Dans Europe midi, Mickael Dorian et ses invités débattent de dernières informations.
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00:00On va parler du reste de l'actualité à présent avec une semaine politique décisive
00:04alors qu'Emmanuel Macron recevra vendredi les chefs de partis et de groupes parlementaires
00:08et que la France Insoumise a menacé ce week-end de le destituer
00:13s'il nomme pas un Premier Ministre issu de la gauche.
00:15Vous n'étiez pas au courant de ça ?
00:17Ah ben normal, personne n'en a parlé puisqu'au même moment,
00:19on apprenait le décès d'Alain Delon, ça s'appelle faire un pschitt.
00:23D'abord, Arnaud Benedetti, est-ce que cette menace était sérieuse
00:26ou est-ce que c'était juste de la com' de la part de la France Insoumise pour faire parler d'eux ?
00:32C'est un coup symbolique.
00:33Clairement, on sait très bien que de toute façon,
00:38c'est l'article 108 de la Constitution qui dispose de cette possibilité
00:44de déchoir le Président de la République
00:46si les parlementaires réunis ont autre cours de justice,
00:49il faut le rappeler, considère qu'il a manqué à ses devoirs.
00:53Mais de toute façon, d'abord, il faudrait s'entendre sur ce que c'est que manquer à ses devoirs
00:58pour le Président de la République.
01:00Donc juridiquement, il y aurait un débat, mais surtout aujourd'hui,
01:03rien ne permet à l'Assemblée Nationale et également au Sénat
01:08de disposer finalement d'une majorité
01:11qui doit être de l'ordre, si mes souvenirs sont bons, de plus de 70%
01:17pour destituer le Président de la République.
01:21Mais on voit bien ce qu'il y a derrière, c'est la volonté aujourd'hui de la France Insoumise
01:26de considérer que dans la situation d'instabilité dans laquelle nous sommes entrés,
01:31il faut sursouligner la responsabilité du Président de la République
01:36pour essayer potentiellement d'accélérer l'agenda politique.
01:42Et de ce point de vue-là, même si on peut contester en effet
01:46la façon dont essaie d'utiliser la France Insoumise des ressources constitutionnelles,
01:51il y a un problème politique qui ne manquera pas de se poser à un moment donné
01:55si nous rentrons dans une période d'instabilité gouvernementale chronique.
02:00Parce qu'immanquablement, un certain nombre de responsables politiques
02:04en viendront à poser la question de la responsabilité personnelle et politique
02:09du Président de la République dans cette situation,
02:12qui est une situation, il faut le rappeler, on ne le dit pas suffisamment,
02:14mais totalement inédite sous la Ve République.
02:17C'est la première fois que la France se retrouve sans gouvernement
02:21et sans véritable visibilité sur l'avenir potentiel d'un gouvernement dans les mois qui viennent.
02:28Vous conviendrez tout de même, Arnaud Bénédetti,
02:30que si c'est de la com' de la part de la France Insoumise, l'annonce est tombée au mauvais moment.
02:34Oui, alors ça, ils ne sont pas responsables, bien évidemment, de l'actualité.
02:39Il est clair que là, en l'occurrence, il y a souvent parfois des événements
02:42qui viennent cannibaliser un coup de courbe.
02:44Nathan Devers.
02:46Qu'il y ait une responsabilité du Président de la République dans la situation politique,
02:50c'est une évidence absolue.
02:52Le Président a décidé de faire une dissolution au lendemain des élections européennes,
02:57sans laisser le temps aux diverses formations politiques de s'organiser,
03:01à commencer par la sienne d'ailleurs, et de mener une campagne constructive.
03:05Et ensuite, depuis le deuxième tour des élections législatives,
03:08il joue une stratégie extrêmement mitterrandienne, de monarque, maître des horloges,
03:14qui prend le temps, qui se distingue de la classe politique dont il entend montrer la médiocrité,
03:19pour mieux se hisser au rang de sage, qui contemple tout cela depuis une colline.
03:25Mais, est-ce que la stratégie de la France Insoumise est à la hauteur de la situation ?
03:31Je ne pense pas, et je ne pense pas pour deux raisons.
03:33D'abord, qui sont-ils pour critiquer l'autoritarisme ?
03:37Je n'ai pas vu Jean-Luc Mélenchon,
03:39qui fait certes l'apologie d'une nouvelle constitution moins présidentialiste,
03:42et ce en quoi je pense qu'il a raison sur le fond,
03:44mais je ne l'ai pas vu faire preuve de beaucoup de sens de la démocratie, notamment interne.
