Marchés des matières premières
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00:00Bonjour et bienvenue sur la SPACE TV par WebAgri. Je suis avec Patricia Lecatte.
00:11Bonjour.
00:12Vous êtes responsable de l'alimentation et production animale aux céréopas.
00:15Voilà.
00:16Pour l'instant, nous allions parler hausse des prix des matières premières.
00:20Pour vous, pour bien comprendre la situation, il y a des angles morts à vérifier. Lesquels ?
00:24Tout à fait. Alors on a souvent tendance à se focaliser sur l'offre.
00:28Souvent, on ne nous parle que de l'offre, des stocks, de la production.
00:30La demande, c'est aussi très important. Et souvent, elle est sous-estimée en début de campagne.
00:34Mais il y a des angles morts, en fait, pour nous, qui vont être très importants cette année.
00:38C'est la logistique, la politique et la géopolitique.
00:41D'accord. Si on part sur la logistique, par exemple ?
00:44Alors sur la logistique, en fait, j'ai tendance à dire souvent que l'offre doit rencontrer la demande.
00:49Et pour ça, elle est stockée à un moment donné.
00:51Et elle est aussi transportée en grande partie pour arriver sur les marchés internationaux.
00:55Donc du coup, en fait, on a un certain nombre d'éléments qui sont assez structurels.
01:00Et quelques-uns qui sont conjoncturels, en fait, qui se sont développés.
01:04La 1re des choses, en fait, c'est le stockage.
01:06Et au niveau du stockage, il y a une très forte augmentation du stockage à la ferme un peu partout dans le monde.
01:10Ça concerne tous les pays et toutes les productions.
01:12Avant, on parlait du soja en Argentine, avec de la rétention pour s'arbitrer face à de l'inflation.
01:18Aujourd'hui, c'est vraiment le blé, le maïs, le soja un peu partout.
01:22Aujourd'hui, on n'a, par exemple, pas de problème de disponibilité en blé.
01:25Alors, on parle aussi du marché des blés, pas du blé,
01:28parce qu'en fait, on manque de certains blés sur le marché, mais pas de tous.
01:31Mais si on prend l'exemple de la mer Noire,
01:33on pourrait mettre sur le marché autant qu'en 2017-2018, où ça avait été un record.
01:38Simplement, ce blé, il est au chaud, dans les silos, dans les fermes, souvent.
01:42Et donc, il faut comprendre ce qui inciterait.
01:46D'abord, pourquoi les agriculteurs le gardent au chaud ?
01:49Et puis ensuite, qu'est-ce qui les inciterait à le sortir de l'exploitation pour le mettre sur le circuit ?
01:55Donc, le stockage, c'est déjà quelque chose de très important.
01:58Et par exemple, si je reprends l'exemple du blé russe,
02:01aujourd'hui, c'est très politique, on est en pleine élection législative,
02:05les politiques ont été très attentifs à l'inflation alimentaire dans le pays.
02:08Il faut gérer cette inflation, donc il y a une retenue aujourd'hui à cause de ça.
02:11Et puis, il y a toute la géopolitique.
02:13Et on peut se dire que dans une année comme celle-ci,
02:16ça m'étonnerait que la Russie se prive d'aller passer des accords,
02:21souvent c'est grains, pétrole, etc.,
02:23mais avec des clients comme la Turquie, l'Iran, l'Afghanistan.
02:27Et d'ailleurs, malgré les prix très chers en Russie,
02:30ils exportent et ils exportent plutôt sur des rythmes
02:33qui commencent vraiment à monter en puissance depuis 2 semaines.
02:37Donc ça, c'est la partie stockage et ce qui peut, un moment donné,
02:41avec les taxes qui ont été mises en place notamment par les Russes
02:45et qui pourraient peut-être diminuer dans les mois à venir.
02:49Voilà, ça, c'est une des explications.
02:51Après, en partie logistique, il y a le transport.
02:54Et le transport, il y a 2 choses.
02:56Il y a le Covid qui a complètement désorganisé le transport,
02:59à la fois maritime, avec des routes qui sont privilégiées à d'autres
03:03et des matières premières qui sont privilégiées à d'autres,
03:05donc qui font monter les prix de certaines destinations
03:08et globalement de l'ensemble du fret maritime,
03:10ce qui va avantager certains acteurs par rapport à d'autres,
03:13notamment pour aller sur l'Asie.
