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00:00Bonjour et merci Emely de m'avoir invité à partager mon regard sur la secularité dans le luxe.
00:12L'économie séculaire, c'est l'art d'utiliser des matériaux et des produits le plus longuement possible
00:20en les recyclant, en les réemployant, en les réparant, etc.
00:25Avec toujours l'idée derrière en tête que les produits à la fin de leur vie ne sont pas des déchets, mais des ressources précieuses.
00:34Et ça peut avoir un impact très significatif.
00:38Par exemple, la fondation Ellen MacArthur, qui est un peu la référence dans l'économie séculaire,
00:43a estimé que l'Europe peut réduire par 30% sa consommation de ressources
00:48et 50% des émissions de gaz à effet de serre en appliquant strictement les principes de l'économie séculaire.
00:58Et ça a aussi, comme il y a le mot économie dans le mot, un impact sur les opportunités économiques qui sont derrière.
01:07Et pour les réaliser, ça nécessite souvent de mettre en place de nouvelles activités commerciales
01:16ou voire de créer de nouveaux business models circulaires.
01:20Et on distingue souvent cinq grandes catégories de business models circulaires dans l'économie séculaire
01:27et faisons un peu le tour pour voir comment le secteur du luxe s'est emparé de ces business models circulaires.
01:34Et donc le premier modèle s'appelle valorisation des ressources
01:38et ça veut dire qu'une entreprise valorise autrement des produits, des matériaux qui ne les ont pas utilisés
01:47ou qu'ils ont récupéré auprès des clients à la fin de leur utilisation.
01:53Et donc si je regarde dans le luxe, vous avez peut-être même des exemples en tête,
01:57mais ça me fait penser par exemple à Nonasource, la plateforme qui permet de revendre des stocks morts,
02:05des tissus qui n'ont pas été utilisés, à d'autres ateliers ou à d'autres créateurs.
02:11Mais aussi, comme ça a été évoqué ce matin, tout le marché de second-hand dans le luxe qui a une croissance énorme en ce moment.
02:19Deuxième modèle, ça s'appelle sourcing circulaire.
02:23Et donc là, c'est l'idée d'intégrer dans ces produits, dans son approvisionnement,
02:27des matériaux qui ont déjà été utilisés ou qui sont biodégradables.
02:33Et là aussi, encore une fois, quand on pense au luxe, il y a beaucoup d'exemples.
02:39Par exemple, Prada a lancé sa nouvelle gamme de produits re-nylon,
02:44qui est basé sur du plastique qui a été collecté dans les océans,
02:48ou IDGENEV qui produit des montres haute gamme circulaires sur la base de l'acier ou de fibres de carbone
02:57ou d'autres matériaux recyclés.
03:00Troisième modèle, l'extension de la durée de vie.
03:03Donc là, c'est l'idée, tous les modèles autour de permettre à un client, un consommateur,
03:08d'utiliser le produit le plus longuement possible.
03:11Et on a déjà entendu ce matin que ça, c'est très proche du luxe,
03:15où l'idée est d'utiliser effectivement, d'avoir des produits qu'on peut utiliser très longuement.
03:20Et ça, c'est souvent autour de la réparation.
03:23Par exemple, Hermès a déclaré dans son rapport annuel
03:26qu'ils ont fait plus de 200 000 transactions de réparation l'année dernière.
03:30Et c'est similaire pour d'autres marques,
03:32comme la marque Leuve qui a créé une boutique dédiée à la réparation au Japon,
03:37le Leuve ReCraft.
03:40Et quatrième modèle, c'est l'économie de la fonctionnalité.
03:43C'est peut-être la catégorie de business model la plus innovante, je trouve, personnellement.
03:47Elle est tout autour de changer le focus de la possession
03:52vers un focus sur l'utilisation ou l'expérience d'utilisation d'un produit.
03:58Et donc, le client utilise le produit mais n'est pas propriétaire.
04:01C'est le fabricant, le prestataire qui reste propriétaire.
04:05Et c'est aussi le prestataire, le fabricant qui gère tous les services autour,
04:09la réparation du produit, le changement si nécessaire,
04:15la reprise à la fin, le recyclage, le réemploi, etc.
04:19Et ça me fait penser dans le luxe à, par exemple, la fameuse plateforme ou start-up,
04:25Rent the Runway, américain, qui permet à des particuliers
04:30de louer des objets de mode ou aussi d'autres accessoires,
04:34comme des lunettes soleil, haute gamme ou d'autres,
04:36pendant une durée courte, quelques jours,
04:38et qui gèrent tout autour et qui d'ailleurs se vantent
04:40d'avoir la plus grande opération de repassage de textiles dans le monde entier.
04:45Et le dernier business model, ce sont des plateformes de partage.
04:49Donc là, c'est un peu différent.
04:51Ce n'est pas le fabricant qui est propriétaire du produit,
04:53mais les plateformes mettent ensemble des particuliers
04:56pour permettre à d'autres personnes d'utiliser un produit.
04:59Donc là, j'ai dû chercher un peu dans le luxe,
05:02mais par exemple, il y a des sites comme Book Classic
05:04qui vous permettent de louer une voiture de luxe vintage
05:08pendant quelques jours à un autre particulier.
05:11Et donc, c'est très bien.
05:12Le secteur du luxe s'est emparé des différents business models circulaires.
05:16Vous trouvez encore beaucoup plus d'autres exemples.