03:48Je vous rappelle que lors de ces élections législatives,
03:50c'est lui qui a purgé un certain nombre de gens, dont M. Corbière,
03:53dont le seul crime qui avait été ses plus fidèles soutiens depuis le tout début de la formation de la France Insoumise,
03:57dont le seul crime était d'appeler un peu plus de démocratie interne,
04:00et un peu moins de brutalisation du débat.
04:03Je vous rappelle aussi que depuis le deuxième tour des élections législatives,
04:07ces gens-là sont dans un déni,
04:09tant et si bien qu'on peut se demander s'ils habitent dans la même réalité que nous,
04:12à nous dire à 20h05 qu'ils ont été élus,
04:15et qu'ils vont appliquer le programme, rien que le programme, tout le programme,
04:19à ne pas se rendre compte que si Mme Castex arrivait à Matignon,
04:23elle serait l'objet d'une motion de censure,
04:27probablement dans les 48 ou dans les 72 heures,
04:29et que son gouvernement tomberait pour une seule raison,
04:31c'est qu'il y aurait des ministres insoumis,
04:33c'est le grand facteur qui déclencherait une motion de censure.
04:38Donc évidemment que là, on est dans une stratégie,
04:41qui à mon avis commence vraiment à fatiguer les Français,
04:43y compris les sympathisants des Insoumis,
04:46qui consiste à faire de l'agitation permanente,
04:48à jouer en fait avec toutes les cartes politiciennes de notre Constitution,
04:53et à ne pas être dans une démarche surtout de sincérité et de sens de l'État,
04:56dont on a besoin quand on est dans une période critique,
04:58où il y a trois Frances politiques qui s'affrontent,
05:00qui se regardent en chien de faïence,
05:02et qui ont besoin pourtant d'avancer ensemble,
05:04parce que nous sommes sur le même bateau.
05:05Alors concernant cette initiative de la France Insoumise,
05:07on apprend déjà que les socialistes, les écologistes,
05:09et les communistes du Nouveau Front Populaire se désolidarisent.
05:14Écoutez Marine Tondolier qui s'exprimait justement ce matin
05:17chez nos confrères de BFM TV.
05:19Ce n'est pas ni la ligne ni la priorité des écologistes.
05:22La priorité des écologistes c'est d'obtenir une cohabitation.
05:26Toute notre énergie est dirigée vers le fait que Lucie Casté
05:29soit bien nommée Première Ministre par Emmanuel Macron
05:32à l'issue des consultations du 23 août.
05:34Arnaud Benedetti, on a l'impression que personne ne s'est concerté
05:37au sein du Nouveau Front Populaire sur cette histoire.
05:39Non mais tout cela traduit et témoigne des ambiguïtés
05:42de ce Nouveau Front Populaire,
05:44qui est un cartel électoral qui a été construit
05:47dans l'urgence des élections législatives,
05:49qui a plutôt bien fonctionné,
05:51mais qui en aucun cas, il faut le rappeler,
05:53et Nathan Devers l'a dit justement,
05:55n'est majoritaire.
05:57Il va falloir qu'on nous explique comment avec 192 ou 193 députés,
06:01on est capable de former un gouvernement
06:03qui puisse gouverner et s'installer
06:05dans la durée et dans la stabilité.
06:08Ensuite, on sait très bien que,
06:10depuis le début de toute façon,
06:12et on le voit bien à travers les réactions de M. Olivier Faure
06:16ou ce matin de Mme Tondelier,
06:18qu'il y a des lignes de fracture
06:20au sein du Nouveau Front Populaire
06:22qui sont extrêmement importantes
06:24sur un grand nombre des sujets
06:26et pas seulement sur ce sujet
06:28de l'éventuel et hypothétique
06:30et vraisemblablement invraisemblable
06:32destitution du Président de la République.
06:35Donc on voit qu'ils ne sont pas d'accord entre eux
06:38et donc, n'étant pas d'accord entre eux,
06:40on voit mal, alors qu'ils n'ont que 193 députés,
06:42comment ils seraient en mesure de gouverner le pays.
06:45Et là où je ne suis pas tout à fait en accord avec Nathan Devers,
06:49c'est quand il nous dit
06:50« Oui, Emmanuel Macron prend la posture du sage à la Mitterrand.
06:53Oui, enfin, tout cela, c'est pour maquiller aussi une forme d'impuissance
06:56du côté d'Emmanuel Macron. »
06:58Parce que la réalité, encore une fois,
07:00Emmanuel Macron, pas plus que les responsables politiques
07:03de ce pays d'où qu'ils viennent,
07:05n'a de solution à la situation
07:07dans laquelle nous sommes entrés
07:09depuis le 7 juillet dernier.
07:12Arnaud Bénédetti, concernant à présent
07:14le calendrier politique,
07:16les consultations de vendredi repoussent
07:18une nouvelle fois la nomination d'un Premier ministre
07:20puisqu'il faudra attendre les conclusions
07:22de ces discussions.
