Les informés débattent de l'actualité du jeudi 13 février 2025
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00:00A titre de comparaison, c'était 436 en 2022, donc avant les attentats en Israël.
00:06Écoutons la ministre chargée de la lutte contre les discriminations, Aurore Berger.
00:11Aujourd'hui, on ne dit plus le juif, on dit le sioniste.
00:16On ne dit plus ils sont une menace, mais ils sont génocidaires.
00:20Mais derrière les mots, l'obsession reste la même.
00:24Quand on voit des morts aux Juifs tagués en bas des immeubles et sur les vitrines,
00:27quand on entend les cris de salles sionistes pendant les manifestations,
00:31quand dans la rue, sur les réseaux sociaux, à certaines tribunes,
00:34les cris les plus violents, les insultes les plus virulentes,
00:37les appels à la violence se déchaînent,
00:39alors il faut le dire, et le dire sans détour,
00:42l'antisionisme, la haine décomplexée d'Israël
00:46sont les nouveaux visages de l'antisémitisme.
00:49En parallèle de ces assises, le gouvernement lance une campagne de communication
00:53avec des témoignages.
00:54Salle juive, c'était tagué sur ma porte.
00:57Salle juive, c'est ce que mon fils a entendu à la fac.
01:00L'antisionisme, c'est le nouveau visage de l'antisémitisme,
01:03comme le dit la ministre, Benjamin Morel ?
01:06Alors, c'est un sujet qui est un sujet complexe,
01:08parce qu'historiquement, évidemment, ce n'est pas forcément la même chose,
01:11mais c'est devenu, je dirais, de manière beaucoup plus politiquement correcte,
01:15une façon, et surtout pas répréhensible par la loi,
01:18en effet, de s'attaquer aujourd'hui à la communauté juive.
01:20Donc oui, sur le fond, elle a raison.
01:22Après, vous pouvez avoir une critique légitime du gouvernement de Benjamin Netanyahou,
01:27on peut avoir une critique légitime de la politique d'Israël, évidemment,
01:31mais en revanche, l'antisionisme tel qu'il va être instrumentalisé aujourd'hui
01:35par certaines personnalités, voire par certains mouvements politiques,
01:39est une façon, en effet, à peine dissimulée,
01:42de masquer une forme d'antisémitisme,
01:44et surtout, parce qu'évidemment c'est plus fin,
01:46de flatter un électorat et les pulsions antisémites,
01:49qui sont prêtées, souvent d'ailleurs de manière très caricaturale, à cet électorat.
01:53Donc oui, il y a un jeu politique,
01:55et en effet, la dénonciation en la matière, elle est nécessaire.
01:57Sylvie Pierre-Bronsolette.
01:58Oui, d'ailleurs, quand est-ce que les actes antisémites ont explosé ?
02:01C'est au lendemain du 7 octobre.
02:03On aurait pu espérer que, justement, il y a un mouvement de solidarité
02:06vis-à-vis des Israéliens massacrés,
02:08mais pas du tout, ça a donné un coup de fouet à l'antisémitisme.
02:11Tout ça est lié, évidemment, au conflit israélo-palestinien.
02:15Parce qu'il y a le 7 octobre, il y a la riposte d'Israël.
02:19Non mais, dès le lendemain du 7 octobre,
02:21avant qu'Israël ait levé le petit doigt pour répliquer,
02:24il y a eu en France des actes antisémites démultipliés.
02:27C'est absolument incroyable.
02:29Et donc, il y a depuis plusieurs années une montée des actes antisémites,
02:33même avant le 7 octobre.
02:35Fondapol a fait une très belle étude, sortie récemment,
02:38qui montre la progression, et notamment chez les plus jeunes,
02:40du sentiment d'antisémitisme.
02:42Les deux types d'antisémitisme,
02:44celui de préjugés avec tous les clichés
02:47qui sont généralement attribués à des juifs quand on est antisémite,
02:51et puis un antisémitisme, si je puis dire, encore pire,
02:54d'agression, où on trouve normal, du coup, d'attaquer une synagogue,
02:58de s'en prendre à des biens juifs ou des personnes juives.
03:02Je connais même des familles qui enlèvent leur nom juif
03:05de leur interphone pour éviter d'être attaquées.
03:08On en est là, ou qui retirent leur mézouza devant leur appartement.
03:13Donc, il y a vraiment une montée préoccupante en France,
03:17comme ailleurs, d'ailleurs, en Europe,
03:19il y a une montée de l'antisémitisme.
03:21C'est très difficile à combattre,
03:23tant qu'il y a, en plus, des forces politiques
03:26qui attisent un peu ce sentiment,
03:28et c'est vrai, parlons-en, franchement,
03:30Jean-Luc Mélenchon, quand il dit que l'antisémitisme est résiduel,
03:33n'aide pas à la cause.
03:35Et puis, certains de ses députés européens ou français,
03:38qui prennent systématiquement fait des causes pour le Hamas, etc.,
03:42ça n'aide pas non plus à la cause.
