• il y a 22 heures
Avec Patrick Meney, ancien reporter de guerre et lauréat du prix Albert Londres.

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##LES_CLEFS_D_UNE_VIE-2025-02-13##

Catégorie

Personnes
Transcription
00:00Sud Radio, les clés d'une vie, Jacques Pessis.
00:03Sud Radio, les clés d'une vie, celle de mon invité,
00:05le journaliste que vous êtes à passer des années à observer et à raconter
00:10quelques-unes des tragédies de notre monde,
00:12vous devenez aujourd'hui l'auteur d'une comédie
00:14qui ne se déroule pas sur notre planète mais sous terre, après notre départ.
00:18Bonjour Patrick Menet. Bonjour.
00:20Alors on va tout à l'heure évoquer Appelez-moi Albert, votre première comédie,
00:23mais on va évoquer surtout, vous savez, le principe des clés d'une vie,
00:26votre parcours à travers des dates clés,
00:28puisque vous avez un parcours tout à fait différent de ce que vous faites aujourd'hui.
00:31Exactement, très différent.
00:32Alors on va l'évoquer avec des dates clés,
00:35et la première que j'ai trouvée, c'est le 12 juin 1973,
00:39les prémices de votre premier grand dossier de journaliste,
00:43et on va l'évoquer à travers une chanson.
00:45Oh jeune femme qui descendiez sur Besançon
00:49Cette année-là, vers le mois d'août, en portant comme un sacre-dix
00:52Jacques Bertin, qui était journaliste devenu chanteur,
00:55qui a fait à Besançon, et qui évoque l'affaire Lip,
00:58qui a été votre premier grand dossier quand vous êtes rentré à l'AFP.
01:02L'affaire Lip, c'est une affaire extraordinaire,
01:05c'est un souvenir humain et journalistique extraordinaire,
01:08et puis également c'est un moment clé de ma vie,
01:10parce qu'en fait, si vous voulez, au départ, moi je n'ai pas fait de grande école de journalisme,
01:13j'étais un provincial, je n'avais pas de relation,
01:16je n'ai pas été très très bon dans mes études,
01:18et puis je me suis retrouvé au bureau de l'AFP à Dijon,
01:22un bureau que personne ne visait véritablement.
01:27Et là, j'avais sept départements,
01:29et un jour on m'a dit, écoute, il y a une grève à Besançon,
01:33à l'usine Lip, qui était un peu la Rolls-Royce des montres à l'époque,
01:37une grève, donc j'y suis allé,
01:39et puis je pensais y rester un week-end, et je suis resté plus d'un an.
01:42– Mais qu'est-ce qui s'est passé, comment ça se fait ?
01:44– C'est une affaire extraordinaire, c'est-à-dire que finalement,
01:47je pense qu'on n'était pas très loin des vacances d'été, je pense,
01:50ou en tout cas de certains congés.
01:52– On était au mois de juin, oui.
01:53– Au mois de juin, il n'y a pas de gros candidats à Paris
01:55parmi les journalistes pour aller à Besançon.
01:57Et quand je suis arrivé sur place, d'abord le choc,
02:00c'est-à-dire qu'une grève dans une usine, en général,
02:03il y a des banderoles, c'est pas très drôle, etc.
02:06Là, c'était très ouvert à tout le monde,
02:09avec des syndicalistes très ouverts, très souriants,
02:13avec beaucoup de jeunes femmes, il y avait vraiment,
02:15dans ces usines où il y avait, je crois, mille après mille salariés,
02:17il y avait peut-être 900 jeunes femmes,
02:20et j'ai demandé à voir le responsable.
02:22Et le responsable, c'était Charles Piaget,
02:24qui était vraiment un personnage, un syndicaliste très ouvert.
02:27Et à chaque fois, on me disait, il faut voir Charles,
02:31il faut voir Charles, il faut voir Charles,
02:32et qui avait un charisme incroyable, c'était le responsable de la CFDT.
02:36Et pendant un an, je suis resté, parce que tous les jours,
02:39il se passait quelque chose, non pas au Grand Lafayette, mais chez Lippe.
02:42Il y avait toujours une invention, c'est-à-dire que le grand génie
02:45de ces syndicats et de ces ouvriers, c'est qu'en fait,
02:49ils ont occupé l'usine, mais ils ont continué à la faire marcher,
02:52à la faire fonctionner. Ils ont fabriqué des montres.
02:54– Ils ont fait de l'auto-gestion.
02:55– De l'auto-gestion, vraiment, et ça a duré un an.
02:57– Alors, je crois que ça a commencé parce qu'un jour,
02:59dans une réunion syndicale, un syndicaliste a dérobé la serviette,
03:04le cartable d'un administrateur, et dedans,
03:06il a vu qu'il y avait 480 licenciements.
03:08– Exactement, voilà, ça partait comme ça.
03:10– Et c'est devenu une affaire d'État.
03:12– C'est devenu une affaire d'État, une affaire nationale,
03:14et d'un point de vue journalistique, ça m'a permis de me faire connaître,
03:18de signer, et d'avoir tout de suite un grand réseau parmi les journalistes.
03:21– Oui, parce que vous étiez le feuilletonniste de l'histoire.
03:24– Voilà, et j'étais le petit provincial journaliste qui, d'un seul coup,
03:27faisait la une des journaux, des télévisions, des radios,
03:30et c'était quelque chose d'extraordinaire.
03:32– Pierre Messmer a déclaré « L'IPPE, c'est fini un jour »,
03:35et je crois que Fred Lippe était déjà parti.
03:37Fred Lippe qui était un personnage incroyable, qui était le patron,
03:40qui avait inventé la montre qu'on ne remonte plus,
03:42et il était tellement doué pour le marketing
03:44qu'il avait eu l'idée d'offrir, en 1952,
03:46une nouvelle montre pour Noël au général de Gaulle,
03:49et cette montre, le général de Gaulle l'a portée pendant des années,
03:51elle est sur des photos.
03:52– Et elle est toujours fabriquée aujourd'hui, par Lippe.
03:55– Alors, vous, vous êtes né pas loin de Dijon,
03:57en Côte d'Or, à un petit village qui s'appelle Corsin, c'est tout petit.
04:00– C'est tout petit, je suis né dans une école.
04:02– Parce que vos parents étaient directeurs d'école.
04:04– Mes parents étaient instituteurs, mais ils étaient seuls dans cette école,
04:08et je suis né dans l'école, au premier étage, c'était un signe.
04:13– Avec papa et maman comme professeurs.
04:15– Avec papa et maman, qui étaient des instituteurs typiques de l'époque,
04:20c'est-à-dire qui a fait de la résistance, j'en parle toujours avec émotion,
04:24et mon père était un instituteur laïc, qui défendait la laïcité.
04:28– Et en même temps, avoir maman comme professeur,
04:31ce n'est pas toujours facile pour un enfant, Patrick Meunier.
04:33– Alors, c'est ma maman qui m'a appris à écrire,
04:36et jusqu'en 6ème, c'est mes parents qui ont fait mon éducation scolaire.
04:42– Et ensuite, vous êtes allé, Patrick Meunier, au lycée Carnot de Dijon,
04:45où il y a eu quand même comme professeur Henri Miller et Paul Guth.
04:48– Exactement.
04:49– Et ça, c'est autre chose, ça vous a permis d'avancer un petit peu,
04:52vous n'étiez pas un excellent élève non plus.
04:53– Alors, pour situer un peu mon niveau, j'étais dans une classe,
04:57et c'est un ami qui me l'a récemment rappelé,
05:00où on était 17 redoublants à l'époque.
05:03– Quand même.
05:03– Oui, 17 redoublants.
05:04Et alors, ce qui est intéressant, c'est que cet ami m'a dit,
05:06mais finalement, je me suis aperçu que les 17,
05:09c'est peut-être ceux qui ont le mieux réussi dans la vie,
05:11et c'était d'ailleurs le point de départ,
05:12on en reparlera un petit peu plus tard, de la pièce que j'ai écrite.
05:15– Exactement.
05:15Alors, il se trouve aussi qu'il y a une chose qui vous fascine,
05:18c'est l'actualité quand même,
05:195 colonnes à la une, où François, ça vous parle.
05:22– Ah, ça me parle, parce qu'en fait, on avait la télévision,
05:25on a eu la télévision très très tôt,
05:27la télévision en noir et blanc, très tôt chez mes parents,
05:29et donc, l'émission comme 5 colonnes à une,
05:32j'ai vu ça lorsque j'avais 7-8 ans, les gens ont télévisé,
05:36donc vraiment, j'ai été dans ce bal de culture de la télévision,
05:39la télévision française, avec les grands noms de l'époque.
05:42– 5 colonnes à la une, c'était d'ailleurs le titre
05:44des 5 colonnes de François, au départ dirigées par Lazareff,
05:47mais ce qu'on ne sait pas, c'est que c'est Frédéric Rossif,
05:49auteur de la vie des animaux,
05:50qui a trouvé le titre un jour en réunion avec Pierre Lazareff et Pierre Degros.
05:55Et ça a été aussi un événement,
05:56car ça vous a guidé aussi dans votre envie de faire du journalisme.
05:59– Totalement, ça fait rêver que lorsqu'on est un écolier à Dijon,
06:03et qu'on voit ces reportages sur l'Algérie, sur l'Afrique, sur l'Asie,
06:08ça a été extraordinaire.
