SOMMET DU DROIT EN ENTREPRISE - L’innovation dans la direction juridique
Mercredi 9 octobre 2024, SOMMET DU DROIT EN ENTREPRISE reçoit Iga Kurowska (Head of Innovation Karnov Group Region South, Lexzur Partner) et Christophe Lemée (Président, deepblock)
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00:00Bonjour à tous, nous sommes toujours en direct du 10e sommet du droit en entreprise
00:05et nous avons le plaisir d'avoir deux professionnels avec nous
00:09pour un plateau spécial dédié à la transformation de la direction juridique,
00:13un thème très largement d'actualité.
00:16Alors je vais commencer par introduire mes deux intervenants ici présents.
00:20Iga Kurowska, vous êtes Head of Innovation chez Carnov Group,
00:25région Sud, alors plutôt Sud de l'Europe pour être précise.
00:28Et vous Christophe Lemay, vous êtes président et cofondateur de la LegalTech DeepBlock.
00:35Alors je vais commencer par vous Christophe,
00:39et puisqu'on parle de la transformation du juriste,
00:43la transformation du rôle de la direction juridique,
00:45il est question forcément d'intelligence artificielle,
00:48il est question de nouvelles technologies.
00:50Alors pouvez-vous nous expliquer un petit peu comment le juriste doit-il évoluer,
00:55quel est son rôle aujourd'hui
00:57et doit-il se former à un art un peu spécifique qui est celui du prompting.
01:02Et peut-être du coup en parlant de cette notion,
01:04pouvez-vous nous expliquer tout simplement ce qu'est le prompting,
01:07notion peut-être qui n'est pas maîtrisée par tous encore aujourd'hui.
01:11Bien entendu, bonjour à vous deux.
01:14L'art du prompting c'est quoi ?
01:15C'est que jusqu'à maintenant quand on utilisait un moteur de recherche,
01:18comme Google ou autre,
01:20on posait des questions très simples pour rechercher par des mots clés.
01:24Or l'art du prompting c'est plutôt de discuter avec une IA,
01:27avec une profondeur de questions qui est bien plus large
01:31que le simple mot interrogatif qu'on donnait au moteur de recherche.
01:35Donc l'art du prompting c'est effectivement,
01:37il y a globalement 6 à 7 mots clés,
01:40enfin contextes clés à donner à une IA
01:43de façon à ce qu'elle puisse elle-même générer ses réponses.
01:46Et plus le prompt va être efficient,
01:50plus ce qu'on appelle les hallucinations de l'IA seront limitées.
01:56Donc ça c'est le premier point.
01:57Et le deuxième point qui est très intéressant
01:59avec les nouvelles IA utilisables comme Perplexity ou d'autres,
02:03c'est la capacité de générer des documents qui sont préformatés.
02:08Ce qui n'était pas le cas jusqu'à maintenant
02:09puisqu'on avait globalement une liste de courses qu'une IA nous donnait.
02:14Là maintenant on a des documents qui sortent, qui sont préstructurés
02:17et on a également les sources qui sont nommées directement en post-réponse.
02:22Donc ce qui change pour le juriste
02:24et surtout le travail qu'il aura à faire demain
02:27avec ces tas d'innovations on va dire,
02:30l'IA génératif n'étant qu'une innovation ou un outil parmi d'autres,
02:34c'est que tout simplement plus il aura affiné l'art du prompting,
02:38plus il aura une réponse efficiente à la question
02:42qu'il se posera au quotidien,
02:45par rapport y compris avec des domaines très précis
02:49puisque les nouvelles IA permettent aussi de dialoguer avec des documents.
02:53Donc ça permet aussi d'appliquer du prompt sur des documents existants
02:57de façon à pouvoir interagir avec le document
02:59comme si c'était une base de données.
03:01Aujourd'hui une IA c'est une base de données à part entière,
03:04ce qu'on appelle souvent la mémoire qui a une mémoire d'éléphant,
03:08qui a une mémoire bien plus importante qu'un être humain.
03:11Mais jusqu'à maintenant on ne pouvait pas discuter avec les documents.
03:14Demain, enfin en ce moment, on peut déjà discuter avec des documents.
03:17Vous uploadez un document de 300 pages en PDF
03:19et vous pouvez interagir avec ce document.
03:22Et plus on sera précis dans le prompt,
03:24plus les réponses seront efficientes bien évidemment.
03:27Merci beaucoup, donc on l'a compris,
03:29les technologies sont de plus en plus efficaces,
03:31de plus en plus évoluées
03:33et ça impacte inévitablement la direction juridique.
03:36Et donc cette direction juridique doit se structurer face à ces innovations.
03:42Iga Kurowska, vous connaissez bien le sujet.
03:45Peut-être pouvez-vous nous expliquer quelles sont les grandes étapes
03:49justement qui permettent à cette direction juridique
03:52de se structurer face à cet éventail d'innovations
03:55qui nous arrive de plus en plus aujourd'hui.
03:58Avec plaisir, merci beaucoup pour cette question.
