaine
00:26:26quand la joueuse devient une championne internationale.
00:26:29Son parcours alimente les colonnes des journaux
00:26:32autant pour son coup droit que pour ses jupes
00:26:35qu'elle est la première à raccourcir.
00:26:38Sa notoriété est telle
00:26:41qu'elle influence même la mode.
00:26:44Ses tenues créées par le couturier Jean Patou
00:26:47mais aussi son bandeau
00:26:50sont reprises et copiées par les femmes de la rue.
00:26:54Alors que Paris mise sur celle qu'on surnomme la divine,
00:26:57Suzanne Langlain sera la grande absente
00:27:00des JO de 1924.
00:27:03Une jaunisse l'oblige à déclarer forfait
00:27:06dès le deuxième tour des épreuves.
00:27:09Mais cette Olympiade va être l'occasion
00:27:12de découvrir une autre star.
00:27:24L'athlète qui va dominer les courses de fond
00:27:27est un Finlandais de 27 ans.
00:27:30Il s'appelle Pavo Nurmi.
00:27:35Ses performances presque surhumaines
00:27:38vont susciter à la fois la stupéfaction
00:27:41et l'admiration.
00:27:44Ce 10 juillet, il est à peine 16h
00:27:47quand il prend le départ du 1500m.
00:27:50Rapidement, Nurmi devance les autres coureurs
00:27:53et termine l'épreuve en tête.
00:27:58Pour lui, c'est presque une formalité.
00:28:02Alors que ses concurrents se remettent difficilement
00:28:05de l'effort accompli,
00:28:08l'infatigable Finlandais ne va pas s'arrêter là.
00:28:12Moins de deux heures après cette première victoire,
00:28:15il se lance dans le 5000m.
00:28:18Et là encore, il l'emporte.
00:28:24Deux médailles d'or en l'espace de quelques heures seulement.
00:28:27Du jamais vu.
00:28:30Pour la presse, c'est du pain béni.
00:28:33Mais Pavo Nurmi ne joue pas le jeu des journalistes.
00:28:36Présenté comme froid, distant
00:28:39et même manquant d'humanité,
00:28:42il évite les caméras et les photographes.
00:28:46Le journal Le Miroir des Sports
00:28:49le présente même comme le type parfait du misanthrope,
00:28:52fuyant ses coéquipiers et ne serrant jamais la main
00:28:55de ses rivaux après une course, comme c'est l'usage.
00:28:59Nurmi sera quand même célébré comme le premier athlète
00:29:02à décrocher cinq médailles d'or en une seule édition.
00:29:10L'un de ses titres, il va l'obtenir dans l'épreuve
00:29:13la plus controversée de la compétition,
00:29:16le Cross Country.
00:29:2138 athlètes prennent le départ.
00:29:24Ils ne savent pas encore que cette course de dix kilomètres
00:29:27sur un terrain accidenté va se transformer en cauchemar.
00:29:32Cette compétition a été organisée en tout début d'après-midi,
00:29:35à l'heure la plus chaude de la journée.
00:29:39En plein soleil, le thermomètre frôle les 45 degrés
00:29:42et monte même, sur une partie du tracé, jusqu'à 60 degrés.
00:29:48Après quelques kilomètres seulement,
00:29:51certains sportifs sont pris de malaise.
00:29:54Ils sont contraints d'abandonner tout au long du parcours.
00:30:04Deux d'entre eux doivent même être évacués
00:30:07vers l'hôpital le plus proche.
00:30:13Sur les 38 participants au départ,
00:30:1615 seulement terminent l'épreuve.
00:30:19La fin d'un chemin de croix.
00:30:22Sauf pour notre invincible Pavo Nurmi,
00:30:25qui finit la course en tête.
00:30:33Les journalistes raconteront qu'il franchit la ligne d'arrivée
00:30:36frais comme une rose.
00:30:40Il a même 1 minute 30 d'avance sur le deuxième,
00:30:43son compatriote Villeritola.
00:30:47Mais devant l'hécatombe,
00:30:50les organisateurs décident de retirer le cross-country
00:30:53du programme olympique.
00:30:56Ce ne sera pas le seul revers de la compétition.
00:31:10Le rugby à 15 va également connaître des déboires
00:31:13lors des Jeux de 1924.
00:31:16A l'époque, le tournoi se résume à 3 pays.
00:31:19La France, les Etats-Unis et la Roumanie.
00:31:24En finale, face aux Américains,
00:31:27les tricolores sont donnés largement favoris.
00:31:30Mais contre toute attente,
00:31:33ce sont les Américains qui dominent la partie.
00:31:37Quand 2 joueurs français sont évacués
00:31:40après des plaquages tout à fait réglementaires,
00:31:43les spectateurs se déchaînent.
00:31:46Au coup de sifflet final,
00:31:49sur le score de 17 à 3,
00:31:52la foule redouble de fureur.
00:31:55Loin de l'esprit olympique,
00:31:58elle siffle la levée du drapeau américain.
00:32:01Certains vont même s'en prendre physiquement aux supporters.
00:32:04Le rugby à 15 ne sera plus au programme olympique
00:32:07et le ballon ovale ne fera son retour qu'à Rio en 2016
00:32:10dans sa version à 7.
00:32:13Une autre discipline très populaire
00:32:16va elle aussi disparaître des Jeux.
00:32:34Sur les cours construits près du stade de Colombes,
00:32:37tout semble réuni pour que le spectacle soit au rendez-vous.
00:32:40Les joueurs français en compétition
00:32:43ne sont pas encore des stars,
00:32:46mais ils vont bientôt dominer le tennis mondial
00:32:49sous le nom des mousquetaires.
00:32:52Jean Borotra, René Lacoste,
00:32:55Jacques Brugnon et Henri Cochet.
00:32:58C'est sur ces 4 noms que reposent les espoirs de médaille.
00:33:05Il n'y aura finalement pas de titre olympique français,
00:33:08mais à eux 4, ils remportent tout de même 3 médailles.
