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Le maire de Lyon Grégory Doucet a annoncé vouloir augmenter de 10% le nombre de caméras fixes de la ville. Un changement de dogme : l'élu écologiste a longtemps été opposé à ce dispositif. La vidéo-protection est-elle vraiment efficace pour protéger les villes ? Écoutez l'interview de Dominique Legrand, président de l'Association nationale de vidéo protection (AN2V).
Regardez L'invité pour tout comprendre avec Yves Calvi du 11 décembre 2024.

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Transcription
00:00Bonsoir Dominique Legrand, merci beaucoup de nous rejoindre, vous présidez l'association nationale de vidéo-protection.
00:06Le maire écologiste de Lyon, Grégory Doucet, va renforcer de 10% le nombre de caméras dans sa ville
00:11et pourtant il fut très longtemps opposé à ce projet.
00:14Comment expliquez-vous ce revirement du maire lyonnais ?
00:17Bien sûr qu'aujourd'hui nous sommes en fin de mandat et donc de manière pragmatique,
00:24ce type de couleurs politiques, nous avons plusieurs villes qui ont partagé ce même sentiment que la vidéo n'était pas utile.
00:35Donc dans un premier temps, en première phase, on cherche à démonter des caméras
00:39et puis au final on se rend compte assez rapidement que c'est utile.
00:43Et au final, tout à fait en fin de mandat, on rajoute des caméras, on les redéploie au bon endroit.
00:51C'est une preuve, une bonne fois pour toutes, que ces caméras sont utiles et pour ne pas dire indispensables.
00:56Justement 571 caméras fixes en usage actuellement à Lyon, à quoi servent-elles concrètement ? Expliquez-nous.
01:04Alors en fait, il y a deux utilités pour ce type de caméras.
01:08La première utilité, c'est ce qu'on appelle les recherches en temps réel, donc sur événements, on a un appel radio, on a un signalement.
01:17Donc on cherche à comprendre, à coordonner, à protéger les forces sur place.
01:22Donc ça, c'est un premier type de travail.
01:24Et puis le deuxième type de travail, c'est en temps différé.
01:27Et là, on a besoin, dans le cadre d'une enquête, de comprendre ce qui s'est passé,
01:32donc de retracer finalement le véhicule, l'individu et d'apporter des éléments de preuve à charge ou à décharge d'ailleurs sur des événements.
01:44Ce qui est frappant en tout cas, c'est de voir des maires, notamment de gauche, qui se convertissent à cette surveillance.
01:48Même sketch, j'ai envie de vous dire à Bordeaux, Pierre Urmy qui était hostile et il en a aujourd'hui 250 dans sa ville.
01:53Oui, tout à fait, il rattrape aussi son retard.
01:57Si vous voulez, aujourd'hui, sur les 42 villes de plus de 100 000 habitants en France, il n'y a plus une seule ville qui n'a pas de caméra.
02:07Orban et Lille faisaient de la résistance.
02:09Aujourd'hui, on a bien compris que dès qu'il y a un événement, on saute sur les images pour essayer de comprendre.
02:18Et il y a deux types de dossiers d'ailleurs.
02:20Il y a des dossiers sans images et là, ça devient forcément plus compliqué.
02:24Bon, puis s'il y a une image, de la flagrance, forcément, ça devient plus simple.
02:29Dominique Legrand, combien coûte une installation ? Parce que c'est un coût important pour une municipalité, j'imagine ?
02:36Oui, effectivement, ça peut sembler cher au premier abord parce que ce sont des produits de haute technologie avec des poteaux robustes, etc.
02:46Comme de l'éclairage public d'ailleurs.
02:48Donc, on a un coût moyen entre 6 000 et 9 000 euros le point de captation.
02:53Mais qui est à mettre en comparaison avec des budgets globaux d'une ville de ce que coûte un rond-point, un feu tricolore ou une bretelle d'autoroute.
03:04Et par ailleurs, si vous voulez, on est inférieur au pourcent, à 1% si on compare l'ensemble de la ville de protection nationale vis-à-vis des budgets des forces de l'ordre en France.
