• il y a 13 heures
David Lisnard, maire de Cannes et président de l'Association des maires de France, réclame un audit de Météo France, "pour analyser de façon précise et objective le problème, et savoir s'il est possible d'organiser une politique publique de la gestion du risque avec cet organisme." Météo France a-t-il failli dans la prévision et le lancement des alertes ? Louis Bodin, chef du service météo de RTL. est l'invité pour tout comprendre dans RTL Soir.
Regardez L'invité pour tout comprendre avec Yves Calvi du 18 octobre 2024.

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Transcription
00:00Il faut réformer le mécanisme des alertes, c'est pas normal que les gens soient restés sous alertes orange avec même des magasins ouverts où les gens étaient piégés,
00:11les gens étaient piégés dans leur voiture sur la route, puisque les mécanismes sont plus extrêmes, il faut donc réformer les méthodes d'alerte.
00:20Et nous accueillons avec plaisir notre ami Louis Baudin. Bonsoir Louis, vous êtes, je le rappelle, le chef du service météo d'RTL.
00:26On vient d'entendre Louis Ségolène Royal, ce matin, sur notre antenne, l'ancienne ministre de l'écologie veut réformer le système d'alerte de Météo France
00:34après les inondations de ces dernières 48 heures. Est-ce qu'elle a raison ?
00:38Alors elle a raison dans le principe. Le problème c'est qu'il faut déjà revenir à la source, c'est-à-dire que la météorologie, la prévision météorologique,
00:45aujourd'hui encore, elle n'est pas parfaite. On sait faire des choses, on progresse. Moi ça fait 35 ans que je fais ce métier-là,
00:50entre le début et maintenant, évidemment qu'on a fait des progrès énormes en fiabilité, mais on n'est pas encore parfait.
00:56Il faut savoir que la météorologie, dans sa prévision, elle a encore un peu d'incertitude.
01:01Donc oui, la vigilance orange était bien vue, oui, moi je l'avais annoncé hier matin, on va avoir de fortes précipitations, probablement des vallées qui vont réagir,
01:09mais j'étais incapable de dire à quelle intensité, à quel moment, et si on allait dépeindre le cadre de la vigilance orange pour passer en rouge ou rester jusqu'à la limite.
01:18On touche aux limites de ce qu'on sait faire en matière de prévision.
01:21Est-ce que vous pouvez nous rappeler, Louis, comment déclenche-t-on une alerte, à quel degré ?
01:26En fait, c'est simple, on essaie d'estimer le plus justement possible les quantités de pluie qui vont tomber sur telle ou telle zone.
01:33Je rappelle qu'on est à l'échelle du département, parce qu'encore une fois, à l'intérieur, ça n'aurait pas de sens, on ne sait pas faire plus précis que ça.
01:40Et quand on a ces intensités, en fonction du département ou de la zone qui va être concernée,
01:45où on sait qu'il y a tel type de relief, tel type de sol, qu'on va avoir une réaction plus ou moins rapide en fonction des quantités attendues, pas forcément réelles,
01:54et bien effectivement, on peut déclencher là des vigilances jaunes, oranges et rouges, quand on est certain que là, on va avoir des quantités tellement importantes
02:03que le bassin en question, le bassin où ces pluies vont tomber, va réagir brutalement.
02:07Alors Louis, on n'est pas du tout là pour leur donner des leçons, mais on a besoin d'eux à longueur d'année.
02:11Mais y a-t-il eu un manque, je ne sais pas, mais d'anticipation, voire des erreurs, je dis bien des erreurs de prévision de la part de Météo France ?
02:19Bien sûr qu'il y a une erreur de prévision.
02:21Maintenant, on fait avec les outils dont on dispose.
02:24Bien sûr qu'on avait prévu, je crois que l'accumule est allée jusqu'à 300-400 millimètres de pluie.
02:30On a eu très ponctuellement, ce n'est pas non plus sur toute la surface, jusqu'à 550-600 millimètres de pluie.
02:35Donc oui, on a eu 25% de plus que ce qui était prévu.
02:40Mais ça, ça veut dire quoi ?
02:41Ça veut dire que ce sont nos modèles, nos calculs, notre expérience, notre historique,
02:47qui fait qu'on bute encore et qu'on n'arrive pas encore à faire des prévisions parfaites.
02:52Et donc, si on ne fait pas une prévision parfaite, évidemment, on n'arrive pas à l'avertir.
02:56On n'arrive pas à être précis dans l'avertissement et dans la prévention pour le public et pour les biens.
03:02Mais est-ce que ça veut dire, Louis, que comme l'affirme Agnès Pannier-Runacher, la ministre de la transition écologique,
03:08que nos systèmes de modélisation des cours d'eau sont dépassés ?
03:12Est-ce qu'il faut changer ?
03:14Alors ça, oui.
03:15Ça, alors là, pour le coup, voir et réétudier la géographie, les paysages, l'occupation des sols,
03:24les cultures qui en placent, l'urbanisation, ça oui, on a un travail urgent à faire et très important.
03:31Moi, je le fais un peu dans les Alpes-Maritimes, avec justement le département suite à l'Aroya.
03:36Et là, il y a tout à refaire ou à faire, parce qu'on se rend compte qu'on ne connaît pas encore bien la réaction de certains bassins.
03:43Donc oui, cette connaissance-là nous aidera, évidemment, à être un petit peu plus précis et à mieux avertir.
