Mardi 4 février 2025, SMART BOURSE reçoit Olivier Guignon (Managing Partner Corporate finance, Alantra)
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00:00Le dernier quart d'heure de Smartbourges, chaque soir c'est le quart d'heure thématique.
00:13Le thème ce soir, c'est celui des opérations sur capital, comme on dit, on est dans le
00:17thème du MNA, des offres publiques et autres OPA qui ont pu animer le marché français
00:24en 2024.
00:25Nous parlons du 13e baromètre annuel des offres publiques déposées en France, publié
00:31chaque année depuis 13 ans par la banque Alentra et l'un des associés gérants est
00:34avec nous, Managing Partner Corporate Finance chez Alentra, Olivier Guignon.
00:39Bonsoir Olivier.
00:40Merci beaucoup d'être avec nous et de reprendre avec vous ce baromètre, je crois qu'on l'a
00:44laissé un peu de côté, en tout cas dans l'émission, je crois qu'on n'en avait pas
00:47parlé l'an dernier et peut-être l'année d'avant.
00:49Que s'est-il passé en 2024 du point de vue des offres et des opérations sur capital
00:54en France, qui est la géographie d'analyse, quel est le bilan quantitatif et qualitatif
01:01qu'on peut tirer de cette année 2024, Olivier ?
01:04Alors sur le plan quantitatif, on peut noter une nette augmentation du nombre d'offres
01:09publiques puisqu'on a comptabilisé 42 offres publiques, 39 déposées, 3 annoncées.
01:16Ce qui nous ramène, c'est vraiment sur les belles années, l'année d'avant pour vous
01:20donner des éléments de comparaison, on était à 31 OPA, l'année d'avant encore à 35 et
01:26donc on revient sur l'année 2021 où on devait être autour de 45 OPA.
01:32Donc ce sont vraiment des très belles années.
01:35Donc ça sur le plan quantitatif, ce sont les premiers éléments.
01:39Sur le plan qualitatif, comment expliquer cette augmentation ? L'année 2024 a été
01:47marquée par une baisse du CAC, qui a été de l'ordre d'un peu plus de 2 %, vous connaissez
01:52ça ?
01:53On connaît l'histoire du CAC en 2024.
01:56Et donc effectivement, les valeurs boursières françaises ont apparu de meilleurs marchés
02:03par rapport à d'autres comparables et les investisseurs ne s'y sont pas trompés.
02:09Ils ont dit, c'est le moment de poursuivre les emplettes, d'autant que les conditions
02:16de financement sont un petit peu détendues, elles s'améliorent encore et là aussi on
02:20verra que ces offres publiques ont été déposées également par des investisseurs financiers
02:26en nombre un petit peu plus important que les années précédentes.
02:28Donc on peut, on développera peut-être tout à l'heure, dans la physionomie même des
02:38offres publiques qui ont été déposées, on a toujours ces offres publiques classiques,
02:43on a de plus en plus ces offres publiques d'achat simplifiées, c'est-à-dire où l'initiateur
02:47a déjà le contrôle de la société en vue de lancer son offre et d'aller au retrait
02:52de la cotation.
02:53Et puis, on a aussi une augmentation très sensible du nombre d'offres publiques de
02:59retrait suivi de retrait obligatoire, ce sont des offres publiques où l'initiateur a plus
03:02de 90 % du capital et des droits de vote, je crois qu'on en a eu 9 cette année, ce
03:06qui est un record absolu.
03:07Quels enseignements on tire de ça Olivier ? Sur ces points, parce que pour discuter
03:12avec vous depuis quelques années, effectivement, la montée en puissance des opérations publiques
03:16d'achat simplifiées, on l'a vu, on l'a commenté ensemble, quel est l'intérêt
03:20de ces opérations, qu'est-ce que ça nous dit de l'état d'esprit des acquéreurs
03:24effectivement, et puis les retraits.
03:27Pourquoi est-ce qu'on a envie d'aller jusqu'au retrait et d'ailleurs, est-ce qu'on réussit
03:32souvent à aller jusqu'au retrait quand l'intention est d'aller jusqu'au retrait ?
03:37Alors, effectivement, de plus en plus d'initiateurs lancent des offres publiques en ayant le contrôle
03:43préalablement de la société, c'est-à-dire en ayant la majorité du capital et les droits
03:47de vote.
03:48Pourquoi ? D'abord parce que ça leur permet d'abord de réussir leur offre.
