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00:00On retrouve Pierre-Emmanuel Guigaud, historien, maître de conférences à l'université de Créteil et responsable de l'association Michel Rocard, bonjour.
00:07On pensait que suite à l'élection de Yael Brandt-Pivet au perchoir, la majorité relative était une alliance entre la Macronie et la droite républicaine.
00:15L'élection d'Éric Coquerel montre que ce n'est pas aussi clair. Qu'en pensez-vous ?
00:21C'est assez ambigu comme élection puisque ce poste revient toujours à l'opposition.
00:26Être élu à ce poste, c'est reconnaître que la gauche fait partie de l'opposition face à la droite qui a remporté la présidence.
00:35La droite et le centre avec la présidence de l'Assemblée nationale.
00:39On a une situation qui est assez ambiguë.
00:41On a vu qu'au niveau du bureau, la gauche est majoritaire mais qu'au niveau de la présidence des différentes commissions,
00:49c'est au contraire le centre et la droite qui ont une nette majorité avec 6 sur 8 comme vous l'avez rappelé.
00:54En tout cas, ce qui est sûr, c'est que le grand perdant de ces différentes élections à l'Assemblée nationale,
00:59c'est clairement le RN qui n'a ni aucune présidence de commission ni aucun poste au bureau de l'Assemblée nationale.
01:06Mais est-ce que ça veut dire qu'on s'oriente vers une majorité relative entre la Macronie et la droite républicaine
01:11vu qu'ils ont obtenu 6 des 8 présidences de commission ?
01:16C'est un des éléments qui sont sur la carte.
01:19Le problème, c'est que ça ne suffit pas à avoir une majorité suffisamment confortable.
01:23En tout cas, ça ne suffit pas du tout à avoir une majorité absolue.
01:27Et ils devront donc chercher, si jamais c'est cette majorité-là qui se dessine, des soutiens à gauche,
01:34des soutiens au RN, ce qui dans les deux cas semble très difficile.
01:39Donc ça ne remet pas en cause la situation telle qu'elle est sortie du résultat du scrutin il y a maintenant presque deux semaines.
01:47On a toujours une situation qui est très ambigüe, avec une majorité qui, de toute façon,
01:52quelle qu'elle soit, devra composer avec des oppositions qui seront très fortes
01:57ou avec des majorités à la carte suivant chacun des textes qui sera voté.
02:02Vous parliez justement de chercher des soutiens à gauche,
02:05mais vu l'élection d'Éric Coquerel, on imagine mal là une rupture du nouveau Front populaire.
02:11Effectivement, il y a eu avec ces différents votes une resolidification du Front populaire.
02:16Qui est due à ces différentes élections.
02:19Et il y a eu plutôt une assez grande solidarité, que ce soit derrière la candidature d'André Chassaigne
02:24pour présider à l'Assemblée nationale, ou pour les différentes commissions,
02:27ou encore pour les postes au bureau de l'Assemblée nationale.
02:30Alors que ces jours-ci, on voyait au contraire des tensions très fortes,
02:33notamment autour du nom du futur Premier ministre.
02:36Puisque la France insoumise et le PS avaient présenté des noms,
02:41Laurent Stubiana, Huguet de Belleau, qui à chaque fois avaient été rejetés par les autres composantes.
02:47Donc ces tensions-là semblent mises de côté.
02:50Mais elles peuvent très rapidement revenir,
02:52puisque les différents groupes appellent à un vote pour choisir le Premier ministre
02:57proposé par le nouveau Front populaire, qui devrait avoir lieu le 23 juillet.
03:01Pour revenir à l'élection de la présidente de l'Assemblée, Yael Brand-Pivet,
03:06on a quand même assisté à une victoire du Nini.
03:10Oui, parce qu'effectivement, elle a réussi à faire un relatif consensus au centre et centre droit.
03:17Alors qu'il y avait eu des tensions assez fortes,
03:19on sait qu'Emmanuel Macron lui en voulait de ses prises de position
03:22lors de la campagne des législatives.
03:24Elle avait très mal pris la dissolution,
03:26elle s'était présentée finalement avec une assez grande indépendance à l'égard d'Emmanuel Macron.
03:31Là, elle a réussi finalement à rassembler derrière elle le centre et le centre droit
03:38contre la gauche du nouveau Front populaire
03:41et contre l'extrême droite qui est présentée chacun des candidats de manière unie.
03:46Mais l'alliance entre la Macronie et la droite républicaine,
03:49elle n'est pas majoritaire dans le pays ?
03:51Non, justement, elle n'est ni majoritaire dans le pays, ni majoritaire à l'Assemblée nationale.
03:56On pourrait même dire que dans le pays, en termes de poids électoral,
04:00elle est très minoritaire.
04:02Si on prend les résultats des dernières législatives ainsi que des dernières européennes,
04:07celle-ci ne dépasse pas de beaucoup les 20%.
04:10On est autour de 20-21% et guerre plus.
04:14Donc, face à des oppositions, si c'est bien cette majorité-là qui se dessine,
04:20qui sont quand même très fortes avec 30% pour chacun des blocs,
04:24que ce soit le bloc de gauche ou le bloc d'extrême droite.
04:27Et aucune de ces alliances dont vous parlez ne pourra faire face à une motion de censure ?
04:32Tout à fait, puisque s'il n'y a pas de majorité absolue,
04:35c'est très dur de résister à une motion de censure,
04:38puisque en cas de crise grave, les oppositions n'hésiteront pas à la voter.
