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Art et designTranscription
00:00 *Ti ti ti ti ti ti*
00:02 *Musique*
00:08 France Culture, Olivia Gesper, bienvenue au club.
00:12 *Musique*
00:17 Bonjour à tous, un club de lecteurs passionné,
00:20 aujourd'hui celui d'André Dussolier.
00:22 Après le succès de Nové Cento, d'Alessandro Barrico, qu'il a adapté au théâtre,
00:26 le comédien Molièreisé remonte sur scène pour porter haut le verbe et la voix des écrivains qui l'accompagnent depuis l'enfance.
00:32 Victor Hugo, Henri Michaud ou encore Raymond De Vos, il lit et redonne vie à son panthéon littéraire.
00:38 Un seul en scène intitulé "Sans dessus dessous", à voir en ce moment au Bouffe Parisien.
00:43 Vous savez ce qu'on fait aux hommes comme lui, aux hommes comme vous, lui demande-t-on dans le film "Diplomatie" ?
00:48 "Je crois qu'on les décore", répond celui qui a déjà reçu trois Césars du meilleur acteur pour "Un coeur en hiver",
00:53 "La chambre des officiers" ou encore "On connaît la chanson".
00:56 Eh bien moi je crois qu'on les écoute et qu'on leur donne la parole.
00:59 André Dussolier est aujourd'hui l'invité de "Bienvenue au club".
01:02 Une émission programmée par Henri Leblanc, préparée par Joseph Julien avec Laura Dutèche-Pérez
01:10 à la réalisation Félicie Fauger avec Grégory Vallon.
01:13 Donnez vie au texte, voilà ce que vous faites.
01:16 Bonjour André Dussolier.
01:17 Bonjour.
01:18 Dans cette pièce "Sans dessus dessous", vous butinez d'un livre à l'autre.
01:22 Quel fil conducteur a été le vôtre ?
01:24 Comment avez-vous rassemblé, associé ces fragments de grands textes, de grands auteurs ?
01:29 Alors je suis parti de mon plaisir.
01:30 C'est vrai que c'est des textes que j'aime beaucoup, que je dis souvent, que j'interprète.
01:34 Il y a en particulier Roland Dubillard et puis j'en ai découvert d'autres au fil des années.
01:38 Et donc en particulier Victor Hugo et des poèmes tellement forts.
01:42 Et donc du coup j'ai envie de les partager parce que c'est des textes,
01:45 c'est des poèmes qui restent un peu la plupart du temps sur les étagères.
01:49 Comme dit Marcel Proust, tous ses amis qui sont sur les étagères.
01:52 Et qu'on n'a pas l'occasion.
01:53 Et quand on peut les dire et les jouer, les interpréter,
01:56 ils ont un relief évidemment très fort ou une puissance très forte.
02:01 Et on n'a pas souvent l'occasion de les entendre.
02:03 Donc l'occasion, j'avais envie de me la, me l'accorder et de la partager surtout avec les spectateurs.
02:08 Enfin quelqu'un comme Hugo, c'est quelqu'un que vous découvrez sur les bancs de l'école, non ?
02:11 Peut-être que vous ne l'appréciez pas tout de suite, ça c'est autre chose.
02:13 Ah si, Hugo aussi, vraiment.
02:15 En plus, c'est une poésie tout à fait, c'est très narratif à certains moments.
02:20 Je n'ai pas appris seulement d'ailleurs un poème, c'est le poème du Grapeau qui est très connu.
02:24 C'est vrai, mais que j'ai découvert tardivement, mais qui est tellement impressionnant, émouvant.
02:28 Mais il y en a d'autres, il y a un extrait aussi des Misérables,
02:31 qui est vraiment une description d'un enlisement d'un homme comme ça sur la plage,
02:36 qui est très impressionnante à tel point que je suis allé chercher, fouiller pour voir si ça existait vraiment.
02:41 C'est tellement écrit de façon si précise qu'on se dit que ça ne peut être que vrai.
02:46 Et voilà, c'est la force de la fiction quelquefois.
02:49 La pièce, elle emprunte son nom, un sketch de De Vos,
02:53 sens dessus dessous, et non pas sans dessus dessous,
02:57 avec beaucoup de S à bien prononcer.
03:00 Vous reprenez donc sur scène ce sketch aussi, et ça donne ça si on l'écoute.
03:05 Alors il y a des courants d'air partout.
