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Amiral Nicolas Vaujour, chef d'état-major de la Marine nationale, répond aux questions de Dimitri Pavlenko.
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Transcription
00:007h-9h, Europe 1 Matin. Il est 7h12 sur Europe 1, Dimitri Pavlenko, vous recevez ce matin le chef d'état-major de la Marine Nationale.
00:09Bonjour Amiral Vaujour. Bonjour Dimitri Pavlenko. Bienvenue sur Europe 1 Amiral Nicolas Vaujour, vous êtes ce qu'on appelle le SEM, le chef d'état-major de la Marine.
00:17Cette semaine Nicolas Vaujour a lieu le salon Euronaval à Paris Nord-Villepinte. Alors c'est le premier salon mondial du naval de défense et c'est un peu votre marché en tant que patron de la Marine Nationale Amiral Vaujour.
00:29La Marine pour beaucoup de français, on va commencer par une présentation un peu générale, ce sont quelques bâtiments emblématiques, je pense au sous-marin nucléaire lanceur d'engin, le Charles de Gaulle aussi, on a beaucoup vu nos trois portes-hélicoptères Amphibie en Haïti, au large de Gaza aussi, le Dixmude, le Mistral, le Tonnerre.
00:45Au global, la Marine Nationale Amiral Vaujour c'est combien de navires, c'est combien de marins ?
00:50Alors la Marine Nationale c'est 41 000 marins qui travaillent au quotidien, c'est grosso modo une centaine de bateaux avec évidemment des bateaux dits de premier rang que vous avez cités et puis des bateaux qui viennent soutenir derrière l'ensemble des opérations.
01:05Et c'est une marine qui est engagée à la fois sur mer évidemment, en surface avec des bateaux de surface, sous l'eau vous l'avez dit avec des sous-marins, également dans les airs puisqu'on a l'aéronautique navale avec des avions, les Rafales, des avions de patrouille maritime et puis sur terre avec nos commandos marines.
01:20Donc on est dans les quatre milieux et on agit en permanence sur toutes les mers du monde. La marine elle est mondiale, elle est nucléaire puisqu'on est à propulsion nucléaire pour quelques-uns de nos bateaux et répartie sur l'ensemble des océans du monde.
01:34Alors à l'occasion de ce salon Euronaval, une étude du JICAN, le groupement des industries de construction et d'activité navale classe les puissances maritimes à l'échelle mondiale et on voit que la France, on est un peu surpris, je vous avoue je l'ai été, la France est au dixième rang mondial avec ses 90 bâtiments, ex-aequo donc avec l'Egypte, on est derrière des pays comme la Corée du Nord, la Turquie ou encore l'Indonésie et évidemment assez loin du trio tête Chine, Russie, Etats-Unis.
01:59Est-ce qu'il faut s'inquiéter de ce format et quelle est la dynamique ? Est-ce que vous diriez que la marine française est en réduction Amiral Vaujour ?
02:06Alors ce que marque ces statistiques c'est en fait le réarmement mondial et plus que du format de la marine, ce dont on peut discuter, c'est d'abord et avant tout le fait que les nations se réarment dans le monde et se réarment dans l'ensemble des périmètres aériens, terrestres mais également navales et tout particulièrement dans le naval.
02:27Ce qui fait que dans ces statistiques qui comptent essentiellement le tonnage des bateaux, la marine n'est pas en réduction mais en revanche il y en a beaucoup qui augmentent à côté, ce qui fait que relativement on apparaît effectivement un peu en diminution.
02:41Après le nombre de bateaux n'est pas suffisant pour dessiner ce qu'est une puissance navale.
02:47Ça ne me dit rien de la qualité de notre marine notamment.
02:50On a quatre choses qui définissent une puissance navale.
02:53La première c'est le nombre de bateaux, on vient d'en parler.
02:55La deuxième c'est la technologie dont vous disposez et là la France est plutôt très bien placée.
03:00La troisième c'est les savoir-faire de vos équipages et là c'est quelque chose qui est extrêmement dur à acquérir.