06:09– Alors, il y a quand même une école que vous avez faite à Tours,
06:11une école de journalisme, mais qui était une école qui venait d'ouvrir.
06:15– Non, c'était l'IUT, l'IUT section journaliste à Tours,
06:20des bâtiments qui étaient en fait entourés de chemins boueux,
06:24ce n'est pas encore goudronné, on était les premiers,
06:27c'était à l'issue de 68, la création des IUT,
06:30et j'ai l'impression que finalement, les étudiants savaient
06:33presque autant que les professeurs, côté journalisme.
06:36– Oui, parce que les cours relevaient de l'improvisation.
06:38– Complètement, complètement, on a inventé un petit peu
06:42ce que pouvaient être les programmes de journalisme.
06:44– Alors, je crois que le premier cours que vous avez fait, Patrick Menet,
06:47il fallait décrire les locaux, et là vous avez vu, c'est la première bonne note.
06:50– Vous savez tout, incroyable, effectivement, le professeur de français
06:55nous a dit, décrivez les locaux, donc imaginez un immeuble moderne,
06:59à peine terminé, entouré de champs, et on était assez perplexes,
07:03et lorsqu'il a rendu les copies, désolé de le dire, mais ça s'est passé comme ça,
07:07il a déclaré que finalement, il y a une seule personne ici qui sait écrire,
07:11et qui a un style et des idées, c'est Patrick Menet.
07:14– Et vous aviez raconté quoi ?
07:16– Je ne me souviens plus, mais apparemment…
07:17– Ça n'allait plus.
07:18Alors, l'école se termine, et vous vous êtes affecté,
07:21non pas dans votre région, Patrick Menet, mais à Nice matin.
07:24– Alors, ça c'est aussi un itinéraire assez étonnant,
07:28lorsque ma première expérience journalistique, j'ai 18 ans,
07:32et je réussis à me faire embaucher comme stagiaire durant l'été,
07:35alors que j'étais encore lycéen, au Dépêche, le journal local.
07:39Et lorsqu'on était stagiaire à l'époque, on signait nos papiers,
07:41comme les journalistes, et on était payés comme les journalistes.
07:44Donc, si vous voulez, juillet et août, tous mes juillets et août,
07:47je les ai passés au Dépêche, avec un rédacteur en chef formidable,
07:51qui s'appelait Bernard Angelot, et alors que tout au long de ma carrière,
07:54on m'avait dit, bon je n'irai pas loin, parce que je n'étais pas très bon à l'école,
07:58contrairement à mes frères qui étaient très brillants,
08:00et où mes parents me disaient, quand tu seras grand,
08:02que tes professeurs, que tes frères seront professeurs,
08:05et que tu seras ouvrier chez Tero, Tero c'était l'usine de motos à Dijon,
08:09qu'est-ce que tu vas faire ?
08:10Et pour la première fois, quelqu'un m'a dit,
08:12Patrick, tu as vraiment un talent d'écriture,
08:15tu es vraiment fait pour le journalisme.
08:16C'est la première fois qu'un adulte, si vous voulez,
08:18me reconnaissait une certaine qualité.
08:21Oui, mais ça relève aussi du miracle,
08:22puisque aujourd'hui, on ne peut pas imaginer rentrer pour un stage d'été à 18 ans,
08:26et être payé.
08:27C'est fini, c'est terminé, ça c'est une époque complètement terminée,
08:30malheureusement, et c'était une très bonne école,
08:32c'était une école peut-être aussi bonne que CFJ finalement,
08:35pour être journaliste, et j'étais passionné.
08:37Et il y avait un photographe qui avait beaucoup de talent,
08:39qui s'appelle Jean-Claude Delmas,
08:41qui lui voulait aussi faire du grand journalisme, du reportage,
08:45et on a essayé tous les deux de s'associer durant le week-end,
08:48et aller faire des reportages qu'on allait vendre aux journaux.
08:51Et on vendait ces reportages à l'agence Aigle,
08:53l'agence Aigle qui dépendait du Progrès de Lyon.
08:56Et lorsque je suis allé au CIS militaire,
08:58en sortant, aucun contact, je voulais être journaliste,
09:01et j'ai fait 100 CV.
09:03A l'époque on les faisait, c'était même pas de la photocopie.
09:06– C'était de la Renéo.
09:07– De la Renéo.
09:08Et j'ai reçu une seule réponse, qui était ni ce matin,
09:11le journal où tout le monde voulait aller,
09:13à cause du soleil, et également des bons salaires.
09:16Et le rédacteur en chef me reçoit, il me dit « Monsieur Meunet, je vous connais ».
09:19Je dis « bon, mais personne ne me connaît ».
09:21« Si, si, je vous connais, car on a publié vos reportages,
09:24les reportages, et on a trouvé ça très bon, et on veut vous embaucher ».
09:28– Incroyable.
09:28– Voilà, c'est le début de mon histoire.
09:30– Et alors, ni ce matin, effectivement, c'est le soleil,
09:33mais c'est aussi, la presse de province est très particulière,
09:36c'est le quotidien de chaque personne.
09:39– Alors c'est le quotidien de chaque personne,
09:40et ni ce matin, c'était aussi beaucoup des personnalités de la culture quand même.
09:46En été, si vous voulez, beaucoup de monde passe par Nice,
09:49donc c'était comme un univers très très intéressant.
09:53Mais j'avais quand même toujours en tête l'idée de faire du grand reportage.
09:56– Parce qu'il y avait Monaco à côté aussi.
09:57– Il y avait Monaco, il y avait beaucoup de choses à côté,
10:00il y avait, oui oui, beaucoup de choses.
10:01– Les reportages, quand on était à Nice et à Monaco,
10:03il y avait un hôtel, l'hôtel Métropole, où mouraient les vieilles Anglaises,
10:07et on les descendait dans l'ascenseur à 6h du matin,
10:10et c'était un reportage, le groupe était toujours prêt à avoir une petite pièce
10:13pour savoir qui était mort, ça faisait un reportage pour le journaliste,
10:16et c'est comme ça que l'hôtel Métropole est devenu l'hôtel Nécropole.
10:19– Ah d'accord.
10:20– Mais effectivement, vous avez tout appris sur le terrain, même à Nice.
10:24– Complètement, et en fait, Nice à l'époque, c'était le Nice aussi de cette époque,
10:30donc avec les palaces, avec la joie de vivre, avec beaucoup de monde intéressant.
10:35– Et Cannes et le festival pas loin, ça vous avez…
10:38– Ça je ne l'ai pas couvert.
10:38– Vous ne l'avez pas couvert, vous avez fait beaucoup d'autres choses,
10:42et on va continuer à en parler à travers une autre date importante pour vous,
10:46le 21 juillet 1980.
10:49A tout de suite sur Sud Radio avec Patrick Menet.
10:52– Sud Radio, les clés d'une vie, Jacques Pessis.
10:55– Sud Radio, les clés d'une vie, mon invité Patrick Menet,
10:58journaliste, on va expliquer votre parcours à travers des dates clés,
11:02auteur de théâtre avec Appelez-moi Albert qui débute dans quelques jours,
11:05on va aussi en parler, mais on a évoqué vos débuts de journalisme par hasard finalement,
11:11et à 18 ans, mais il y a une date importante, le 21 juillet 1980, écoutez ce générique.
11:17Le journal d'antenne 2, c'est votre première télé,
11:23vous couvrez une manifestation d'homosexuels italiens sur la place rouge
11:26à l'heure des Jeux Olympiques de Moscou.
11:28– Effectivement, ça fait partie de mon parcours,
11:31j'ai été correspondant de l'AFP à Moscou,
11:35dans les années 80, je suis resté trois ans là-bas,
11:37donc l'URSS à l'époque communiste,
11:40et une expérience à la fois assez difficile humainement,
11:43parce qu'il n'y avait aucune liberté sur place,
11:45et puis très enrichissante, parce que c'était un monde qu'on ne peut même pas imaginer.
11:50Et c'était pendant les Jeux Olympiques, et j'avais appris avec des contacts,
11:54qu'un italien, je crois, je me souviens,
11:57qui voulait manifester en URSS pour la défense des homosexuels.
12:04Et donc on est arrivé très disquérés, en se faisant cacher,
12:07en pensant que personne n'était au courant,
12:09et puis il a à peine eu le temps de sortir une pancarte,
12:13qu'immédiatement des hommes du KGB lui sont tombés dessus,
12:16mais également sont tombés sur nous,
12:17c'est-à-dire que j'étais avec un journaliste de l'AFP,
12:19Jean-Claude Delmas, que j'ai cité tout à l'heure,
12:22et qui lui n'a pas eu le temps de sortir son appareil photo,
12:24qui s'est fait tabasser, prendre l'appareil photo,
12:26et donc la manifestation, elle a duré 15 secondes,
12:28et personne n'était au courant, sauf à travers une dépêche AFP qui relatait ce fait.
12:32– Et en même temps, la télévision en a parlé,
12:35puisque vous êtes dans ce journal…
12:37– La télévision en a parlé en France,
12:39parce que bien sûr, j'avais fait des pêches AFP, j'étais à l'AFP,
12:42et en même temps, je faisais des correspondances pour Antenne 2.