03:15La France, elle ne sera pas très...
03:17Malheureusement, la France ne va pas forcément en profiter.
03:20Et puis, vous avez tout le transport interne,
03:23c'est-à-dire dans les différents pays.
03:25Si vous prenez l'Australie, par exemple,
03:27aujourd'hui, il y a des fermetures entre les différents Etats
03:29et il y a aussi des problèmes de main-d'oeuvre qui sont liés au Covid.
03:32Par exemple, la récolte australienne,
03:34aujourd'hui, ils ne savent pas avec qui ils vont la récolter.
03:36Ils sont vraiment en train de courir après des personnes
03:38pour venir récolter dans les différents Etats ce blé qui devrait arriver.
03:42Et puis, en termes de logistique et de transport,
03:46il y a aussi l'impact du changement climatique.
03:49Et donc, on peut prendre deux exemples.
03:51Il y a ce dont on parle beaucoup en ce moment,
03:53mais qui est ponctuel, c'est effectivement les ravages
03:57qu'a fait la tempête ou l'ouragan Ida en Louisiane,
04:01qui est un peu le poumon d'exportation des Etats-Unis.
04:04Forcément, à un moment donné, ça amène de la volatilité dans les marchés.
04:07Et puis, il y a quelque chose d'un peu plus grave,
04:10c'est le fleuve Parana, qui est, à l'Argentine,
04:14ce qu'est le Mississippi aux Etats-Unis,
04:16qui est là aussi ce qui permet d'exporter,
04:18de triturer, etc., dans le pays.
04:20Et le fleuve n'a jamais été à des niveaux d'eau aussi bas depuis 70 ans.
04:24Donc, l'Etat a décrété un état d'urgence
04:27pour les 6 mois qui sont en cours.
04:30Et si la Niña en remet une couche,
04:33puisqu'on pense qu'il y a une forte probabilité
04:35d'avoir une 2e année de la Niña,
04:37on aura toujours ce boulot d'étranglement.
04:39Et je rappelle que l'Argentine
04:41est le 1er exportateur de tourteau, de soja.
04:43Et donc, forcément, ça a un impact fort,
04:45mais ça a aussi un impact sur le maïs.
04:47On parlait du soja, justement.
04:49Sur la question de la disponibilité du soja,
04:51quelle est votre analyse ?
04:52Oui, alors, c'est pareil.
04:53En fait, je dis toujours,
04:54mise à disposition et disponibilité,
04:56c'est pas exactement pareil.
04:57Quand on regarde sur le papier,
04:58l'Argentine, il y a beaucoup de choses.
05:00Mais on voit déjà qu'effectivement, entre la rétention,
05:02parce qu'il y a une très forte inflation alimentaire dans le pays,
05:04et la logistique, c'est compliqué.
05:06Et après, le Brésil, c'est pareil.
05:08Je dis aussi souvent
05:10que le marché de la graine n'est pas le marché du tourteau.
05:13Donc ne vous arrêtez pas à ce qu'on va vous dire
05:15sur le marché de la graine.
05:16Je prends juste un exemple.
05:17On attend l'année prochaine à ce que l'offre brésilienne
05:20augmente d'au moins 15 millions de tonnes.
05:22Ils ne mettront pas plus de tourteau de soja
05:24sur le marché que cette année.
05:25Voilà.
05:26Parce qu'à la fois, en fait,
05:27ils produisent pour exporter de la graine,
05:29avant d'exporter du tourteau.
05:31Et ensuite, le tourteau qui est produit aujourd'hui
05:33est préférentiellement gardé
05:35par les transformateurs brésiliens
05:37pour le transformer en produits animaux
05:39et revendre ces produits animaux
05:41à plus forte valeur ajoutée.
05:42Très bien.
05:43Merci beaucoup pour cet éclairage, Patricie Lecadre.
05:44Merci à vous.
05:45Quant à nous, on peut se retrouver sur Ternet
05:47et sur WebAgri pour davantage d'informations agricoles.