03:06Et la quatrième c'est quels sont vos partenaires, avec qui vous êtes capable de travailler ? Est-ce que vous êtes tout seul dans le monde ou est-ce que vous avez plein de partenaires avec qui vous êtes capable ?
03:14C'est pas tout d'avoir beaucoup de bateaux, il faut avoir des copains aussi.
03:16Il faut être capable de travailler ensemble parce qu'il y a tellement de crises aujourd'hui que faire tout seul c'est impossible.
03:23Donc il faut trouver les partenaires avec qui on peut partager le fardeau.
03:26La France est présente sur tous les océans, sur toutes les mers du globe du fait de sa présence dans les outre-mer.
03:35Vous dites aujourd'hui qu'il faut choisir les points chauds.
03:37Quels sont-ils aujourd'hui ? Où la marine nationale porte-t-elle son regard prioritairement ?
03:43Aujourd'hui, et vous le voyez au quotidien dans l'actualité que vous traitez, on a deux moments un peu particuliers géopolitiques.
03:50Un, évidemment, c'est l'Ukraine avec l'invasion de la Russie en Ukraine qui a des conséquences en mer.
03:56Et on a également le conflit au Proche et Moyen-Orient, la bande de Gaza, Israël, qui a des répercussions à la fois en Méditerranée orientale et en Mer Rouge.
04:05On a tout un arc comme ça, du Liban au Yémen, c'est ça.
04:09Qui m'impose évidemment d'avoir des bâtiments déployés, soit pour connaître, soit pour anticiper un certain nombre de choses qui pourraient arriver, c'est la Méditerranée orientale,
04:17soit pour protéger le trafic commercial, ça c'est la Mer Rouge où aujourd'hui j'ai un bateau en permanence qui aide, qui accompagne les bateaux de commerce à traverser le détroit de Bab-el-Mandeb.
04:26Mais en même temps, ça c'est mes deux points chauds, en même temps je continue les missions de protection de la France, des Français, des intérêts,
04:34les intérêts vitaux avec un SNLE en permanence à la mer, et puis la protection des Français de la plage au grand large sur les trafics illicites, sur la pêche illicite, etc.
04:42Donc ça au quotidien.
04:43Alors ça on va en parler, mais je voudrais qu'on revienne un instant sur ce qui se passe en Mer Rouge notamment, vous avez commencé pratiquement par cela.
04:50Vous faites face à quoi aujourd'hui, Amiral Vaujour, les marins français ?
04:54Est-ce que vous auriez imaginé par exemple il y a dix ans, vous retrouver face à des tirs de missiles balistiques de la part des rebelles Houthis ?
05:01Ça paraît absolument incroyable en l'espace d'une décennie.
05:03De fait c'est absolument étonnant, incroyable pas tant que ça finalement, mais parce qu'ils y arrivent en fait, il faut se remémorer que le Yémen a été en guerre contre l'Arabie Saoudite pendant très longtemps,
05:14et ont donc développé beaucoup de systèmes d'armes qui aujourd'hui sont utilisés contre les bâtiments de commerce.
05:19Et donc on fait face aujourd'hui à cette milice qui essaye d'attaquer les intérêts notamment israéliens en Mer Rouge,
05:30et donc on fait face à des attaques de drones aériens, à des attaques de drones de surface, à des attaques de missiles antinavires et de missiles balistiques.
05:37La satisfaction c'est de constater que nos bateaux, nos équipages sont capables de les contrer.
05:44Il faut savoir que c'est une menace qui est extrêmement difficile à adresser.
05:48Vous avez un temps de réaction entre la détection du missile et le moment où vous ordonnez le feu qui est extrêmement faible,
05:54et ça ça nécessite des équipages extrêmement entraînés, des athlètes de haut niveau entre guillemets comme j'ai tendance à le dire,
06:00et ça c'est vraiment la caractéristique de ce qu'on rencontre aujourd'hui.
06:05On n'imaginait pas avoir ça il y a cinq ans, véritablement, on n'imaginait pas, vraiment.
06:10Alors le combat en mer, Amiral Vaujour, évidemment le cinéma nous en a montré un petit peu,
06:15mais on a du mal à se figurer, ce qu'on sait c'est que c'est fulgurant, c'est hyper létal,
06:21et on sait qu'on entre maintenant dans un âge un petit peu nouveau.
