"Je ne sais pas si c'est ça dont le monde a besoin aujourd'hui", réagit, mardi 26 novembre, Sébastien Kopp, le co-fondateur de la marque Veja, dont les baskets sont majoritairement fabriquées au Brésil.
Category
🗞
NewsTranscription
00:00L'invité éco, Sophie Auvigne.
00:04Sébastien Coop, bonjour, vous êtes le co-fondateur de Veja.
00:08Ce sont les baskets, évidemment avec un V sur le côté.
00:11Elles sont éthiques, durables, réparables, bref, meilleures élèves de la classe.
00:16Et en même temps, fabriquées très majoritairement au Brésil.
00:20C'est l'un des grands pays du Mercosur, avec lequel on prévoit un accord commercial si décrié.
00:27Finalement, pour vous, ce ne serait pas si mal ?
00:30Bonsoir. Pour nous, ce n'est pas un dossier qu'on suit activement.
00:36Dans le sens où on n'a jamais suivi les droits de douane de tel ou tel pays.
00:43Et que, après, personnellement, et je parle pour mon associé, mon meilleur ami et moi,
00:49on en parlait ce matin, mettre les gens, les agricultrices, les agriculteurs,
00:53en concurrence les uns avec les autres, perpétuellement,
00:56je ne sais pas si c'est ça dont le monde a besoin aujourd'hui.
00:59C'est là où ce traité arrive à un moment spécial dans le monde.
01:06Il arrive à un moment où personne n'attend ça.
01:10Et il paraît presque grotesque aujourd'hui.
01:14Je reviens tout de même à votre entreprise personnelle depuis maintenant 20 ans.
01:18Vous payez des droits de douane pour faire venir vos sneakers en France.
01:21D'ailleurs, des taxes à hauteur de quel pourcentage ?
01:25On paye des droits de douane entre 8 et 20% pour faire venir les Végea en Europe.
01:31C'est très élevé quand on compare ces droits de douane aux pays asiatiques.
01:35Mais c'est quelque chose qui ne nous a jamais ennuyé,
01:39dans le sens où on n'a jamais créé notre projet selon les droits de douane, etc.
01:44On ne suit pas ces choses-là, on ne fait pas du lobbying pour ça.
01:48D'ailleurs, si on devait faire du lobbying, on ferait plutôt contre ce traité.
01:52Est-ce que c'est pour répondre notamment à d'éventuelles critiques
01:56que vous commencez à produire en Europe depuis l'an dernier, je crois ?
01:59Et au Portugal, précisément. Pourquoi ?
02:02Ah non, pas du tout. Le Brésil est le centre de Végea depuis le début.
02:06C'est le pays dans lequel on est allé chercher toutes les matières premières écologiques
02:11avec lesquelles on produit les baskets.
02:13C'est-à-dire que c'est toute la déconstruction de la chaîne de production
02:16pour la reconstruire de manière clean.
02:19C'est-à-dire utiliser du coton bio, utiliser du caoutchouc,
02:22travailler directement avec les producteurs de matières premières.
02:25Donc le Brésil est dans notre cœur, il restera à vie.
02:28Mais on produit au Portugal par amour aussi,
02:31parce qu'on trouve ça génial de pouvoir produire en Europe
02:34avec des usines géniales qui nous ont écoutés,
02:40qui connaissaient bien Végea et qui nous suivent aujourd'hui.
02:43Ça fait seulement deux ans qu'on produit là-bas.
02:46On n'en parle pas trop, ça représente je crois 2 ou 3% de la production.
02:50Mais on trouve ça génial de créer une nouvelle aventure,
02:53de nouvelles filières aussi pour le futur, peut-être avec l'Afrique, etc.
02:58J'allais vous demander, vous pourriez rapatrier une partie de votre production
03:02un peu plus près de la France ?
03:04Oui, complètement. Et c'est le but.
03:06Je pense qu'on aimerait d'ailleurs que le futur soit relocalisé.
03:11La mondialisation est partie dans tous les sens.
03:14Elle a amené plein de bonnes choses, mais beaucoup de mauvaises aussi.
03:18Et le projet Végea part de là, de reconstruire une autre mondialisation,
03:23de dire qu'une autre mondialisation est possible,
03:26qui respecte les travailleurs, les travailleuses,
03:28qui respecte les agriculteurs,
03:30qui respecte en fait tout ce champ que les gens ne voient pas,
03:34que nous en tant que consommatrices et consommateurs, on ne voit pas.
03:37Et que vous montrez, les contrats de travail sont visibles sur Internet par exemple.
03:43Vous les montrez à qui veut les voir.
03:46On a créé Végea très égoïstement pour nous,
03:49c'est-à-dire pour nous en tant que consommateurs.
03:51Nous, on aime bien savoir, voir et savoir ce qu'il y a derrière les baskets,
03:56c'est-à-dire combien sont payées les ouvrières et les ouvriers,
03:59combien sont payées les producteurs de coton bio.