12:45– Alors à l'époque, il faut savoir que les Jeux Olympiques de Moscou
12:47ont été boycottés par beaucoup de monde,
12:49ça a été un événement,
12:50ça a commencé par les États-Unis à la demande de Jimmy Carter,
12:53mais ce qu'on ne sait pas, c'est qu'en fait,
12:55l'administration américaine avait dit au CIO
13:00que si jamais il y avait des Jeux Olympiques avec les Américains,
13:04ils coupaient toutes les subventions et ils avaient des taxes supplémentaires,
13:06et ça a été décidé comme ça.
13:08– Ah d'accord, je ne savais pas.
13:09Alors, l'URSS, en même temps,
13:12vous découvrez la vie quotidienne des Soviétiques pendant des années.
13:16– Alors ça, c'est un peu l'approche que j'ai du journalisme,
13:18c'est-à-dire que je suis arrivé en URSS sans culture particulière
13:22par rapport à ce pays, sans a priori,
13:24mon père était communiste, moi je n'étais pas communiste,
13:26enfin je n'avais pas d'a priori,
13:27et la plupart des correspondances intéressaient beaucoup au Kremlin.
13:31Qu'est-ce qui se passe au Kremlin ?
13:33On ne savait pas ce qui se passe au Kremlin,
13:34je ne pensais pas ce qui était essentiel finalement,
13:36et je racontais au jour le jour ce que je voyais, ce que je vivais,
13:40et c'était quelque chose d'assez étonnant.
13:42Et je vous donne une anecdote,
13:44à l'époque, il n'y avait absolument rien dans les magasins, rien.
13:48Et quand je suis revenu en Bourgogne, dans le petit village où j'étais né,
13:51il y avait une épicerie, et l'épicerieur me dit,
13:53mais Patrick, comment c'est à Moscou ?
13:56Je lui ai dit, écoutez, c'est simple,
13:57à Moscou, il y a un très grand magasin,
13:59qu'on peut comparer au Galerie Lafayette chez nous à Paris,
14:04et bien dans ce magasin,
14:06il y a moins de choses que dans votre épicerie.
14:08Elle ne me croyait pas, et c'était vrai.
14:10Moi, je me souviens à l'époque d'une photo
14:12qui a circulé dans les journaux en URSS,
14:14c'était une queue devant la boulangerie Poilane, rue du Cherchemidi,
14:18et les Russes avaient titré que les Français manquaient de pain,
14:21qu'ils faisaient la queue devant les boulangeries.
14:22Exactement, et pour parler des files d'attente en URSS,
14:26le premier jour où je débarque en URSS,
14:27il y a un chauffeur qui vient me chercher, le chauffeur de l'AFP,
14:30et puis il faisait moins 15 degrés ou moins 20 degrés,
14:34et on passe devant un immeuble où il y avait marqué ce mot magasine,
14:38j'avais fait un peu de russe au lycée quand même,
14:39je pouvais lire magasin, magasin, et il n'y a pas de vitrine,
14:42et il y avait une queue, mais une très très longue queue,
14:45et je me dis mais qu'est-ce qu'ils attendent ?
14:47Ils me disent mais ils attendent l'ouverture du magasin.
14:49Je regarde ma montre, je me dis bon c'est pas,
14:50il est 8h moins le quart, c'est dans un quart d'heure.
14:52Non, non, demain matin.
14:54Donc les gens viennent faire la queue jusque le lendemain matin.
14:57Et là, le lendemain matin, je suis venu,
14:59la porte s'est ouverte, il n'y a pas de vitrine,
15:01et c'était un magasin de meubles.
15:03Mais il n'y avait aucun meuble, il y avait des tables,
15:04avec des cahiers et des crayons,
15:06caran d'âche, des crayons,
15:08et les gens écrivaient,
15:09je commande une table, je commande trois chaises,
15:12je commande des meubles,
15:14mais ils ne savaient pas ce que c'était.
15:15Et on les appelait un mois, deux mois, six mois plus tard,
15:17en leur disant bah écoutez vos chaises sont arrivées,
15:19votre bahut est arrivé,
15:21et voilà, c'était ça en fait l'URSS au quotidien à l'époque.
15:23Il faut savoir parce que beaucoup de gens ne savent pas que l'AFP
15:26est né vraiment juste après la guerre,
15:29c'est le premier bâtiment pris après la libération de Paris,
15:32et je crois que les gens exclandestins qui se sont emparés de l'immeuble
15:35ont diffusé la première DPH de l'AFP le 20 août 44,
15:39soit quelques jours avant l'entrée de Leclerc dans Paris.
15:41Exactement.
15:42Alors, il y a eu l'AFP,
15:44mais il y a eu aussi la radio,
15:45car vous avez aussi dérivé vers la radio,
15:47en commençant je crois à Europe 1.
15:48À Europe 1.
15:49Alors ça c'était parallèlement à l'AFP,
15:51c'est-à-dire que j'étais journaliste à l'AFP,
15:53et j'étais correspondant d'Europe 1 sur les points chauds où j'allais.
15:56Et à la fin je signais donc Patrick Meunet, AFP pour Europe 1.
16:00Alors, les points chauds justement c'était un désir
16:02d'aller vers des reportages un peu plus délicats et dangereux, Patrick Meunet.
16:06Alors notamment la révolution iranienne,
16:08que j'ai couverte au moment du premier au dernier jour,
16:09je pense avoir été peut-être le seul journaliste
16:11qui l'a couverte du premier jour,
16:13même avant même la révolution elle-même,
16:15jusqu'au dernier jour,
16:16avec tout ce que ça implique,
16:17ça m'a vraiment marqué,
16:19parce que là j'ai vu ce que peut être une révolution
16:22et comment elle peut détourner,
16:23et comment finalement les vainqueurs peuvent se retrouver fusillés au bout de trois semaines.
16:28Mais ce qui est étonnant aussi,
16:29c'est qu'il faut entrer dans ce pays-là,
16:31c'était pas évident pour un journaliste,
16:33et ensuite y rester, et c'est dangereux.
16:35Alors quand je suis arrivé,
16:36entrer c'était pas très compliqué,
16:37parce que c'était encore le régime du chat.
16:39Donc on pouvait rentrer,
16:41et j'y suis allé parce que,
16:44un peu comme Adlib,
16:46c'était pour couvrir les premières manifestations.
16:48Et de jour en jour les manifestations ont pris de l'ampleur,
16:51l'armée tirait sur les manifestants,
16:53et les manifestants, pour se réunir et être plus ou moins à l'abri,
16:57se réunissaient sur les cimetières,
16:59et finalement c'est là que sont apparues les voiles.
17:01Les voiles islamiques, mais pas du tout,
17:03d'un point de vue religieux,
17:04c'était plutôt comme une sorte de symbole,
17:06un symbole pour se réunir.
17:08Et puis finalement ça a pris de l'ampleur,
17:09c'est devenu une vague incroyable,
17:13et moi je suis resté pendant un an là-bas,
17:15et pendant un an avant la chute de la révolution,
17:18à part les manifestants,
17:20dans l'Iran, j'avais vu pratiquement aucune femme voilée.
17:23C'est fou, alors il y a eu aussi les tortures,
17:25vous avez été le premier journaliste à évoquer les tortures.
17:27Alors j'étais le premier à envoyer une dépêche
17:30de témoignages de jeunes qui sortaient des prisons
17:33et qui avaient été torturés.
17:35Et je me souviens que le correspondant de la FP qui était sur place,
17:37moi j'étais envoyé spécial, qui était sur place,
17:39à la fois me félicitait et avait très très peur,
17:41m'a dit mais on va se faire expulser.
17:44Et en fait on est resté et j'ai pu couvrir toute la révolution.
17:46Et il y a eu aussi l'ambassade des Etats-Unis,
17:48où vous avez pu entrer, ce qui n'était pas évident.
17:49Alors l'ambassade des Etats-Unis, effectivement,
17:51c'est avec les otages américains.
17:53C'est-à-dire qu'entrer aussi là-dedans, ce n'est pas évident.
17:56Alors ce n'était pas évident,
17:57mais malheureusement, à cause de ce scoop,
17:59je n'ai pas couvert l'Afghanistan,
18:01parce que Paris m'a dit écoute Patrick,
18:04tu pars tout de suite en Afghanistan,
18:06les Russes viennent d'envahir l'Afghanistan.
18:07Et moi depuis un mois pratiquement,
18:10je négociais avec ceux qui tenaient l'ambassade américaine, les otages,
18:16et j'attendais vraiment de pouvoir rentrer.
18:19Et je leur ai dit écoutez, là vous me faites rentrer,
18:21parce que ce n'est pas possible, sans ça je rate l'Afghanistan.
18:23Et ils m'ont fait rentrer.
18:24– En même temps, vous n'aviez pas les moyens techniques
18:27dont disposent les journalistes d'aujourd'hui.
18:28J'ai reçu Marine Jacquemin et Dorothée Aurélieric,
18:33ils ont des téléphones portables qui les soutiennent jusqu'au dernier moment.
18:36– Alors à l'époque, en Iran on avait une chance quand même,
18:39c'est que le chat d'Iran avait fait installer le téléphone automatique.
18:43Donc je pouvais téléphoner en automatique,
18:45ce qui n'était pas le cas quand j'étais en URSS,
18:47directement à Paris.