03:48Donc oui, il y a un énorme travail aujourd'hui de réaction, de connaître comment les naves phréatiques
03:54sont capables d'absorber l'eau, à quelle vitesse.
03:57Là, il y a beaucoup d'endroits encore où ça, on ne sait pas le faire précisément.
04:00Est-ce que vous décrivez là le boulot ou le futur boulot de Météo France ?
04:04Ou est-ce que c'est à d'autres, gentil de vous dire, à d'autres entités de nous apporter ce type d'informations ?
04:10Non, je crois qu'après là, il y a d'autres entités, parce qu'évidemment, la redéfinition d'un paysage, d'un territoire, d'une géographie,
04:17ça dépend de beaucoup de paramètres, ça dépend de la politique, des choix que l'on veut faire, sur quoi on veut investir, comment,
04:22est-ce que c'est sur de la route, est-ce que c'est sur du logement ?
04:25Donc là, évidemment, la politique, Météo France doit continuer, moi je dirais, à essayer de progresser sur la qualité de la prévision.
04:32Plus on va pouvoir prévoir précisément les intensités et sur une géographie de plus en plus localisée,
04:39évidemment que la formation, à ce moment-là, elle sera beaucoup plus utile dans la définition ou en tout cas dans le déclenchement d'une alerte.
04:47Donc Météo France, je pense, a encore à travailler sur ces modèles pour être plus précis, simplement dans la prévision.
04:53David Lissner, qui préside l'association des maires de France, s'étonne des marges d'erreur, il réclame carrément un audit de Météo France.
05:01C'est injuste ou pas selon vous, Louis ?
05:03Allons, allons, mais c'est très bien de faire ça.
05:04Moi, je pense que c'est bien de le faire et que Météo France explique bien la fiabilité d'une prévision.
05:09Moi, quand je fais une prévision à 24 heures, je mets une fiabilité qui n'est malheureusement, j'aimerais bien, mais qui n'est pas de 100%.
05:16Je mets une prévision que j'essaye la plus élevée, 95, 97%, dans des situations exceptionnelles comme ça, est-ce qu'on arrive à être à 90, 92 ?
05:24Si on est très honnête, oui, voilà la fiabilité dont on dispose aujourd'hui.
05:28Alors, c'est beaucoup plus qu'il y a 20 ou 30 ans, mais ce n'est pas encore suffisant quand on arrive dans ces situations exceptionnelles.
05:34On n'aurait pas pu, même avec, je dirais, des informations de meilleure qualité, éviter ces inondations,
05:40mais est-ce que les anticiper et s'y préparer auraient pu être faits de façon plus pointue avec des informations qualitatives ?
05:49Ah ben là, il y a deux aspects. Il y a tout d'abord, effectivement, que la prévision progresse, c'est-à-dire que le passage en rouge qui est intervenu à un moment,
05:55puisse l'être, je dirais, cinq, six heures avant, déjà, ça permet de mieux prévenir, d'anticiper sur, effectivement, des routes à fermer ou des choses comme ça.
06:05Ça, c'est le premier aspect. Et le deuxième aspect, là, c'est le travail qu'on doit faire maintenant à long terme,
06:09qui est de bien connaître à partir de quelle quantité telle vallée, telle route va être submergée.
06:15Ça, c'est le travail qu'on doit faire aujourd'hui, et les deux cumulés nous permettront d'être beaucoup plus réactifs
06:21et d'être un peu plus efficaces dans la prévention de tels phénomènes.
06:25Mais ce travail-là dont vous nous parlez, Louis, vous avez l'impression qu'effectivement, il y a une prise de conscience au niveau de l'État, au niveau des différents organismes ?
06:35Ah ben ça, c'est certain. Enfin, moi, j'ai la chance de sillonner un peu la France. C'est le cas d'ailleurs en ce moment à la rencontre de gens qui sont impliqués, qui ont envie de bouger.
06:44Après, il faut se concerter. On est une démocratie, donc voilà, il faut que tout soit exposé.
06:52C'est certain qu'aujourd'hui, on doit faire ce travail à un moment ou à un autre de parfaitement connaître notre territoire par rapport à ces éléments météo.
06:59Et là, on peut encore progresser, oui.
07:01Ah oui, ah non, je vous donne une réponse courte et ce sera la dernière question.
07:05Est-ce qu'il va falloir, par exemple, rehausser nos viaducs, nos ponts et toutes nos structures qui dominent l'eau ?
07:10Oui, dans certains cas, oui, exactement. Sauf que, si j'ai encore un petit peu de temps, rajouter que quand on va faire ces rehaussements, on va le faire peut-être pour trois ou quatre épisodes dans un siècle.
07:25Donc, ça veut dire que beaucoup ne le verront pas. Mais pourquoi rehausser ce pont ? À quoi ça rime ?
07:29Et bien, parce que trois ou quatre fois dans un siècle, ça va être très utile et ça va peut-être sauver des biens, voire des gens.
07:35Merci infiniment, oui, voilà.
07:37Merci à la chef de notre service Météo à RTL. On va se réchauffer un petit peu maintenant et se réconforter avec la cuisine mexicaine.
07:43Elle connaît un succès grandissant et on est très loin des tacos et des burritos.
07:48Nous sommes avec la chef Kirsch Lopez dans un instant.

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