03:51Il y a ce qu'on appelle en droit boursier un seuil guide de caducité.
03:55Lorsque vous lancez votre offre, si vous êtes en dessous du seuil de 50 %, eh bien, pour
03:59considérer que votre offre est réussie, il faut atteindre au moins le seuil du 50 %, donc
04:03déjà, les initiateurs se disent, avant même de lancer mon offre, je veux déjà
04:06avoir réussi ce seuil, l'avoir dépassé.
04:09Et donc, la façon de faire, c'est les offres publiques d'achat simplifiées, premièrement.
04:13Deuxièmement, pourquoi, au-delà de réussir cette offre et d'avoir le contrôle de la
04:19société, c'est se rapprocher le plus possible du seuil de 90 %, plus ma rampe de lancement
04:24est importante, plus ma probabilité d'atteindre le seuil de 90 % est importante.
04:29Et pourquoi on veut se retirer de la bourse de plus en plus, effectivement, le taux d'intention
04:35de retrait est de l'ordre de 77 %, le taux de transformation est encore plus fort, de
04:3975 %, pourquoi ? Tout simplement parce que la bourse ne remplit plus son objectif premier,
04:46qui est de permettre le financement des sociétés qui sont cotées en bourse.
04:49Premièrement, lorsque vous êtes dans un mouvement baissier, comme c'était le cas en 2020, faire
04:53une augmentation de capital vous amène à être dilué, et donc les actionnaires de
04:58référence n'en veulent pas, premièrement.
04:59Deuxièmement, dans un mouvement baissier, vous externalisez une valeur de votre société
05:04baissière, alors que vos comparables non cotées, eux, n'externalisent pas.
05:09Troisièmement, vous avez des coûts qui sont inhérents à la bourse, des réglementations,
05:15une transmission d'informations à l'ensemble du marché, alors certains disent « c'est
05:19bien, on se met en bourse parce que ça va nous créer une certaine discipline intellectuelle,
05:23financière, etc. », mais lorsque les choses tournent un petit peu moins bien, vous vous
05:27dites « non, mais c'est des contraintes, c'est de la transmission d'informations
05:30à des concurrents, et donc toutes ces raisons cumulées font que ces actionnaires, pour
05:36peu qu'ils contrôlent leur société, se disent « très bien, on va réaliser la suite
05:40de la croissance à l'abri de la bourse, et puis on obtiendra un financement plus rapide,
05:46plus discret, avec moins de transmission et moins de coûts.
05:51– Vous le disiez tout à l'heure, la typologie des initiateurs d'offres,
05:57comment est-ce qu'elle s'équilibre entre les industriels d'un secteur et les financiers ?
06:03Les paramètres étaient un peu plus favorables pour les financiers l'an dernier, Olivier ?
06:07– Oui, ils se sont améliorés, on ne retrouve pas les grandes années d'il y a…
06:12– D'être au zéro, quoi !
06:13– Voilà, et donc effectivement les financiers ont été un petit peu plus entreprenants
06:18sur la bourse, lors de 31% des offres publiques qui ont été initiées par des financiers,
06:27c'était un petit peu moins avant, donc ça s'est amélioré,
06:29parce que les conditions de financement se sont améliorées.
06:33Néanmoins, ça ne s'est pas amélioré de façon significative, comme je viens de l'indiquer,
06:38parce que sans doute les fonds d'investissement avaient d'autres préoccupations,
06:43et la principale c'est qu'un fonds d'investissement, avant d'acheter,
06:48il faut aussi qu'il liquide ses participations.
06:50Or, les fonds d'investissement ont accumulé une série de participations très significatives
06:57qu'ils tardent à vendre sur le marché, parce que les valorisations n'étaient plus là,
07:02et ils ont quand même besoin de vendre ces participations,
07:06parce que s'ils veulent relever de l'argent, il faut qu'ils aient montré à leurs LPs
07:15qu'ils ont réalisé de bonnes ventes.
07:17Donc la préoccupation, c'est d'abord vendre avant d'acheter,
07:21et donc acheter en bourse, lancer des offres publiques.
07:24Donc là, de ce point de vue-là, c'est un marché d'acheteurs, aujourd'hui ?
07:27C'est un marché d'acheteurs, on le voit dans les statistiques, évidemment.
07:33Les conditions de financement s'améliorent, c'était ce qu'indiquaient vos précédents invités,
07:39et donc on peut penser que les financiers vont continuer à monter
07:43dans le nombre des initiateurs d'offres publiques.
