Tous les jours de la semaine, invités et chroniqueurs sont autour du micro de Pierre de Vilno pour débattre des actualités du jour. Ce soir, il reçoit l'écrivaine, Amélie de Bourbon-Parme, à l'occasion de la sortie de son nouveau livre : l’ascension, 2ème tome des Trafiquants d’éternité publié chez Gallimard.
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00:00Heureux Pinsoir !
00:0219h21, Pierre de Villeneuve
00:04Toujours avec Philippe Guibert et Joseph Macescaron et nous accueillons Amélie de Bourbon-Parme.
00:09Bonsoir à vous !
00:10Vous êtes historienne, vous avez fait l'amabilité de venir déjà pour le premier tome de cette trilogie des trafiquants d'éternité.
00:19C'est joliment trouvé parce que vous jouez avec l'éternité, avec Dieu...
00:23Mais pas seulement moi !
00:26Bien sûr tous vos protagonistes, les Borgia, toutes ces familles qui sont extrêmement connues à cette époque de la Renaissance.
00:34Et donc on suit l'ascension maintenant, puisqu'il y a eu l'ambition avant.
00:38Maintenant c'est l'ascension de celui qui va devenir le pape Paul III.
00:42Et alors qu'on parle beaucoup là en ce moment avec Charles Rodwell qui vient de sortir de ce studio,
00:47qui est député, qui va rejoindre l'hémicycle pour voter un budget dans des conditions quasiment impossibles
00:53parce qu'on a trois blocs politiques qui s'affrontent et puis tout le monde a son budget, tout le monde est dans son couloir de nage.
00:59Finalement ce pape Paul III, c'est une entité politique.
01:05C'est une entité... On n'est pas du tout dans le pape François d'aujourd'hui.
01:10Alors on ne l'est pas du tout parce qu'à l'époque l'Église, on est au XVIe siècle, l'Église est une puissance politique.
01:17Ce qu'elle n'est plus autant aujourd'hui en tout cas, puisqu'elle est une puissance influente évidemment, religieuse,
01:23mais elle n'a pas cette même dimension comme équivalente à le royaume de France, à l'Empire,
01:29et à l'empereur même Charles Quint qui va lui disputer beaucoup son autorité.
01:33C'est marrant que vous disiez que l'Église a encore du pouvoir aujourd'hui alors qu'on a une loi de 1905,
01:37qui en tout cas en France dresse la séparation.
01:39Oui bien sûr qu'elle en a sur les consciences, sur l'esprit, et le pouvoir sur l'esprit il est quand même très très fort.
01:44Donc évidemment il est moins visible, moins tangible qu'à l'époque de la Renaissance,
01:48où le Pape gouvernait un territoire, il avait un grand espace autour de Rome,
01:54et puis, et c'est tout le sujet, il avait aussi une capacité avec des armées à conquérir d'autres territoires.
02:01Et surtout il avait son mot à dire sur énormément d'événements politiques dans les autres royaumes,
02:06et en Empire, dans l'Empire aussi, Austro-Hongrois.
02:09Donc ça c'est une donnée qui va permettre d'expliquer un petit peu l'ascension de ce Alessandro Farnese,
02:14qu'on retrouve en effet dans ce tome 2.
02:16Qu'on a connu tout petit, dans l'ambition.
02:18Tout jeune, non pas au berceau, mais il avait aux alentours de 18 ans.
02:21C'est ça, il était adolescent, il a connu les femmes, il a eu un amour perdu.
02:27Il a eu un amour perdu, retrouvé, c'est justement un des sujets de ce livre,
02:31c'est une passion amoureuse pour une femme, Sylvia Ruffini,
02:34qui s'avère être vraiment l'unique femme de sa vie.
02:38Et alors j'ai beau lui faire des recherches en me frottant les yeux,
02:41en me disant que ça n'est pas possible, l'époque est de la dépravation,
02:44les hommes d'église avaient des maîtresses, et bien non, il n'en a eu qu'une,
02:47qu'il a adorée, et donc c'est un homme assez moderne finalement,
02:50puisque c'est un sujet inépuisable en tout cas.
