• il y a 5 mois
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00:00Bonjour, je suis en compagnie d'Yvanne Leperlier, vous êtes vétérinaire au GDS de Bretagne,
00:14on va parler tout de suite des boîteries en vache laitière et de la maladie de Mortelaro,
00:19aussi appelée Dermatite Digitée, qui pose de plus en plus de soucis aux éleveurs, qu'est-ce
00:26que c'est cette maladie, comment on la reconnaît ?
00:28Alors la maladie de Mortelaro, effectivement, a un souci en élevage, elle est maintenant la
00:33troisième cause de boîterie après le fourchet et l'ulcère de la sole, donc c'est une maladie
00:39infectieuse, elle est due à une bactérie qu'on appelle Tréponem, et cette bactérie pénètre dans
00:44la peau du sabot, enfin dans le sabot, peau voire corne, et crée des lésions sur le pied,
00:51entraînant une douleur et donc des boîteries à la vache. C'est une lésion très typique,
00:56c'est une lésion circulaire circonscrite, ulcérative au niveau de la peau, en général
01:02elle est localisée au bord du sabot, en arrière du pied, voire des fois devant le pied aussi.
01:07D'accord, donc quand on soulève le pied, c'est un point rouge assez net ?
01:11C'est un rouleau qui est plus ou moins grand, qui peut faire jusqu'à 3 cm de diamètre,
01:15donc plus il est grand, plus il est douloureux, et plus il est contagieux,
01:18c'est une maladie infectieuse et contagieuse.
01:20Donc c'est une bactérie ?
01:21C'est une bactérie.
01:21D'accord, et comment ça s'attrape, quelles sont les causes ?
01:25Alors les causes de cette maladie, c'est surtout des conditions d'élevage.
01:31Il y a des élevages qui connaissent cette bactérie, mais sans avoir beaucoup de vaches atteintes,
01:37et d'autres élevages qui sont très atteints, parce que la conduite ne permet pas de maîtriser
01:43tous les facteurs de risque, qui sont essentiellement des problèmes de zones souillées
01:49au niveau des pieds des vaches. Alors on parle souvent de l'air d'exercice avec beaucoup d'humidité,
01:54des zones de matières stagnantes, etc.
01:58Mais il faut également penser aux parcs d'attente en salle de traite.
02:01D'accord, donc typiquement, là où ça reste devant, où les vaches restent piétinées,
02:08restent debout longtemps.
02:11Voilà, donc ça, c'est le premier point à maîtriser.
02:14Les autres facteurs de risque, c'est tout ce qui est cause de traumatisme de la corne
02:19dans l'élevage, donc ça va être beaucoup d'obstacles, des marches, des blessures par cailloux,
02:24des sols caillouteux également.
02:25Et le troisième point, c'est tout ce qui va être responsable de fourbures du pied.
02:30Donc on pense à l'alimentation, mais il faut aussi penser aux défauts de couchage.
02:33Une vache qui reste trop longtemps debout, elle va avoir une inflammation du pododerme
02:37et donc une fourbure qui fragilise la corne du sabot et favorise la pénétration du tréponème
02:44dans le pied.
02:46Je reviens au bâtiment.
02:47Est-ce qu'il y a des différences, par exemple, d'une litière paillée, d'un caillbotis ?
02:52Est-ce que c'est des choses qu'on a regardées ?
02:53Alors, il y a eu une étude, une grosse étude qui a été menée par l'école vétérinaire
02:59de Nantes et l'INRA dans les années 2010-2012.
03:03On travaillait beaucoup sur les moyens de maîtrise de cette maladie et des éléments
03:09ont été comparés sur le type de sol, le type de béton, etc.
03:13Et il n'y a pas eu de choses vraiment qui sont ressorties sur le type de bâtiment
03:17à proprement parler.
03:18Ce qui est ressorti, c'est vraiment tout ce qui est humidité et souillure, les causes
03:23de traumatismes, les causes de fourbures et bien sûr, les achats.
03:26On sait que l'introduction d'animaux porteurs, en général, c'est comme ça que l'élevage
03:31est contaminé.
03:32D'accord, donc ça veut dire qu'il faut regarder les 4 pieds dès qu'on achète
03:36un nouvel animal, ça va devenir une routine dans les achats ?
03:41Oui, probablement que dans les troupeaux qu'on voit et qui introduisent beaucoup
03:46d'animaux, je pense que c'est quelque chose aussi qu'il faudra prendre en compte
03:50de la même façon qu'on va vérifier des maladies infectieuses telles que la BVD
03:53ou la néosporose.
03:55Probablement qu'on va inciter les éleveurs aussi à lever les pieds des animaux
03:58introduits ou avant introduction, justement, pour faire un point sur le risque pris
04:03à l'achat d'animaux.
04:04Est-ce qu'il y a des races où il y a des animaux qui sont plus sensibles que d'autres ?
04:10Je reviens aussi au résultat de l'école vétérinaire de Nantes.
04:15Ils avaient donc travaillé sur des troupeaux primolstein et normand.
04:20Ce qui a été montré au cours de cette étude sur une cinquantaine d'élevages,
04:23c'est que la primolstein avait deux fois plus de chances d'avoir une nouvelle infection
04:28par rapport à une normand, en dehors des conditions d'élevage.
04:31Donc il y a quand même quelque chose, probablement un phénomène de race, avec une fragilité
04:36liée à la race.
04:38Après, sur les autres types de races qu'on trouve en France, il n'y a pas eu de travaux menés.
04:41Et après, au sein d'une race, par exemple au sein de la primolstein,
04:44est-ce qu'il y a des facteurs génétiques qui pourraient être décelés ?