03:08 Déjà dans mon immeuble, les portes d'entrée sont toujours ouvertes.
03:11 Alors quand j'ouvre ma porte, il y a un courant d'air qui vient de la rue,
03:14 qui m'arrive et qui passe par là.
03:20 Vous n'habitez pas dans mon immeuble ou ?
03:24 Ne faites pas de zèle.
03:27 Vous avez de la chance de ne pas habiter dans mon immeuble.
03:32 Parce qu'en ce moment, mon immeuble est sans dessous dessous.
03:35 Tous les locataires dessous voudraient habiter au-dessus.
03:38 Tout ça parce que le locataire qui est au-dessus est allé raconter par en dessous
03:41 que l'air que l'on respire à l'étage au-dessus était meilleur que celui qu'on respire à l'étage en dessous.
03:45 Alors le locataire qui est en dessous a tendance à envier celui qui est au-dessus.
03:49 Et à mépriser celui qui est en dessous.
03:51 Moi je suis au-dessus de ça.
03:53 Si je méprise celui qui est en dessous, c'est pas parce qu'il est en dessous,
03:56 c'est parce qu'il convoite l'appartement qui est au-dessus, le mien.
03:58 Remarquez, moi je sais très bien que mon appartement est celui du dessous
04:00 à condition d'obtenir celui du dessus.
04:02 Mais je compte pas trop dessus.
04:04 D'abord parce que j'ai pas de sous.
04:06 Ensuite au-dessus de celui qui est au-dessus, il n'y a plus d'appartement.
04:09 Alors le locataire du dessous qui monterait au-dessus
04:11 obligerait celui du dessus à redescendre en dessous.
04:14 Or je sais que celui du dessus n'y tient pas.
04:18 D'autant que comme la femme du dessous est tombée amoureuse de celui du dessus,
04:23 celui du dessus n'a aucun intérêt à ce que le mari de la femme du dessous monte au-dessus.
04:28 Alors là-dessus, quelqu'un est-il allé raconter à celui du dessous
04:33 qu'il avait vu sa femme bras-dessus-bras-dessous avec celui du dessus ?
04:36 Toujours est-il que celui du dessous l'a su.
04:39 Et un jour que la femme du dessous était allée rejoindre celui du dessus,
04:43 comme elle retirait ses dessous et lui ses dessus,
04:48 soi-disant parce qu'il avait trop chaud en dessous,
04:51 je l'ai su.
04:53 Parce que dans le dessous, on entend tout ce qui se passe au-dessus.
04:56 Bref, celui du dessous leur est tombé dessus,
04:59 comme ils étaient tous les deux dessous, ils se sont tapés dessus.
05:02 Finalement, c'est celui du dessous qui a eu le dessus.
05:07 On a presque tout compris André Dussoulier.
05:14 C'est un peu comme piano panier, vous arrivez à le dire ?
05:17 - Piano panier, oui, c'est trop tôt !
05:22 - Pas facile de ne pas s'en mêler les pinceaux avec tous ces S,
05:25 ces sens dessus-dessous, dessus-dessous.
05:27 Comment vous faites dans ces moments-là ?
05:29 Vous vous accrochez au sens ou au contraire à la musique des mots ?
05:32 - Au sens d'abord, je pense que c'est le sens.
05:34 C'est tellement bien écrit par Raymond Deveau,
05:36 c'est parce qu'en général on a beaucoup de scrupules,
05:38 on ne va pas sur le terrain de Raymond Deveau.
05:40 On l'a entendu juste au début,
05:43 à la fois l'auteur et l'interprète,
05:47 ça fait une seule personne, on n'ose pas y toucher en général.
05:50 Mais c'est tellement bien écrit, ce sens dessus-dessous,
05:52 qu'on peut se l'approprier et restituer sa force.
05:56 C'est le sens d'abord qui est prioritaire,
05:58 et puis c'est ça qui amuse les gens,
06:00 c'est le jeu avec les mots aussi,
06:02 mais c'est d'abord le sens, il ne faut pas s'y perdre en effet.
06:04 - Le sens peut parfois aussi partir en sens dessus-dessous.
06:09 On peut perdre le sens.
06:11 - C'est un peu ce qui se passe dans ce spectacle,
06:13 puisque j'ai emprunté ce titre à Raymond Deveau,
06:16 parce que c'est un peu au fil de mes plaisirs,
06:19 de mes goûts, de passer d'une époque à l'autre,
06:21 d'un genre à l'autre.
