Véronique Le Floc'h : «On a conduit l'agriculture dans une situation totalement dépendante de l'Europe»
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Véronique Le Floc'h, présidente de Coordination rurale, répond aux questions de Dimitri Pavlenko.
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NewsTranscript
00:00Il est 7h12 sur Europe 1, Dimitri Pavlenko vous recevez ce matin, la présidente du syndicat agricole La Coordination Rurale.
00:06Bonjour Véronique Leflocq.
00:09Oui bonjour.
00:10Bienvenue sur Europe 1, on se souvient de vos bonnets jaunes lors de la crise agricole cet hiver.
00:15Vous nous direz d'ailleurs où on en est mais avant cela, quand même une question sur notre nouveau Premier Ministre Michel Barnier.
00:21Alors ça tombe bien pour vos professions agricoles Véronique Leflocq, il a été par le passé Michel Barnier Ministre de l'Agriculture sous François Fillon.
00:28Est-ce que vous le connaissez et est-ce que vous avez demandé à le rencontrer Véronique Leflocq ?
00:34Alors personnellement je ne le connais pas, je n'ai pas travaillé avec lui parce que j'étais encore étudiante au moment où il exerçait.
00:41Néanmoins on a bien demandé à le rencontrer parce que l'agriculture a été en théorie ou aux yeux de tous portée d'intérêt général majeur
00:51et je pense que c'est peut-être une des plus graves crises qu'il devra gérer cet hiver, cet automne, cet hiver.
01:00Donc bien sûr qu'on ne veut pas qu'il se trompe parce que l'avenir de l'agriculture et de ce que vous aurez dans vos assiettes demain est en jeu.
01:09Donc on attend.
01:11Donc crise financière, crise budgétaire peut-être ? Non, vous nous dites la crise la plus grave qui arrive ce sera la crise agricole.
01:17Mais qu'est-ce qui se passe Véronique Leflocq ? Où en est-on de cette crise dont tout le monde se rappelle ?
01:21Les tracteurs montant sur Paris notamment fin février début mars.
01:25Rien n'est arrangé à l'heure où l'on se parle Véronique Leflocq ?
01:30Eh bien écoutez la situation s'est empirée parce qu'à la situation qui était déjà dramatique avec de l'inflation, avec une concurrence déloyale,
01:39avec des prix absents et absents depuis 30 ans, des prix qui ne font que plonger.
01:45Et on voudrait mettre sous dépendance économique tous les agriculteurs pour qu'ils deviennent totalement asservis.
01:52La crise sanitaire est encore en France.
01:57Elle touche tout le territoire avec deux virus, la FCO et la MHE, auxquels on rajoute la grippe aviaire.
02:08C'est ça, donc les moutons, les ovins, les bauvins et la volaille, donc les canards essentiellement pour la grippe aviaire.
02:21Mais on n'a pas réglé tous les problèmes avec la bio, on n'a pas réglé les problèmes de récolte pour les céréales.
02:30En fait ce qui se passe c'est qu'on a conduit l'agriculture dans une situation, comme je disais tout à l'heure,
02:36totalement dépendante de l'Europe, donc totalement dépendante d'aide, à un point où aujourd'hui,
02:43comment fait-on pour produire en France des céréales quand elles peuvent venir d'Ukraine ou d'ailleurs ?
02:49Comment fait-on pour produire de la viande quand on est en train de signer les accords de Mercosur ?
02:54Comment fait-on pour produire du bio quand pareil la plupart des productions viennent d'Espagne ou d'ailleurs ?
03:02Comment fait-on pour produire du vin quand en France on vous dit d'arracher vos vignes alors que l'Europe vient d'ouvrir les quotas pour replanter ailleurs ?
03:10Et que les vins viennent d'Espagne, d'Italie et des Etats-Unis ? On fait comment ? On fait comment nous pour vivre ?
03:17C'est vrai qu'on a l'impression d'un empilement des crises, alors vous avez cité les crises sanitaires dans l'élevage,
03:24on en parlera d'ailleurs avec Emmanuel Ducrot tout à l'heure aux alentours de 9h20,
03:28on a la pire récolte céréalière depuis 40 ans Véronique Lefloch, comment ça vous impacte vous notamment à la coordination rurale ?
03:36Il y a beaucoup d'éleveurs dans votre syndicat.
03:39Alors oui, des éleveurs et des céréaliers, on a de tout.
03:43En fait, les deux catégories de producteurs sont touchées puisque ceux qui produisent les céréales
03:50ont eu des charges élevées à l'automne dernier quand ils les ont mis en place.
