Chères lectrices, chers lecteurs,
Voici la captation de la rencontre de Hubert Haddad, enregistrée le mercredi 11 septembre 2024. Cet échange est animé par notre responsable de Littérature Française, Delphine.
Vous souhaitant de belles lectures,
L'écume
La Quatrième :
"Clemens, jeune Allemand issu de la bourgeoisie cultivée et bientôt à l’abandon, a tout l’air d’un elfe qui parcourt les massifs de la Forêt-Noire, comme dans les légendes. Alors que le régime nazi resserre peu à peu son étau sur l’Allemagne, sa vie d’enfant se trouve bousculée de foyer en institut, avec son violon comme un prolongement de lui-même. La virtuosité prodigieuse et fascinante avec laquelle il s’empare des partitions des plus grands lui permet d’échapper à la tourmente et à l’angoisse des enrôlements forcés dans les Jeunesses hitlériennes. Bientôt, une musique terrible arrive de l’Ouest, celle du déluge des bombes alliées qui s’abat sur les villes et précipite le pays dans l’abîme, emportant le destin de tous dans la guerre…
La Symphonie atlantique nous fait entendre Liszt, Mozart ou Grieg dans le fracas du monde, en un étrange écho avec notre époque. Hubert Haddad ravive avec maestria la culture allemande dévoyée par les nazis et donne la parole aux innocents, aux enfants et aux populations civiles bombardées. Tragique, essentiel et bouleversant."
Voici la captation de la rencontre de Hubert Haddad, enregistrée le mercredi 11 septembre 2024. Cet échange est animé par notre responsable de Littérature Française, Delphine.
Vous souhaitant de belles lectures,
L'écume
La Quatrième :
"Clemens, jeune Allemand issu de la bourgeoisie cultivée et bientôt à l’abandon, a tout l’air d’un elfe qui parcourt les massifs de la Forêt-Noire, comme dans les légendes. Alors que le régime nazi resserre peu à peu son étau sur l’Allemagne, sa vie d’enfant se trouve bousculée de foyer en institut, avec son violon comme un prolongement de lui-même. La virtuosité prodigieuse et fascinante avec laquelle il s’empare des partitions des plus grands lui permet d’échapper à la tourmente et à l’angoisse des enrôlements forcés dans les Jeunesses hitlériennes. Bientôt, une musique terrible arrive de l’Ouest, celle du déluge des bombes alliées qui s’abat sur les villes et précipite le pays dans l’abîme, emportant le destin de tous dans la guerre…
La Symphonie atlantique nous fait entendre Liszt, Mozart ou Grieg dans le fracas du monde, en un étrange écho avec notre époque. Hubert Haddad ravive avec maestria la culture allemande dévoyée par les nazis et donne la parole aux innocents, aux enfants et aux populations civiles bombardées. Tragique, essentiel et bouleversant."
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00:00Bonsoir à tous, merci infiniment d'être là ce soir avec une des pages.
00:06Nous sommes infiniment enchantés de recevoir Hubert Haddad pour son dernier roman paru le 5 septembre dernier.
00:17On retrouve avec joie et avec bonheur la virtuosité de la langue d'Hubert Haddad
00:25qui est d'abord sa marque de fabrique, c'est ce qu'on aime dans sa prose, une prose éminemment poétique.
00:35Mais il nous convie pour un véritable roman, un roman qui met en scène un tout jeune garçon au début de l'histoire, un enfant.
00:49Un enfant seul avec sa mère, nous sommes en Allemagne, année 30, la montée du nazisme.
00:59Et cet enfant va être envoyé chez un grand-oncle pour être sauvé.
01:10La mère lui confiera un violon et ce violon qu'il est censé protéger va le protéger lui tout au long de son parcours
01:22parce que la virtuosité, la musique vont lui tracer un chemin.
01:31Est-ce que vous pouvez nous parler de ce beau personnage, de cet enfant?
01:38L'enfant, on prend un personnage et on prend une tranche de temps.
01:48Pour que la tranche de temps soit surgissante, fraîche, même si c'est une terrible tranche de temps,
02:03on prend un enfant plutôt qu'un vieillard qu'on a connu, qui est dans la répétition souvent.
02:11Nous sommes tous d'ailleurs dans la répétition, dans la mort, comme disait Freud.
02:21C'est très simple, il n'y a pas de préalable à un roman, en vérité, il n'y a pas vraiment de préalable à un roman.
02:31Il y a une idée, on ne sait pas ce qu'elle va devenir.
02:37Il y a de l'écriture, l'écriture vous pulse.
02:43Et puis quand tout d'un coup il n'y a pas de perspective, vous êtes perdu, vous n'écrivez pas.
02:57Elle est là, elle vous pulse, vous êtes perdu.
03:01Mais il y a une idée, cette idée ou un titre, ne serait-ce qu'un titre.
03:06Et là vous êtes parti d'un lieu, est-ce que c'était ?
03:10Je suis parti de quelque chose.
03:12Une époque, il fallait évidemment, cette époque elle est terrible, mais elle peut se transposer.
03:19Je suis parti d'une promenade en Normandie, de nombreuses promenades.
03:27J'ai vécu dix ans sur les côtes normandes et puis je suis souvent retourné.
03:33J'habitais un village qui s'appelle Tigreville.
03:37Les lecteurs de Blondin, Tigreville.
03:42Et j'ai vécu là dix ans dans un village qui était menacé.
03:52Les maisons tombent à la mer dans cet endroit-là.
03:57Elle s'écroule, elle tombe à la mer.
03:59Il y a l'avancée, il y a la poussée argileuse depuis le bassin méditerranéen.
04:06Le roman se termine sur la côte.
04:08Vous avez peur que je m'éloigne du sujet ?