04:49Alors effectivement, c'est quand même suspecté de plus en plus qu'il y a probablement
04:54des lignées plus fragiles que d'autres au sein même d'un élevage, au sein d'une même race.
04:59C'est suspecté et ça reste encore à affiner, mais probablement que la génomique
05:05et la recherche qui va en découler, les résultats qui vont en découler vont permettre peut-être
05:09de valoriser une sélection d'animaux moins sensibles.
05:13Il y a des élevages qui sont assez fortement atteints, jusqu'à peut-être 20 ou 30% des individus.
05:20On dit que c'est une maladie qui ne se soigne pas vraiment, on apprend à vivre avec.
05:25Comment faire pour améliorer un peu son quotidien en tant qu'éleveur quand on a beaucoup de vaches qui souffrent ?
05:32Alors oui, c'est une maladie contraignante. On a vu les facteurs de risque qui accentuent les problèmes dans l'élevage.
05:39Maintenant, on sait aussi qu'il y a des choses à faire en plus pour limiter encore l'impact de la maladie dans l'élevage.
05:48Alors ça marche quand c'est fait de façon simultanée.
05:53Et les leviers complémentaires, ça va être le parage régulier.
05:56Le parage régulier, ça permet d'avoir une corne solide et de consolider la corne, de limiter les effractions et les traumatismes.
06:05Le traitement individuel, quand on voit une lésion, un traitement local, antibiotique en forme de spray.
06:13D'accord, on soulève un coup de spray, on sortit de la salle de traite.
06:17Exactement, après avoir fait un nettoyage du pied, c'est efficace et ça permet une guérison importante et ça limite aussi la contagion.
06:24Et le dernier levier qui doit être mené, en tout cas qui est vraiment fortement recommandé pour les éleveurs avec beaucoup de vaches atteintes,
06:30c'est la désinfection collective régulière et elle ne marche, elle va être pertinente si elle est faite à deux jours consécutifs tous les 15 jours.
06:39Si cette fréquence est élevée, on a des résultats vraiment insatisfaisants.
06:44Mais si on tient bien deux jours consécutifs tous les 15 jours, on a des très bons résultats en désinfection collective si c'est associé à tout le reste.
06:52Désinfection collective, ça veut dire un pédiluve en gros, c'est ça ?
06:56Ce qui a été testé, c'est effectivement les pédiluves, c'est aussi la pulvérisation, tout ce qui va être un moyen de désinfection collective va permettre d'améliorer la situation.
07:08Maintenant, la difficulté pour l'éleveur, en plus des contraintes pratiques, c'est aussi le choix du produit parce qu'il y a des produits avec des risques de toxicité qui ne sont pas négligeables.
07:17Comme le formol qui est assez cancérigène ?
07:21Le formol, on l'est quand même très cancérogène, c'est connu et donc c'est vrai que pour le manipulateur, c'est quand même pas anodin, il faut en prendre compte.
07:32Il y a le formol mais il y a aussi tout ce qui est sulfate de cuivre qui est phytotoxique et comme ensuite il faut éliminer le pédiluve au niveau de l'environnement, ça peut aussi poser des contraintes.
07:43Nous, au niveau du GDS Bretagne, on essaye de continuer à trouver des solutions pour pouvoir aider les éleveurs à appliquer de façon rigoureuse ces désinfections collectives mais avec peut-être des solutions plus simples et moins contraignantes.
07:59Vous avez testé le pédiluve sec en poudre ?
08:04On a effectivement cette année mis en place un essai avec un produit qui s'appelle Saniblan litière, c'est un asséchant désinfectant des litières mais il est sous forme de poudre et il est utilisé dans un bac pédiluve en sortie de traite ou dans un couloir de retour.
08:22On a testé l'efficacité par rapport à ce qui avait déjà été testé avec d'autres moyens de désinfection collective.
08:29Pour quels résultats ?
08:32Pour l'instant, on a des résultats préliminaires qui sont plutôt satisfaisants parce qu'on arrive en deux mois de traitement à un résultat aussi intéressant que les autres moyens de désinfection.
08:43On avait des élevages qui étaient autour de 20% de pieds atteints au départ de l'étude et on arrive à 8% après deux mois de traitement tous les 15 jours et donc 8% c'est à peu près ce qu'on obtient aussi avec d'autres formes de désinfection collective.
08:59Donc on est plutôt satisfait parce que c'est en plus un produit qui est facile d'utilisation pour l'éleveur et il y a aussi une bonne acceptation des vaches, il n'y a pas du tout d'appréhension dans ce que l'on peut voir.
09:12Parce que passer dans l'eau c'est toujours gênant.
09:14Et là on voit que les vaches ne sont pas anxieuses donc ça ne limite pas la fréquentation, on y pense notamment en traites robotisées, on a une bonne fréquentation malgré la mise en place de ce type de produit.
09:24Donc on essaye de trouver des solutions pour les éleveurs.
09:27Donc en gros les résultats vous avez réussi à diviser par deux l'incidence de la maladie.
09:32Oui voilà sachant que c'est aussi ce qu'obtient, on n'arrivera sans doute jamais à moins de 8%, on n'arrivera pas à 0% de pieds atteints en élevage, ce n'est pas forcément un objectif mais on arrive à des résultats comparables aux autres moyens de désinfection collective donc c'est plutôt intéressant pour les éleveurs.
09:51Donc ça reste une maladie difficile à combattre quand même.
09:54Oui c'est assez contraignant.
09:56Merci Yvann Leperlier.
09:58Je vous remercie, au revoir.

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