Exportations menacées, phénomènes climatiques récurrents, baisse globale de la consommation : les nuages s'accumulent sur les vignes françaises. C'est le cas dans le Gers, patrie des vins « Côte de Gascogne » et d'une eau-de-vie bien connue : l'Armagnac.
Jean-René Cazeneuve, député de ce département, est un fervent défenseur des viticulteurs. Pour ce nouveau numéro de "Circo", les équipes de LCP l' ont suivi pas à pas, chez les producteurs d'Armagnac, que Donald Trump a menacé de taxes douanières exorbitantes ou à la rencontre des producteurs de vin, en proie à des phénomènes climatiques de plus en plus récurrents.
Elu influent du camp présidentiel, Jean-René Cazeneuve oeuvre à l'assemblée pour faire passer des aides aux viticulteurs dans les budgets de l'état, et pour convaincre les ministres de plaider leur cause auprès des partenaires commerciaux de la France.
Jean-René Cazeneuve, député de ce département, est un fervent défenseur des viticulteurs. Pour ce nouveau numéro de "Circo", les équipes de LCP l' ont suivi pas à pas, chez les producteurs d'Armagnac, que Donald Trump a menacé de taxes douanières exorbitantes ou à la rencontre des producteurs de vin, en proie à des phénomènes climatiques de plus en plus récurrents.
Elu influent du camp présidentiel, Jean-René Cazeneuve oeuvre à l'assemblée pour faire passer des aides aux viticulteurs dans les budgets de l'état, et pour convaincre les ministres de plaider leur cause auprès des partenaires commerciaux de la France.
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01:00Je vous propose de découvrir avec moi les magnifiques coteaux de Gascogne
01:05à la rencontre de nos agriculteurs qui souffrent des conséquences des changements climatiques
01:11et de la menace sur les taxes pour leurs marchés principaux qui sont les Etats-Unis et la Chine.
01:17Un climat doux, un paysage vallonné, la circonscription de Jean-René Cazeneuve au sud du Gers est propice à la viticulture.
01:29Ici, on produit du vin, le Côte de Gascogne et une eau de vie célèbre, l'Armagnac.
01:35La Maison de l'Or est l'un des plus gros producteurs français.
01:39Le député va nous faire découvrir le spiritueux.
01:43C'est son péché mignon et il ne s'en cache pas.
01:46C'est ça, Sylvain ?
01:49Ça va très bien.
01:50Et là, comme cépage, c'est...
01:52Donc là, on est sur du baco, 100% baco, le cépage armagnac.
01:59C'est difficile d'être député du Gers, ça.
02:02Merci.
02:02Il y a des moments plus pénibles que d'autres.
02:06Il a déjà pris la couleur pendant trois ans, c'est ça ?
02:08Trois ans, oui.
02:12Ça fait partie de la Gascogne.
02:14On a notre foie gras, nos canards, l'Armagnac.
02:18Je crois que ces choses-là, je crois que le caractère du Gascogne, un peu batailleur, combatif, virulent, râleur, sympa, courvillien,
02:30on retrouve ça dans l'Armagnac.
02:31C'est pas par hasard.
02:32C'est un connaisseur.
02:33Il va sur le terrain, il va dans les distilleries, il voit les alambics qui fonctionnent,
02:39il fait la promo de l'Armagnac à l'Assemblée.
02:44VRP de l'Armagnac, Jean-René Cazeneuve l'assume, ça fait partie, selon lui, de son job de député du Gers.
02:54Et particulièrement en s'étant troublé.
02:57L'Armagnac se vend essentiellement à l'export.
03:00Les trois principales destinations sont la Chine, la Russie et les Etats-Unis.
03:05Dire que le contexte diplomatique est défavorable est un euphémisme.
03:10Ces derniers mois, les menaces douanières de Donald Trump ont créé un climat d'incertitude qui nuit aux exportations et suscite une grande inquiétude.
03:19Pour vous donner une idée, les Etats-Unis, en 2024, on a expédié un peu moins de 50 000 bouteilles.
03:26Ça fait un peu moins d'un million d'euros de chiffre d'affaires.
03:30Et c'est un pourcentage, ça fait 12% de notre chiffre d'affaires.