06:23 De Victor Hugo à Roland Dubillard,
06:25 et j'aime beaucoup les choses drôles,
06:27 et puis absurdes aussi.
06:29 C'est la liberté d'un homme,
06:31 c'est comme si je jouais plusieurs petites pièces de théâtre
06:33 qui se succédaient,
06:35 comme des petits monologues, poèmes ou monologues,
06:37 ou textes en prose.
06:39 On a l'impression de voyager comme ça,
06:41 et de pouvoir, oui,
06:43 être surpris à chaque moment.
06:45 - Mais d'ailleurs Deveau,
06:47 cette liberté, il l'offre.
06:49 Il l'offre à tout un chacun,
06:51 puisque typiquement ce sketch, il a été publié aussi
06:53 dans un recueil de plus de 70 sketches,
06:55 dans les années 70,
06:57 qui alternent des monologues,
06:59 des dialogues aussi.
07:01 Et il laissait à chacun la liberté de se les approprier.
07:03 Et on voit bien la différence entre vous deux,
07:05 dans la manière de le dire sur scène.
07:07 Entre deux époques aussi, peut-être.
07:09 Parce qu'il y avait la diction des années 70,
07:11 celle d'aujourd'hui,
07:13 et puis celle de deux personnalités, de deux hommes.
07:15 Vous faites très attention
07:17 à ne pas tomber dans un mimétisme,
07:19 à essayer de trouver votre propre personnalité
07:21 entre chaque mot.
07:23 - Oui, quand on prend un texte, c'est vraiment
07:25 parce qu'on le sent et qu'on a envie de le faire
07:27 à sa façon.
07:29 On a envie de l'interpréter.
07:31 C'est ça le propre d'une interprétation.
07:33 - Mais c'est quoi l'interprétation ?
07:35 - C'est de s'approprier un texte.
07:37 Un jour, vous savez, je citais un exemple,
07:39 les ingénieurs formidables de l'Ircam
07:41 me disent "Vous avez enregistré
07:43 le Petit Chaperon Rouge."
07:45 J'ai dit "Non, jamais." "Si, si, si, si,
07:47 venez écouter l'Ircam qui se trouve près de Beaubourg
07:49 et ils me font entendre en effet
07:51 le Petit Chaperon Rouge avec ma voix."
07:53 C'est incroyable. Donc ils avaient pris des phonèmes
07:55 d'enregistrement de Proust
07:57 et c'était bien.
07:59 La voix, en effet, je la reconnaissais bien.
08:01 Sauf que j'ai dit "Ecoutez, ok, très bien, bravo, félicitations,
08:03 maintenant je vais l'interpréter
08:05 et je vais prendre ma revanche sur la machine."
08:07 Et donc la machine pouvait restituer la voix
08:09 mais pas une interprétation, justement.
08:11 - Vous êtes un homme de radio aussi, André Dussolier.
08:13 Vous avez beaucoup enregistré
08:15 pour la radio. Pourquoi c'est une expérience singulière ?
08:17 - Parce que la radio,
08:19 d'abord, premièrement, j'écoutais
08:21 beaucoup la radio quand j'étais jeune.
08:23 La télévision n'est venue dans ma famille que lorsque j'avais
08:25 13 ans et donc la radio,
08:27 c'était extraordinaire. Je ne vais pas répéter
08:29 ce que je répète sans arrêt à propos
08:31 de ce qu'a dit Orson Welles
08:33 qui lui a fait croire aux Etats-Unis et aux Américains
08:35 que les Martiens avaient débarqué.
08:37 Et donc il disait, la radio
08:39 a ceci de supérieur au cinéma, c'est qu'à la radio
08:41 l'écran est plus large. Et c'est vrai
08:43 qu'en écoutant les gens à la radio,
08:45 avec une voix, on imagine
08:47 qui ils sont, on voit un univers,
08:49 un monde
08:51 se présenter.
08:53 Ça part de notre imaginaire.
08:55 On sollicite l'imaginaire des autres. Et quand je suis
08:57 rentré à la Comédie-Française, on faisait beaucoup de radio.
08:59 On enregistrait beaucoup de pièces de théâtre
09:01 ici dans la maison de la radio. Donc du coup,
09:03 la radio m'est familière et j'aime beaucoup ça.
09:05 - On continue aujourd'hui avec les fictions de France Culture.
09:07 - Oui. - Par ailleurs.