18:48Et je me souviens que pour la chute de Téhéran,
18:50j'allais avec les combattants de maison en maison,
18:53et dès qu'un bâtiment public était tombé,
18:55je décrochais le téléphone dans la maison par hasard où j'étais,
18:58et j'appelais Europa et l'AFP.
19:00En revanche, la télévision c'était très différent,
19:04puisque la télévision ne pouvait pas faire de news à l'époque,
19:06il ne faisait que du magazine.
19:08C'est-à-dire que le reportage, les équipes de TF1, d'Antenne 2,
19:12filmaient, envoyaient les pellicules par avion, quand il y avait des avions,
19:16à Paris, qui étaient développés, démontages.
19:18Donc on faisait du magazine à l'époque, en télévision.
19:20C'est passionnant mais dangereux.
19:21Vous aviez conscience du danger, Patrick Meunier ?
19:24C'était très dangereux et j'ai été blessé même.
19:27J'ai été blessé, j'ai été pris dans une fusillade.
19:32Et je me souviens qu'à Téhéran, les égouts étaient à ciel ouvert,
19:35extrêmement profond et assez large.
19:38Et je m'étais dit, si un jour je me retrouve sous une fusillade,
19:41je vais précipiter dans l'égout.
19:42Et là, je me suis précipité dans l'égout.
19:44Je suis resté très très longtemps, c'est assez long.
19:46Et la question que je me posais, c'était,
19:48mais quand on set la balle dans la tête, est-ce que ça fait mal ?
19:52Et finalement, je m'en suis sorti.
19:54Heureusement. Et alors ensuite, la récompense,
19:56ça a été le prix Albert Londres en 1983.
19:59Exactement, le prix Albert Londres pour l'ensemble des reportages
20:01sur l'Union Soviétique, l'URSS.
20:03Ça, c'était une surprise pour vous ?
20:05Alors, c'est une surprise, c'est une reconnaissance.
20:08Vous étiez extrêmement rare à l'AFP.
20:09Je pense qu'avant moi, un seul journaliste avait dû avoir
20:12dans les années 50, le prix Albert Londres.
20:15Et c'est vrai que c'était à la fois une récompense,
20:17mais aussi, c'était quelque chose qui m'obligeait,
20:20comme dirait Macron.
20:21C'est-à-dire que c'est quand même,
20:23le prix Albert Londres, on doit quand même honorer ce prix.
20:27Et comment ?
20:29Et comment ? En restant vraiment sur la conception que j'ai du journaliste.
20:33C'est-à-dire que moi, je n'étais pas un journaliste engagé.
20:35C'est-à-dire que je pense que, voilà, je vois des choses,
20:38j'écris des choses.
20:39L'AFP, ce qui, je trouve la grande force de l'AFP,
20:42c'est que lorsque vous êtes sur un événement,
20:44vous devez donner le point de vue des uns et des autres.
20:47Vous donnez vos sources.
20:48En tout cas, à l'époque, j'espère que c'est comme ça encore aujourd'hui.
20:50Et je crois que c'est une très bonne école et un très grand respect
20:54pour le public qui, après, lui, se fait son point de vue
20:57en fonction de ce que l'on a pu rapporter.
20:59– On vous a surnommé le roule-tabille de l'AFP.
21:01– Alors, le roule-tabille, j'étais à cette époque-là en poste à Rome.
21:07Et le pape Polsis est décédé.
21:10Et le pape Polsis est décédé à Castel Gandolfo,
21:12son palais d'été, qui se situe à 40 kilomètres de Rome.
21:17Et il fallait que je sois à la fois à Castel Gandolfo et au Vatican
21:20parce que le pape allait être transféré au Vatican.
21:23Et comment faire ? C'est impossible.
21:24Et à l'époque, j'avais une Peugeot bleue foncée,
21:27la couleur vêtue au Vatican.
21:29Et j'ai imaginé, avec deux journalistes, avec Vincent Lalu,
21:35qui, à l'époque, je crois, était un quotidien parisien.
21:40Et puis, un journaliste du Point, j'étais donc le chauffeur,
21:48avec une casquette de sa voiture.
21:50Vincent était le secrétaire d'un soi-disant ambassadeur,
21:56qui était en fait un journaliste.
21:57Et on s'était arrêté juste à la sortie du Vatican.
22:00Et lorsque toutes les voitures sont sorties, les cortèges officiels,
22:03on s'est collé au cortège.
22:04– Et voilà.
22:05– Et on a pu se coller au cortège du pape.
22:07Et c'était fabuleux parce qu'on voyait autour du pape,
22:10comme les abeilles, des jeunes en Vespa,
22:13avec les jeunes filles qui étaient en Amazon derrière
22:15et qui accompagnaient le pape donc jusqu'au Vatican.
22:18– Ce sont de beaux souvenirs.
22:20Et il y en a d'autres, mais il y a un autre Média
22:22qu'on va évoquer à travers la date du 11 mars 1992.
22:25A tout de suite sur Sud Radio avec Patrick Menet.
22:28– Sud Radio, les clés d'une vie.
22:30Jacques Pessis.
22:31– Sud Radio, les clés d'une vie.
22:32Mon invité Patrick Menet, nous parlerons tout à l'heure
22:35de vos débuts d'auteur de comédie avec « Appelez-moi Albert ».
22:39On a évoqué votre parcours de journaliste
22:41qui vous a valu le prix Albert Londres.
22:43Mais il y a encore un autre univers où vous avez excellé.
22:46Le 11 mars 1992 débute cette émission à la télévision.
22:50« Mais accueille pas » qui a duré deux ans.
22:57La première, vous ne l'y êtes pas, c'est l'anislase de Hoyo.
22:59Il part parce que le montage ne lui convient pas
23:01et vous arrivez comme présentateur,
23:03mais vraiment par hasard parce que ce n'était pas votre métier.
23:05– Je n'arrive pas par hasard parce que je travaille
23:06sur cette émission comme rédacteur en chef, je pense.
23:09Et puis l'anislase a quitté l'émission.
23:12Et il a dû quitter je crois un lundi,
23:14il fallait être à l'antenne le mercredi.
23:16Et TF1 m'a dit « ça t'as déjà fait de la télé ? »
23:20« Oui, mais jamais en direct » et on m'a mis à l'antenne.
23:23– Vous étiez quand même un grand reporter après Albert Londres.
23:26Vous vous retrouvez à TF1, comment ça s'est fait ?
23:28– Je me retrouve à TF1 parce qu'entre-temps j'ai créé AFP TV.
23:33C'est-à-dire le service télévision de l'AFP.
23:35Et à l'époque ça a été très très mal vu.
23:37Beaucoup de personnes disaient « mais la télé c'est une danseuse ».
23:40Et il y a eu une grève même à un moment donné
23:41où le fait d'avoir créé AFP TV a été mis en cause.
23:45Et moi je me suis dit mais quand même, ça c'était en 1986,
23:49je me suis dit mais on ne peut pas ignorer la télévision.
23:53– Mais à l'époque il n'y avait pas de reporter JRI, il n'y avait rien ?
23:56– Il n'y avait rien, il n'y avait aucun reportage, non aucun.
23:58Et j'ai eu une proposition de TF1,
24:02et donc je suis parti à TF1 parce que je me suis dit
24:04je pense que la télévision c'est quand même l'avenir.
24:07Et AFP TV a été créé et a fait sa vie sans moi très bien
24:10parce qu'aujourd'hui je crois que c'est un département
24:11très très important de l'agence France Presse.
24:13Et il y a maintenant des journalistes de télé, des équipes de télé
24:17dans pratiquement tous les bureaux de l'AFP dans le monde.
24:19– Mais encore une fois on ne l'imaginait pas
24:21parce que personne ne pensait à l'époque
24:22que la télévision allait prendre autant d'importance
24:24et les moyens techniques étaient différents.
24:26Moi je me souviens de reportages que je faisais pour TF1,
24:28on partait avec 4 personnes, des cars et un montage qui n'en finissait pas.
24:32– Exactement, et c'est pour ça, malgré tout, si vous voulez,
24:36moi j'ai pris conscience en Iran, sur le terrain en Iran,
24:39en voyant effectivement qu'il se passait des choses incroyables
24:41et l'information se faisait par la presse écrite et par la radio
24:45mais pas par la télévision.
24:46Mais ça a commencé à évoluer très vite,
24:47c'était le début de CNN aux Etats-Unis.
24:50– Alors vous débutez donc comme présentateur de Miraculpa,
24:53c'est encore un nouveau métier pour vous, c'est un nouveau danger Patrick Monet.
24:56– Alors c'est un nouveau danger, c'était très dangereux,
24:58là on craignait pas de recevoir une balle dans la tête
25:02mais il y avait des snipers qui étaient comme des journalistes
25:05qui n'aimaient pas du tout TF1,
25:07qui n'aimaient pas du tout ce qu'ils appelaient les réétichaux
25:09et qui n'aimaient pas du tout qu'on parlait de sujets
25:12qui aujourd'hui sont devenus des sujets respectables
25:15et que j'ai traités à l'époque, notamment l'inceste,
25:18j'ai fait une émission sur l'inceste,
25:19qui en deuxième partie de soirée avait fait 7,5 millions de téléspectateurs,
25:22ce qui est énorme, et qui avait été critiqué
25:25parce qu'on trouvait que parler de l'inceste c'était du voyeurisme.