04:14Commencez par le début.
04:15Bref, j'ai vu, vous savez les blocos qui tombent.
04:19Il y a des énormes blocos en haut des falaises qui sont là, qui tiennent.
04:28Et puis de loin en loin, il y a des tout petits blocos pour enfants.
04:33Des tout petits blocos comme ça, en béton.
04:38Oui, les enfants joueront.
04:40C'est les enfants de la Hitlerjugend joueront là à se faire tuer.
04:46C'est ça le sujet.
04:47C'est-à-dire que je me demandais, qu'est-ce que c'est que ces tout petits blocos ?
04:52Alors on m'a dit, on appelle ça des Tobruk.
04:57Pourquoi Tobruk ?
04:59Parce que le mur de l'Atlantique, c'est énorme.
05:07C'est des complexes comme ça, immobiliers, qu'on met ici.
05:16Mais quand Rommel est venu faire une visite,
05:21Hitler a demandé à Rommel de voir si ça tenait bon.
05:25Rommel, il revient du désert.
05:28Et puis il y a la mer.
05:30Il y a comme ça, un phénomène d'analogie.
05:34Et il s'est promené et il a vu que des trous, de vastes, des plages vides.
05:44Et il s'est interrogé.
05:46Il a demandé aux ingénieurs, pourquoi là il n'y a rien ?
05:53D'où le Tobruk.
05:55Il a mis des Tobruk tous les 100 mètres.
05:59C'est dit de longue distance.
06:04Et moi je voyais, quand j'ai vu ça, je voyais un enfant, un jeune qui est là,
06:10complètement isolé de ce qui va se passer,
06:18ne comprenant rien à rien,
06:21et qui se retrouve face aux éléments.
06:27Les éléments, la guerre, c'est un élément parmi les éléments,
06:34qui rassemble tous les éléments.
06:36Et il est là, face aux éléments.
06:38On le met là, avec une mitrailleuse,
06:41dont il sait à peine se servir parce qu'il n'a eu que trois jours d'entraînement.
06:45Et puis c'est tout.
06:48Alors je voulais faire une petite nouvelle quoi.
06:51Rien, un petit rien, un truc, quelque chose comme ça pour évoquer.
06:57Et je ne l'ai pas fait, ça me traînait comme ça.
07:02C'est comme ça que le roman est né.
07:05C'est comme ça que le roman est né.
07:07Et puis ce titre me trottait, la Symphonie Atlantique.
07:13Et puis j'ai écrit entre temps un roman,
07:19un monstre et un chaos.
07:20Il est question aussi d'un enfant alter.
07:23Dans la Pologne, la Pologne est envahie.
07:30Et dans la Pologne où on a l'armée nazie,
07:35je ne veux pas employer le mot allemand,
07:37les armées nazies ont, en 1939, ravagé tout ce qui pouvait résister.
07:51C'est-à-dire qu'ils ont massacré les intellectuels, les enseignants.
07:54Et on voit une très belle évocation de la guerre,
07:57toutes les étapes, la montée, le nazisme.
08:01Finalement, là, on a tout.
08:03C'est une évocation qui est rapide, mais qui est véritablement chronologique.
08:09Et on retrouve toutes les étapes terribles jusqu'aux grandes destructions.
08:19Mais votre texte est aussi parsemé.
08:22Et ça, c'est ce qui fait l'échange.
08:30C'est qu'il est parsemé de la culture allemande.
08:33C'est-à-dire qu'il y a ce hiatus entre l'horreur de la guerre.
08:36Ce qu'on fait, c'est nazi, comme vous dites.
08:39Et cette culture extraordinaire, vous évoquez les grands poètes,
08:45Holderlin, Rilke.
08:46Mais je le mets en parallèle avec un monstre et un chaos,
08:50où il était question du ghetto de Lodz,
08:53où il y avait 150 000 Juifs qui ont été mis dans un ghetto au milieu de la ville
09:03et qui ont servi d'esclaves pour l'économie de guerre allemande
09:16jusqu'à disparition, jusqu'au massacre.
09:21Et là, je prends un petit enfant, un enfant qui altère,
09:26qui va se retrouver dans ce lieu-là.
09:29Il était dans un châtel qui a été anéanti.
09:32Et là, à travers Altair, il y a toute la culture yiddish,
09:38qui est en grande partie allemande.
09:41C'est-à-dire que c'est la culture européenne.
09:44On se retrouve maintenant à Ratisbonne,
09:49dans une famille de la bourgeoisie catholique.
09:52On est dans le sud de l'Allemagne.
09:54C'est la bourgeoisie catholique qui est un peu moins contaminée.
10:03Et surtout, dans cette famille, ça ne coïncide pas par la culture,
10:14par la grande culture germanique.
10:19Mais qu'est-ce que ça veut dire, la culture ?
10:22La culture, c'est l'universalité.
10:25Quand Novali s'écrit, il n'écrit pas pour un autochtone.
10:32Il écrit pour l'univers.
10:34Il est en rapport avec l'univers, avec l'universel, avec l'être.
10:41C'est quelque chose de très belle, à un moment donné, de cet enfant.
10:46Justement, vous dites que lorsqu'il joue du violon, il est au monde.
10:50Il est au monde lorsqu'il joue.
10:53Il est conscient au monde à ce moment-là.
10:56Comme si c'était un rapport.
10:58C'est-à-dire que ça le protège de cette réalité terrible.
11:02Il est dans son univers, il est dans sa musique.
11:05Cette musique aussi va le protéger.
11:08Parce que tout au long, un peu comme dans un conte,
11:11il va rencontrer des adjuvants qui vont le protéger.
11:15Lui, on ne l'envoie pas chez les jeunesses hitlériennes
11:21parce que c'est un virtuoso, c'est un enfant.