07:24Est-ce qu'elles étaient réellement nécessaires,
07:26finalement, ces discussions ?
07:28Non, mais il n'est pas choquant qu'au vu de la conjoncture
07:31qui est la nôtre aujourd'hui,
07:33c'est-à-dire l'absence de majorité
07:35à l'Assemblée nationale,
07:37que le Président de la République
07:39consulte les forces politiques du pays.
07:42C'est tout à fait logique.
07:43Sauf que nous sommes le 19 août
07:45et qu'aujourd'hui il y a de nombreux sujets
07:47qui restent en suspens.
07:48Ah non, mais on est d'accord.
07:49C'est-à-dire que ça fait depuis le 7 juillet
07:51que nous n'avons pas de gouvernement
07:52ou que nous n'avons qu'un gouvernement démissionnaire
07:54ce qui d'ailleurs pose problème sur le fond.
07:56On entend beaucoup parler du budget,
07:57mais il n'y a pas que ça.
07:58Il y a plein de sujets qui restent en suspens.
07:59Il y a des tas de sujets qui sont très compliqués.
08:01On parlait de la Nouvelle-Calédonie ces derniers jours.
08:02Il y a la Nouvelle-Calédonie, j'allais y venir.
08:04Il y a la situation internationale.
08:06Tout cela, si vous voulez, renforce deux choses.
08:08Et c'est ça qui est inquiétant.
08:10D'une certaine manière dans une démocratie
08:11qui est une démocratie parlementaire,
08:13comme la Ve République,
08:14même si c'est un régime semi-présidentiel.
08:16Ça renforce le pouvoir de l'administration.
08:18Parce qu'à partir du moment où le politique est absent,
08:20c'est l'administration qui va diriger le pays.
08:24Et une administration, elle n'est pas responsable
08:27comme l'est un responsable politique
08:29devant le Parlement et devant l'opinion publique.
08:31Donc ça, ça pose problème.
08:32Et deuxièmement, ça renforce en effet,
08:34d'une certaine manière,
08:36les pouvoirs du Président de la République.
08:38Puisque aujourd'hui, finalement,
08:39le régime parlementaire ne fonctionnant pas,
08:41faute de majorité,
08:42c'est le pouvoir présidentiel qui concentre tous les pouvoirs
08:45ce qui, quand même, n'est pas sans poser problème
08:47sur la distance.
08:48Bon, depuis ce week-end,
08:49il y a le nom de Valérie Pécresse
08:51qui résonne de plus en plus dans les rédactions.
08:53C'est un scénario qui avait été évoqué déjà
08:56la semaine dernière.
08:58Mais depuis ce week-end, effectivement,
08:59ce nom semble revenir davantage.
09:02Est-ce que c'est un scénario crédible,
09:03selon vous, Nathan Devers ?
09:04Alors, ce qui est très intéressant,
09:06quand on regarde les trois figures
09:08dont le nom a été mentionné
09:09depuis le début,
09:10M. Cazeneuve, M. Bertrand et Mme Pécresse,
09:14ils ont un point commun,
09:15c'est que ce sont trois personnes
09:17qui ont démontré,
09:18l'un venant de la gauche
09:21et les deux autres venant de la droite,
09:23qu'ils étaient capables de travailler avec tout le monde
09:25dans le camp républicain, en quelque sorte.
09:27Et donc, j'ai l'impression qu'on est en train d'assister
09:29à l'émergence d'une nouvelle forme de macronisme.
09:32En 2017, la formule du macronisme,
09:34c'était le « et en même temps »
09:35de réunir le centre gauche et le centre droit.
09:37Là, ce n'est pas tout à fait ça.
09:38C'est d'essayer de créer une tradition
09:40de compromis, de dialogue,
09:42de constructivité commune.
09:44Et c'est ça le dénominateur commun
09:45de ces trois personnalités.
09:46Alors, en un mot, Arnaud Benedetti,
09:48crédible ou pas crédible ?
09:49Valérie Pécresse ?
09:50Il faudra bien nommer un premier ministre.
09:51Toute la question est de savoir
09:53si ce premier ministre sera suffisamment fédérateur
09:55pour construire ce que Nathan Devers appelle
09:58finalement un compromis majoritaire
10:00à l'Assemblée Nationale.
10:01Au stade où l'on parle,
10:03je ne vois pas aujourd'hui
10:05une personnalité qui soit en mesure
10:07de réussir finalement
10:09cette espèce de martingale magique
10:11qui permettrait de sortir de la crise institutionnelle
10:13dans laquelle nous sommes entrés.
10:14Merci Arnaud Benedetti et merci Nathan Devers
10:16d'avoir été avec nous sur Europe 1.