00:33:17Chez les femmes, en l'absence de Suzanne Langleyne,
00:33:20c'est une autre française qui va se distinguer sur les cours.
00:33:25Julie Vlastow parvient à décrocher la médaille d'argent
00:33:28face à la favorite, l'américaine Ellen Wills.
00:33:31La qualité des échanges est bien présente,
00:33:34mais l'organisation des matchs est l'objet de vives critiques.
00:33:38Les joueurs se plaignent du comportement des spectateurs
00:33:41qui pénètrent sur les cours pour prendre des photos.
00:33:46A la même époque, le tennis se professionnalise.
00:33:49Les joueurs rémunérés pour la pratique de leur discipline
00:33:52ne peuvent plus participer au JO
00:33:55ou ne sont admis que les sportifs amateurs.
00:33:58Le tennis va donc être écarté des jeux pendant 60 ans.
00:34:03Cette décision va priver les femmes
00:34:06d'une des rares disciplines qui leur sont accessibles.
00:34:09Car elles n'ont le droit de concourir que dans des sports
00:34:12jugés féminins comme le tennis, la natation,
00:34:15les scrims ou la voile.
00:34:18Hors de question pour elles de participer
00:34:21à une course d'athlétisme jugée trop violente.
00:34:24On cherche ainsi à protéger leur féminité et leur fécondité.
00:34:39Pourtant, pendant la Première Guerre mondiale,
00:34:42les Françaises ont eu l'occasion de démontrer
00:34:45qu'elles n'étaient pas ces petites personnes fragiles
00:34:48auxquelles on aimerait les réduire.
00:34:51A la campagne, elles vont remplacer les hommes mobilisés
00:34:54en effectuant les moissons et les vendanges.
00:34:57On compte sur elles pour nourrir le front.
00:35:05Dans les usines aussi, elles jouent un rôle de premier plan.
00:35:08Déjà présentes dans certains secteurs
00:35:11comme le luxe et le textile,
00:35:14elles sont les premières à s'intégrer
00:35:17et rejoignent les lignes de production d'armement.
00:35:20Surnommées les munitionnettes,
00:35:23ces ouvrières possèdent des bras solides
00:35:26pour tourner des obus plus de dix heures par jour.
00:35:33Le reste des emplois traditionnellement réservés aux hommes
00:35:36est également occupé par des femmes.
00:35:39Conductrices de tramway,
00:35:42transports de voitures,
00:35:45conductrices de tramway ou de taxi,
00:35:50postières ou encore balayeuses.
00:35:53Les femmes ont joué un rôle primordial
00:35:56et à la fin de la guerre,
00:35:59elles comptent bien s'en servir pour conquérir de nouvelles libertés.
00:36:04Leur émancipation va passer par la libération du corps.
00:36:09Pour cela, elles vont pouvoir s'appuyer sur l'engagement
00:36:12d'un certain nombre de figures,
00:36:15comme la comédienne Musidora,
00:36:18qui bouleverse la représentation féminine au cinéma.
00:36:21Dans le film « Les vampires » de Louis Feuillade,
00:36:24elle interprète le rôle d'Irma Vep,
00:36:27la première femme fatale française sur grand écran.
00:36:30Bien avant Catwoman et Batman,
00:36:33elle se montre dans cette combinaison très moulée de soie noire,
00:36:36à l'époque où les femmes portent encore des jupons et des corsets.
00:36:39Sa silhouette féline embrase le cinéma.
00:36:43Le film en dix épisodes,
00:36:46remplit les salles obscures
00:36:49et Musidora devient l'actrice la plus populaire
00:36:52et la plus emblématique du cinéma européen.
00:36:58Avec ses grands yeux noirs soulignés de côles
00:37:01et son teint diaphane,
00:37:04elle est vénérée par les poilus pendant la Première Guerre
00:37:07et devient l'icône des surréalistes.
00:37:10Actrice, mais aussi réalisatrice,
00:37:13elle adapte deux romans de Colette, son amie,
00:37:16elle aussi figure libre et indépendante de ce début de siècle.
00:37:20Ses modèles vont inspirer les femmes après la guerre.
00:37:25Suivant l'exemple de Musidora,
00:37:28les françaises abandonnent la rigidité des corsets
00:37:31pour des tenues droites, plus confortables.
00:37:34Une silhouette androgyne
00:37:37qui s'accompagne du raccourcissement des jupes et des robes.
00:37:40Les cheveux, eux aussi, sont plus courts,
00:37:43avec cette fameuse coupe à la garçonne.
00:37:48Une mode qui sera aussi une véritable aubaine
00:37:51pour tous les coiffeurs de France.
00:37:57La garçonne a d'abord été un phénomène littéraire.
00:38:00C'est le titre d'un ouvrage qui sort en 1922.
00:38:03Son auteur, Victor Marguerite,
00:38:06y raconte les aventures d'une jeune femme indépendante
00:38:09menant une vie sexuelle très libre,
00:38:12alternant les partenaires masculins et féminins.
00:38:15A l'époque, l'ouvrage est qualifié de pornographique
00:38:18et son auteur est radié de la Légion d'honneur.
00:38:22Le livre, que n'aurait sans doute pas boudé Musidora,
00:38:25sera un formidable succès de librairie.
00:38:34En apparence, plus rien n'arrête les femmes.
00:38:37Pour la 1re fois, une aviatrice, Adrienne Boland,
00:38:40effectue la traversée de la Cordillère des Andes,
00:38:43quand d'autres cessaient à la haute voltige
00:38:46et même au saut en parachute.
00:38:54Avec la fin de l'ouvrage,
00:38:57les femmes ne peuvent plus s'éloigner
00:39:01Avec la libération du corps,
00:39:04c'est tout l'univers du sport qui s'ouvre aux femmes.
00:39:07Feminasport, le 1er club uniquement féminin,
00:39:10a été créé dès 1912.
00:39:16Il organise chaque année de grands meetings
00:39:19où se produisent des sportifs de haut niveau.