11:25Je reprends du début.
11:28Je reprends du début, tout simplement.
11:31Nous sommes en 1943.
11:35À Ratisbonne, il y a une femme
11:42qui a vraiment de graves troubles de la personnalité.
11:48Elle vit seule.
11:51Elle est héritière culturelle d'une famille.
11:57Cet enfant, il ne sait pas comment faire avec lui.
12:02Il a cinq ans.
12:05Dans son armoire, son trésor, c'est un violon.
12:09Un violon tricentenaire qui appartenait à son père.
12:15C'est ce qui, pour elle, est le plus précieux.
12:20Elle sait qu'au bout d'un moment,
12:23il va falloir se séparer de son enfant.
12:26Elle lui confie.
12:29Elle lui dit, il faut que tu gardes.
12:32C'est ce que j'ai de plus précieux.
12:35C'est ce que tu as de plus précieux.
12:38Cet enfant va se retrouver embarqué dans le grand drame.
12:47L'épouvantable drame dans la guerre.
12:52Il va aller d'un lieu à l'autre.
12:56Il va se retrouver dans la forêt noire
12:59avec un vieil oncle un peu fou.
13:02Anti-nazi qui collectionne des armes.
13:07J'essaie de faire coïncider cette aventure minuscule
13:17avec la montée en force du nazisme en 1900.
13:24En 1933, Hitler prend le pouvoir légalement.
13:29Il n'avait pas la majorité,
13:34mais il a su habilement.
13:37Il a fait en sorte de l'apprendre, cette majorité.
13:43Il a bientôt tout le pouvoir.
13:48L'Allemagne est magnifique.
13:51L'Allemagne est belle.
13:54Il y a plein de mouvements de jeunesse.
13:57Des mouvements de jeunesse catholique,
14:00protestant, laïque.
14:03On aime bien le sport.
14:06On aime bien le grand air.
14:08On aime bien chanter ensemble.
14:11C'est magnifique.
14:14Hitler a une idée.
14:17L'idée est dans le livre qu'il a écrit en prison
14:22lorsqu'il a voulu prendre le pouvoir un peu trop tôt.
14:26Dans Mein Kampf.
14:29Il faut former la jeunesse.
14:32La jeunesse, ce sera l'avenir.
14:35Ce sera les mille ans du règne du grand Reich.
14:42C'est ça qu'il promet.
14:46C'est ça que l'Allemagne, l'Allemagne et l'Autriche,
14:51adoubent dans une immense fascination.
14:56L'Allemagne, c'était au départ des principautés
15:02gérées par un empereur de façade.
15:10La Prusse a tout préfiguré, bien entendu.
15:15La Prusse a envahi Paris, vous le savez.
15:19L'Allemagne a déjà envahi Paris.
15:22En 70, il y a deux belles histoires de mots passants.
15:27Si on ne met pas cette toute petite histoire individuelle
15:35dans ce contexte, ça ne tient pas.
15:40Alors évidemment, je reviens à la jeunesse.
15:45La jeunesse, c'est l'espérance du fascisme.
15:52Le fascisme ne peut tenir que dans la pérennité,
15:56dans cette projection-là.
15:59Et la jeunesse, c'est quelque chose qu'on doit transformer
16:02en une arme, en une armée.
16:06Et donc, très vite, les années passant,
16:10Hitler interdira tous les mouvements de jeunesse.
16:14Tous les scouts, les machins, les éclaireurs,
16:18tout le monde devra devenir...
16:21rentrer dans les jeunesses hitlériennes.
16:24Il n'y aura plus qu'un seul parti de la jeunesse,
16:27c'est les jeunesses hitlériennes.
16:29Et ils seront partout, avec des sergents recruteurs.
16:32Et eux-mêmes guetteront tout ce qui a l'air d'un peu jeune
16:38et qui n'est pas avec eux.
16:41Et je fais en sorte...
16:44Enfin, je fais en sorte, c'est pas moi, c'est...
16:48Clémence, il est dans la musique.
16:53Sans la musique, il n'a plus sa mère.
17:00Il ne reste plus que le violon.
17:03Et le violon, il est devenu virtuose.
17:06Virtuose, pourquoi pas.
17:09Les enfants sont souvent virtuoses.
17:11Tous les grands compositeurs ont été virtuoses.
17:16Mendelssohn était virtuose, Mozart, bien d'autres.
17:20Et très jeunes.
17:23Dans tous les cas, il séduit par sa musique.
17:26Séduit.
17:27Il séduit par sa musique.
17:29C'est quelque chose qui lui permet une protection.
17:33Ça le protège de ce mouvement.
17:36Disons qu'il y a un enchantement atroce.
17:39Un enchantement militaire.
17:41Un enchantement qui est celui du nazisme.
17:48Et que le nazisme...
17:50La culture est souvent appropriée.
17:54Le fasciste approprie la culture à des fins contraires.
17:58Et c'est ce qui s'est produit.
18:03Wagner et d'autres ont fait usage.
18:08Un grand usage chez les nazis.
18:12Mais cette grande profonde culture allemande,
18:16Wagner compris,
18:19elle est toujours là, toujours vivante.
18:24Mais encore faut-il trouver ces lieux de solitude ontologiques.
18:31Ces lieux de solitude pour pouvoir être en phase.
18:39Ce n'est pas au pas de loi qu'on écoute Schubert.
18:44Ou bien qu'on lit Olderlin.
18:49Toute cette magnifique culture allemande a été occultée.
18:53Complètement occultée.
18:55Et aussi, ce qui est terrible,
18:58c'est que je crois qu'il y a le fascisme,
19:03dans le pire des cas,
19:06qui provoque dans une population entière
19:10un syndrome de Stockholm.