25:28– J'ai vu un article du Monde mais vous descendant en flèche Patrick Monet.
25:30– Ah bah tous les jours oui.
25:32– Mais c'était presque une ambition, c'est traumatisant à la fin non ?
25:35– Non ce n'était pas traumatisant parce que moi je considérais
25:37que je faisais ce métier avec connetté et en défendant de bonnes causes,
25:41j'ai présenté après avec Jacques Pradel
25:44une émission qui s'appelait Témoin numéro 1,
25:46le principe de cette émission c'était des appels à témoins
25:49pour aider la justice à résoudre des affaires non élucidées,
25:53on se faisait descendre tous les jours,
25:55on nous a traité de tous les noms, c'était hallucinant, de la délation etc.
26:00À l'époque il ne fallait pas parler de l'ADN,
26:02il ne fallait pas parler des caméras,
26:03il ne fallait pas parler de la police scientifique,
26:05et on a résolu beaucoup d'affaires criminelles,
26:10on a fait arrêter des criminels en série grâce à cette émission,
26:13on a innocenté des personnes aussi, des personnes qui avaient été accusées à tort
26:17et qui grâce à des témoignages qui sont sortis dans cette émission ont été acquittés.
26:22L'idée vous en êtes venue je crois avec une émission américaine ?
26:25Anglaise, une émission anglaise qui s'appelle Crime Watch.
26:27J'étais en Angleterre à Londres avec mon épouse,
26:29on regarde la télévision, on voit Crime Watch,
26:31une émission qui existait depuis 25 ans sur la BBC,
26:36qui est la référence absolue en matière d'éthique,
26:40une émission civique,
26:42et donc j'ai proposé à TF1 d'importer cette émission en France
26:46et elle se faisait dans les règles les plus rigoureuses,
26:50c'est-à-dire que jamais on donnait à l'antenne le nom d'un suspect.
26:55Les fiches étaient transmises, on les traitait pas,
26:57on les transmettait aux juges d'instruction,
26:59on travaille sur réquisition.
27:01Aujourd'hui, dès qu'il y a une accusation,
27:03on balance le nom à la télé et ça fait le tour du monde,
27:07enfin le tour de France,
27:08et la personne qui est suspectée est forcément condamnée à vie.
27:14C'est ce qui se passe régulièrement aujourd'hui,
27:16exceptant si c'est non dans l'actualité.
27:17Il faut voir que l'inceste, il y avait déjà eu un incident
27:20quand c'était, je crois, Michel Pollak qui avait fait son émission Post Scriptum,
27:24lors de la sortie du film de Louis Malle, Le souffle au cœur,
27:27il avait fait un sujet sur l'inceste, il s'est fait virer.
27:30Oui, exactement.
27:31Et aujourd'hui, le poétiquement correct aujourd'hui
27:33est ce qu'on nous a reproché à l'époque.
27:36Alors, le reality show, c'était tout à fait nouveau,
27:38Dechavanne avait commencé avec Ciel Montmardi,
27:41mais le reality show avec vous, Pascal Brugneau et quelques autres
27:44ont enfoncé le clou, Patrick Meunet.
27:45Oui, je ne mets pas trop le mot de reality show,
27:48parce que si vous voulez faire une émission comme Crime Watch en France,
27:52c'est-à-dire où en plateau, vous avez des témoins,
27:56vous avez des victimes, vous avez des policiers,
27:59vous avez des juges, vous avez des avocats.
28:01Ce n'est pas du reality show, c'est vraiment de l'information,
28:04de la recherche d'information.
28:05Alors, en même temps, vous avez travaillé avec Jean-Pierre Foucault,
28:09qui faisait une autre émission que Sacré soirée.
28:11Alors, je n'ai pas travaillé sur Sacré soirée,
28:13mais sur une émission qui s'appelait Enquête de vérité.
28:15Une émission qui s'appelait Fait d'hiver,
28:17et qui est l'émission que j'avais proposée à TF1.
28:21Aujourd'hui, il y a beaucoup d'émissions qui reprennent ce principe.
28:28Et TF1 m'avait dit, Etienne Bouchotte m'a dit,
28:30Patrick, ton émission, c'est formidable.
28:32Mon inconcept à TF1, émission de plateau,
28:35où je vais faire du documentaire,
28:37est présentée par une de nos stars, Jean-Pierre Foucault.
28:40Et j'ai dit, pourquoi pas, Banco.
28:42Et ça a choqué beaucoup le monde.
28:44Je me souviens, j'avais une amie qui était membre du CSA.
28:47Et à l'époque, elle me disait, tu sais, Patrick,
28:49tu termineras un jour comme patron de France 2.
28:51Et elle m'a appelé, elle m'a dit, Patrick, tu es fou,
28:53tu fous ta carrière en l'air, travaille avec Jean-Pierre Foucault.
28:56Et j'étais très heureux de travailler avec Jean-Pierre Foucault,
28:57parce que c'est un grand professionnel avec qui je suis en contact.
29:01Et qui mène une carrière extraordinaire.
29:05Il a débuté, je ne sais pas si vous le savez,
29:07après un concours à Radio Montréal en 66.
29:09Il a été engagé, mais au bout de six mois,
29:11il a été viré parce qu'il faisait des farces avec son copain,
29:14Patrick Topalov.
29:15Donc, il est allé à l'Europe 1, où il a réussi.
29:17Il est revenu à Radio Monte-Carlo, où il est devenu une star.
29:20Jean-Pierre Foucault, à se souvenir avec lui, incroyable.
29:24J'étais à Nice ce matin.
29:25Donc, j'en ai parlé tout à l'heure.
29:27Petit journaliste qui débarque.
29:29Et on m'envoie donc traiter une soirée à Villefranche-sur-Mer,
29:34qui était animée par Jean-Pierre Foucault,
29:36qui était la star de Radio RMC, Radio Monte-Carlo.
29:41La star, c'était la star Jean-Pierre Foucault.
29:43Et j'arrive en retard.
29:45Et tout était bloqué.
29:46Donc, il y a des milliers de personnes.
29:47Je ne pouvais pas accéder à Jean-Pierre Foucault.
29:48Et je dis aux personnes qui bloquent,
29:51mais je viens voir Jean-Pierre Foucault.
29:53Et il y a une dame à côté qui comprend que je suis Jean-Pierre Foucault.
29:56Et elle me traite jusque à côté du préfet pour dire,
30:00voilà Jean-Pierre Foucault.
30:01Et il me dit, mais non, mais Jean-Pierre Foucault, il est là.
30:04Et c'est comme ça que j'ai connu Jean-Pierre Foucault.
30:06Et vous avez un point commun, je crois, de vos passions.
30:08Il adore les automobiles et vous aimez les Bugatti.
30:11Alors moi, j'aime les Bugatti, j'ai une voiture ancienne.
30:13Et ça remonte, j'avais 8 ans.
30:16J'avais 8 ans et j'allais dans un village chez mes grands-parents,
30:21avec les copains du village, avec mes frères, avec mes cousins.
30:24On rentrait dans le château qui était abandonné.
30:26Et dans une grange, il y avait des vieilles voitures,
30:28des voitures de 1903, 1904, abandonnées.
30:31Et ça a été un choc pour moi.
30:33Et c'est là qu'il y a mon amour des voitures, de l'automobile.
30:36Il y a un cercle Bugatti, je crois, que vous présidez ou que vous avez présidé.
30:39Voilà, il y a le club Bugatti France que j'ai présidé.
30:42J'étais président pendant 8 ans de ce club,
30:45avec des personnes très, très différentes.
30:47Et où on ne parle que mécanique et où, finalement, le PDG,
30:53eh bien, c'est le copain du mécanicien ou du prof.
30:56Et c'est extraordinaire.
30:57Et les salons des voitures anciennes ont débuté.
30:59Moi, j'avais fait un des premiers reportages sur l'électromobile.
31:02Personne ne croyait aux voitures anciennes.
31:04Et aujourd'hui, on les répare et elles ont encore beaucoup de succès.
31:08Exactement. Et la réflexion d'un vieux bugattiste
31:13qui cherchait des Bugatti dans les années 50 et elles partaient à la casse.
31:18Une phrase qui m'est restée, il dit
31:19« Je ne comprends pas qu'un objet qui vaut le prix de la ferraille en époque
31:23vaut des millions quelques années plus tard. »
31:24Et d'ailleurs, le circuit du Mans porte le nom de Bugatti
31:27parce que c'était un passionné de Bugatti qui était là.
31:30C'était Ettore Bugatti, le constructeur de Bugatti,
31:33qui est un nom mythique dans l'histoire de l'automobile.
31:36Et en même temps, ce circuit est un circuit mythique et Bugatti y est associé.
31:41Alors, il y a eu d'autres émissions parce que vous avez ensuite créé votre structure,
31:45Patrick Meunet, et il y a des émissions aujourd'hui mythiques dont vous êtes à l'origine.
31:50Il y a Super Danny, il y en a beaucoup d'autres.
31:53Il y a beaucoup d'autres émissions.
31:54J'ai créé ma société de production à l'époque où on parlait beaucoup des animateurs producteurs.