03:34Donc c'est pas négligeable.
03:35Mais au-delà du chiffre d'affaires actuel, c'est le potentiel.
03:40Les Etats-Unis, c'est un potentiel phénoménal.
03:42Le député n'a évidemment aucune prise directe sur les décisions de Donald Trump.
03:48Mais c'est un élu influent du camp présidentiel, proche de l'Elysée et des cabinets ministériels.
03:54Moi, je passe mon temps à appeler les ministres, à appeler aussi le cabinet de Amatignon, le cabinet de Bayrou, à l'Elysée pour les sensibiliser.
04:03Donc il faut qu'on travaille sur l'opinion public, ça c'est un peu notre dom politique, et évidemment sur l'exécutif, et que les deux convergent et qu'on puisse faire plier Trump.
04:13En tout cas, nous, on n'y est pour rien, on subit les conséquences.
04:15Oui, bien sûr.
04:16Mais vraiment pour rien.
04:16Absolument.
04:17Dans le Gers, les annonces de Donald Trump ont provoqué une déflagration.
04:26La filière de l'Armagnac tremble sur ses bases.
04:29Réunie ce jour-là en Assemblée Générale, l'Association des Producteurs a proposé aux députés d'intervenir.
04:36Jean-René Cazeneuve le sait, dans le contexte calmer les inquiétudes, c'est mission impossible.
04:41Vous savez que nous sommes tous très attachés à cette pépite qu'est l'Armagnac.
04:48Et voilà, soyez persuadés de notre mobilisation aujourd'hui, de chaque instant.
04:55Pas sûr que ces mots suffisent à rassurer le lobby de l'Armagnac.
05:00En réalité, le député a beau se démener, il est aussi inquiet que les producteurs.
05:05Mais face à l'adversité, il tente au moins d'insuffler un état d'esprit combatif.
05:09L'Armagnac a sept siècles, donc il n'y a pas de raison qu'il se laisse intimider.
05:17On n'a aucun espoir, c'est que la bourse américaine s'effondre et que Trump comprenne...
05:22Voilà où on en est, vraiment à se dire, il faut qu'il se plante pour qu'il revienne en arrière.
05:29Donald Trump est absolument incontrôlable, incontrôlé, fantasque, dingue, on peut dire des tas de choses.
05:36Il a été élu par les Américains.
05:39Donc moi, je ne suis pas du genre à baisser le bras.
05:41Il faut me dire, bon, c'est foutu, attendons.
05:44Non, même si notre chance est très faible, il faut la jouer.
05:50Les menaces de Donald Trump sont d'autant plus malvenues pour les viticulteurs gascons
05:55qu'elles viennent s'ajouter à un autre phénomène.
05:58Il prend la forme de tempête de grêle, d'épisodes de gel ou encore de sécheresse et s'appelle
06:05le changement climatique.
06:09Jean-René Cazeneuve vient rencontrer un viticulteur qui craint pour sa vigne.
06:14À l'heure où la floraison approche, elle devient hypersensible aux conditions météo.
06:20Là, d'ici 8-10 jours, ça va débourrer.
06:22Donc dans 8-10 jours, tu vas te retrouver avec des bourgeons qui seront à peu près à
06:25ce truc où tu auras déjà les grappes.
06:29Et dans 8 jours, moi, je commence à trembler.
06:31Parce que dans 8 jours, je peux perdre toute la récolte.
06:34Parce que si j'en ai un gel assez catastrophique...
06:37Et cette parcelle a été touchée, l'année dernière ?
06:39Cette parcelle, l'année dernière, elle a été touchée par le gel.
06:41Par le gel, d'accord.
06:42Elle a été touchée par le gel.
06:43Le haut n'était pas touché, mais il y avait les deux tiers de la parcelle qui étaient touchés.
06:49Pour faire face aux dégâts du gel, Jean-René Cazeneuve a obtenu deux années de suite
06:54des compensations pour les viticulteurs.
06:57Au sein de son groupe parlementaire, il est considéré comme monsieur finance,
07:01une position qui lui permet de peser dans le budget de l'État.
07:05On a fait voter l'année dernière avec 80 millions pour aider les viticulteurs.
07:11Ça n'a couvert qu'une partie quand même des préjudices.