00:39:22Les femmes parviennent même à faire céder
00:39:25un bastion traditionnellement masculin, le football.
00:39:31Dans les années 20,
00:39:34Feminasport est comparable à ce que l'Olympique lyonnais
00:39:37est au football féminin aujourd'hui.
00:39:40Les joueuses vont gagner à 10 reprises
00:39:43le championnat de France.
00:39:46Au niveau international aussi,
00:39:49elle s'impose avec à leur tête Madeleine Braquemont,
00:39:52la capitaine de la 1re équipe de France féminine.
00:39:56Cette attaquante hors-pair
00:39:59que le pays surnomme affectueusement Mado,
00:40:02incarne l'image de la sportive par excellence.
00:40:07Dans ce reportage qui pourrait s'intituler
00:40:10« La femme idéale »,
00:40:13elle paraît aussi à l'aise sur un terrain de football ou de rugby
00:40:16qu'avec une raquette de tennis ou un fleuret à la main.
00:40:21Sans oublier pour autant
00:40:24les activités bien féminines de l'époque.
00:40:37Pourtant, cette soif de liberté
00:40:40ne s'accompagne pas des grands changements de société
00:40:43réclamés par les femmes.
00:40:46Alors que les Allemandes, les Anglaises, les Hollandaises
00:40:49obtiennent le droit de vote,
00:40:52des lois extrêmement répressives sont votées
00:40:55comme celle de 1920
00:40:58interdisant l'information sur la contraception et l'avortement.
00:41:02Dans le domaine sportif aussi,
00:41:05le combat des femmes est loin d'être gagné.
00:41:08Malgré leurs performances,
00:41:11elles n'ont pas le droit de participer aux épreuves
00:41:14les plus emblématiques des Jeux olympiques.
00:41:17Pour le rénovateur des Jeux, Pierre de Coubertin,
00:41:21je n'appauvre pas personnellement
00:41:24la participation des femmes à des concours publics,
00:41:27ce qui ne signifie nullement
00:41:30qu'elles doivent s'abstenir de pratiquer un grand nombre de sports,
00:41:33mais sans se donner en spectacle.
00:41:36Aux Jeux olympiques, leur rôle
00:41:39devrait être surtout, comme aux anciens tournois,
00:41:42de couronner les vainqueurs.
00:41:45On doit conclure que le véritable héros olympique
00:41:48est à mes yeux l'adulte mâle individuel.
00:41:53Si la misogynie de Pierre de Coubertin
00:41:56est souvent pointée du doigt,
00:41:59ses déclarations sont le fruit à la fois
00:42:02de son milieu d'origine et de son époque.
00:42:05Mais les femmes ne vont pas se laisser faire.
00:42:08Celle qui prend la tête de la fronde,
00:42:11c'est Alice Mia.
00:42:14Issue d'un milieu modeste,
00:42:17elle pratique l'aviron à haut niveau
00:42:20et s'est illustrée en natation et en hockey sur gazon.
00:42:23Elle va tenir tête à Pierre de Coubertin.
00:42:26Puisque les hommes ne veulent pas
00:42:29des femmes aux JO,
00:42:32Alice Mia organise en 1922 à Paris
00:42:35des Olympiades réservées uniquement aux femmes.
00:42:38Tout s'y déroule comme aux Jeux masculins,
00:42:41avec le défilé des athlètes
00:42:44et la proclamation officielle d'ouverture.
00:42:47Ce qui provoquera une grosse colère du CIO.
00:42:50Le président de la Fédération d'athlétisme
00:42:53parle même de « putsch féminin ».
00:42:5677 sportives vont s'affronter
00:42:59dans 13 épreuves d'athlétisme.
00:43:05La plupart des journaux qui relaient la manifestation
00:43:08déplorent le spectacle auquel se livrent les femmes.
00:43:12La palme des propos les plus réactionnaires
00:43:15revenant au Figaro dans son compte-rendu du 400 m.
00:43:42Malgré ces comptes-rendus inimaginables,
00:43:45les spectateurs sont là,
00:43:48et le Paris semble gagner.
00:43:51Tous les sports vont progressivement
00:43:54s'ouvrir aux femmes.
00:43:57Mais il faudra attendre les Jeux de Paris de 2024
00:44:00pour atteindre la parité parfaite.
00:44:03En attendant, elles vont se faire remarquer
00:44:06dans les rares disciplines auxquelles elles ont accès.
00:44:09En 1924, ce sera le cas en natation,
00:44:12le sport qui rassemble le plus de concurrentes.
00:44:29Les épreuves se déroulent
00:44:32dans un stade nautique flambant neuf,
00:44:35le stade des Touraines.
00:44:38Ce bassin a été installé porte des Lilas
00:44:41dans le nord-est de Paris.
00:44:44C'est l'un des équipements construits spécialement pour les JO.
00:44:47Mais comme pour le stade de Colombes,
00:44:50sa réalisation ne s'est pas faite sans polémique.
00:44:53Pendant des mois, les élus et les concepteurs du projet
00:44:56vont s'affronter sur le financement de cette piscine.
00:44:59Les travaux coûtent plus cher que prévu.
00:45:02En décembre 1923, 6 mois avant les Jeux,
00:45:05on se demande même si elle sera terminée à temps.
00:45:13Le stade nautique sera finalement inauguré
00:45:16un mois seulement avant la cérémonie d'ouverture.
00:45:21Cette piscine est alors considérée
00:45:24comme la plus moderne d'Europe.
00:45:27Pour la 1re fois, un bassin est équipé de cordes
00:45:30pour délimiter les lignes d'eau.
00:45:33La nageuse qui va dominer le tournoi
00:45:36est une jeune américaine de 18 ans.
00:45:39Gertrude Ederle remporte à elle seule 3 médailles.
00:45:42Une en or et deux en bronze.
00:45:45Mais c'est un autre défi qui intéresse celle
00:45:48que l'on surnomme Trudy,
00:45:51la traversée de la Manche à la nage.
00:45:54Alors que personne à l'époque n'imagine une femme
00:45:57affronter une telle difficulté,
00:46:00Trudy est née le 6 août 1926.