02:53Joseph Macescaron, ça vous inspire quelque chose ?
02:56Quand vous grattez la barbe comme ça, c'est qu'il y a quelque chose qui vous dévore ?
02:59C'est une seule maîtresse qui t'aime.
03:01Je suis historien de formation aussi, je suis sensible aussi à la figure de Paul III,
03:07parce que Paul III c'est ce qui vient après le sac de Rome de 1527,
03:11qui est un grand tremblement de terre dans la chrétienté,
03:14c'est quelque chose qui frappe bien sûr tous les esprits,
03:17et en fait c'est par rapport aux coups de boutoirs qui sont mis contre l'église catholique,
03:22c'est la réorganisation de l'Inquisition, c'est la contre-réforme catholique,
03:27c'est aussi des dispositions qui sont prises,
03:31qui peuvent paraître révolutionnaires qu'à l'époque,
03:34notamment le fameux texte Veritas Ipsa qui est sur les Indiens d'Amérique,
03:39dont il est l'auteur, et il a cette caractéristique humaniste,
03:43alors là vous griez un tout petit peu, vous spoilez légèrement,
03:48puisque là vous parlez du tome III, qui est le pontificat de Paul III,
03:52là on est vraiment dans son ascension, comment il va devenir pape,
03:55et comment il est possible que cet homme ait été élu pape à l'unanimité en deux jours,
04:00alors que ses prédécesseurs ça a tenu des jours, des semaines, des mois,
04:03mais c'est ce qu'on appelle aujourd'hui du lobbying, ma chère Amélie,
04:06alors c'est justement tout le sujet, c'était plus que du lobbying,
04:10c'était un destin, et un destin d'un homme à la fois habile diplomatiquement,
04:15donc il a su avoir le coup de génie d'être à la fois celui qui contente le parti français,
04:20François 1er à l'époque, et qui ne dit jamais non à Charles Quint,
04:23et Charles Quint il n'a une envie que d'une chose à cette époque,
04:26c'est de convoquer un concile, et il lui dit peut-être,
04:29et donc il va être élu sur l'espoir justement de cette convocation qu'il va convoquer,
04:34donc quelques années plus tard ça va être très difficile.
04:37Parce que Charles Quint il doit faire le ménage en Allemagne.
04:41Charles Quint n'est pas très éloigné d'Amélie de Bourbonpas, vous le savez.
04:44Non plus, mais bon ça c'est pas le sujet du livre, j'ai écrit un roman dessus.
04:47C'est pas le sujet du livre, enfin c'est votre sujet, donc pardon.
04:49Il fait partie de l'histoire, Charles Quint est un protagoniste absolument clé et fascinant de cette histoire.
04:55Philippe Guibert.
04:56Alors moi qui ne suis pas historien, j'ai un souvenir de Machiavel en revanche.
05:00Tout à fait, qui croise la route d'Alessandro.
05:03Lui il est très critique Machiavel contre la papauté de manière générale.
05:07Il est critique, mais il a justement joué un rôle absolument clé dans cette histoire,
05:15c'est qu'en effet il critiquait la papauté, il disait que c'était au fond la papauté qui empêchait l'unité italienne.
05:21Et Alessandro va le croiser à plusieurs reprises,
05:24puisque c'est lui qui va suivre la vie de César Borgia et qui va la raconter si bien dans Le Prince.
05:29Et au fond quand il va croiser Alessandro, il va lui dire une chose, il va lui dire
05:35César Borgia n'a pas eu de chance.
05:37Et ça c'est ce qui va faire basculer le destin du côté d'Alessandro,
05:41et c'est lui qui va réussir ce que les Borgia n'ont pas réussi,
05:44c'est de créer un état pour ses enfants, pour sa descendance,
05:49et donc de créer une entité politique qui va lui survivre.
05:52Et ça c'est, je pense, l'unique pape qui a réussi une telle tour de force.
05:57Et c'est aussi une des raisons pour lesquelles j'ai voulu raconter sa vie,
06:00parce qu'être à la fois un homme d'église, qui a aimé une femme,
06:03qui a été un père de famille, qui a été un politique brillant,
06:06il méritait une famille, il a eu quatre enfants,
06:10dont un a été duc de Parme.