09:09 - Oui. Parce que pendant
09:11 l'épidémie du Covid,
09:13 on parlait beaucoup de médecine
09:15 etc. et de la maladie. Et il y avait
09:17 l'exemple d'un médecin, au moment
09:19 où les médecins se battaient comme ça
09:21 sur la manière de soigner le Covid.
09:23 Et il y avait cette histoire de Semmelweis
09:25 qui est un médecin autrichien qui
09:27 lui, se battait pour faire valoir
09:29 50 ans avant Pasteur, l'existence
09:31 du microbe. Et donc, j'ai lu
09:33 ça sur mon iPhone et puis
09:35 je l'ai passé à France Culture et ça a eu
09:37 beaucoup de retentissement. - Oui. Et quand
09:39 vous vous enregistrez, quand vous
09:41 jouez, quand vous lisez des textes pour la radio,
09:43 vous parlez à qui ? - Ah ben
09:45 on parle à celui qui écoute,
09:47 celui qui est là, celui à qui on fait confiance
09:49 pour entendre. Voilà.
09:51 C'est le libre espace
09:53 que chacun s'approprie
09:55 aussi, autant de la part de celui
09:57 qui propose que celui qui écoute
09:59 et qui choisit de continuer
10:01 l'écoute ou bien
10:03 c'est la grande liberté
10:05 d'être pris, d'être
10:07 saisi. C'est ça qu'on espère
10:09 quand on est comédien, c'est capter
10:11 et c'est organique le théâtre.
10:13 Donc on a envie vraiment que les autres...
10:15 C'est ma réaction de spectateur quand je suis dans une salle.
10:17 J'ai pas envie de faire d'efforts, j'ai envie d'être
10:19 saisi émotionnellement. - C'est organique
10:21 et l'organe c'est la voix, votre voix, à vous.
10:23 Est-ce que vous l'aimez ?
10:25 Est-ce qu'elle vous est familière aujourd'hui ? Est-ce que vous l'avez
10:27 totalement apprivoisée ? - Je la connais pas.
10:29 Franchement... - Vous la connaissez pas ?
10:31 - Non, je la connais pas. Je sais pas trop
10:33 où je parle avec la voix. C'est vraiment...
10:35 Ça raconte la vie de quelqu'un, ça raconte
10:37 quelqu'un aussi. Elle évolue au fil des ans.
10:39 Elle raconte un peu tout ce que vous avez pu vivre
10:41 je pense. Et puis la voix, j'ai joué Novenchento,
10:43 vous y avez fait allusion tout à l'heure avec des musiciens
10:45 qui disaient "mais la voix c'est comme un instrument
10:47 de musique aussi" puisqu'eux ils jouaient de leurs instruments.
10:49 Et la voix c'est pas seulement
10:51 une tessiture, c'est aussi, c'est pas seulement
10:53 une note, c'est aussi la mélodie avec les mots,
10:55 la manière dont on parle. Donc la voix,
10:57 je suis allé... Un jour j'ai posé
10:59 la question à un orthophoniste et je lui ai dit
11:01 "mais qu'est-ce que c'est qu'une belle voix ?" Il m'a dit
11:03 "c'est une voix sincère" et ça m'a allé très très bien.
11:05 - Votre voix, vous ne la connaissez pas
11:07 mais tout le monde la connaît et il trouve
11:09 cette sincérité probablement,
11:11 celle d'avoir le sentiment d'être
11:13 avec André Dussolier. Alors vous êtes
11:15 seul en scène pour
11:17 cette pièce intitulée
11:19 "Sans dessus, dessous", vous l'étiez déjà
11:21 dans "Monstre sacré, sacré monstre". Vous l'étiez
11:23 aussi dans "Nové Cento"
11:25 que vous avez joué avec un succès
11:27 immense d'Alessandro Baricco mais qui était
11:29 une adaptation de ce texte à lui.
11:31 Dans cette pièce-là, dans ce "Seul en scène" vous reprenez
11:33 on le disait, des extraits,
11:35 des moments choisis, des poèmes,
11:37 de textes d'autres auteurs. Pourquoi
11:39 "seul en scène" ? Qu'est-ce qu'il y a dans ce mot
11:41 "seul" pour vous André Dussolier ?
11:43 - Le goût pour la solitude que j'ai toujours...
11:45 - Vous n'aimez pas les autres en fait ?