04:02C'est ce qui nous anime.
04:03Et c'est pour ça d'ailleurs qu'on n'a jamais fait de publicité.
04:05Donc Végea, ce n'est pas une marque très connue non plus,
04:07parce qu'on n'a jamais fait de publicité.
04:09Il y a plein de gens qui ne nous connaissent pas.
04:11Vous n'avez pas fait de publicité, vous êtes malgré tout très connu.
04:13C'est précisément un de vos modèles économiques.
04:17Oui, on ne fait pas de publicité,
04:19parce que nos baskets coûtent beaucoup plus cher à produire
04:21que des baskets qui seraient produites comme toutes les grandes marques le font
04:24en Chine, au Vietnam, en Indonésie.
04:26Donc elles coûtent entre 3 fois et 4 fois plus cher,
04:29avec des matériaux écologiques.
04:31Et on a décidé de sacrifier la publicité sur l'hôtel
04:36de cette chaîne bénéfique aux agriculteurs, aux agricultrices et aux producteurs.
04:41Alors précisément, les matériaux, effectivement, on le dit,
04:45vos baskets sont des modèles avec des matériaux naturels,
04:47bio, recyclés, quand il s'agit de plastique.
04:50Mais pourquoi pas d'approvisionnement en France ?
04:52Un exemple, vous le dites, vous utilisez beaucoup de coton,
04:56très gourmand en eau.
04:58Pourquoi pas du lin, qui pousse en France et qui est si économique ?
05:02Parce qu'on a tout fait au Brésil.
05:04Et on a créé une chaîne locale.
05:07Tous les matériaux proviennent du Brésil.
05:10On fabrique au Brésil, dans le Sud, à côté de Porto Alegre.
05:13Et je réponds à votre première question,
05:16importer du lin au Brésil,
05:18c'est déjà, pour moi, quelque chose qui est contre-productif
05:23dans le sens mondialisation.
05:25Vous faites 3 fois le tour de la planète pour produire une paire de baskets.
05:28Là, non, tout est fabriqué au Brésil.
05:30Les matières premières écologiques viennent du Brésil.
05:32Et, en plus, le lin serait taxé à plus de 100% s'il devait être importé.
05:38Ce serait la même chose pour du cuir.
05:40Parce que vous vous évertuez à tracer au Brésil des vaches
05:43qui n'ont pas mangé d'OGM.
05:45Or, le cuir sans OGM, il est là, il est en France.
05:48Oui, mais ça va plus loin que sans OGM.
05:51C'est-à-dire qu'on veut la traçabilité totale sur notre chaîne de production.
05:54Et on va beaucoup plus loin que les autres marques de mode
05:57ou que les autres marques de baskets.
05:59C'est-à-dire qu'on a créé ce projet de traçabilité du cuir depuis 2015-2016.
06:03On a mis 4 ou 5 ans à le réussir.
06:05Et aujourd'hui, le cuir d'Eveja vient de vaches d'Uruguay
06:11qui mangent bio et qui grandissent à ciel ouvert.
06:15En revanche, l'empreinte carbone, évidemment, là, elle est importante.
06:19Vous allez retour, j'imagine, mais surtout, évidemment, le transport de vos baskets.
06:25Oui, le transport se fait en porte-container à travers l'Atlantique.
06:29On exporte un peu partout dans le monde.
06:31Veja, aujourd'hui, le plus gros marché de Veja est aux Etats-Unis.
06:34Le deuxième plus gros marché de Veja est au Brésil.
06:37Donc là, pour le coup, on vend deux fois plus qu'en France.
06:41Et si vous voulez, au Brésil, c'est la basket parfaite puisqu'elle est faite localement.
06:45Alors, parfaite, mais vous avez tout de même été l'un des premiers à miser sur la réparabilité
06:49précisément d'une simple paire de baskets.
06:52Ça pourrait être l'avenir, pour l'instant, c'est une poignée de chaussures.
06:57Dans un monde aux ressources de plus en plus limitées,
07:01on est dans la semaine du Black Friday,
07:04c'est-à-dire dans la semaine de la surconsommation et de la folie de la consommation,
07:09d'acheter des choses inutiles.
07:11Et nous, on pense, et c'est peut-être un vœu qui ne sera jamais réalisé,
07:17on pense qu'on achète trop,
07:21on jette sans même avoir fini de consommer nos vêtements ou nos baskets.
07:28Et on pense que cette réparabilité, c'est un pied aussi dans l'avenir,
07:32une marche vers l'avenir, que de pouvoir réparer avec des cordonnières et des cordonniers
07:37qui font un travail extraordinaire et qui vous remettent à neuf une paire,
07:41alors que vous croyez complètement fichu et ils vous la refont super bien.
07:46Donc c'est un pari, on a commencé il y a quatre ans,
07:49on marche incroyablement bien et on répare les Végea et toutes les autres marques.
07:53Sébastien Coppe, cofondateur des baskets Végea, invité éco de France Info, merci à vous.
07:58Merci.