31:59Moi, j'étais salarié de TF1 et c'est l'époque où il y avait des gens comme Delarue,
32:03des gens comme Courbet, qui créaient leur boîte de production.
32:08Et je faisais le même métier qu'eux.
32:09Et j'ai dû voir l'achat des patrons, Patrick Lelay et Etienne Moujotte.
32:12Et j'aurais dit, mais finalement, j'ai envie de créer ma société de production.
32:15Ils m'ont dit, Patrick, aucun problème.
32:17Simplement, tu prends le risque si l'émission ne marche pas.
32:21OK, je plonge.
32:22Donc, j'ai créé cette société qui a marché très, très bien,
32:24puisque au bout de six mois, un an, j'avais trois émissions en prime time.
32:28Une sur TF1, une sur France 2, une sur M6.
32:32Et très vite, j'ai eu des propositions de grands groupes
32:37comme Lagardère, comme Andemol et Fremantle.
32:42Et j'ai vendu ma société de production à Fremantle.
32:44Et Fremantle, j'ai inventé beaucoup d'émissions, effectivement,
32:47beaucoup d'émissions, beaucoup de concepts.
32:48Mais à partir du moment où j'ai vendu à Fremantle,
32:50j'ai eu aussi accès à des formats qui appartenaient à Fremantle,
32:53qui était un groupe qui dépend de RTL au départ.
32:56Et comme Supernanny, Cyril Lignac,
32:59effectivement, j'ai été à l'origine de sa carrière,
33:02je pense, entre autres, avec d'autres personnes.
33:04Et ça m'a donné beaucoup, beaucoup de formats qui sont devenus mythiques
33:08et dont certains sont encore à l'antenne.
33:10Les premières émissions de cuisine, justement,
33:12à l'époque, personne n'en voulait.
33:13Il y avait eu Raymond Olivert, Michel Olivert.
33:16Mais il n'y avait pas autre chose.
33:17Oui, il m'a été, effectivement, l'émission de cuisine.
33:20Pendant des années, proposer ça à des chaînes, c'était ringard.
33:25Et puis, d'un coup, ça a démarré avec Lignac, grâce à Cyril Lignac.
33:29Un concept d'émission venue d'Angleterre,
33:31où Cyril Lignac crée un restaurant avec des jeunes.
33:34On disait à des jeunes, mais est-ce que vous préférez être dans les rues,
33:37faire des imbéciles, ne rien faire de votre vie ?
33:40Au contraire, on vous paye des cours dans la meilleure école de formation de cuisinier
33:45et créer ensemble un restaurant.
33:47Et c'est parti comme ça.
33:48Et les temps ont changé, puisque à la radio, dans les années 50,
33:51il y a un seul jeu qui a été acheté par Louis Merlin pour Radio Luxembourg aux Américains,
33:56qui était « Kit ou Double ».
33:57Et en échange, le seul jeu français vendu à l'époque aux Américains,
34:02c'était 100 francs par seconde,
34:04qui consistait à répondre à des questions tant qu'il n'y avait pas un arrêt.
34:08Et on gagnait 100 francs par seconde.
34:10Et les Américains en ont fait un grand jeu, et c'est inspiré de la France.
34:14Et là, je voudrais rendre hommage à la télévision, quand même.
34:15Parce qu'en fait, à l'époque, à Fremantle, il y avait une personne que j'ai beaucoup l'estime,
34:25qui s'appelait Bibiane Godefroy, et qui, elle, croyait beaucoup à la cuisine.
34:29Et elle disait, mais finalement, les jeunes générations ont perdu la transmission de la cuisine.
34:34Les filles apprenaient la cuisine de leurs parents.
34:36Et aujourd'hui, donc ça, c'était il y a 20 ans,
34:38et aujourd'hui, la cuisine, effectivement, est devenue, à la télévision,
34:41des émissions qui marchent très, très bien.
34:43Et les Français se sont remis à cuisiner.
34:45Et je pense que c'est grâce à la cuisine.
34:46Et ce phénomène, également, on peut le constater pour la chanson.
34:50Je pense qu'à une époque, les Français ne savaient plus chanter.
34:53On parlait beaucoup des Canadiens, qui chantaient très, très bien.
34:56Et les Français, aujourd'hui, moi, je suis sidéré par la qualité des chanteurs,
35:01des gamins, des jeunes, des adolescents, dans ces émissions.
35:04Et je crois que c'est la télévision qui a redonné ce goût et l'exigence, également,
35:09de ce que doit être un cuisinier ou un chanteur.
35:11– Est-ce que vous êtes conscient d'avoir vécu une époque privilégiée
35:13de la télévision, Patrick Monnet ?
35:16– Ah, je ne suis pas nostalgique, parce qu'il y a des très belles choses aujourd'hui.
35:20Mais c'est vrai qu'avant, c'était beaucoup plus simple.
35:23D'abord, il y a beaucoup plus de moyens, paradoxalement,
35:24puisque lorsqu'il y a moins de chaînes, l'argent, on peut le mettre vraiment à l'antenne.
35:28Lorsqu'il y a plein de chaînes, il faut le partager entre tout le monde.
35:31Et, si vous voulez, c'était extrêmement direct.
35:33C'est-à-dire que lorsque j'avais une idée d'émission,
35:35j'allais voir Étienne Mougeot ou j'allais voir Nicolas Taverneau,
35:39ou j'allais voir Michel Cotard, à l'époque, qui dirigeait France 2.
35:42Et puis, en cinq minutes, je leur expliquais le concept.
35:44En cinq minutes, ils me disaient Banco.
35:47Et puis, après, ils me faisaient confiance.
35:48On avait le budget et l'émission, elle était à l'antenne deux mois plus tard.
35:52Et ça marchait.
35:53– Et ça marchait.
35:54Et là, vous avez totalement changé d'univers.
35:56Et on va l'évoquer à travers la date du 6 février 2025.
36:00À tout de suite sur Sud Radio avec Patrick Monnet.
36:03– Sud Radio, les clés d'une vie, Jacques Pessis.
36:06– Sud Radio, les clés d'une vie, mon invité Patrick Monnet.
36:09On a évoqué votre parcours de journaliste, le Prix Albert-Londres,
36:12votre parcours de télévision avec ces émissions que vous avez inventées
36:16et qui sont toujours à l'antenne aujourd'hui.
36:18Et puis, le 6 février 2025, a débuté à la Seine-Parisienne,
36:22un théâtre près des Grands Boulevards, en attendant Albert, une comédie.
36:29Et là, on vous attendait dans tous les domaines,
36:32mais pas dans la comédie, Patrick Monnet.
36:33– Alors moi, je ne m'attendais pas à la comédie ici,
36:35parce que finalement, je suis assez passant rire
36:38sous des aspects un peu austères parfois, mais dans le théâtre, non.
36:42Et en fait, c'est venu tout à fait par hasard.
36:46J'étais avec des copains que je retrouve après 50 ans, des copains de lycée,
36:50et qui me parlaient du destin des uns et des autres.
36:52Et je me suis dit, mais finalement, c'est vrai qu'on ne connaît pas le destin des gens.
36:55Et la situation où on ne connaît plus du tout le destin des gens,
36:57c'est quand on est mort.
36:59Lorsqu'on est mort, on ne sait pas ce que va devenir notre femme ou notre mari,
37:02nos enfants, nos collègues, ceux qu'on a connus, et même la société.
37:05Et je me suis dit, je vais écrire quelque chose qui serait une comédie,
37:08parce qu'il faut, je crois qu'il faut rire dans la vie aussi,
37:11une comédie qui va partir d'une femme qui a 65 ans, qui est morte.
37:17Elle est dans le caveau de famille, et elle attend son mari.
37:20Mais Albert, qu'est-ce qu'il fait, Albert ? Qu'est-ce qu'il fout ?
37:22Qu'est-ce qu'il fout ? Et Albert se fait attendre.
37:24– Ça, encore écrire une comédie, si vous ne l'aviez jamais fait,
37:27c'est autre chose, c'est une envie de toujours.
37:31– Oui, j'ai écrit un livre qui s'appelait « Madame Bovary sort ses griffes »,
37:36qui était une comédie en livre qui était écrite.
37:39Et ça s'est imposé, parce qu'écrire, je ne sais pas,
37:43quelque chose qui passe sous terre dans un cimetière,
37:44ce n'est pas une comédie, c'est quand même un peu compliqué quand même.
37:48– Donc vous allez faire un spectacle, et ce spectacle est dans la tradition
37:51du vaudeville avec des rebondissements.
37:54– Exactement, c'est-à-dire que cette femme attend son mari,
37:57elle l'attend pendant 5 ans, et lorsqu'il arrive,
38:00elle va découvrir, en fait, elle est très heureuse,
38:02enfin tu es là, Albert, comme autrefois, c'est génial,
38:06et puis elle va découvrir que tout a changé.
38:08Elle dit des mots qu'on ne peut plus dire,
38:10elle fait des choses qu'on n'a plus le droit de dire.
38:12Aujourd'hui, il y a plein de choses qu'on n'a pas le droit de dire,
38:14il y a des plaisanteries qu'on ne peut plus faire.
38:17Et puis après, elle va s'apercevoir qu'il y a quelqu'un qui va arriver,
38:21une autre personne, qui c'est celle-là ?