06:24Il y a des grands théoriciens, des gens de la marine nationale qui ont parlé du cinquième âge du combat naval,
06:29l'âge de la robotique, c'est l'âge des drones, c'est l'âge des armes automatiques, etc.
06:33Les industriels que vous rencontrez cette semaine au salon Euronaval, Amiral Vaujour,
06:38qu'est-ce que vous leur demandez ? Vous leur demandez des drones, des armes qui s'opèrent toutes seules ?
06:42Alors ce qui est certain, ce qu'on voit véritablement monter, c'est les deux grands retours d'expérience,
06:47à la fois de la guerre en Ukraine, pour ce qui me concerne, la guerre en mer noire,
06:51et les opérations en mer rouge aujourd'hui.
06:55Je ne vous ai pas demandé, on a des bateaux en mer noire aujourd'hui ?
06:57La mer noire, vous le savez, aujourd'hui c'est un théâtre qui est enclavé,
07:02et donc il faut avoir l'autorisation des pays qui tiennent le Bosphore,
07:07et donc des Turcs notamment, pour traverser.
07:11Et donc aujourd'hui en mer noire, il n'y a que les pays qui appartiennent à la mer noire
07:16qui sont à l'intérieur.
07:18Mais que ce soit la mer noire, que ce soit la mer rouge,
07:21la dronisation est effectivement un des facteurs assez marquants du retour d'expérience que l'on peut avoir.
07:27Cette dronisation, on l'avait anticipée, on avait commencé à la mettre en place dans la marine,
07:33aujourd'hui on l'accélère, et effectivement les industriels nous proposent énormément de solutions.
07:37Que ce soit des drones pour surveiller la mer, que ce soit des drones pour attaquer,
07:41que ce soit plein de choses, en fait il faut visiter au naval, c'est assez intéressant de ce point de vue-là,
07:45l'imagination n'a pas de limites.
07:47Alors une dernière question matérielle, bien sûr, le porte-avions de nouvelle génération, le fameux PANG,
07:51c'est des nouvelles, Amiral Vaujour ?
07:54Alors le porte-avions fait partie de ces programmes de longue durée.
08:00J'ai toujours dans ma manière de m'exprimer, je dois être agilité du temps court et détermination du temps long.
08:07Dans le temps court, je dois m'adapter très vite aux menaces auxquelles je fais face,
08:10c'est la mer rouge, c'est les drones, etc.
08:12Et dans le temps long, il faut que j'arrive à construire le successeur du Charles de Gaulle,
08:18et c'est bien le porte-avions de nouvelle génération.
08:20Et les inquiétudes budgétaires, à ce stade, ont-elles un impact sur le projet du PANG, Amiral Vaujour ?
08:26Forcément, c'est un objet qui coûte cher.
08:29Maintenant, c'est un objet qui a un retour sur investissement dans la nation qui est très fort.
08:35Plus de 90% de ce que l'on investit dans le porte-avions est directement investi dans les territoires en France.
08:41C'est ça ce qui peut faire notre fierté, c'est-à-dire qu'on est capable de le faire,
08:44mais on est capable de le faire nous-mêmes, avec nos propres industriels.
08:48Les pompes primaires, les pompes du circuit nucléaire sont fabriquées dans le nord de la France,
08:53les optiques sont fabriquées du côté d'Angoulême, etc.
08:56Vous avez tout un tissu industriel qui va bénéficier de cet investissement.
09:03Quand on se rend compte de l'impact territorial de ce type de programme,
09:09on peut vraiment être assez fier de notre capacité en France à construire ce genre d'objet.
09:13L'Amiral Nicolas Vaujour, chef d'état-major de la Marine, était ce matin l'invité d'Europe 1.
09:18Merci Amiral d'être venu nous voir.
09:20Merci Dimitri Falco.
09:21Bonne journée à vous.
09:22Il est 7h21.
09:23On a entretien à retrouver en intégralité en version longue dans votre appli Europe 1 et sur europe1.fr.

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