11:47 - J'adore partager, j'adore
11:49 d'abord en plus "seul en scène" mais avec tout le monde
11:51 dans la salle et c'est
11:53 très beau d'être
11:55 avec des personnes qui sont
11:57 là et qui vivent dans le silence, dans l'écoute
11:59 ou dans le rire ce qu'on est en train
12:01 de vivre sur scène. Non,
12:03 "seul" peut-être parce qu'à un moment donné
12:05 on voit dans le cinéma
12:07 des comédiens qui font leurs films
12:09 ou bien des comédiens en effet
12:11 qui font des "seul en scène", il y en a pas mal aussi
12:13 c'est parce que peut-être on a l'impression
12:15 qu'on est maître un peu de ce qu'on va faire
12:17 de A jusqu'à Z, c'est-à-dire dans le choix
12:19 dans la manière de composer le spectacle
12:21 dans la manière de l'interpréter
12:23 voilà, on le fait pas tout seul
12:25 on le fait avec des équipiers
12:27 des... voilà des...
12:29 formidables comme c'est le cas là puisque
12:31 je voulais quand même qu'il y ait...
12:33 profiter un peu de l'image qui
12:35 intervient là dans ce spectacle pour être
12:37 illustré
12:39 les décors successifs
12:41 qu'on voit donc
12:43 qui retracent une période ou une autre
12:45 alors Sébastien Miséremont qui est un as de la
12:47 vidéo m'aide aussi
12:49 beaucoup dans ce cas là
12:51 mais non, "seul en scène" est très accompagné
12:53 quand même et puis "seul en scène" pour
12:55 la liberté que ça représente. - Oui parce que la
12:57 solitude est une fausse solitude, vous le disiez
12:59 avec les équipes qui travaillent avec vous sur ce
13:01 spectacle mais aussi avec le public
13:03 avec lequel vous tissez un fil
13:05 et on ressent en vous
13:07 dans vos manières, dans votre manière
13:09 et vos manières d'ailleurs de parler
13:11 ces textes, de les faire vivre à voix haute
13:13 que vous avez cette envie de transmettre qui est vraiment
13:15 au coeur de tout, de tisser ce lien
13:17 ce fil avec le public
13:19 elle vous vient d'où ce côté passeur ?
13:21 - Elle me vient, l'envie
13:23 c'est vrai, peut-être parce que
13:25 ça me vient alors pour répondre
13:27 en plusieurs étapes mais la première c'est de dire que
13:29 tout d'un coup, quand j'ai découvert le théâtre
13:31 j'avais 10 ans, c'était grâce à un professeur qui nous a
13:33 emmené voir une pièce de théâtre, j'avais l'impression que tout d'un coup
13:35 c'était un univers de grande liberté
13:37 où on pouvait grâce aux auteurs
13:39 dire des choses qu'on ne disait pas chez soi
13:41 montrer des sentiments qu'on n'avait pas le droit
13:43 forcément de montrer ou d'exprimer
13:45 donc il y avait un espace de liberté, la possibilité
13:47 de vivre peut-être superficiellement mais enfin
13:49 des vies beaucoup plus riches, beaucoup plus
13:51 intenses parce que quand on joue
13:53 la vie conjugale de Bergman avec Nicole Garcia
13:55 comme ça m'est arrivé, tout d'un coup on dit des choses
13:57 sur la vie de couple que ne sont pas
13:59 dites à haute voix devant tout le monde
14:01 donc là c'était formidable
14:03 donc c'est ça qui
14:05 a été d'abord la découverte
14:07 la possibilité de partager et de vivre
14:09 avec d'autres et puis
14:11 après je ne sais plus quelle était l'idée que
14:13 j'avais en tête et que je voulais exprimer
14:15 - Oui, cette envie du partage d'où elle venait
14:17 du fait que vous-même vous avez été à un moment
14:19 le récipiendaire, le bénéficiaire
14:21 de ce partage, que le théâtre
14:23 a été peut-être votre porte
14:25 d'entrée si je vous comprends bien vers
14:27 les grands textes et vers les livres
14:29 - Oui, les livres
14:31 je les suivais, je les lisais
14:33 un peu comme un élève sage
14:35 à l'école, un peu par obligation
14:37 et donc on ne les lit pas, on ne les découvre pas
14:39 avec toute l'intensité
14:41 qu'on peut avoir quand on y va
14:43 vraiment, quand on va vers un livre et qu'on découvre
14:45 les choses par soi-même. J'aime beaucoup les autodidactes
14:47 que j'ai rencontrés
14:49 dans ma vie parce que j'avais l'impression qu'à chaque
14:51 fois qu'ils découvraient un texte, ils l'avaient
14:53 fait sans obligation mais avec le plaisir