19:13Vous savez ce qu'est le syndrome de Stockholm ?
19:16Tout le monde sait.
19:18C'est ce qui s'est produit avec le peuple allemand.
19:22Ils étaient en danger de mort.
19:27Et donc, ils ont acquiescé.
19:29Et donc, ils ont levé le bras.
19:32Quelque part, Stefan Zweig dit qu'il s'est trouvé
19:36dans une manifestation devant un des fureurs.
19:41Et que tout le monde levait le bras, tout le monde criait.
19:44Puis lui, il a sorti son bras qui allait se lever.
19:47Stefan Zweig !
19:50Et donc, il y a un phénomène d'hallucination collective.
19:56Et là, plus rien n'était possible.
19:59Mais il y avait une résistance.
20:01Il y a toujours eu une résistance.
20:04Malgré les massacres antérieurs.
20:06Parce que dès les années 30,
20:08on a massacré tous les...
20:10On a interné tous les opposants.
20:15Tous les opposants visibles.
20:17Ceux qui parlaient.
20:19Ceux qui se manifestaient.
20:21Les communistes, évidemment, ils ont été radiqués.
20:23Beaucoup sont partis.
20:25Chez les juifs, beaucoup ont essayé de...
20:28Mais beaucoup étaient allemands avant d'être juifs.
20:32Non, ils sont juifs profondément.
20:35Mais ils sont juifs comme on est humain.
20:38Je suis humain, je suis juif, mais je suis allemand.
20:42Ma situation est d'être allemand.
20:45Et j'aime la culture allemande.
20:47Même si je fais la prière.
20:51Donc, pourquoi j'écris ce livre ?
21:02C'est que j'entends souvent.
21:04Chez des gens très bien.
21:06Même Yankelevich.
21:08Jamais j'ai retourné en Allemagne.
21:10Jamais. Pourquoi ?
21:12Là-bas, ils ont fait tout un travail.
21:16Un travail qui est toujours à refaire.
21:19Puisque le fascisme est toujours présent.
21:22Partout.
21:24Il y a toujours un retour du refoulé.
21:26Puisque le refoulé, c'est l'homme.
21:28C'est l'humain.
21:29C'est la névrose.
21:30Nous sommes tous prêts à retomber dans des hallucinations.
21:37Bon, peut-être que je...
21:42Clémence.
21:44Je pense à... Pourquoi Clémence ?
21:46Evidemment, Clémence pense à nous.
21:48Clémence est là.
21:53Et il a ce tourbillon, ce maestrome autour de lui.
21:57Qu'il ne comprend pas.
21:59Quand il a 10 ans, il se retrouve dans la forêt noire.
22:04Avec cet oncle qui a une magnifique bibliothèque.
22:08Dans une maison désertée.
22:10Et il s'échappe.
22:13Il y a la forêt.
22:15Il y a les montagnes.
22:17La nature est très importante.
22:19Bien entendu.
22:20Elle est importante pour tous les enfants.
22:22Quand c'est possible.
22:24Tous les chants, tous ces hymnes à la nature.
22:30Quand ils ne sont pas confisqués.
22:35Eh bien, c'est naturel.
22:40Tous les peintres, les très chinois.
22:44Devaient aller visiter les 12 grandes montagnes.
22:48Et puis s'y perdre.
22:50Et faire coïncider le zen et le Tao.
22:57A travers le beau visage disparaissant du Bouddha.
23:02Pourquoi pas en Allemagne ?
23:08Cette beauté et cette fureur en même temps.
23:12La culture ne protège pas et n'empêche pas.
23:17La culture ne protège pas mais la culture donne la vie.
23:20A la fois dans votre histoire.
23:25Elle aide ce garçon qui aura une issue fatale.
23:30Non, il n'aura pas une issue fatale.
23:33Il aura l'issue qu'on a tous.
23:35Pas fatale.
23:37Il est bien jeune.
23:39Oui, mais qui disait qu'il meurt jeune est aimé des dieux.
23:46Sur les Grecs, je crois.
23:48Est-ce qu'on peut lire votre récit comme un conte ?
23:53Ça dépend.
23:57Oui, il y a Loreley.
24:02Il y a toute la culture allemande.
24:06A la fois première, mythique.
24:13Et puis aussi celle qui donne à penser.
24:17Et critique aussi.
24:21Cette culture est essentiellement critique.
24:25Vous savez, il faut relire.
24:28On peut relire Hegel, on peut relire Nietzsche.
24:31Nous sommes tous des Nietzschéens, des Hegeliens.
24:36On a été complètement imprégnés.
24:39Et par ailleurs, l'antisémitisme, le racisme,
24:42l'idéologie raciale, raciste
24:47que les Allemands nazis,
24:50que les nazis ont accompli,
24:54c'est en France qu'elle s'est pensée, qu'elle s'est conçue.
24:59Au XIXe siècle, la France coloniale avait besoin,
25:06la France et tous les colonialistes,
25:10les colonialistes aussi anglais, espagnols.
25:16Les espagnols se sont pris très tôt.
25:20Mais au XIXe siècle, comment d'un pays chrétien
25:26peut se permettre,
25:30sous des motifs économiques, évidemment, industriels,
25:34on a besoin de matières premières,
25:36on a besoin d'envahir des pays
25:40pour exploiter leurs ressources.
25:45Alors il y a tout simplement la race,
25:50la race inférieure.
25:53Et nous avons plusieurs idéologues
25:58qui sont de grands esprits,
26:00comme le comte de Gobineau,
26:02qui est dans la Pléiade, parce que c'est un écrivain
26:05qui a écrit de l'inégalité des races humaines.
26:09Et ça, c'était un best-seller.
26:12C'était un best-seller, et Adolf Hitler adorait ce livre.