07:14Et c'était quand même important de le faire.
07:16Cette année, on a aussi fait voter...
07:18Moi, j'ai mis un amendement dans la loi de fin de gestion de 20 millions d'euros.
07:22On a touché 13 000 euros.
07:24C'est 10% de ce que j'ai perdu, en gros.
07:26C'est pas beaucoup, mais quand vous en avez besoin, ça fait toujours du bien.
07:30Ça permet de payer quelques échéances.
07:31On en est aujourd'hui à espérer une année normale.
07:35On n'est même pas sûr à espérer des récoltes exceptionnelles.
07:37Il faut vraiment, effectivement, une année normale.
07:40On sait qu'il faut vivre avec des aléas climatiques qui vont être plus fréquents.
07:43Mais là, ça n'est plus possible.
07:45C'est-à-dire, si ça devenait...
07:47Maintenant, si on avait un problème chaque année, il faudrait changer de métier.
07:51Là, c'est plus possible.
07:53C'est ce qui a découragé un peu les viticulteurs de cette zone.
07:56Comme tu le vois, les parcelles que tu vois là-bas.
07:58Tout ça, c'était des vignes.
07:59Le château, là, 33 hectares de vignes.
08:02Un voisin, 20 hectares.
08:03L'autre, 17.
08:04L'autre, 15.
08:05Ils arrachent.
08:06Dans un rayon de 1 km, autour d'ici, ils s'arrachent pas loin de 100 hectares de vignes.
08:11Des vignes arrachées, conséquence ultime des difficultés rencontrées par les viticulteurs.
08:21Sur cette parcelle, le tractopelle est à l'œuvre.
08:25Le propriétaire part en retraite.
08:28Il n'a trouvé aucun repreneur.
08:30Comment vous allez ?
08:32Combien de temps vous l'avez exploité, cette vigne ?
08:34Moi, je travaille depuis l'âge de 14 ans.
08:37J'en ai 75.
08:38Alors, vous voyez, comptez.
08:40Et toujours ici, non ?
08:41Oui.
08:41Toujours ici.
08:42Oui, oui.
08:43Et c'est pas un crève-cœur, ça, de faire ça ?
08:45Oui, oui, ça fait mal de l'avoir arrachée.
08:47J'aurais préféré que quelqu'un la reprenne, qu'il la travaille là.
08:51Il faut faire ça, quoi.
08:53Et bon, on n'a pas le choix, on n'a pas le choix.
08:56Cette parcelle produisait du vin rouge.
08:58Au-delà des phénomènes climatiques, la consommation de ce produit est en baisse continue depuis plusieurs années.
09:05En 2024, les ventes ont baissé de 4,1%.
09:09Dans ce contexte, des viticulteurs découragés jettent l'éponge, notamment dans le Bordelais, même si le Gers n'est pas épargné.
09:17Bonjour, monsieur.
09:18Je vais vous embêter.
09:19Non, il n'y a pas de problème.
09:20Ça, vous le faites souvent ou pas ?
09:22Pas d'un 4 ou 5 mois, oui.
09:23Pas d'un 4 ou 5 mois.
09:24De plus en plus.
09:26Oui, il y a une baisse dans la consommation.
09:27Oui.
09:28Oui, oui.
09:28Ça, c'est sûr qu'on produit beaucoup plus de vin qu'on peut en boire.
09:32Qu'on peut en boire.
09:32Même si on fait tous les efforts, moi le premier, parce que j'aime ça, il y a des limites, quand même.
09:36Si la consommation de vin baisse en France, est-ce que ce n'est pas aussi, quelque part, une bonne nouvelle ?
09:42C'est-à-dire qu'en termes de santé publique, ce n'est peut-être pas plus mal.
09:46Écoutez, non, parce que c'est un problème de santé publique si les gens boivent trop.
09:53Si les gens boivent, vous voyez, chez nous, ici, ma grand-mère disait qu'un verre de rouge tous les jours, à tous les repas, ça faisait vivre très longtemps.
10:01Vous savez qu'il y a une espérance de vie ici qui est très forte, donc moi, je ne fais pas le lien.
10:08Les autorités sanitaires alertent au contraire sur les risques d'une consommation quotidienne, même limitée.