00:46:03Pour la protéger du froid et des piqûres de méduses,
00:46:06on l'a enduite de sein doux et d'huile d'olive.
00:46:09La Manche affiche un timide 16 degrés.
00:46:12A bord du bateau qui l'accompagne,
00:46:15des journalistes et des photographes ont pris place.
00:46:21Après 14 heures et 39 minutes de combat,
00:46:24elle remet le pied sur la terre ferme en Angleterre.
00:46:28Non seulement elle est la première femme
00:46:31à accomplir cet exploit,
00:46:34mais elle bat le record de la traversée
00:46:37détenue par un homme de près d'une heure.
00:46:40Encensée pour son courage et son audace,
00:46:43elle fait un retour triomphal à New York
00:46:46où 2 millions de personnes l'attendent.
00:46:49Au JO de 1924, une future immense star du grand écran
00:46:52va également s'illustrer.
00:46:56L'Américain Johnny Weissmuller,
00:46:59premier homme capable de nager le 100 m en moins d'une minute,
00:47:02va décrocher 4 médailles.
00:47:05Pourtant, Weissmuller a bien failli ne pas participer au jeu.
00:47:10Né en 1904 dans ce qui est encore l'Autriche-Hongrie,
00:47:13il devient apatride après la chute de l'Empire,
00:47:16ce qui l'empêche de participer au JO.
00:47:19Pour venir à Paris, il va donc tricher sur son identité
00:47:22et se faire passer pour son frère Peter,
00:47:25américain de naissance.
00:47:28Weissmuller devient une véritable attraction.
00:47:31Les spectateurs se pressent pour applaudir ses performances.
00:47:34Considéré comme le plus grand nageur de ce début du XXe siècle,
00:47:37il établit 28 records du monde
00:47:40tout au long de sa carrière.
00:47:438 ans après les jeux,
00:47:46c'est dans les salles de cinéma que le public viendra l'admirer.
00:47:49Il sera l'interprète de Tarzan
00:47:52et de son célèbre cri dans pas moins de 12 films.
00:48:04Pour les Français aussi,
00:48:07ce bassin des tourelles sera synonyme de médaille d'or.
00:48:10Les tricolores y obtiennent leur premier titre olympique
00:48:13dans un sport collectif, le water polo.
00:48:16Il bat en finale la Belgique
00:48:19qui, comme à Anvers 4 ans plus tôt,
00:48:22décroche la médaille d'argent.
00:48:25Au total, la France va remporter 38 médailles, dont 13 d'or.
00:48:28Elle se classe 3e
00:48:31derrière les Etats-Unis et la Finlande.
00:48:41C'est en cyclisme que les Français vont survoler la compétition
00:48:44avec 4 médailles d'or.
00:48:47Celui qui va tout rafler s'appelle Armand Blanchonnet.
00:48:50Surnommé le Phénomène,
00:48:53il remporte la course sur route en individuel comme en équipe,
00:48:56juste devant la Belgique qui décroche l'argent.
00:49:03Les cyclistes français gagnent 2 autres médailles sur piste
00:49:06dans un vélodrome plein à craquettes.
00:49:10Il faut dire qu'à l'époque,
00:49:13le vélo est une vraie passion française.
00:49:18Il est devenu un moyen de transport
00:49:21utilisé par tous, les ouvriers en ville
00:49:24comme les paysans à la campagne.
00:49:29Entre les 2 guerres,
00:49:32on compte près de 9 millions de bicyclettes
00:49:35pour 40 millions d'habitants.
00:49:38Toutes les familles en possèdent une.
00:49:44Le vélo est populaire
00:49:47et il a sa course, le Tour de France.
00:49:50Le grand rendez-vous a été créé en 1903
00:49:53par le journal Loto
00:49:56qui cherche à doper ses ventes pendant l'été.
00:49:59Première traversée des cols des Pyrénées en 1910,
00:50:02première ascension du col du Galibier l'année suivante,
00:50:05introduction du maillot jaune en 1919,
00:50:08la légende du Tour s'écrit édition après édition.
00:50:16On se presse chaque été le long des routes
00:50:19pour acclamer les champions.
00:50:23Le temps d'une étape,
00:50:26cette fête gratuite qui passe près de chez soi,
00:50:29abolit les frontières sociales et fédère tout le pays.
00:50:32Les cyclistes sont célébrés en véritables dieux de la route.
00:50:38Mais en 1924,
00:50:41le Tour est aussi déjà l'objet de scandales.
00:50:44Henri Pellissier, personnage haut en couleur,
00:50:47vainqueur l'année précédente,
00:50:50a décidé d'abandonner l'épreuve.
00:50:53Il dénonce le chemin de croix que vivent les cyclistes
00:50:56et le dopage auquel ils sont obligés de se soumettre.
00:50:59Dans un article signé du grand reporter Albert Londres
00:51:02qui couvre pour la première fois la compétition,
00:51:05Pellissier évoque la cocaïne,
00:51:08le chloroforme et les pilules
00:51:11qui les aident à atténuer les souffrances.
00:51:15Ces déclarations n'empêcheront pas le sacre d'Ottavio Bottecchia,
00:51:18premier Italien vainqueur du Tour de France.
00:51:23Au jeu de 1924,
00:51:26les Français ne vont pas seulement briller en cyclisme.
00:51:29Des champions vont se démarquer dans deux autres disciplines.
00:51:34Charles Rigoulot, c'est l'homme le plus fort du monde.
00:51:37Avec son seul bras droit,
00:51:40il soulève plus de 87 kg et décroche la médaille d'or.
00:51:45À une époque où l'on exalte le corps viril,
00:51:48celui qui exerce comme boucher à la ville
00:51:51incarne la perfection masculine.
00:51:54Beau, fort, sympathique et désirable,
00:51:57modèle idéal des photographes d'agences de presse.