26:15Il n'était pas le seul.
26:18Il n'était pas le seul.
26:21Tous les militaires, les soldats, les amiraux,
26:31avaient lu ça.
26:34Ils étaient rassurés.
26:36Ah, il y a des races inférieures, c'est très bien.
26:38Donc on peut se permettre d'en massacrer un tiers
26:41de la population malgache, de la population algérienne.
26:45Et puis après, on les éduquera.
26:48On essaiera de les...
26:50Ça se passait comme ça.
26:53Et puis évidemment, il y a Drummond, pour les Juifs,
26:56parce que dans la race, il y a une race cachée
27:00qui n'est pas trop visible comme ça.
27:04On n'arrive pas à bien la repérer.
27:06Mais c'est les pires,
27:08parce qu'ils sont intelligents, ils sont malins.
27:11Donc c'est le serpent.
27:13Ça, c'est Drummond, la France juive.
27:15Et ça, c'est un million d'exemplaires.
27:18Qu'est-ce que c'est, nos best-sellers aujourd'hui ?
27:21Et Hitler a lu, évidemment, et Drummond, et Gobineau,
27:27Hitler, Mussolini.
27:29Non, Mussolini n'a pas lu ça.
27:31Il était parfaitement illettré.
27:34Illettrisme volontaire.
27:36Poésie.
27:38Alors cet ancrage dans la Deuxième Guerre mondiale,
27:42de votre texte,
27:45est-ce qu'on peut aussi le transposer
27:48sur quelque chose de plus universel, bien sûr,
27:50et malheureusement de très contemporain,
27:53c'est-à-dire les premières victimes de la guerre,
27:55ce sont les enfants, toujours ?
27:58Ce ne sont pas seulement les enfants.
28:00En l'occurrence, les premières victimes du nazisme,
28:03ce n'étaient pas nécessairement les enfants,
28:06ça a été les politiques,
28:09mais ça a été tous les handicapés.
28:14Les handicapés physiques, handicapés mentaux.
28:21Le travail d'éradication a commencé avec les handicapés,
28:28allemands, aryens, et les autres.
28:32Et les chambres à gaz,
28:35c'est avec les handicapés au départ.
28:38Il y a des lieux qui sont maintenant des lieux
28:41de mémoire en Allemagne,
28:43où les hôpitaux, où on gazait les handicapés.
28:47Les handicapés, les enfants aussi.
28:52Mais au départ, c'est les handicapés.
28:55Après, évidemment, les enfants sont les victimes
28:59premières de toutes les guerres et de tous les conflits.
29:02Je vous dis ça parce que votre personnage principal,
29:05votre héros, est un enfant.
29:07Ça vous tenait ?
29:10Non, parce que l'enfant,
29:13c'est un enfant,
29:16parce que l'enfant, il est dans la découverte,
29:19dans le regard premier.
29:21C'est par l'enfant qu'on arrive à retrouver...
29:26C'est lui qu'on va suivre.
29:29Avec l'enfant, on est enfant nous-mêmes.
29:33On est soudain enfant nous-mêmes,
29:35et on regarde le monde avec les yeux de l'enfance.
29:38C'est-à-dire qu'on devrait le regarder toujours.
29:41Tout est neuf, tout est toujours neuf.
29:44Nous sommes là pour un instant sur la Terre,
29:47et puis on est dans des complications,
29:50dans des constructions imaginaires,
29:55terrorisantes, alors que tout est neuf.
29:59C'est-à-dire qu'à cet instant, tout est là.
30:02Tout est là, et tout peut disparaître à cet instant.
30:05C'est pour ça que c'est essentiel
30:09que ce soit un enfant dans un roman.
30:13Très bien.
30:15Est-ce que certains d'entre vous l'ont lu déjà,
30:18et peuvent avoir une question ?
30:20J'ai une question.
30:21L'enfance est un terrain vierge, finalement.
30:24C'est un terrain vierge de tout compromis, de toute chose.
30:27Il a les yeux, avec la naïveté que ça implique,
30:31donc c'est...
30:33C'est un peu ça.
30:35C'est un peu...
30:37C'est un peu comme l'époque du cerf dans la phénoménologie.
30:42On met entre parenthèses, et puis on est dans le surgissement.
30:49C'est l'innocence avec un grand I.
30:51L'innocence ne demande pas grand-chose pour être...
30:58Quand vous mettez le tableau,
31:01avant de mettre la première touche sur le tableau,
31:05vous êtes ébloui par l'innocence de la toile vierge.
31:11Mais il va bien falloir...
31:15Est-ce que vous...
31:17Je pense que vous savez qu'un des éléments qui constituent le violon s'appelle...
31:22L'âme, bien sûr.
31:24Et le violon, c'est son âme.
31:27Vous le dites, d'ailleurs, dans le texte.
31:29C'est son âme.
31:31J'ai parlé comme ça.
31:33Le 22, je crois, le 22...
31:37Il y a un roman où la musique est très présente.
31:39Alors, je sais, j'ai été invité à France Musique
31:42pour une émission qui se passe le dimanche de 11 à 12 heures.
31:47Ce dimanche ?
31:48Non, le 22.
31:50Dans deux semaines.
31:51D'accord.
31:54Et j'ai dit...
31:56Parce qu'on me disait, mais quoi ce violon ?
31:58C'est son âme.
32:00Et je savais en disant cela,
32:02mais je n'ai pas eu la propos de dire,
32:06mais oui, mais il y a l'âme.
32:08L'âme qui est un tout petit...
32:10C'est tout petit.
32:11D'accord.
32:12Ça soutient.
32:13Ça soutient sans l'âme, il y a...
32:15Vous connaissez la réponse du Jacques Stern.
32:18On lui demande pourquoi il n'en est pas vu jouer un violon.