03:44Donc, il y a toutes sortes de raisons
03:47pour lesquelles l'antisémitisme progresse,
03:49et tous les efforts que pourront faire le gouvernement,
03:51les partis, les associations, tout un chacun,
03:54sera le bienvenu, parce que c'est un vrai problème.
03:56Étienne Girard, on sait que 42% des auteurs d'actes antisémites
03:59ont moins de 35 ans.
04:01Qu'est-ce qu'on a raté, collectivement ?
04:04Quelque chose dans l'éducation, évidemment,
04:06quelque chose dans le vivre ensemble.
04:09Bon, c'est un phénomène qui est extrêmement, aujourd'hui, fertile.
04:14Et la riposte d'Israël au Hamas donne du carburant à ses discours,
04:23et en plus qui assimile, évidemment, Israël aux Juifs,
04:26le sionisme, au fait d'être juif, etc.
04:29Là, on a raté des choses,
04:32il faudra répondre sur le terrain de l'éducation,
04:34il faudra répondre sur le terrain judiciaire.
04:36À mon avis, l'arsenal juridique, on l'a,
04:39mais il pourrait être encore mieux utilisé,
04:41utilisé plus subtilement par les magistrats.
04:44Cette caractérisation de l'antisémitisme,
04:48renouvelée de la part d'Aurore Berger,
04:51elle me semble intéressante.
04:54On a parlé, il y a quelques années,
04:57de la pénalisation de l'antisionisme en tant que concept.
05:00J'avais beaucoup de réserve avec ça,
05:02parce que même si les poissons volants
05:04ne sont pas le gros de l'espèce,
05:05il faut bien voir qu'ils existent.
05:07Et il existe un antisionisme,
05:09qui est un antisionisme politique,
05:11parfois porté par des Juifs, d'ailleurs,
05:13qui n'est pas antisémite.
05:15C'est une position politique qui est considérée
05:17que l'État d'Israël n'a pas lieu d'être.
05:19C'est là ce qui donne souvent du carburant
05:21à certaines positions borders ou franchement antisémites,
05:24de dire, oui, mais il y a des Juifs qui sont antisionistes.
05:26Mais il ne faut pas s'en servir,
05:28et vous avez tout à fait raison,
05:29il ne faut pas se servir de cette existence-là
05:31de façon complaisante.
05:33Le plus gros de l'espèce, quand même,
05:35aujourd'hui, et on a raison de le dire,
05:37c'est qu'aujourd'hui, oui, l'antisionisme
05:39est souvent, très souvent, antisémite.
05:41Et quand on dit « salsioniste »,
05:43derrière, évidemment, il y a saluif,
05:45et il faut que les magistrats
05:47prennent ce propos-là,
05:49« salsioniste »,
05:51pour qu'il est, c'est-à-dire le fauné
05:53d'un antisémitiste, et réprime à l'aune
05:55de ce qu'il veut être, de façon dissimulée.
05:57On doit sanctionner les intentions.
06:01À l'instant, Étienne parlait de l'éducation.
06:05Aurélie, on sait qu'Elisabeth Borne,
06:07la ministre de l'éducation,
06:09dénonce une intensification inquiétante
06:12des actes en milieu scolaire.
06:14De fait, ça aussi, c'est un sujet.
06:15Ça aussi, c'est un sujet, puisque
06:17pour le premier trimestre de l'année,
06:19l'année scolaire 2024-2025,
06:21il y a eu 480 actes antisémites
06:23en milieu scolaire.
06:25Ce qui est un niveau très élevé,
06:27et ce qui est vraiment inquiétant,
06:29parce que milieu scolaire, ça veut dire
06:31tous les niveaux à l'école,
06:33donc c'est particulièrement prégnant,
06:35y compris chez les plus jeunes.
06:37Et c'est vrai que pendant ces assises,
06:39on a entendu des témoignages assez glaçants.
06:42Par exemple, c'est Joseph,
06:43qui est élève en première à Paris,
06:45qui est l'objet de blagues du genre
06:46« Fais gaffe, on va te mettre dans la douche ».
06:48On entend encore dans les écoles
06:50ce genre de, je ne me pose même pas
06:52à appeler ça de blague, et qui donc
06:54a dû quitter l'école publique
06:56pour ne plus être soumis à ce genre de blagues.
06:58Ou Nathan, un étudiant à Nanterre,
07:00qui fait état de nombreux tags
07:02à la fac, « Nique les juifs »,
07:04« Décroix gammés retrouvés sur les tables des amphis ».
07:07Donc, on voit vraiment qu'y compris
07:09chez les plus jeunes, on a quand même
07:11un gros sujet devant nous
07:13pour faire diminuer ce genre d'acte
07:15absolument intolérable.
07:17Valérie Gass.
07:18Oui, je pense qu'il y a un mélange de choses,
07:20c'est qu'on voit sur ces jeunes générations
07:21qui ont peut-être un manque de culture,
07:23d'éducation, et qui a véritablement
07:25un gros effort pour rappeler
07:27un certain nombre de choses historiques
07:29et leur remettre dans la tête
07:31la portée de certains propos,
07:33de certaines marques qui peuvent être utilisées.