03:55C'était dans des conditions difficiles parce qu'il n'a cessé de pleuvoir depuis la fin 2023 et tout l'automne.
04:01Donc nos cultures ont été touchées par les maladies, des maladies que l'on ne peut plus soigner
04:07parce qu'on nous enlève au fur et à mesure toutes les molécules.
04:10On nous les enlève à nous en France alors qu'on ne les enlève pas ailleurs.
04:15Donc au moment de récolter de la pluie de nouveau, résultat catastrophe, des céréales humides, le poids des grains insuffisant.
04:26Donc difficile pour nous, pour les céréaliers, sachant que pour être payé, c'est au prix mondial
04:33et que ce prix, malgré une offre réduite, ne va pas monter puisque partout ailleurs il y a suffisamment de céréales.
04:42Pour nous les éleveurs, on nourrit nos animaux à partir de céréales entre autres,
04:47et bien on est impacté avec une céréale qui ne sera pas moins chère et qui sera certainement de moins bonne qualité.
04:55Donc avec des risques sanitaires après dans nos élevages, sachant que quand vous n'avez pas de trésorerie,
05:01déjà vos animaux peuvent être fragilisés parce que vous ne les complémentez pas comme il faut.
05:06On voit bien le cercle vicieux qui s'est mis en place.
05:10Vous auriez rendez-vous avec Michel Barnier ce matin, Véronique Leflocq, qu'est-ce que vous lui diriez ?
05:15Qu'est-ce que vous lui demanderiez ?
05:17Eh bien déjà de ne pas se tromper sur le ministre qu'il va choisir, parce qu'il nous faut un ministre, une personnalité forte, qui est capable.
05:27Eh bien écoutez, il faudrait donner un nom de chez nous, je donnerais le nom d'un bonnet jaune.
05:34Je donnerais le nom de Bousquet-Cassagne.
05:36Vous voyez le type, le profil type, quelqu'un qui est droit dans ses bottes et qui ose dire les choses et qui veut de l'efficience.
05:43Maintenant ça suffit.
05:45Soit on veut encore des agriculteurs et on fait quelque chose pour qu'il y ait des jeunes à venir dans nos fermes.
05:52Soit on se dit c'est pas grave, on a l'équivalent de 33 000 hectares.
05:5633 000 hectares c'est plus de 33 000 terrains de foot qui partent en friche chaque année.
06:01Parce qu'on n'en peut plus.
06:03Bousquet-Cassagne, je précise, c'était le patron de la coordination rurale dans le Lot-et-Garonne, si j'ai bonne mémoire.
06:08Il s'était illustré notamment dans les dégradations de la préfecture.
06:13On imagine qu'auprès des pouvoirs publics ça n'a pas dû améliorer sa cote, si je puis dire, pour rebondir ce que vous disiez.
06:20Eh bien écoutez, il est patron de la chambre d'agriculture, mais néanmoins il arrive à faire des choses que partout ailleurs on ne fait pas, ou on n'ose pas faire.
06:30Il y avait un abattoir qui était en faillite, ils l'ont repris à la chambre d'agriculture.
06:34Il y avait besoin d'une réserve d'eau, une réserve culinaire.
06:37Même aujourd'hui, tous les écologistes disent que c'est le modèle.
06:41Et lui était menacé de prison.
06:43Est-ce qu'il faut s'attendre à vous voir, vous remobiliser dans les semaines qui viennent, Véronique Lefloch ?
06:47Les agriculteurs vont-ils remonter sur leurs tracteurs, repartir dans des actions ?
06:51Eh bien écoutez, toutes les cases sont en train de se cocher puisqu'on les voit.
06:57Ils sont repartis pour le mercosur.
06:59Pour les céréales, on attend toujours.
07:02Alors que dès le départ, on a bien dit comment fait-on détaxer le foncier non bâti ?
07:09Pour notre outil de travail à nous les agriculteurs, celui qui est taxé 60% quand on compte la CSG avec.
07:16Mais comment peut-on produire encore en France avec autant d'obstacles et 200 000 normes en agriculture ?
07:24Vous voyez ce qui est grave aujourd'hui ?
07:26Juste si je peux me permettre un mot, qui vit bien aujourd'hui dans le domaine agricole ?
07:31Tous ceux qui vivent sur notre dos.
07:33La réponse est dans la question, on pourra vous dire.
07:35Merci beaucoup Véronique Lefloch d'être venue ce matin sur l'antenne d'Europe 1.
07:39Je rappelle que vous êtes la présidente de la coordination rurale.
07:42Bonne journée à vous malgré tout, il est 7h20.