07:45Sur la quarantaine d'offres déposées,
07:49quels ont été peut-être des secteurs emblématiques ciblés ?
07:53Est-ce qu'il y a eu des opérations aussi marquantes, emblématiques, qu'il faut soulever ?
07:58Oui, toujours le même secteur leader, télécommunications, tech, services.
08:07Voilà, ça c'est la grande majorité des offres publiques, et ça, ça ne change pas.
08:12C'est vraiment la grande tendance de ces dernières années.
08:17Ensuite, sur les marchés, il y a un point important à souligner,
08:23c'est que les offres publiques se sont surtout réalisées sur Euronext Growth plus que sur Euronext.
08:31Là, c'est très net, et je crois même que c'est la première fois qu'en pourcentage,
08:35on a 51% sur Euronext Growth versus 49% sur Euronext.
08:40Je ne sais plus quels compartiments c'était, mais Growth, c'est les entreprises de croissance, comme son nom l'indique.
08:44Exactement, c'est des sociétés qui ont une capitalisation qui tourne autour de 150 millions minimum,
08:52qui peuvent aller beaucoup plus loin.
08:53Les compartiments ABC commencent à 150 et vont jusqu'à plusieurs milliards.
08:58Ce sont surtout, et c'est ça qui l'explique, des sociétés à taille humaine, plus faciles à acquérir,
09:07plus familiales, plus contrôlées.
09:09Donc, on retrouve cette possibilité d'acheter un blog, d'avoir le contrôle et d'aller plus facilement au retrait.
09:15Si j'ai l'accord de la famille, tout va bien l'air.
09:17Exactement, vous pouvez y aller facilement.
09:19Et puis, ce sont des sociétés qui sont moins bien valorisées encore que les autres sociétés cotées.
09:24Pourquoi ? Parce qu'elles sont souvent moins bien suivies, étant des plus petites valeurs.
09:28Les analystes se concentrent moins sur ces valeurs.
09:30Et donc, on retrouve cette problématique décomparable à non cotée.
09:36Non seulement je suis moins bien suivi en bourse, mais encore moins bien puisque je suis sur Ronex Growth.
09:41Et donc, je suis dévalorisé encore plus vis-à-vis de mes pairs non cotés.
09:46Tous ces éléments-là aussi font qu'on a une croissance assez significative des offres publiques sur ce segment-là de Ronex Growth.
09:55Comment vous envisagez les perspectives pour ce thème des opérations, des offres publiques pour 2025 en France ?
10:03Et quand même, la petite question politique, est-ce que le climat pèse ? Est-ce que c'est un frein ?
10:07Puisque là, vous nous montrez quand même que 2024 a été une année de belles reprises qui nous ramène à des belles années, en l'occurrence 2021.
10:16Est-ce que c'est une dynamique qui peut se poursuivre malgré le niveau d'incertitude assez élevé dans lequel on navigue aujourd'hui ?
10:22Je dirais que globalement, oui, cette dynamique se poursuit.
10:28On le voit dans les opérations qui arrivent, de celles qui sont potentiellement annoncées.
10:32On voit Véraliaz qui est une des rumeurs qui date d'aujourd'hui, avec 3 milliards de capitalisation.
10:39Donc je pense que 2025 se dirige sur une même tendance que 2024.
10:45L'incertitude et le marasme potentiellement économique et politique renforcent cette tendance.
10:56Parce que là encore, on se dit que ça risque de peser sur ma valorisation, même si la bourse a repris par rapport à 2024.
11:08On n'est pas encore sur une reprise excessive. Et donc là encore, il y a de bonnes affaires à faire.
11:16Là encore, un certain nombre d'initiateurs potentiels se disent qu'il faut retirer les sociétés de la cote parce que c'est le moment.
11:29Et toutes les autres contraintes que j'évoquais, notamment la communication et la lourdeur de la réglementation, pèsent.
11:35Et ça, ça n'est pas prêt de changer, malheureusement.
11:38Merci beaucoup, Olivier Guignon.
11:41Exercice de réalité quand même sur ce qu'est la bourse aujourd'hui et ce que peut représenter la bourse pour des entreprises de petite taille ou de taille intermédiaire, il faut l'entendre.
11:51Associé gérant, managing partner du département Corporate Finance de la Banque Alentra, qui était avec nous l'invité de ce dernier quart d'heure de Smart Bourse ce soir.