00:52:02L'exploit de Charles Rigoulot a lieu au cœur de Paris,
00:52:05dans l'un des lieux les plus emblématiques de ses Olympiades,
00:52:08le Vélodrome d'hiver.
00:52:11Ce Veldive, endroit tristement célèbre aujourd'hui,
00:52:14abrite également certaines épreuves d'escrime
00:52:17dominées par les Belges et par les Français.
00:52:21La Belgique décroche 4 titres,
00:52:24dont une médaille d'or attribuée à Charles Delporte.
00:52:28Côté français, Roger Ducret
00:52:31remporte à lui seul 5 des 38 médailles tricolores.
00:52:35Mais Ducret ne va pas se contenter de participer aux épreuves,
00:52:38il va aussi les commenter.
00:52:41Chaque jour, il écrit son article
00:52:44pour les 3 quotidiens auxquels il collabore,
00:52:47l'Eco des Sports, l'Intransigeant et la Petite Gironde.
00:52:51Les lecteurs peuvent apprécier ces chroniques
00:52:54qui ne sont pas dépourvues de parti pris,
00:52:57comme dans l'édition du 27 juin,
00:53:00où il ne souhaite rien d'autre qu'une victoire française.
00:53:18Le 9 juillet 1924,
00:53:21Le Miroir des Sports publie des dessins qui feraient scandale aujourd'hui.
00:53:25Une pleine page pour détailler les 4 races représentées aux Jeux Olympiques.
00:53:31Les races blanches, noires, jaunes et rouges.
00:53:36Le journaliste ne manque pas de rassurer le lecteur
00:53:39en soulignant que la supériorité de la race blanche
00:53:42n'est pas compromise par les 3 autres.
00:53:46Pourtant, une épreuve va mettre à mal ce préjugé
00:53:49et ce complexe de supériorité de l'homme blanc.
00:53:55William de Hart Hubbard, un jeune athlète de 19 ans,
00:53:58parvient à décrocher une médaille d'or en saut en longueur
00:54:01en franchissant 7,44 m.
00:54:08Avant de quitter les Etats-Unis pour Paris,
00:54:11il avait écrit à sa mère,
00:54:14je vais tout faire pour être le premier champion olympique de couleur en individuel.
00:54:18Il a tenu sa promesse.
00:54:21Fidèle à sa lecture du monde,
00:54:24elle hebdomadaire Le Miroir des Sports
00:54:27relate l'exploit du nègre américain.
00:54:30Pour comprendre ces propos qui apparaissent totalement déplacés,
00:54:33il faut se replonger dans le contexte de l'époque.
00:54:37La France est alors la 2e puissance coloniale après la Grande-Bretagne.
00:54:48Après la Première Guerre mondiale,
00:54:51son empire s'étend sur plus de 12 millions de km2,
00:54:54près de 20 fois sa surface actuelle.
00:54:57La France est présente sur tous les continents.
00:55:07Cette position de puissance coloniale
00:55:10alimente la conviction que la race blanche est la race supérieure.
00:55:18A plusieurs milliers de km de là,
00:55:21les Parisiens n'ont eu l'occasion de croiser des personnes de couleur
00:55:24qu'à de très rares occasions.
00:55:27Notamment dans les zoos humains,
00:55:30où les Noirs sont exhibés comme des bêtes de foire.
00:55:33Une figure reconnue, c'est le clown chocolat,
00:55:36de son vrai nom, Rafael Padilla,
00:55:39popularisé au cinéma par Omar Sy.
00:55:44A la fin du XIXe siècle, avec son complice Foutit,
00:55:47ce fils d'esclave cubain fait rire tous les enfants
00:55:50en endossant le rôle de souffre-douleur.
00:55:55Bien avant Josephine Baker,
00:55:58il est le 1er artiste noir très populaire en France.
00:56:04...
00:56:10Des personnes de couleur,
00:56:13les habitants de la métropole en croisent
00:56:16lors des expositions coloniales organisées dans tout le pays.
00:56:22A Paris, Marseille ou Strasbourg,
00:56:25on reconstitue des villages indigènes
00:56:28et des édifices s'inspirant des territoires colonisés.
00:56:33Plusieurs millions de visiteurs
00:56:36prennent part à ces grandes foires exotiques.
00:56:39Pendant la guerre aussi,
00:56:42ces deux populations ont eu l'occasion de se côtoyer.
00:56:45Des habitants des colonies ont été enrôlés dans l'armée,
00:56:48quand d'autres sont venus prêter main-forte à l'économie.
00:56:51Pour remplacer les hommes partis au combat,
00:56:54250 000 travailleurs coloniaux et chinois
00:56:57ont été employés dans les usines d'armement,
00:57:00dans les transports ou dans les mines.
00:57:03...
00:57:06Ces colonies constituent aussi
00:57:09un réservoir d'athlètes pour la France.
00:57:12Ahmed Bouguera El Ouafi, né en Algérie,
00:57:15court le marathon sous la bannière tricolore.
00:57:18Cet ouvrier de chez Renault
00:57:21se classe 7e en 1924.
00:57:244 ans plus tard, il parviendra
00:57:27à décrocher la médaille d'or à Amsterdam.
00:57:30...
00:57:33...
00:57:36...
00:57:39Après la guerre,
00:57:42la France continue de faire appel
00:57:45à des travailleurs hors de ses frontières.
00:57:48...
00:57:51Plus de 10 % de la population active masculine
00:57:54a été tuée sur les champs de bataille.
00:57:57Pour reconstruire et redresser le pays,
00:58:00c'est vers les Italiens, les Polonais
00:58:03ou encore les Belges qu'on va se tourner.
00:58:06...
00:58:09En 1924, on crée même
00:58:12la Société Générale d'Immigration.
00:58:15Ce sont les chefs d'entreprise eux-mêmes
00:58:18qui se chargent directement de sélectionner
00:58:21et d'acheminer la main-d'oeuvre étrangère.
00:58:24...
00:58:27En 10 ans,
00:58:30le nombre d'immigrés va doubler
00:58:33pour atteindre 7 % de la population.