32:22C'est parce que...
32:23Parce qu'on ne va pas prendre le piano.
32:29Est-ce que l'enfant est juif ?
32:31Non.
32:32Non, non, c'est un bel...
32:33Non, justement.
32:34C'est ça.
32:35Alors, on n'a rien compris.
32:37On n'a rien compris au film.
32:40Non, justement.
32:41Je parlais d'un monstre à chaos, oui.
32:45C'est un enfant juif du Stettl qui s'enfuit après un massacre
32:50parce que les troupes arrivent, avancent.
32:52Allemand.
32:53Non, là j'ai voulu prendre simplement un enfant arien.
32:58Et justement, c'est le plus bel exemplaire de l'Arien
33:04avec sa blondeur,
33:06à tel point qu'il va être traqué
33:09par les...
33:11Par les...
33:13Non, aussi pas.
33:15Vous savez que les Allemands de l'ASS...
33:19Les recruteurs de l'ASS.
33:21Les recruteurs dans l'ASS.
33:23Himmler, c'est lui l'idéologue.
33:26C'est lui l'idéologue qui voulait créer une race absolument pure.
33:33Et donc, il cherchait.
33:36Il avait donné des critères absolus.
33:43Et ces recruteurs ratio allaient avec des appareils.
33:49Il y avait pour granulométrie.
33:52Tout était là.
33:54Et quand ils ont repéré un qui était parfaitement...
33:58Eh bien, il l'enlevait.
33:59Il l'enlevait à la famille.
34:01Il l'enlevait à la famille pour lui donner une éducation
34:03pour qu'il soit un prototype de la race supérieure.
34:07Et il y a eu des...
34:11Il y a eu des films là-dessus.
34:13Il y a eu aussi les tout-petits-enfants
34:18qui ont été confisqués
34:21dans des grandes pouponnières SS
34:24et qui, à leur grande...
34:29stupeur,
34:32eh bien, comme ils n'avaient pas d'affect autour d'eux,
34:37pas d'affection,
34:38eh bien, ils sont tous devenus un peu débiles.
34:42Ça ne fonctionne pas comme ça.
34:44L'homme, l'humain, c'est la fragilité.
34:47L'humain, ce n'est pas les gènes.
34:49Les gènes, c'est rien.
34:50C'est un support.
34:51L'humain, c'est la nuance.
34:55Tout nous est acquis.
34:58Rien n'est inné.
35:00Rien d'autre n'est inné que ce qu'on a tous.
35:03Et avec des difficultés dans l'inné,
35:06avec des douleurs dans l'inné,
35:08avec des manques dans l'inné,
35:09tu as des chances de faire quelque chose de mieux.
35:19Non, non, c'est vrai que, pour l'anecdote,
35:21on parlait de l'archéologie tout à l'heure,
35:23mais je me suis dit qu'il ne parlerait plus jamais allemand.
35:25Il se trouve que, bon, sans pouvoir parler de moi,
35:27j'ai été invité à un moment donné à exploser en Allemagne.
35:30Je n'ai pas voulu...
35:31Oui, mais maintenant, il faut...
35:32Oui.
35:33Je sais, il faut...
35:34On a marché là où des nazis ont marché.
35:36Oui, oui, je sais,
35:37mais on a marché là où des pétainistes ont marché.
35:40Ah ben, oui.
35:41C'était pas mieux.
35:43C'est pas beaucoup mieux.
35:44Je suis...
35:45Par...
35:46Par...
35:48Grande surprise pour moi,
35:49j'avais terminé les livres, je les donnais,
35:51et j'ai vu que je reçois une invitation d'Allemagne, en Allemagne,
35:55dans un petit festival,
35:57dans une petite ville, dans la forêt noire,
36:00enfin, dans ce coin-là.
36:04Heidelberg.
36:07Heidelberg.
36:08J'ai dit oui.
36:09J'ai trouvé que c'était trop coïncidentiel.
36:12Donc, j'y suis allé,
36:14et j'ai été très, très, très bien accueilli.
36:17Il n'y avait pas beaucoup d'invités,
36:18j'ai été très bien accueilli.
36:21La ville est très belle.
36:23Elle n'a pas été...
36:24Vous savez que toutes les villes,
36:26c'est aussi ça le sujet.
36:28Oui, à la limite, je ne vais pas vous raconter mon séjour à Heidelberg,
36:33où on m'a fait visiter des choses étranges,
36:38à double face,
36:41qu'on peut interpréter de manière...
36:45Non, ce que je voulais dire aussi dans ce roman,
36:47c'est qu'il y a quelque chose qui est important dans ce livre,
36:55pourquoi j'ai écrit aussi ce livre,
36:57c'est que, justement,
37:03on minore, ça se dit minorer,
37:07on minore un drame absolu
37:10qui a été le bombardement,
37:12les bombardements de l'Allemagne par les alliés.
37:16Pas seulement Brel,
37:17des quantités de grandes villes.
37:21Ils ont été bombardés systématiquement,
37:23ça a commencé en 1942.
37:25C'est les Allemands, évidemment, qui ont commencé à Londres,
37:28mais ils faisaient de petits dégâts.
37:31Il y a le bombardement,
37:34le bombardement tactique
37:36et le bombardement stratégique.
37:39Le bombardement tactique, c'est bombarder
37:41les dépôts d'armes,
37:45c'est bombarder les lignes militaires,
37:47c'est bombarder les sites industriels.
37:51Et le bombardement stratégique,
37:53c'est bombarder plus vaste, comme ça.
37:57Jusqu'au bombardement de zones,
38:01jusqu'au bombardement civil.
38:03Pourquoi ?
38:04Pour démoraliser la population.