05:19Et est-ce que ça veut dire que l'économie circulaire est très présente
05:23ou répandue dans le luxe ?
05:25Peut-être pas complètement.
05:28Donc déjà, si on regarde dans l'économie globale,
05:32indépendamment du luxe, le taux de circularité,
05:35ça veut dire le taux de matériaux qui sont repris à la fin
05:39pour être utilisés autrement, ce n'est que 7%.
05:42Et c'est d'ailleurs en train de baisser.
05:44C'était 9% il y a deux ans.
05:46Donc ça veut dire que 83% des matériaux
05:48arrivent quand même à la déchetterie à la fin.
05:51Donc ce taux même n'est pas évalué, en tout cas pas à ma connaissance,
05:55pour le secteur du luxe en soi.
05:58Mais si on regarde quelques chiffres, par exemple,
06:00le taux de recyclage dans la mode en France, c'est 32%.
06:03Ou si on regarde dans les rapports des grands maisons de luxe,
06:08combien de matériaux qu'ils utilisent ont déjà eu une vie antérieure.
06:14Normalement pour leurs produits, ces chiffres ne sont pas publiés,
06:17mais parfois on trouve des chiffres sur l'emballage.
06:20Là on trouve normalement des indicateurs de 35-40%
06:25de matériaux recyclés ou biodégradables
06:27qui sont dans l'emballage des produits de luxe.
06:30C'est déjà très bien.
06:33Mais je pense ou j'espère qu'on peut aller encore plus loin.
06:37Pourquoi est-ce que c'est le cas ?
06:39Je pense qu'une des raisons est qu'il y a beaucoup d'initiatives,
06:43mais il n'y a pas encore assez de passages à l'échelle.
06:47Pour ce passage à l'échelle, je pense qu'il y a trois choses
06:52qui me semblent importantes.
06:54Tout d'abord, il faut continuer à rendre des produits
06:58et des services circulaires désirables.
07:01Je compte particulièrement sur les acteurs de luxe,
07:04parce que s'il y a un secteur qui sait très bien
07:07rendre des produits et des services désirables,
07:09c'est notamment le luxe.
07:11Il faut bien sûr mettre en valeur le faible impact environnemental
07:19des produits circulaires, mais il faut aller au-delà
07:22et chercher des vecteurs de différenciation
07:24ou des avantages que les produits circulaires n'ont pas.
07:27Par exemple, la maison Camus, qui propose des cognacs de haute gamme,
07:32a développé une solution de recherche qui vous permet
07:36de rechercher votre flacon de cognac à la fin,
07:39quand le flacon est vide, et qui en même temps
07:42propose une solution de personnalisation du flacon.
07:45Personnaliser un flacon pour un usage unique, c'est dommage,
07:49mais personnaliser un flacon pour un usage répété,
07:52c'est là où ça commence à avoir du sens.
07:55Je pense que c'est ça qui est important pour développer
07:58encore plus la désirabilité.
08:00Deuxièmement, c'est d'industrialiser ou de passer à l'échelle
08:05les chaînes de valeur, les chaînes logistiques.
08:08Nous avons travaillé avec France Supply Chain et le cabinet SITWELL
08:12sur une étude sur comment mettre en œuvre des supply chains circulaires,
08:16en se basant sur des témoignages d'acteurs très différents
08:19de diversités de secteurs.
08:21Ce que nous avons vu est qu'il y a beaucoup de modèles différents
08:25Il y a des entreprises qui mettent en place une chaîne de valeur
08:28dédiée pour des produits circulaires en parallèle
08:31de la chaîne de valeur de produits traditionnels.
08:34Il y a d'autres qui essaient d'intégrer les produits circulaires
08:38dans la chaîne de valeur habituelle, en utilisant les mêmes sites,
08:41les mêmes fournisseurs, les mêmes transporteurs, etc.
08:45Tous ces modèles sont possibles, mais il faut concevoir
08:48ces chaînes dès le début pour un passage à l'échelle
08:51pour qu'ils puissent absorber de la croissance plus tard.
08:55Troisième point, c'est d'avancer ensemble,
08:58et ça revient au sujet des coalitions aujourd'hui.
09:01Il y a beaucoup de solutions dans le circulaire,
09:04comme par exemple les systèmes de consigne, de réemploi ou d'autres,
09:07que vous ne pouvez pas mettre en place seul.
09:10Est-ce qu'il vous oblige de collaborer à la fois avec les fournisseurs,
09:15par exemple pour intégrer des nouveaux matériaux
09:18ou pour redesigner des produits,
09:21de travailler parfois avec vos clients,
09:24d'avoir leur retour, leur engagement, leur participation,
09:27mais aussi souvent de travailler avec vos concurrents.
09:30C'est là où je pense qu'on peut créer beaucoup de valeur,
09:34et un exemple qui me vient à l'esprit,
09:37c'est la coalition sur le réemploi dans le secteur de la cosmétique,
09:41qui a été initiée par les cabinets Vidante, Nidraud et Socula,
09:45qui a réussi à réunir un grand nombre d'acteurs autour de la cosmétique
09:49pour réfléchir ensemble comment on peut mettre en place un système de réemploi,
09:53et je pense que ce ne serait pas faisable de le faire tout seul.
09:57Je trouve que c'est une très bonne idée,
09:59et peut-être qu'on en entendra encore plus plus tard.
10:02Merci beaucoup pour votre attention,
10:05et je suis très heureux de passer le relais au prochain speak.

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