00:58:36La France devient
00:58:39le plus grand pays d'immigration au monde
00:58:42devant les Etats-Unis.
00:58:45...
00:58:48L'arrivée de ces nouveaux venus
00:58:51s'accompagne de tensions,
00:58:54une partie de la population témoignant
00:58:57d'une certaine hostilité à l'égard des étrangers.
00:59:00Quelques journaux fustigent
00:59:03les métissages imprudents
00:59:06ou stigmatisent le Belge, voleur de travail.
00:59:09Si l'on ne parle pas encore de grands remplacements,
00:59:12on n'hésite pas à souligner
00:59:16et la crainte de devenir minoritaire dans son pays.
00:59:19Ces étrangers seront les premiers licenciés
00:59:22quand la France sera frappée par la crise
00:59:25et le chômage au début des années 30.
00:59:28On n'hésitera pas alors
00:59:31à les renvoyer chez eux.
00:59:34...
00:59:37Applaudissements
00:59:40...
00:59:44...
00:59:47En 1924, le programme olympique
00:59:50ne se limite pas au sport.
00:59:53Il compte aussi des épreuves artistiques.
00:59:56A l'époque, Paris, capitale culturelle,
00:59:59entend rester fidèle à sa réputation
01:00:02en décernant des médailles dans 5 disciplines.
01:00:05...
01:00:08Les noms des lauréats ne sont pas passés à la postérité,
01:00:11mais les membres du jury sont eux très prestigieux.
01:00:14Maurice Ravel et Gabriel Fauré pour la musique,
01:00:17Auguste Perret pour l'architecture,
01:00:20l'écrivain Jean Giraudoux pour la littérature
01:00:23et l'artiste Fujita,
01:00:26grande figure parisienne de ses années 20,
01:00:29pour la peinture.
01:00:32Les oeuvres sont exposées au Grand Palais,
01:00:35mais toutes les médailles ne seront pas décernées.
01:00:38Certains jurys considérant qu'aucun des travaux
01:00:41ne mérite une telle récompense.
01:00:44Une ironie pour une ville qui connaît
01:00:47un incroyable bouillonnement intellectuel et artistique.
01:00:50La capitale française est l'une des plus fréquentées en Europe.
01:00:53Les touristes viennent admirer tous ces monuments,
01:00:56en particulier le Palais du Trocadéro,
01:00:59construit pour l'exposition universelle de 1878
01:01:02et aujourd'hui disparu.
01:01:05Mais ils viennent surtout pour la Tour Eiffel,
01:01:08qui en 1924 fête ses 35 ans.
01:01:11Pour cet anniversaire,
01:01:14elle se refait d'ailleurs une beauté.
01:01:17Une vingtaine d'ouvriers vont la rajeunir
01:01:20en la repeignant.
01:01:23Après l'avoir beaucoup critiquée,
01:01:26la Tour Eiffel est la plus grande ville
01:01:29de l'Europe.
01:01:32Après l'avoir beaucoup critiquée,
01:01:35les Parisiens se sont habitués à sa silhouette.
01:01:38Elle est même devenue le symbole de la France.
01:01:41Mais les touristes ne sont pas les seuls
01:01:44à venir l'admirer.
01:01:47Les peintres comme Modigliani et Picasso,
01:01:50les sculpteurs, les écrivains comme Hemingway
01:01:53sont tombés sous le charme de Paris.
01:01:56Ils se donnent rendez-vous à Montparnasse,
01:01:59un quartier en pleine effervescence.
01:02:02...
01:02:05C'est là que les artistes organisent chaque année
01:02:08le bal de la Horde.
01:02:11...
01:02:14Sur des rythmes endiablés,
01:02:17le public peut y croiser les acteurs
01:02:20et les actrices du musical.
01:02:23...
01:02:27Car les années 1920 à Paris,
01:02:30c'est aussi le triomphe de la fête.
01:02:33...
01:02:36Les jeunes veulent s'amuser
01:02:39pour oublier les horreurs de la guerre
01:02:42avec un slogan,
01:02:45plus jamais ça!
01:02:48C'est cette période d'euphorie et d'insouciance
01:02:51qu'on appellera des décennies plus tard
01:02:55Cette libération est incarnée
01:02:58par une Parisienne en particulier.
01:03:01...
01:03:04Jeanne Bourgeois, plus connue
01:03:07sous le nom de Miss Tinguette.
01:03:10Actrice et chanteuse,
01:03:13la femme aux divines gambettes,
01:03:16devient la vedette du Casino de Paris
01:03:19et du Moulin Rouge grâce à sa goye.
01:03:23Le public se passionne pour sa vie
01:03:26et a suivi la relation tumultueuse
01:03:29qu'elle a entretenue avec Maurice Chevalier,
01:03:32artiste très populaire du musical.
01:03:35Les visiteurs, présents à Paris à l'été 1924,
01:03:38pourront aller les applaudir
01:03:41entre deux épreuves des JO.
01:03:44...
01:03:47...
01:03:50...
01:03:53...
01:03:56...
01:03:59L'été 1924, la canicule s'abat
01:04:02sur toute la France.
01:04:05Paris n'est pas épargné.
01:04:08Dans la capitale, chacun cherche
01:04:11un coin de fraîcheur.
01:04:14Les familles se pressent dans les parcs
01:04:17et les jardins publics.
01:04:20La température est si accablante
01:04:23que certaines festivités du 14 juillet
01:04:26sont menacées d'annulation.
01:04:29Mais l'épreuve du Marathon Prévu le 13,
01:04:32elle, aura bien lieu.
01:04:35...
01:04:38Les organisateurs ont tiré les leçons
01:04:41de l'épreuve du Cross Country.
01:04:44Pour éviter le même désastre,
01:04:47le départ est donné en fin d'après-midi.
01:04:50Les 58 coureurs doivent faire
01:04:53l'aller-retour entre Colombes et Pontoise.
01:04:56Tout au long du parcours,
01:04:59les points de ravitaillement sont pris d'assaut.