38:08Et alors, on a bombardé
38:10toutes les grandes villes,
38:12le cœur des villes.
38:14Et là, il y a eu des...
38:16Il y a certaines villes
38:18qui ont été complètement anéanties.
38:21Mais pas seulement Dresde,
38:24parce que Dresde, c'était en 1945.
38:26Il y a un très bon texte de Sebade,
38:28de la destruction.
38:29Oui, il y a eu des réflexions là-dessus, des textes.
38:33C'est le journal qui était effectivement dans votre texte.
38:36C'était pour briser,
38:39pour briser le nazisme,
38:41pour briser la...
38:43Mais une fois que c'est parti,
38:45cette espèce de folie,
38:48eh bien, on ne s'arrête plus.
38:51La question est là.
38:54Dès lors que
38:58on ne se bat plus avec une fronde,
39:01un arc, une massue,
39:04et que la distance est prise
39:07avec les victimes,
39:09il n'y a plus de limite.
39:11Il n'y a plus de limite.
39:13Et ça a commencé en 1914, un peu.
39:16Mais ça n'allait pas trop loin, 1914.
39:19Mais après, en 1940,
39:23il y a les bombardements
39:25de Londres, certes.
39:27Mais à partir de 1942,
39:29ça a été les bombardements alliés.
39:33Les Anglais, les Américains, et voilà.
39:36Et ça a été des massacres épouvantables.
39:46Même en Italie ?
39:48En Italie aussi.
39:50Bien sûr, en Italie.
39:51Mais c'était le début.
39:53C'est le début de...
39:56Non, mais ce que je veux dire, c'est le début
39:58de ce qui se passe aujourd'hui.
40:00Là, il y a comme une abstraction faite.
40:03Il y a eu Hiroshima.
40:05Et voilà.
40:07Il y a eu Hiroshima, là, c'était le comble.
40:09Voilà, le comble.
40:11Les aviateurs...
40:15En Allemagne, c'était des...
40:17Il y avait mille avions,
40:19mille bombardiers qui venaient,
40:21qui détruisaient des villes entières.
40:24Mais maintenant, évidemment,
40:26la bombe atomique...
40:27Mais le retour, c'est que...
40:29Le retour, c'est qu'il n'y en a pas pour ceux
40:31qui ont bombardé.
40:33Il n'y en a pas vraiment.
40:35Jules Roy était chef d'escadrille.
40:37Jules Roy, l'humaniste.
40:39Jules Roy...
40:41Il bombardait.
40:43Mais il n'y a pas de culpabilité, là.
40:47C'est la technique.
40:49La technique...
40:54Ce qui se passe à Gaza,
40:56c'est dans le prolongement.
40:58C'est des Juifs.
41:00Alors là, ça ne va plus du tout.
41:02Ça ne va plus du tout.
41:04Et ça permet, tout d'un coup,
41:06de faire marche arrière.
41:08Et puis de...
41:10Vous voyez les Aporis,
41:12comment ça fonctionne.
41:14Alors que...
41:16Erdogan...
41:18Massaque les Kurdes.
41:20Il envoie...
41:22Les Kurdes sont massacrés
41:24quotidiennement.
41:26Et puis on peut voir ça un peu partout
41:28dans le monde.
41:34C'est un peu...
41:36Cette monstruosité-là
41:38que...
41:40Qui est en question.
41:42Enfin...
41:44Une question posée.
41:48La poésie.
41:50Ce n'est pas de ma faute, la poésie.
41:52Ni la bombe.
41:54Mais la poésie.
41:56Vous résumez ce que vous venez de dire.
41:58Mais sans description aussi...
42:00aussi terrifiante.
42:02Du ciel,
42:04seules les étoiles
42:06n'étaient pas tombées.
42:08Mais ça, c'est l'écriture.
42:10L'écriture magnifique qui est la vôtre.
42:12Non, parce que vous avez beaucoup...
42:14Non, on m'a reproché la poésie.
42:16Des fois, on me dit, mais toi,
42:18comment tu peux écrire poétiquement
42:20sur des choses si terribles.
42:22Il faut écrire chirurgicalement
42:24sur des choses.
42:26Moi, je ne suis pas chirurgien.
42:30Vous connaissez Bernadade,
42:32mais tous ses développements
42:34ne sont pas dans le texte.
42:36L'édition du texte, elle est
42:38tout y est, mais tout y est aussi
42:40politiquement, avec
42:42beaucoup de densité.
42:44Pour terminer, est-ce que vous voudriez lire
42:46un passage de votre texte?
42:48Est-ce que c'est quelque chose
42:50que vous préférez?
42:52Je ne sais pas.
42:58Je voulais déjà dire,
43:00quand tu as dit plus jamais,
43:02j'ai un dernier regret
43:04dans le livre
43:06de Yankelevich
43:08que j'aime beaucoup.
43:10J'aime beaucoup Yankelevich, évidemment.
43:12Non, mais sur la musique, justement.
43:14Je me suis dit, comment
43:16un être pareil ne peut pas
43:18nous imprimer d'écrire
43:20sur la grande
43:22musique allemande.
43:26Il n'y a pas une ligne.
43:28La deuxième chose que je voulais
43:30te dire,
43:32par rapport à ce que vous avez dit,
43:34c'est que quand on parle de la langue
43:36et qu'on me reproche la poésie,
43:38en général,
43:40quand quelqu'un parle
43:42de son livre, je me dis,
43:44il a tout découpé.
43:46Je n'ai pas trop envie d'écouter
43:48des histoires. Avec Hubert, ce n'est pas ça.
43:50Il peut raconter de A à Z
43:52en parlant.
43:54C'est retrouver son écriture
43:56qui est...
43:58C'est l'écriture qu'il mène.