38:23C'est elle, c'est qui ? C'est la petite chatte,
38:26c'est l'ancienne maîtresse d'Albert, de son mari,
38:29et elle va découvrir qu'ils se sont mariés après son décès.
38:31Alors là, il y a tout un affrontement,
38:34parce que qui c'est la femme ?
38:36Est-ce que c'est la première ou est-ce que c'est la dernière ?
38:39Alors en plus, vous leur donnez une vie,
38:40c'est-à-dire que la première femme qui est dans le cimetière depuis 5 ans,
38:44elle était fleuriste.
38:45Elle était fleuriste.
38:46Et son mari, en revanche, c'était le Mozart, Albert, le Mozart de la pub.
38:49Le Mozart de la pub, donc deux milieux totalement différents.
38:53Lui, c'est un 68ards, c'est-à-dire qui est la génération du mai 68,
38:56et elle, elle représente un peu le bon sens,
38:58elle est également du mai 68,
39:00mais c'est le bon sens populaire.
39:02Et pourquoi la pub ? Pourquoi le Mozart de la pub ?
39:03Pourquoi cet univers ?
39:04Parce que la pub, c'est un univers qui est quand même très typique,
39:08très ciblé, très parisien.
39:10Et puis lui, en fait, c'est un contestataire en 68.
39:13Il est devenu un publicitaire.
39:15Donc il a évolué.
39:16Donc il est à la fois, si vous voulez,
39:17il est resté sur l'idée de 68,
39:19qui était un mouvement incroyable de libération.
39:21Libération sexuelle, libération de la femme, libération de la société.
39:24Et puis il est resté là-dessus,
39:25mais aujourd'hui, ça va trop vite pour lui.
39:27Aujourd'hui, il ne comprend plus rien.
39:29Déjà, ça allait vite dans la pub à cette époque-là,
39:32et c'était une insouciance.
39:33Moi, je me souviens de gens que je connaissais
39:34qui travaillaient dans une grosse agence de publicité.
39:37Ils arrivaient le matin, ils mettaient un dossier sur la table,
39:40ils accrochaient leur manteau sur un porte-manteau,
39:43et ils allaient au cinéma toute la journée.
39:44Personne ne leur demandait rien.
39:45Ah, et ça a changé.
39:46Ça a changé, ça a beaucoup changé de ce côté-là.
39:48Et donc, il y a aussi cette femme qui va arriver,
39:52et cette femme a eu un accident de trottinette.
39:53Et ça, c'est aussi quelque chose de très actuel.
39:56Voilà, donc elle était sur une trottinette.
39:58Ils étaient trois sur la trottinette.
39:59Oui, on en voit beaucoup dans les rues.
40:00Voilà, et elle a grillé le feu vert, ce qui est normal,
40:02sauf qu'il y a un connard qui a grillé le feu.
40:06Donc, il est passé au vert, lui.
40:08Donc, elle a remis sa trottinette,
40:09et les trois se sont retrouvés à l'hôpital.
40:11Donc, cette femme, Janine, Virginie,
40:15donc l'ancienne maîtresse, la nouvelle femme,
40:18et deux autres personnes,
40:19qui vont arriver également successivement,
40:21donc, au fond du trou, dans ce caveau de famille.
40:24Il faudra que la trottinette telle qu'on la connaît aujourd'hui
40:26n'ait rien à voir avec la patinette pour les enfants,
40:29qui était en bois ou avec une armature en métal,
40:32et qui a été un jouet qui s'est vendu dans les années 50,
40:36et qui avait déjà une petite pédale,
40:38mais c'était minuscule.
40:38Ça n'a rien à voir, effectivement.
40:40Alors, c'est aussi quelque chose,
40:41ça, c'est le journaliste qui parle par rapport à notre société.
40:44Voilà, en fait, effectivement,
40:45c'est une pièce sur la société et sur les générations,
40:47le choc des générations.
40:48Il y a Janine, donc Janine et Albert,
40:51ils sont de la génération 68A, les baby-boomers.
40:55Virginie, la jeune épouse, donc,
40:57elle, génération, elle a une quarantaine d'années,
41:02et puis vont arriver après, donc, le fils,
41:05le fils de ce couple,
41:06on en parlera peut-être après,
41:07et puis, en dernier, va arriver Kevin,
41:09qui est un jeune étudiant,
41:10un jeune étudiant noir,
41:12et qui a épousé, finalement, la deuxième épouse.
41:15Vous voyez ?
41:15Donc, ils ont...
41:18Virginie a 25 ans de moins qu'Albert, qu'elle a épousée,
41:21et quand Albert est mort,
41:22Virginie a épousé un garçon qui était son élève,
41:24qui était prof, qui a 25 ans de moins.
41:26Tiens, ça rappelle quelque chose.
41:28Voilà, exactement.
41:29Donc, il y a un choc des générations absolument incroyable.
41:31C'est ce qu'on appelle une famille très recomposée.
41:33Très recomposée et même décomposée, un peu, quand même.
41:36En même temps, c'est aussi un phénomène nouveau,
41:38et là, encore, c'est le journaliste qui parle,
41:40les familles recomposées,
41:42c'est un phénomène assez récent, aussi.
41:44Complètement, mais Albert, malgré tout,
41:47il est complètement perdu.
41:48À mon oeil, il dit, mais ça allait trop loin,
41:50c'est-à-dire que, finalement,
41:51nous, on était en liberté totale, etc.,
41:53ça allait trop loin.
41:54Aujourd'hui, le fils de ma première femme
41:56est devenu la fille de ma deuxième femme,
41:58qui était ma compagne,
42:00mais qui aurait pu être ma fille,
42:02et qui, après, a épousé Kévin,
42:04qui aurait pu être son fils,
42:05et qui est devenu le frère de mon fils,
42:11qui est devenu le compagnon.
42:12Enfin, c'est un micmac incroyable,
42:14et en fait, c'est ce qui se passe aujourd'hui,
42:16c'est la réalité, et voilà.
42:18C'est la base d'un beau-de-ville, effectivement.
42:20Moi, je me souviens d'Hervé Bazin,
42:22qui était devenu papa à 80 ans,
42:23en naissance.
42:24Je l'ai connu avec son fils.
42:25Et son fils est devenu grand-oncle à sa naissance.
42:27C'est assez étonnant.
42:30Alors, il y a effectivement un cinquième personnage,
42:31et là, vous jouez la carte ultra-moderne d'aujourd'hui.
42:35Alors, le personnage de Jacqueline, je pense.
42:38Effectivement, il y a une jeune fille,
42:40donc, premier accident de trottinette,
42:43arrive Virginie,
42:44l'ancienne maîtresse devenue l'épouse,
42:47et arrive ensuite une deuxième victime
42:50de l'accident de trottinette,
42:51c'est Jacqueline.
42:53Et Janine, donc la mère,
42:55elle ne le connaît pas,
42:55mais c'est qui celle-là ?
42:57C'est Jacqueline, mais tu la reconnais pas ?
42:59Regarde un peu, il y a un petit R2.
43:02Et en fait, elle va découvrir que c'est son fils,
43:03Jacques, qui est devenu Jacqueline.
43:05Alors là, ça se prête à des échanges
43:08absolument incroyables et truculents,
43:10parce qu'elle ne comprend pas.
43:11Je veux dire, mais pourquoi tu n'étais pas resté un garçon ?
43:14Mais tu étais très bien un garçon.
43:16Ils t'ont coupé le zizi, qu'est-ce qu'on a fait ?
43:20Et puis après, elle va finir par comprendre
43:22cette démarche, pourquoi Jacques est devenu Jacqueline.
43:26Et pour jouer ce rôle,
43:27vous avez choisi Miss Trance 2020.
43:30Je ne sais pas, une Miss Trance, c'est une...
43:32Miss Trance.
43:33Oui, Miss Trance.
43:34Et je crois que ça, c'est très important,
43:36c'est-à-dire qu'il ne fallait pas tomber
43:38dans une caricature,
43:40dans un comédien qui aurait interprété une comédienne.
43:44Et Aïla, donc Chanel, qui interprète le rôle,
43:47est effectivement une jeune femme
43:49qui a subi, qui est une transgenre,
43:54et qui l'assume, et qui est formidable dans le rôle,
43:57et qui est très émouvante,
43:58parce qu'elle raconte un peu son histoire.
44:00En même temps, jouer tous ces personnages,
44:02c'est une nouveauté.
44:03Encore une fois, personne ne l'a fait au théâtre,
44:05ce genre de choses.
44:06C'est vrai, c'est vrai, c'est vrai que c'est...
44:08Et je suis très attaché, en fait,
44:10au fait que toutes les générations
44:13arrivent avec leur point de vue,
44:14avec leurs idées,
44:16le choc de ces générations-là.
44:18Et derrière cette comédie,
44:19il y a quand même le sens,
44:20le sens sur notre société, l'évolution.
44:22Dire mai 68, est-ce que mai 68,
44:24qu'est-ce que ça a produit ?
44:25Aujourd'hui, est-ce qu'on est dans une dérive totale ?
44:28Est-ce qu'on va dans le mur ?
44:29Est-ce qu'au contraire, c'est une évolution normale ?
44:32C'est ça qui est intéressant.
44:33La comédie permet de raconter, de dire tout ça,
44:36de dire des choses.