07:35Et en fait, il faut rien laisser passer
07:37et nommer les choses. Alors, Aurore Berger
07:39essaye de le faire
07:41avec ses assises
07:43contre l'antisémitisme. Je pense
07:45qu'en effet, il faut faire passer
07:47dans l'opinion que
07:49toute va être sanctionnée
07:51et éduquer en effet
07:53vraiment beaucoup plus. Il y a vraiment
07:55un gros effort à faire à l'école
07:57sur ce que ça représente pour les plus jeunes.
07:59Juste un mot parce que
08:01Benjamin Morel, vous, vous êtes maître de conférence
08:03donc vous voyez des étudiants,
08:05c'est une partie de votre vie
08:07d'être devant des amphis. Est-ce que cette question
08:09vous l'avez vue évoluer ces dernières années ?
08:11Dans les prises de parole, dans les intentions,
08:13dans les...
08:14En droit constitutionnel, on est moins
08:16sur ces sujets. Et je crois que
08:18là-dessus, non, je ne peux pas vous dire que
08:20je n'ai pas forcément de témoignage. En revanche,
08:22en Charentan, non. Et même, j'ai donné
08:24des cours dans d'autres facultés qui pouvaient être
08:26considérés comme étant peut-être plus difficiles.
08:28Je n'ai jamais eu ce
08:30type de sujet. Je voulais revenir sur ce que
08:32disait Etienne tout à l'heure. C'est compliqué
08:34en droit, sanctionner une intention,
08:36on ne peut pas. Et c'est parce qu'on ne peut pas
08:38que... C'est l'office du juge.
08:40Il fallait jauger l'intention de celui
08:42qui a prononcé le mot. Oui, mais là, en l'occurrence,
08:44c'est une atteinte disproportionnelle
08:46à la liberté d'expression si on considère que
08:48derrière le mot, on pourrait prêter
08:50éventuellement... Si on peut caractériser qu'il y a cette intention.
08:52Et ça, c'est évidemment extrêmement complexe.
08:54Donc derrière, il y a une question de droit et liberté fondamentale.
08:56Et ce n'est pas un hasard s'il y a cette instrumentalisation.
08:58C'est que, justement, juridiquement,
09:00c'est compliqué. Et pour revenir sur...
09:02Il y a une question de mémoire,
09:04évidemment. Et je crois qu'on a fait
09:06de ce sujet uniquement une question de mémoire
09:08alors qu'aujourd'hui, c'est surtout un sujet
09:10d'importation d'un conflit
09:12étranger sur des schémas
09:14qui sont des schémas franco-français.
09:16Et là, il y a un vrai, vrai problème,
09:18je crois. Il faut arriver à casser cette importation.
09:20Oui. Et il faudrait encourager
09:22les proviseurs, les recteurs, les professeurs
09:24à réagir et pas à mettre la poussière sous le tapis
09:26parce qu'il faut être courageux. C'est compliqué
09:28de lutter
09:30contre les actes antisémites dans des établissements.
09:32Ça déplait à certaines catégories
09:34d'élèves ou de parents. Et donc,
09:36il faut les encourager et pas les sanctionner
09:38quand ils auront dénoncé
09:40beaucoup d'actes antisémites chez eux. On va devoir s'arrêter là.
09:42Mais Sylvie, je vous laisse la parole pour la
09:44une du point cette semaine. Eh bien, c'est une autre guerre.
09:46Ce n'est pas la guerre des chefs à droite.
09:48C'est la guerre des chefs de l'intelligence artificielle.
09:50Donc, tout le numéro est consacré à
09:52la concurrence des grandes
09:54entreprises de l'intelligence artificielle.
09:56A lire dans le point. Etienne Girard, à la une de L'Express.
09:58Les retraites, on vous raconte
10:00toute la vérité, tout ce qu'on vous a caché,
10:02tout ce qu'on vous a pas dit
10:04sur les retraites. Il y a encore énormément de choses
10:06pour réacheter L'Express dans tous les bons cas.
10:08Merci Etienne.
10:10Valérie Gass, merci beaucoup, chef du service politique
10:12de RFI. Benjamin Morel,
10:14politologue, merci, maître de conférence en droit public.
10:16On vous lit aussi en librairie
10:18le Parlement Temple de la République
10:20de 1789
10:22à nos jours. Je ne sais pas, c'est composé.
10:24Il y a bientôt un livre à sortir la semaine prochaine
10:26qui s'appelle Le Nouveau Régime,
10:28l'impossible parlementarisme. C'est sur la crise politique
10:30actuelle. Merci beaucoup Benjamin Morel.
10:32Merci Aurélie. A demain.
10:34Demain, votre interview politique à 18h30
10:36à la radio.
10:38Et les informés qui reviennent avec Renaud Dely
10:40et Benjamin Fontaine, demain à 9h.