03:16Donc, en fait, ça reste entre guillemets marginal.
03:19Vous nous avez dit que les 42 villes de plus de 100 000 habitants étaient aujourd'hui équipées, donc toutes les grandes villes françaises.
03:25Mais combien de villes sont équipées en France ? Est-ce qu'on a un chiffre ? Est-ce qu'on connaît le nombre global de caméras qui fonctionnent chaque jour dans notre pays ?
03:32Alors aujourd'hui, dans l'espace public, on a bonhomme allant environ 120 000 caméras.
03:38Donc, ça peut sembler aussi être un chiffre assez fort.
03:41Mais là, on parle bien des caméras d'espace public, donc dans la rue.
03:45La rue, il y a Victor Hugo qui regarde les trottoirs et la chaussée.
03:49Bon, à côté de ça, si on rajoute l'ensemble des caméras des magasins, des supermarchés, etc., on dépasse allègrement le million.
03:57Et puis, il ne faut pas oublier qu'en France, on a près de 60 millions de smartphones qui circulent,
04:02où à chaque fois, on a aussi une caméra et une capacité de filmer et d'envoyer sur les réseaux sociaux.
04:07Donc, si on regarde bien, même chose, on a un pourcentage infime de caméras d'espace public à ce jour.
04:14On parle des grandes villes, mais qu'en est-il des petits villages, en tout cas des plus petites communes ?
04:20Là aussi, il y a une appétence qui se développe pour les caméras de vidéosurveillance ?
04:24Oui, alors on a constaté que la délinquance se déplaçait aussi dans les zones rurales.
04:29Et ça, c'est un drame pour les maires qui n'ont souvent pas ou peu de moyens à consacrer à la sécurité.
04:36Ce n'était pas dans les budgets initiaux.
04:38Et justement, la NDEV milite pour qu'il y ait des réseaux qui se forment à l'échelle soit de la métropole,
04:45de la grande métropole, soit à l'échelle du département,
04:48pour que les petites collectivités se réunissent et travaillent ensemble.
04:52Et sur un département qui a par exemple 500 communes,
04:56il est préférable de monter un dossier avec 10 caméras x 300 communes,
05:00égal 3000 caméras, pour avoir une couverture cohérente du département,
05:05plutôt que de laisser chaque maire se débrouiller avec ses 5 ou 6 caméras
05:10qu'il installera comme il pourra et qui sera, et ça c'est la NDEV qui le dit, qui sera pas efficace.
05:17Donc nous on cherche bien évidemment l'efficacité pour nos forces de l'ordre,
05:22pour la sécurité des français.
05:24Et donc on travaille en ce moment, la grande tendance,
05:28c'est de monter des vrais réseaux transversaux intercommunaux,
05:32comme l'a déjà fait la ville de Chartres, et donc la métropole de Chartres,
05:36ou la ville de Nîmes, ainsi que Strasbourg, qui ont aussi des couleurs différentes.
05:40C'est la tendance pour qu'il n'y ait pas ou plus de tout petit dossier de 5 caméras
05:46qui par définition, la nuit à 4h du matin, ne sont pas opérants.
05:50Il n'y a pas d'opérateur derrière les moniteurs d'images.
05:54En fait, pour être tout à fait précis pour nos auditeurs,
05:57qui s'en sert et dans quel cadre ?
05:59Elles sont utilisées en direct ou à postériorer au cours d'une enquête ?
06:02Justement les deux, comme j'ai expliqué tout à l'heure.
06:06Sur événements, à l'instant T, et justement précisément sur les gros PC vidéo,
06:12dès lors qu'on a 100, 200 ou 500 caméras, comme à Lyon ou ailleurs,
06:16on a en H24 des opérateurs.
06:19Donc même à 4h du matin, il y a un opérateur qui est capable de suivre une voiture,
06:23de comprendre ce qu'un individu fait à un autre, etc.