10:14Les Français sont de plus en plus nombreux à s'interroger sur les effets de l'alcool et les viticulteurs doivent le prendre en compte.
10:22Qu'il faille s'adapter, que la viticulture s'adapte, c'est ce qu'on fait.
10:26Maintenant, il y a des vins avec un peu moins d'alcool, par exemple, pour s'adapter au goût.
10:30– On s'en est goûté sans alcool, eh bien merci.
10:32– Sans alcool, on n'y est pas encore.
10:34– Ça existe ?
10:36– Ça existe, oui. Donc il faut s'adapter.
10:38Et s'il y a des changements de comportement, il faut le respecter.
10:40Si les jeunes veulent des vins plus légers, plus fruités, moins alcoolisés, il faut le faire.
10:47Donc il faut s'adapter.
10:49S'adapter ou disparaître, les viticulteurs en sont là.
10:53Dans le Gers, une nouvelle génération d'exploitants refuse la fatalité.
10:57Réunis en coopérative, ils se sont associés pour mener ensemble des expérimentations
11:03et inventer la vigne de demain.
11:06Voici le chai expérimental de Saint-Mont.
11:10Ici, les viticulteurs tentent de trouver de nouveaux cépages,
11:13les variétés de raisins qui produisent le vin.
11:16Ils présentent aux députés le massin noir,
11:19un cépage très ancien qui pourrait revenir au goût du jour.
11:22C'est tout frais, c'est pas encore un produit qui est tout à fait abouti.
11:27Mais ce massin noir, malgré cette couleur qui est très très riche,
11:30on voit que c'est très profond en couleur,
11:31il titre peu d'alcool, là il fait 11,2% d'alcool.
11:36Donc ça c'est vraiment adapté aux consommateurs.
11:39On a des cépages qui vont être un peu plus résistants aux maladies,
11:42on a des cépages qui vont être moins chargés en alcool,
11:44on a des cépages qui vont être plus riches aromatiquement,
11:49et ça fera les cuvées de demain.
11:50Avec des floraisons plus tardives aussi dans l'année ?
11:53Oui, le tardif, comme son nom l'indique, il démarre plus tard.
11:57Arce-avril, c'est ça ?
11:58Ça peut être compliqué le gel.
12:00Et donc lui, on se dit que c'est peut-être une option aussi pour résister au gel.
12:04Ce chai expérimental dernière génération a coûté 2,6 millions d'euros,
12:09financé par des fonds publics.
12:12Le plan France Relance, lancé après l'épidémie de Covid-19,
12:16a pris en charge 40% de l'enveloppe.
12:18Le député a fait jouer ses réseaux pour pousser le dossier.
12:21On s'est battus avec le gouvernement pour faire en sorte qu'une partie des fonds soit utilisée pour ça.
12:32J'ai joué humblement mon rôle de député, c'est-à-dire que j'en ai parlé au conseiller, j'en ai parlé au préfet,
12:38je me suis assuré que le dossier était suivi, qu'il était complet, qu'il était compris,
12:42parce que c'est de l'argent public, c'est normal.
12:44Ça, c'est un projet fou qu'on a depuis 10 ans.
12:47Et en fait, c'est vraiment l'occasion, c'est France Relance qui nous permet de le faire.
12:51Par rapport à tout ce que l'on vit, toutes les catastrophes que l'on vit,
12:55on n'a pas le droit de rester les bras croisés et attendre que ça s'arrange tout seul,
12:58parce que ça ne s'arrangera pas tout seul.
12:59C'est difficile, être agriculteur dans le GER, c'est difficile, on n'a pas les rendements de la Beauce, c'est sûr.
13:05On ne vend pas le vin comme on le vend au prix du Bourgogne, c'est vrai,
13:11mais qu'est-ce qu'on est fiers de nos produits ?
13:13Et puis voilà, on se bat avec nos atouts et on n'en manque pas.
13:17Dans le dernier budget, Jean-René Cazeneuve a aussi débloqué une aide de 10 millions d'euros
13:22pour permettre aux caves coopératives de se développer.
13:26À l'Assemblée comme sur le terrain, l'élu du Gers défend les viticulteurs sans modération.
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