06:13Il est devenu duc de Parme, bravo, c'est tout à fait ça,
06:16et ce duché de Parme, qui lui survit à travers une partie de ma modeste personne,
06:21est aussi quelque chose d'assez intriguant et fascinant,
06:26à mon avis, pour le commun des mortels, pas seulement pour moi.
06:29Et c'est un mécène en plus.
06:30Et c'est en plus un mécène, alors il va évidemment faire construire
06:33ce magnifique palais Farnès qui devient l'ambassade de France à Rome,
06:36donc je vous l'enlève, vous alliez le dire, évidemment.
06:39Elle n'est pas dans le budget, je crois, l'ambassade de Palais Farnès.
06:42Je crois qu'elle ne coûte pas très cher.
06:44Non mais aujourd'hui, vous savez, on en a parlé là,
06:47et puis on en parle quand même tous les jours, on peut s'attendre à beaucoup de choses.
06:50Non mais à l'époque, l'Église était riche, pour reparler d'argent un tout petit peu,
06:54parce que c'est le thème de la soirée,
06:56et donc Alessandro Farnès a reçu un nombre d'offices, de prébends,
07:02toute une sorte de titres qui l'ont fait être l'homme le plus riche du Sacré Collège à l'époque.
07:07Et c'est grâce à ça qu'il va s'imposer comme une sorte de vice-pape,
07:10comme vraiment un prince de l'Église,
07:12et qu'il va quand même aussi être élu,
07:15parce qu'à sa charge ecclésiastique, il était attaché à un prestige ou non.
07:19Et puis il entretenait une cour absolument grandiose,
07:22avec des artistes, avec...
07:24Voilà, Michel-Ange a quand même dessiné la corniche de son palais,
07:28c'est lui qui lui a demandé de le faire,
07:30et autour de lui vit l'héritage de cet humanisme rencontré à Florence sous Laurent le Médicis.
07:38En tout cas, merci de nous faire une page d'histoire dans cette émission
07:42qui se veut avant tout politique et économique,
07:44mais c'est important parce qu'aujourd'hui, il y a beaucoup de nos amis,
07:48les politiques, qui viennent nous parler de l'école.
07:50Quel regard portez-vous aujourd'hui sur l'école de la République ?
07:53Est-ce qu'elle est suffisante ?
07:54Est-ce qu'elle devrait justement avoir des petits encarts de renaissance,
08:00de l'histoire de Paul III ?
08:02Évidemment que l'histoire, pour moi, c'est ce qui donne envie d'apprendre.
08:06Pourquoi est-ce que l'histoire, c'est apprendre à devenir un homme ?
08:09Pourquoi est-ce que l'histoire, c'est l'histoire des civilisations
08:11qui fait qu'on devient telle ou telle personne ?
08:14Pourquoi l'histoire ?
08:15Vous avez deux heures.
08:16J'ai deux heures ? Non mais je ne vais pas faire une rédaction là-dessus.
08:20Moi, c'est ce qui m'a motivée quand je faisais mes études,
08:23c'était d'étudier l'histoire, parce que je la sentais très proche de nous.
08:26J'ai l'impression que la vie de ces hommes,
08:28et c'est pour ça que je suis aussi devenue romancière,
08:31mérite d'être connue sous un angle un peu différent que celui des dates,
08:35des chronologies, des grands événements,
08:37qui sont parfois un petit peu froids et un peu effrayants, un peu impressionnants.
08:41Et que quand on rentre dans l'intimité d'un personnage de roman,
08:45on y comprend quand même plus de choses en profondeur
08:48que quand on lit un livre un peu linéaire.
08:52L'Ascension, Les Trafiquants d'Éternité, deuxième tome.
08:56Merci beaucoup Amélie de Bourbon-Parmes.
08:58C'est chez Gallimard.
09:00Merci Philippe Guibert.
09:01Merci Joseph-Maths Escaron.
09:03Après le journal de 20h, Benjamin Morel, le constitutionnaliste.
09:0649.3, Hornote 49.3, à tout de suite sur Europe.