04:01Donc en effet l'IA, l'innovation ne s'improvise pas.
04:05Donc c'est un processus qui est présent depuis des années et des années dans les entreprises
04:10et qui est de plus en plus présent dans le milieu juridique.
04:13Donc il y a plusieurs manières d'organiser et de ne pas improviser cette innovation.
04:19Ce qui arrive le plus souvent c'est cette improvisation,
04:24ce qu'on appelle un modèle ad hoc.
04:26Donc en fait c'est une initiative qui est menée par ce qu'on appelle
04:30une personne qui est la plus branchée dans une direction juridique
04:34qui est la plus intéressée par les sujets technologiques.
04:37Cette personne porte un projet, sauf que cette méthodologie ad hoc
04:43elle a ses convenants et inconvénients,
04:46notamment le manque de motivation, des cadrages de ses projets.
04:50Une autre méthodologie, un autre modèle de gouvernance,
04:54ça serait de faire un modèle centralisé,
04:57c'est-à-dire qu'il y a une instance qui encadre les projets d'innovation,
05:01notamment d'usage d'intelligence artificielle dans la direction juridique.
05:06On peut parler d'un modèle bottom-up, top-down,
05:09en fait ça revient aux notions de centralisation ou de décentralisation.
05:13On parle aussi très souvent de ce qu'on appelle open innovation,
05:17c'est-à-dire innovation ouverte, des collaborations.
05:20On peut même parler d'innovation à service,
05:24c'est-à-dire vraiment qu'une direction juridique,
05:27à travers très souvent de son département de l'IGALOPS,
05:29fournit un service d'innovation pour ses clients.
05:33Donc il y a plusieurs manières de fonctionner,
05:36mais je pense que ce qui est le plus important,
05:38c'est de faire fonctionner les modèles pour notre structure.
05:41Donc ne pas essayer de nous forcer à trouver une structure,
05:47mais de réfléchir combien de personnes sont présentes dans la direction juridique,
05:52quels sont les profils, quelles sont leurs capacités,
05:56quelles sont leurs connaissances, et puis autour de cela,
05:59essayer de construire une gouvernance comme on fait pour d'autres types de projets.
06:03Merci beaucoup.
06:05Christophe Lemay, souhaitez-vous rebondir,
06:07pour compléter un petit peu peut-être ce que vous avez dit en propos préliminaire,
06:11à propos justement de ce rôle du juriste qui aujourd'hui évolue à vitesse grand V ?
06:16Oui, alors moi je vais prendre plutôt l'autre casquette que je rencontre en entreprise,
06:21c'est que dès l'instant où l'IA générative arrive dans un service
06:25ou dans un département, la plupart du temps,
06:27il y a moins de recrutement d'alternants par exemple ou de stagiaires.
06:32Donc c'est une des dérives de l'IA où je pense que l'humain doit se réapproprier l'IA
06:39et pas que ce soit l'inverse parce qu'on arrive très vite à faire,
06:44comment je dirais, tout faire à l'IA sans forcément une grande maîtrise.
06:49Donc oui, dans les organisations, je pense qu'il y a effectivement un leadership humain
06:58qui doit être pris, ça c'est évident, à bien borner les capacités et les réalisations
07:03que doit faire l'IA et de jamais la laisser faire entre guillemets toute seule
07:08parce qu'il peut vite y avoir des dérives.
07:12Voilà ce que je peux en dire, c'est-à-dire qu'il faut bien cadrer son usage en entreprise
07:16mais par contre c'est un outil fantastique.
07:18Ça marche.
07:19Higa, pour vous aussi l'IA doit être maîtrisée par l'humain et non l'inverse ?
07:24Certainement, je pense qu'on devrait s'en servir et ne pas se faire servir par l'IA
07:31et quelque chose encore que je voudrais bien ajouter, c'est l'effet d'avoir des connaissances
07:37et d'insister sur l'apprentissage parce que c'est une connaissance comme les autres
07:42et parfois, surtout avec des intelligences artificielles génératives, c'est tellement facile
07:49c'est-à-dire que l'implantation de ces technologies, contrairement à des technologies précédentes
07:54comme NLP, machine learning, deep learning, c'était complexe, on avait besoin de temps
07:59pour entraîner des données, etc.
08:01En ce moment avec des outils disponibles, il n'y a pas cette phase de vraiment ajustement
08:05de département, ce qui ne veut pas dire que juste parce que c'est simple d'usage
08:10il ne nous faut pas un art de prompting, il ne nous faut pas une étude des risques
08:15d'encadrement juridique parce que nous restons dans un métier encadré
08:21pour nos confrères avocats aussi réglementés, donc je pense que cela demande un traitement spécial
08:29et un savoir-faire d'usage de tels outils par des juristes d'entreprise.
08:34Très bien, merci à tous les deux, je vous libère puisque je crois que vous êtes attendus
08:38pour la prochaine conférence.
08:40Merci pour vos interventions et merci d'avoir nourri ce débat fort intéressant.
08:44Je vous souhaite une bonne suite de sommets et à très vite.
08:46Merci beaucoup.