14:55 qu'on me guide et donc c'est un peu
14:57 ce qui se passe dans ce spectacle
14:59 j'ai envie de partager ces textes-là
15:01 puis voilà, c'était la deuxième chose que je voulais dire
15:03 c'est-à-dire que les mots
15:05 c'est un pouvoir extraordinaire
15:07 je le vois, j'y étais
15:09 sensible dès mon enfance où je voyais
15:11 dans le petit village où j'habitais qu'il y avait des gens
15:13 qui n'avaient pas les mots et ça ne fait que perdurer
15:15 maintenant où il y a
15:17 ce fossé énorme
15:19 entre ceux qui ont les mots et ceux qui ne les ont pas
15:21 et le pouvoir que ça donne
15:23 et j'ai envie de faire entendre ça
15:25 à la fois les belles histoires
15:27 et à la fois aussi la forme
15:29 qui fait que c'est beau à entendre
15:31 c'est rare qu'on puisse
15:33 faire passer
15:35 ce goût-là
15:37 ce plaisir-là. - On peut aimer
15:39 avec des mots, on peut séduire avec des mots
15:41 ça Cyrano de Bergerac, d'Edmond Rostand
15:43 nous l'a appris
15:45 mais c'est aussi l'abbé de
15:47 Laténion qui nous le rappelle avec vous
15:49 sur scène parce que vous êtes aussi allé chercher
15:51 des auteurs moins connus, des auteurs un peu disparus
15:53 avec le mot et la chose
15:55 qu'est-ce qu'il dit du pouvoir des mots
15:57 cet abbé de Laténion
15:59 - Qui l'en doit, j'ai du bon tabac
16:01 j'ai du bon tabac, tu en as tabac Thierre, c'est ça ?
16:03 - Oui c'est ça exactement. - Tu n'en as pas.
16:05 - Il avait hérité de cette charge, il était abbé mais enfin
16:07 il n'avait aucune vocation religieuse et donc
16:09 il écrivait pas mal de textes et alors en effet
16:11 il y a ce poème-là qui commence
16:13 "Madame, quel est votre mot ? Et sur le mot, et sur la chose
16:15 on vous a dit souvent le mot, on vous a fait
16:17 souvent la chose, ainsi de la chose et du mot
16:19 vous pouvez dire quelque chose et je gagerais
16:21 que le mot vous plaît beaucoup moins
16:23 que la chose. Bon là j'arrête le poème
16:25 mais il joue avec le mot et la chose
16:27 mais on dirait que le texte qui a pourtant
16:29 été écrit en 1751
16:31 a été écrit aujourd'hui ou hier
16:33 donc il y a une modernité tout d'un coup
16:35 qu'on découvre chez certains auteurs
16:37 et on est perdus un peu
16:39 dans les dates que je vais d'ailleurs
16:41 montrer et afficher à l'écran
16:43 pour qu'on voit qui a écrit quoi et à quel
16:45 moment parce que vraiment
16:47 c'est fou que la qualité
16:49 fait qu'on oublie
16:51 le moment, la date
16:53 et l'auteur, on se balade
16:55 au milieu de gens de talent
16:57 On écoute un autre extrait tout de suite
16:59 de "Sang dessus dessous"
17:01 seul en scène de notre invité André Dussolier
17:03 La dernière fois que j'ai vu
17:05 une pièce de théâtre c'était au Galette de l'Union
17:07 Non au théâtre français
17:09 au Palais de Chaillot
17:11 Au théâtre français au Palais de Chaillot
17:13 je ne sais pas, en tout cas c'était rudement bien jouir
17:15 une tragédie c'était de Racine
17:17 Non de Corneille
17:23 de Racine ou de Corneille
17:25 je ne sais plus, en tout cas c'était rudement beau
17:27 beau et émouvant
17:29 surtout on était ému
17:31 j'étais avec ma femme
17:33 je ne sais plus
17:37 tellement c'était beau, tellement on était ému
17:39 ma femme surtout était émue, d'ailleurs je dis ça c'est des suppositions
17:41 ma femme je ne l'ai pas revue depuis
17:43 elle a dû rester au théâtre
17:45 tellement elle était émue sur son strapentin
17:47 moi je peux dire que je suis sorti du théâtre parce que je suis ici
17:49 mais comment ça s'est fait je ne peux pas vous le dire
17:51 j'ai dû suivre la foule en somnambule
17:53 je ne me suis réveillé que le lendemain
17:55 chez Paulette
17:57 c'était tellement beau, le début
17:59 surtout on était
18:01 sous le charme, c'était
18:03 parce qu'après vous savez les verts on est tellement sous le charme
18:05 quand ils sont beaux qu'au bout d'un moment
18:07 on a tendance à s'assoupir
18:11 je vais essayer de vous réciter quelques verts
18:13 du début, peut-être que vous reconnaîtrez
18:15 alors
18:17 le rideau s'ouvre
18:19 (...)