44:37Et je crois qu'on dit dans cette comédie
44:39des choses qu'on n'ose plus dire.
44:40Effectivement, quand on les dit,
44:43on prend les réseaux sociaux sur la figure.
44:45Exactement, on prend les réseaux sociaux,
44:47mais aussi, on dit des choses
44:50dans lesquelles beaucoup de gens se reconnaissent,
44:52beaucoup de monde se reconnaît.
44:53Exactement.
44:54Vous êtes tellement habitué à recevoir
44:55les réseaux sociaux depuis des années
44:57que ce n'est pas un problème pour vous.
44:58Alors, si cette comédie aussi est née,
45:00c'est qu'il y a eu un producteur,
45:01et cette production, on va l'évoquer
45:03à travers une chanson.
45:11Vous connaissez l'origine de cette chanson, Patrick Money ?
45:13Non.
45:14En fait, un jour, à ses débuts,
45:16Charles Aznavour fait un concert en Belgique
45:18où il y a un vieux monsieur comme ça,
45:20qui est là depuis 30 ans,
45:21et qui est exactement le personnage
45:23qu'il va décrire dans cette chanson.
45:26Et un jour, sortant de scène,
45:27il enlève son veston, il fait un triomphe,
45:29et c'est comme ça qu'ensuite,
45:30il a terminé toujours ses premières parties
45:32en enlevant son veston
45:33et en sortant de scène de dos
45:35avec cette chanson.
45:36Formidable.
45:37Alors, je me voyais déjà,
45:39Alors, je me voyais déjà aussi,
45:40c'est un producteur ami,
45:43parce que finalement,
45:44il a fallu créer cette comédie
45:46une fois qu'elle était écrite.
45:47Oui, je me voyais déjà.
45:48En plus, le nom de sa société,
45:50de Théâtre Vivant,
45:51s'appelle « Je me voyais déjà ».
45:53Et c'est un jeune qui n'a pas 40 ans,
45:55qui est à côté d'une société
45:57dans la communication,
45:59qui réalise beaucoup de publicités,
46:01et qui est passionné de Théâtre Vivant,
46:04et qui a adoré la pièce.
46:05Il m'a dit « J'adore cette pièce ».
46:07Ça m'a rassuré,
46:08parce que c'est un jeune,
46:08donc c'est une pièce
46:09qui peut s'adresser aussi à des jeunes.
46:13Et il a sauté le pas,
46:15et il a appris ce métier.
46:16Au départ, on avait envisagé
46:18qu'il soit producteur simplement financier,
46:20et on avait trouvé un producteur exécutif.
46:23Et après, il s'est dit
46:23« Moi, je me sens de la produire ».
46:25Et il s'en sort extrêmement bien,
46:26et les comédiens sont totalement chargés,
46:29charmés par ce garçon
46:30qui s'appelle Charles Nenquin,
46:31et je crois qu'il ira très très loin.
46:32Alors, il se trouve aussi
46:33que pour vous,
46:34c'est un nouvel univers
46:35découvrir des comédiens,
46:36travailler avec Marie-Vincent,
46:38Pierre Denis, Jeanne Savary ou Ella Chanel,
46:41c'est tout à fait nouveau pour vous ?
46:42Alors, c'est nouveau pour moi,
46:44mais la personne qui est en contact
46:46avec les comédiens,
46:47qui les a notamment trouvés,
46:48c'est le metteur en scène,
46:50Olivier Massé,
46:51qui est un metteur en scène
46:53qui a une très grande expérience,
46:54qui a beaucoup de talent.
46:55Et c'est lui, en fait,
46:56qui m'a proposé,
46:57qui a proposé,
46:59en fonction des rôles,
47:00des comédiens qui sont des personnes
47:02qui vont incarner ce rôle
47:04d'une très belle façon.
47:05Dans ce spectacle,
47:06il y a beaucoup de rire,
47:07mais le rire, finalement,
47:08ça permet de dominer ses peurs
47:10dans notre société d'aujourd'hui ?
47:13Le rire, ça permet surtout
47:15de dire certaines choses.
47:17Je pense qu'il y a des répliques,
47:18il y a des dialogues.
47:21Si on était ici,
47:23dans cette émission,
47:24sans le contexte,
47:27on se tuerait,
47:28on s'écharperait,
47:29parce qu'aujourd'hui,
47:29c'est quand même très très violent,
47:30les débats.
47:31Et là, on est dans une comédie,
47:32les gens viennent au théâtre,
47:33ils savent que c'est une comédie
47:34et c'est une façon,
47:35ça a toujours été ça,
47:36Molière, depuis toujours,
47:38la comédie,
47:38c'est une façon de dire
47:40la vérité qu'on ne peut plus dire
47:42ou qu'on n'ose pas dire.
47:43Il y a un journaliste
47:43qui est devenu un grand auteur de théâtre,
47:44c'est Francis Weber,
47:45qui a débuté à RTL,
47:47et à l'époque,
47:47il a réussi une performance,
47:48il l'a fait à la radio,
47:51il a fait le striptease
47:52d'une fille à Cannes
47:53pendant le festival,
47:55il l'a fait à la radio en l'écrivant.
47:57C'était assez drôle.
47:58Alors, est-ce que pour vous,
47:59c'est une nouvelle aventure,
48:00une nouvelle voie, Patrick Monnet ?
48:01Alors, d'abord,
48:02c'est une nouvelle aventure,
48:03parce que la télévision,
48:04c'est compliqué.
48:05Le journalisme,
48:06c'est parfois risqué,
48:06la télévision, c'est compliqué.
48:08Là, c'est encore autre chose.
48:10Vous allez comprendre en deux minutes.
48:12À l'origine,
48:15la comédienne qui devait faire Janine,
48:18c'était donc la comédienne
48:22qui devait incarner le rôle principal,
48:24c'était Marie-Vincent.
48:25Et Marie-Vincent
48:27a eu un petit problème de santé
48:29pendant les répétitions,
48:30et on a dû la remplacer.
48:32On a reculé de 15 jours
48:34le début des répétitions,
48:36et on a dû trouver
48:37une autre comédienne pour incarner.
48:41Le spectacle vivant,
48:42c'est vraiment un spectacle vivant
48:44avec, véritablement,
48:45ce genre de choses
48:45qu'il faut gérer.
48:46Et là, même l'auteur
48:47est là aux répétitions,
48:48on peut changer des phrases,
48:49on peut changer des formules ?
48:50Alors, je ne suis pas là
48:51à toutes répétitions,
48:52parce que je pense
48:52que c'est quelque chose
48:53qui pourrait perturber
48:55peut-être les comédiens,
48:56mais à beaucoup de répétitions.
48:57Et c'est un vrai dialogue constant
49:00avec le metteur en scène.
49:02Et de toute façon, de nous-mêmes,
49:03on s'en compte des phrases
49:05qui passent, qui ne passent pas,
49:06des longueurs.
49:07C'est intéressant.
49:09La comédie n'est pas écrite
49:11lorsque l'on la remet
49:12entre les mains du metteur en scène.
49:13Elle évolue.
49:13Oui, mais vous la faites évoluer
49:15aussi à votre façon.
49:16Exactement.
49:17Alors, les horaires sont
49:17très particuliers.
49:18C'est-à-dire, jusqu'au 1er mai,
49:19c'est à 19h30,
49:21à 21h15 le vendredi,
49:23à 16h30 le samedi-dimanche.
49:24Il y a des horaires très différents.
49:25Ça aussi, c'est le théâtre d'aujourd'hui.
49:27Alors, exactement.
49:30Je n'ai jamais vu,
49:31que j'aime beaucoup,
49:32qui a beaucoup compté,
49:33qui s'appelle Louis-Michel Collat,
49:35qui est le directeur,
49:36directeur et propriétaire
49:37de deux théâtres importants à Paris.
49:39Il m'appelait un lundi matin,
49:41lundi de Pâques,
49:42en me disant, écoutez,
49:43j'ai lu votre pièce.
49:44Ça était arrivé jusqu'à lui.
49:46Et je l'ai trouvé formidable.
49:47Et il m'a parlé de plein de choses.
49:49Et notamment, il m'a dit,
49:50vous savez, il faut regarder les horaires.
49:52Ça évolue beaucoup, le théâtre.
49:54Et c'est lui qui m'a conseillé,
49:56notamment, des horaires,
49:57comme ceci, en fin de semaine.
49:58Et le samedi et le dimanche après-midi,
50:01parce que ce sont des très bons horaires,
50:03où, véritablement,
50:04les gens viennent au théâtre.
50:05– Eh bien, nous serons nombreux, j'espère,
50:07à se retrouver à la scène parisienne,
50:09pour ce spectacle,
50:10en attendant, Albert,
50:11que vous avez écrit,
50:13une reconversion envers d'autres choses.
50:14Peut-être, parce que vous n'avez pas vous arrêté comme ça.
50:16– Oui, ou une deuxième, peut-être, derrière.
50:17– Exactement.
50:18Merci Patrick Meunet,
50:19tous nos voeux de succès.
50:20– Merci à vous.
50:21– Et continuez ainsi.
50:22– Merci à vous.
50:22– L'équipe d'Une vie s'est terminée pour aujourd'hui.
50:24On se retrouve bientôt.
50:25Restez fidèles à l'écoute de Sud Radio.

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