44:00Dans chaque phrase,
44:02dans certains de ses livres,
44:04je reviens rien que pour la langue,
44:06pour la beauté de la langue.
44:08Ce qui se fait rare,
44:10qui est très rare en ce moment,
44:12pas simplement ça.
44:14Mais néanmoins,
44:16c'est que
44:18la culture
44:20qu'il a,
44:22il a une vaste culture
44:24de la tragédie
44:26antique jusqu'à...
44:28En sous-jacent,
44:30on dit c'est poétique, c'est poétique.
44:32Non, c'est extrêmement philosophique.
44:34Je veux dire, sa dextérité
44:36dans ses livres,
44:38c'est ça. Et parfois,
44:40c'est époustouflant.
44:42C'est époustouflant aussi parce que pour les écrivains,
44:44à chaque fois que je lui dis,
44:46tu me désespères parce que comment j'ose écrire
44:48en te lisant, je n'ose plus écrire.
44:52Mais c'est vrai.
44:54Et j'ai hâte de lire ça.
44:56Et j'espère qu'un jour tu le feras
44:58parce que je suis en pleine culture de ton livre
45:00sur la peinture.
45:02Je suis sûre que tu as aussi
45:04une connaissance musicale.
45:06Alors, ce qu'il n'y a qu'à le dire, je ne t'ai pas fait,
45:08tu le fais toi.
45:10J'espère qu'un jour tu l'entends.
45:12Yann Calévix aurait dû être romancier.
45:14Pardon ?
45:16Yann Calévix, il aurait dû être romancier.
45:18Il n'a pas écrit un roman.
45:20Il aurait eu au moins un roman.
45:22C'est magnifique son texte sur la musique.
45:24C'est magnifique.
45:26En plus, il est le musicien
45:28dont je suis forcément fan.
45:30C'est ce qu'il aurait pu écrire
45:32sur Mozart et tout. Et toi, tu peux très bien le faire.
45:34J'ai hâte de lire ce roman.
45:36Je dois avouer que j'ai presque,
45:38c'est peut-être un des 100 livres,
45:40en lisant le peintre...
45:42Le peintre en éventail.
45:44J'en suis presque arrivé aux larmes.
45:46Et depuis ce jour-là,
45:48j'ai toujours cherché à rencontrer
45:50M. Haddad.
45:52Et j'ai fini par le rencontrer
45:54il y a trois jours, dans une galerie.
45:56Et je dois avouer que,
45:58vous connaissez cette phrase d'Einstein,
46:00au mois de la guerre,
46:02si il y a une troisième guerre, la quatrième se fera avec des arcs et des flèches.
46:04Avec des arcs et des flèches.
46:06Si il y a une troisième.
46:08La quatrième se fera avec des arcs et des flèches.
46:10Ah, le chou.
46:12Et au point de la mer, je crois, regretté,
46:14c'était pas utile.
46:16On pouvait s'en passer.
46:18Ils l'ont fait pour montrer, pour donner l'exemple.
46:20On aurait très bien pu l'éditer.
46:24L'apprentissage avant.
46:26La guerre était finie.
46:28Enfin bon.
46:30Oui.
46:32J'ai encore une question.
46:34Mon livre, il est pétri.
46:36Il est pétri, au bon sens du terme, de la culture allemande.
46:38Alors j'ai deux questions.
46:40Et après je vais rebondir sur ce que je viens de dire.
46:42Quels sont tes romantiques allemands préférés ?
46:44Première question.
46:46Deuxième question.
46:48Quels sont tes musiciens romantiques allemands préférés ?
46:50Mais ils sont tous dans le livre.
46:54Il est dans le livre.
46:56C'est dans le livre.
46:58La question c'est par rapport au style.
47:00Est-ce que Julia Greig est toujours derrière toi ?
47:02Il n'est pas derrière moi.
47:04Il est à côté.
47:06Il est à côté.
47:10Il n'y a pas seulement Julia Greig.
47:14Il y a beaucoup d'écrivains
47:16proches du surrealisme.
47:22Et puis il y a des écrivains du monde.
47:24Il y en a tellement.
47:26Est-ce qu'il y a quelques contemporains
47:28qui vous plaisent ?
47:30Parmi les contemporains,
47:32dans la revue Appulé,
47:34on en invite beaucoup.
47:38Tous ne sont pas venus.
47:40Parce qu'il y a des écrivains
47:42qui ne veulent pas distraire
47:48un texte du livre.
47:50Avec un grand L.
47:52C'est Jabez qui m'avait...
47:54Jabez m'a dit...
47:56Il m'a envoyé une lettre.
47:58C'était pour Appulé.
48:00C'était pour ma première grande revue.
48:02Enfin, belle revue que j'avais.
48:04Le Point d'être.
48:06Il était très gêné.
48:08Il ne voulait pas distraire...
48:10Vous savez, le livre.
48:12Surtout dans les années...
48:14C'était les années 70, le livre.
48:18Je ne comprenais pas, moi.
48:20J'avais 20 ans.
48:22Qu'est-ce que ça veut dire, distraire un texte du livre ?
48:24Avec un grand L.
48:26Mal armé.
48:30Ça ne m'arrive plus, ça.
48:32Mal armé, vous savez qui c'est.
48:36Je vais vous donner un conseil de lecture.
48:38Vous devriez lire la carte postale.
48:40Anne Béretz.
48:42Voilà.
48:44Moi, c'est ce que je demande, des conseils de lecture.
48:48C'est extraordinaire.
48:52Ça devrait vous plaire.
48:56Voilà.
48:58On termine par une petite lecture ?
49:00Je ne sais pas quoi dire.
49:02Je ne préfère pas.
49:04Non ?
49:06Je vais signer.
49:08Merci beaucoup.
49:14Excusez-moi.