06:26Donc là, en temps réel, on protège les citoyens en actif,
06:30et par définition, cet opérateur, s'il voit la situation qui se dégrade,
06:33il est capable d'appeler les forces de l'ordre ou les pompiers,
06:36enfin le bon service pour aider à solutionner le problème qu'il constate à distance.
06:41Par contre, effectivement, après, si l'événement n'a pas été détecté en temps réel,
06:47et là c'est le grand enjeu de l'intelligence artificielle,
06:50on pourra y revenir après si vous le voulez,
06:52justement quand on bascule dans l'enquête, c'est que les faits se sont déroulés.
06:58Donc dans ce cadre-là, on a des images enregistrées,
07:01et on n'a plus qu'à espérer trouver un comportement, un véhicule,
07:05pour aider les enquêteurs à reconstituer la scène et à trouver les auteurs.
07:09Cela veut dire qu'il y a des personnes affectées,
07:12spécifiquement à la vidéosurveillance, devant les écrans, toute la journée ?
07:16Oui, tout à fait, bien sûr.
07:18Et je répète, âge 24, donc comme vous le savez, un poste c'est du 3-8,
07:23donc déjà minima, il y a 3 personnes qui travaillent 8 heures tous les jours sur un ordinateur.
07:30Et puis malgré tout, ce 3-8, un jour il y a des week-ends, des congés,
07:34donc en fait on affecte 4 ou 5 personnes sur chaque poste,
07:37et donc si on a 2 ou 3 ou 4 personnes qui doivent être en salle,
07:41on atteint tout de suite des PC vidéo avec une dizaine, une vingtaine de personnes affectées, dédiées,
07:48et donc professionnelles, et d'ailleurs je le signale au passage,
07:53déclarées en préfecture pour assurer aussi les Français
07:57sur le fait que ces personnes-là ne sont pas là pour faire du Big Brother et tout n'importe quoi,
08:02ils ont des fiches de route, des missions,
08:05ils sont là pour aider précisément, à la semaine,
08:10quelque chose qui se déroule dans un quartier, sur une rue, etc.
08:15Donc en fait ce sont des professionnels âge 24,
08:18et c'est à nouveau la raison pour laquelle, y compris en zone rurale,
08:22on cherche à récupérer tous les flux vidéo sur un point central,
08:25soit de la métropole, soit du département,
08:30pour avoir justement cette grosse équipe professionnelle
08:33qui travaille et qui donne du résultat, en temps réel et en temps différent.
08:37Une toute dernière curiosité, si vous pouvez y répondre rapidement, merci mille fois,
08:41il semblerait qu'aujourd'hui l'enjeu est celui de l'intelligence artificielle au service de la vidéoprotection,
08:46elle aurait été expérimentée pendant les Jeux Olympiques,
08:49ça va être généralisé, est-ce que c'est véritablement un outil ?
08:53Alors effectivement c'est l'outil qui permet de transformer la caméra en détecteur automatique,
08:58puisque l'intelligence artificielle va être capable de détecter une anormalité,
09:02une personne qui vient de tomber au sol, un mouvement de foule, un départ de feu, etc.
09:07Donc la caméra devient une sonnette qui indique en automatique,
09:12parmi le flot des milliers de flux, à l'opérateur justement qui est en poste,
09:16qu'il se passe tel type de problème à tel endroit.
09:19Donc effectivement il y a eu une expérimentation dans le cadre des JO qui se sont bien passées,
09:25et c'est tant mieux justement, derrière il y avait des équipements qui tournaient sur ce genre d'automatisme,
09:31et cette expérimentation s'arrête le 31 mars 2025,
09:36et bien évidemment il faut poursuivre les efforts en la matière,
09:40pour que ces salles, ces PC vidéo, soient alertées au plus vite et au mieux d'une anormalité au sein d'un parc de caméras.
09:48Merci beaucoup d'avoir fait ce point très complet sur la surveillance de nos caméras sur notre antenne.
09:54Dans un instant, un homme qui lui adore surveiller, même s'il est incontrôlable, Marc-Antoine Lebray.

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