Législatives : "Le vote RN devient rationnel et n'est plus simplement un vote 'coup de gueule'"

  • il y a 3 mois

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00:00Lucas Jacubowitz, merci beaucoup d'être sur ce plateau, vous êtes journaliste politique et rédacteur en chef de Décideur Magazine.
00:0712 millions de Français ont voté Rassemblement National au premier tour de ces législatives hier dimanche,
00:12le résultat d'une campagne menée par l'extrême droite, campagne très efficace ?
00:17À l'évidence. Alors j'aimerais rebondir sur un fait qui a été mentionné par Clovis Cavalli tout à l'heure,
00:25c'est 26 secondes tours sur 26 en Bretagne, c'est-à-dire que pendant très longtemps, le Rassemblement National avait une sociologie très particulière,
00:32il était très fort dans le sud de la France, en Provence, notamment avec un électorat pour beaucoup pieds noirs, classe moyenne, classe moyenne inférieure.
00:41Ensuite, il s'est développé dans le nord du pays, dans la France désindustrialisée, et dans un troisième temps, il s'est développé dans les classes moyennes
00:49et à l'ouest du pays. Pendant très longtemps, en sciences sociales, en sciences politiques, il y avait ce qu'on appelait le verrou breton.
00:55Le verrou breton, c'est donc la Bretagne et les départements de l'ouest de la France, type la Mayenne, la Sarthe, le Calvados, la Normandie, etc.
01:04Et dans ces départements-là, le RN était toujours minoritaire. Il a fini premier dans tous les départements européens et ça s'est transformé aux législatives.
01:13Donc très clairement, l'essor du RN, il se caractérise justement par cette dispersion sur l'ensemble du territoire.
01:20Aujourd'hui, il n'y a plus aucun département de France qui est pourri à l'extrême droite, hormis peut-être les grandes métropoles.
01:26On est passé d'un vote à l'extrême droite qui a été caché pendant des années, à un vote qui s'est dit plutôt enthousiaste, qui ne se cachait plus,
01:34à un vote, on a l'impression, qui est devenu rationnel.
01:39Ça aussi, c'est quelque chose de très frappant, c'est-à-dire que dans les années 80, le vote Le Pen, c'était souvent un vote anti-système, c'était un vote coup de gueule.
01:46Aujourd'hui, effectivement, pour beaucoup d'électeurs, le vote RN devient rationnel.
01:53Et en fait, beaucoup d'observateurs se disent « mais à partir de quand le vote est devenu rationnel ? ».
01:58Et en réalité, il y a une date que très très peu d'observateurs et responsables politiques mentionnent et qui est clé pour comprendre l'essor du RN.
02:06Cette date, c'est l'été 2017.
02:08Qu'est-ce qui s'est passé à l'été 2017 ? Il y a eu une purge au sein du Rassemblement national.
02:13Florian Philippot et ses proches ont été exclus du parti.
02:17C'était le tenant d'une ligne Frexit, c'est-à-dire souverainiste, on quitte l'Union européenne, on quitte la zone euro.
02:23Les idées défendues par Florian Philippot, en fait, elles inquiétaient beaucoup.
02:27Les classes moyennes, les gens qui avaient un petit patrimoine, qui étaient d'accord avec le RN, par exemple, sur les questions d'immigration et de sécurité,
02:34mais qui se disaient « Mais en fait, si je mets un bulletin RN dans l'urne, qu'est-ce qui va se passer plus tard ?
02:40Qu'est-ce qui va se passer pour mon portefeuille ? ».
02:42Et effectivement, depuis 2017, tout l'appareil du RN a essayé de rassurer un maximum cette France des classes moyennes inférieures, des classes moyennes.
02:52Et aujourd'hui, ils en récoltent les fruits.
02:54Alors, on n'a pas les chiffres complets par profession pour les législatives.
02:58Mais ce qui est très intéressant, c'est de constater, par exemple, qu'aux européennes, chez les cadres, le Rassemblement national faisait jeu égal avec la Macronie,
03:06ce qui, il y a quelques années, aurait été totalement impensable.
03:09Donc oui, le vote RN devient rationnel et n'est plus simplement un vote coup de gueule.
03:15Hier soir, c'est Marine Le Pen qui a pris la parole en premier, puis Jordan Bardella.
03:20Pour autant, c'est bien lui, aujourd'hui, qui emmène cet enthousiasme des électeurs du Rassemblement national.
03:26Et peu importe qu'il ait 28 ans et qu'il n'ait que peu ou pas d'expérience politique nationale, qu'il n'ait jamais travaillé,
03:33qu'il n'ait pas forcément fait une campagne dithyrambique, ça fonctionne.
03:37Ça fonctionne. Et d'ailleurs, il y a une anecdote assez stupéfiante, c'est que ça a été remonté dans plusieurs bureaux de vote.
03:42Des électeurs qui voulaient voter Bardella regardaient les bulletins et se disaient en fait, oui, Bardella,
03:48il ne votait pas forcément au Rassemblement national, mais il votait pour l'image que renvoyait Jordan Bardella.
03:53Et ça, c'est tout à fait nouveau.

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