01:05:02Pour tenter de se désaltérer,
01:05:05les sportifs ne boivent pas que de l'eau.
01:05:08Les journalistes suivent dans des véhicules
01:05:11et ne ratent rien de la course.
01:05:14Ils assistent à la victoire d'Albin Stenroos
01:05:17qui, après le triomphe de Pavo Nurmi,
01:05:20confirme la suprématie des Finlandais
01:05:23sur les courses de fond.
01:05:26Les Jeux Olympiques de 1924
01:05:29seront les premiers à bénéficier
01:05:32d'une très importante couverture médiatique.
01:05:35Près de 700 journalistes du monde entier
01:05:38ont relaté la compétition.
01:05:41Les spectateurs du stade de Colombes
01:05:44ont pu suivre l'épreuve mais sans bouger des gradins
01:05:47grâce à une innovation technologique.
01:05:50La télégraphie s'enfile.
01:05:53La TSF.
01:05:56C'est l'une des révolutions de ces Jeux Olympiques.
01:05:59Pour la première fois,
01:06:02les épreuves sont diffusées en direct à la radio.
01:06:05On peut entendre la voix d'Edmond de Horteur.
01:06:08Il est le premier commentateur sportif de l'histoire
01:06:11mais, à l'époque, on l'appelle le parleur inconnu.
01:06:14Edmond de Horteur n'en est pas à son coup d'essai.
01:06:17Il a déjà commenté plusieurs matchs de boxe.
01:06:20...
01:06:23...
01:06:26...
01:06:29...
01:06:32...
01:06:35...
01:06:38...
01:06:41...
01:06:44Les organisateurs des JO et ses collègues de la presse écrite
01:06:47ne voient pas d'un très bon oeil
01:06:50la concurrence de ce journaliste d'un nouveau genre
01:06:53et, dans un premier temps,
01:06:56ils lui interdisent l'accès au stade.
01:06:59C'est donc depuis la nacelle d'un ballon
01:07:02qu'Edmond va réaliser ses reportages.
01:07:05De l'autre côté du poste,
01:07:08les Français ne sont pas encore très nombreux à être équipés.
01:07:11Mais là encore,
01:07:14on fait preuve d'une folle ingéniosité.
01:07:17Grâce à un récepteur glissé dans sa jartière
01:07:20et à son ombrelle qui sert d'antenne,
01:07:23cette jeune femme ne rate rien des épreuves sportives.
01:07:26Ce dispositif va révolutionner la vie des Français
01:07:29qui vont pouvoir se tenir informés
01:07:32dans n'importe quelle situation.
01:07:35Même si l'antenne de réception
01:07:38demeure parfois un peu encombrante.
01:07:41...
01:07:44L'autre révolution médiatique,
01:07:47c'est la création d'un pool image.
01:07:50Une équipe filme les épreuves
01:07:53et envoie souvent les images aux différentes sociétés de presse.
01:07:56Ce système mis en place par le pays
01:07:59qui accueille les Jeux
01:08:02se perpétue encore aujourd'hui pour chaque édition des JO.
01:08:051924 sera l'occasion
01:08:08d'une autre nouveauté de taille,
01:08:11mais cette fois à plusieurs centaines de kilomètres de Paris.
01:08:14...
01:08:17...
01:08:20...
01:08:23...
01:08:26En 1924,
01:08:29les Jeux ne se tiennent pas pendant 2 semaines comme aujourd'hui,
01:08:32mais ils vont se prolonger sur plusieurs mois.
01:08:35Ils ont même démarré dès janvier
01:08:38avec l'organisation des premiers Jeux d'hiver.
01:08:41A l'époque,
01:08:44ils ne s'appellent pas encore Jeux olympiques,
01:08:47mais c'est l'organisation internationale des sports d'hiver.
01:08:5017 pays, pour beaucoup du nord de l'Europe,
01:08:53vont y participer.
01:08:56Ils ont lieu à Chamonix, au pied du Mont Blanc,
01:08:59en janvier et février 1924.
01:09:02...
01:09:05Les adeptes de la montagne l'hiver
01:09:08sont encore peu nombreux,
01:09:11mais la fréquentation commence à se développer
01:09:14grâce aux grandes campagnes de promotion.
01:09:17...
01:09:20Avant la guerre,
01:09:23l'association Le Touring Club de France
01:09:26fait le tour des petits villages de montagne
01:09:29pour convaincre les hôteliers et les commerçants
01:09:32du potentiel économique de ce tourisme.
01:09:35...
01:09:38...
01:09:41Les Alpes et les Pyrénées vont peu à peu
01:09:44se doter de stations équipées
01:09:47et dédiées à de nouveaux sports.
01:09:50Un plus large public peut découvrir
01:09:53la beauté spectaculaire des montagnes enneigées.
01:09:56...
01:09:59En 1924, Chamonix est le centre de sports d'hiver
01:10:02qui offre la plus grande capacité d'accueil.
01:10:058 établissements hôteliers
01:10:08bénéficient de tout le confort moderne.
01:10:11Chauffage central, eau courante et salle de bain.
01:10:14Grande station internationale,
01:10:17Chamonix rivalise alors
01:10:20avec ses concurrentes suisses, Davos et Saint-Maurice.
01:10:23Mais les Jeux de 1924
01:10:26vont encore doper sa fréquentation.
01:10:29...
01:10:32Il n'y a pas encore des preuves de ski alpin.
01:10:35C'est la glace, le patinage artistique,
01:10:38seule discipline ouverte aux femmes
01:10:41et surtout la course de vitesse,
01:10:44dominée par les Finlandais.
01:10:47Pour accueillir la compétition,
01:10:50la station s'est dotée d'un immense parc olympique
01:10:53de 36 000 m2, l'équivalent de 5 terrains de football.
01:10:56A l'époque, elle possède
01:10:59la plus grande patinoire artificielle du monde.
01:11:02C'est sur ce terrain que les Canadiens
01:11:05vont remporter le tournoi de hockey
01:11:08en réalisant un véritable exploit.