04:45Cette motion de censure sera plus difficile à voter néanmoins pour le groupe de centre,
04:51puisqu'on a du mal à imaginer que la gauche, sauf encore une fois crise grave, crise majeure,
04:57associerait ses noms à l'extrême droite lors d'une motion de censure.
05:01Ce serait difficile de dire d'un côté on fait barrage aux RN, aux élections législatives
05:06et à la désignation à des postes à l'Assemblée nationale,
05:09et en même temps accepter de voter avec le RN une motion de censure
05:14contre un gouvernement quel qu'il soit.
05:16Donc ça ne peut être utilisé qu'en extrême recours,
05:18ce qui donne quand même une marge de manœuvre assez importante
05:21à un gouvernement issu du centre et de la droite.
05:25Et en cas de censure, quelles seraient les solutions pour le chef de l'État, Emmanuel Macron,
05:29qui lui n'a toujours pas acté, à ce jour, la défaite électorale de son camp ?
05:35Non, il ne l'a pas acté, parce qu'effectivement, il imagine que peuvent se créer des coalitions
05:43entre différents partis, entre certaines personnes venant du PS, entre une partie de la droite.
05:48C'est comme ça qu'il imagine les choses.
05:50Et c'est une vision des choses qui n'est pas totalement absurde d'ailleurs.
05:55Alain Peyrefitte témoignait dans les années 1990
05:59que le général de Gaulle avait envisagé en 1967 une potentielle défaite électorale.
06:04Et le général de Gaulle avait dit qu'il ne démissionnerait pas si c'était le cas,
06:09sauf si vraiment la défaite était écrasante,
06:11et que dans ce cas-là, il nommerait un gouvernement technique,
06:14cherchant des alliances entre son propre parti et d'autres partis de centre ou de centre-droite.
06:20Donc c'est quelque part sur cette idée-là, déjà déployée en 1967 par le général de Gaulle,
06:25qu'Emmanuel Macron va essayer de s'appuyer pour composer une majorité et un gouvernement.
06:30Mais ils ont perdu aux élections européennes et aux deux tours des élections législatives.
06:35Tout à fait, mais le deuxième tour des élections législatives
06:38leur ont permis d'être nettement au-dessus des prévisions,
06:41puisqu'ils ont quand même plus de 140 députés,
06:43et donc c'est là-dessus qu'ils espèrent emmagasiner en s'alliant avec la droite.
06:47Mais encore une fois, ça va être très fragile,
06:49et le risque de mention de censure est de toute façon très fort.
06:53Ils vont avoir beaucoup de mal de toute façon à adopter des lois,
06:57puisqu'ils n'auront pas de majorité absolue pour faire adopter celle-ci.
07:00Donc on va quand même, quel que soit le gouvernement,
07:03vers un gouvernement qui va utiliser du 49-3, des votes bloqués,
07:08et des ordonnances et des décrets pour gouverner.
07:11Et du coup, dans ce cas-là, est-ce qu'il serait quand même obligé de démissionner,
07:14ou est-ce qu'on pourrait aller vers une crise de régime,
07:17ou d'après vous, ce n'est pas le cas ?
07:19La crise de régime, ça signifierait qu'aucun gouvernement ne puisse être nommé,
07:25qu'il n'y ait pas de majorité du tout qui se dessine,
07:27et dans ce cas, la seule solution pour en sortir,
07:30ça serait la démission du président de la République.
07:32Alors on a vu que certains, notamment à gauche, appellent cela de leur vœu,
07:36c'est le cas en particulier de Jean-Luc Mélenchon,
07:39et d'ailleurs, ça a eu des précédents historiques,
07:42puisque en 1879, le président de Mac Mahon,
07:46qui était aussi dans une situation de cohabitation,
07:48avait dû démissionner face aux Républicains,
07:52et on a également le précédent de 1924,
07:55donc il y a un siècle où le président Miron,
07:57qui s'était beaucoup impliqué dans la campagne électorale,
08:00avait dû démissionner.
08:01Il faut dire quand même qu'on était à l'époque dans un système clairement parlementaire,
08:05où c'est l'Assemblée nationale qui avait vraiment la priorité,
08:09qui avait le pouvoir le plus important entre les trois pouvoirs.
08:12On n'est pas exactement dans cette situation-là à l'heure actuelle,
08:15et en plus, d'ici là, avant qu'on arrive à une telle situation de blocage,
08:19il y a plein d'autres solutions pour Emmanuel Macron,
08:22et la solution la plus simple étant sans doute de serrer les dents,
08:26et de redissoudre d'ici moins d'un an.
08:30Il me semble d'ailleurs qu'Éric Ciotti a également appelé à la démission du chef de l'État.
08:35Le recours à un référendum serait risqué ?
08:39Le recours à un référendum est possible,
08:41il ne pourrait à mon avis se faire que dans le cas où il est sûr d'avoir une victoire,
08:46puisque là aussi le précédent gaulliste inciterait normalement un président battu,
08:52après différents échecs aux législatives et aux européennes,
08:55à démissionner comme l'avait fait le général de Gaulle en 1969.
08:59Donc c'est effectivement quelque chose de risqué,
09:02et en plus de ça, le référendum a un cadre qui est relativement strict,
09:07on ne peut pas utiliser le référendum selon la constitution pour n'importe quel projet de loi.
09:11Merci beaucoup Pierre-Emmanuel Guigaud d'avoir été avec nous sur France 24,
09:15merci pour votre décryptage.

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