01:11:11Au cours des différentes rencontres,
01:11:14ils vont réussir à marquer 122 buts au total
01:11:17en n'en concédant que 3.
01:11:20...
01:11:23Une piste de bobsleg,
01:11:26objet de toutes les curiosités,
01:11:29a également été aménagée à proximité
01:11:32du funiculaire de l'aiguille du midi.
01:11:35Tous les moyens sont bons
01:11:38pour tenter d'apercevoir les épreuves
01:11:41et en particulier le clou du spectacle,
01:11:44le concours du saut à ski.
01:11:47Il se déroule le dernier jour des Jeux
01:11:50sur le vertigineux tremplin installé
01:11:53près du glacier des Bossons.
01:11:56Les enfants ont séché l'école
01:11:59et des trains spéciaux ont été affrétés
01:12:02pour encourager les champions
01:12:05et surtout admirer la technique des Norvégiens.
01:12:08A juste titre, puisque la Norvège
01:12:11remporte les 3 premières places.
01:12:14Mais en réalité, à cause d'une faute
01:12:17dans le calcul des points,
01:12:20la médaille de bronze a été attribuée
01:12:23Cette erreur ne sera découverte
01:12:26que bien des années plus tard.
01:12:29Haugen se verra décerner son titre
01:12:32en 1974, 50 ans après les Jeux,
01:12:35à l'âge de 83 ans.
01:12:49Au printemps 1924,
01:12:52plusieurs centaines de touristes américains
01:12:55débarquent au Havre.
01:12:58Ils ont fait le voyage pour assister
01:13:01aux Jeux de Paris.
01:13:04Difficile d'estimer le nombre précis
01:13:07de visiteurs étrangers,
01:13:10mais au total, ce sont 600 000 billets
01:13:13qui ont été vendus pour ces Jeux olympiques.
01:13:16Sans surprise, c'est le tournoi de football
01:13:19le plus populaire par excellence.
01:13:22On enregistre une affluence record
01:13:25pour une finale de prestige
01:13:28avec l'équipe phare de ce début de siècle,
01:13:31l'Uruguay, que l'on appelle la Céleste.
01:13:34Elle est opposée à la Suisse
01:13:37après avoir éliminé la France
01:13:40en quart de finale.
01:13:43Elle triomphe par 3 buts à 0
01:13:47On a enregistré 200 000 spectateurs
01:13:50pour une recette de près d'un million 800 000 francs.
01:13:53Ce jour de finale,
01:13:56il ne reste plus une seule place de libre
01:13:59dans les tribunes.
01:14:02Le stade de Colombes est même trop petit
01:14:05pour accueillir tous les supporters.
01:14:08Selon la presse, 10 000 personnes
01:14:11n'ont pas pu entrer et ont dû attendre
01:14:14Le football est l'une des rares disciplines à faire le plein.
01:14:17A l'inverse, les spectateurs vont bouder
01:14:20certaines épreuves, comme la gymnastique.
01:14:23Durant les 4 jours de compétition,
01:14:26les spectateurs non payants,
01:14:29officiels et journalistes,
01:14:32sont plus nombreux que les spectateurs payants.
01:14:35L'éloignement de Colombes est pointé du doigt
01:14:38pour expliquer cette fréquentation en Berne.
01:14:42Mais les journalistes vont aussi déplorer
01:14:45le prix excessif des places.
01:14:48Les billets les moins chers se vendent à 2 francs,
01:14:51l'équivalent d'environ 220 euros.
01:14:54Les plus chers peuvent monter jusqu'à 50 francs,
01:14:57soit plus de 5 000 euros aujourd'hui.
01:15:00A l'heure des comptes, à la fin du mois de juillet,
01:15:03la vente de billets aura permis
01:15:06de collecter 5,5 millions de francs de recettes.
01:15:12Cette 8e Olympiade aura aussi profité
01:15:15à bien des commerçants.
01:15:18Tout autour du stade, des bars et des baraques foraines
01:15:21ont vendu des produits estampillés J.O.
01:15:24et même un casse-croûte olympique.
01:15:27Tout le monde veut sa part des Jeux.
01:15:30De nombreuses lettres ont été adressées
01:15:33aux maires de Colombes pour demander l'autorisation
01:15:36de vendre des confiseries, des oranges
01:15:39et de faux bijoux.
01:15:42Les 5 anneaux ont été mis à toutes les sauces,
01:15:45sur les robes, les écharpes et même les éventails.
01:15:48On ne parle pas encore de marketing
01:15:51et encore moins de goodies,
01:15:54mais les visiteurs ont pu repartir
01:15:57avec leur sac rempli de cendriers,
01:16:00de flacons de parfums ou de chapeaux
01:16:03en guise de souvenirs de cette Olympiade parisienne.
01:16:07Si cette édition des Jeux a suscité un certain nombre de critiques
01:16:10qui nous sont bien familières aujourd'hui,
01:16:13elle va s'achever sur un bilan plutôt positif.
01:16:19Toutes les médailles sont remises aux délégations
01:16:22le jour de la cérémonie de clôture, le 27 juillet.
01:16:28L'occasion pour le public de célébrer une dernière fois
01:16:31les Harold Abrahams, Eric Liddell,
01:16:34Pavo Nurmi, William de Hartebard,
01:16:37Roger Ducret, Johnny Weissmuller,
01:16:40Julie Vlastow, Gertrude Ederle tant admirées.
01:16:45Et de prolonger encore quelques instants
01:16:48la magie d'une Olympiade réussie.
01:16:53Et parce que la France est d'abord un pays de convivialité,
01:16:56après Cégio, on ne comptera plus les bistrots
01:16:59où l'on pourra refaire le monde,
01:17:02café olympique ou bar des sports.
01:17:07Un siècle plus tard, l'empreinte des Jeux Olympiques
01:17:10demeure encore présente à Paris.
01:17:14Une capitale française toujours prête à s'enthousiasmer
01:17:17et à vibrer pour de nouveaux exploits.
01:17:32Sous-titrage Société Radio-Canada