18:21 ça représente quelque chose d'abstrait
18:25 dans les blancs et noirs
18:27 avec une touche de rouge
18:29 et
18:31 les voilà qui entrent
18:33 crac, crac
18:37 ça c'est leurs chaussures qui font ça
18:39 crac, crac
18:41 tenez-vous bien ils vont se mettre à causer
18:43 l'extrait d'une tragédie classique
18:45 de Roland Dubillard
18:47 écrit pour la radio en 53
18:49 publié en 76, la mémoire c'est un sacré truc
18:51 pas simplement pour un spectateur
18:53 mais aussi pour un comédien
18:55 André Dussolier, vous n'avez jamais eu peur
18:57 de flancher, de la perdre votre mémoire
18:59 partiellement
19:01 ou totalement ?
19:03 - Ah il faut foncer, il ne faut pas y penser
19:05 parce que si on pense
19:07 à ça, on s'arrête
19:09 et alors là on se pose des questions
19:11 et elle ne répond pas à votre volonté la mémoire
19:13 la mémoire c'est
19:15 l'émotionnel
19:17 c'est pas seulement
19:19 apprendre, c'est nécessaire évidemment
19:21 les mots, mais il faut rentourer ça
19:23 il faut accompagner cet apprentissage là
19:25 avec les émotions
19:27 que ça vous procure, comme ça
19:29 on va d'image en image
19:31 d'émotion en émotion et c'est comme ça que
19:33 la mémoire n'est pas
19:35 simplement celle des mots
19:37 - J'aime beaucoup ce moment où vous tournez vers
19:39 le souffleur
19:41 parce que justement la mémoire vous l'avez perdue
19:43 et que vous lui demandez de vous souffler
19:45 vous tendez l'oreille pour qu'il vous souffle la suite
19:47 du texte, qu'est-ce qu'il vous répond ?
19:49 - C'est à vous !
19:51 - C'est à vous, et le pauvre comédien
19:53 est complètement perdu
19:55 dans cette atmosphère là
19:57 le théâtre doit aller à la rencontre
19:59 de tous les publics, j'imagine que vous
20:01 vous avez envie avec vos pièces de toucher
20:03 plus qu'un public de convaincus
20:05 c'est aussi ça ce que votre histoire raconte
20:07 la manière dont vous avez
20:09 fait connaissance avec ces grands textes
20:11 le théâtre avec Poil de carotte de Jules Renard
20:13 notamment, ça c'était quand vous habitez
20:15 dans un petit village
20:17 bien plus loin que Paris
20:19 au delà d'Annecy
20:21 en Haute-Savoie, il y a cette idée que
20:23 le théâtre aussi doit être itinérant
20:25 et voyager avec vous, vous avez des affinités
20:27 littéraires avec
20:29 un autre comédien qui est Fabrice Luchini
20:31 qui en ce moment joue et rejoue
20:33 La Fontaine et le confinement où il reprend
20:35 les fables mais aussi un peu de Baudelaire et des pensées
20:37 de Pascal au théâtre Montparnasse
20:39 vous serez ensemble à l'affiche du prochain film
20:41 de François Ozon, Mon crime
20:43 qui renoue avec la comédie
20:45 façon potiche, façon
20:47 Ozon et vous faites le chemin inverse
20:49 cette fois de la scène à l'écran puisque le film
20:51 est adapté d'une pièce de Georges Baer
20:53 et de Louis Verneuil et que ça en devient
20:55 un film. L'humour
20:57 il est très important dans le spectacle
20:59 il est aussi très important dans votre parcours
21:01 de comédien, d'acteur que ce soit au cinéma
21:03 ou dans la vie
21:05 - Dans la vie oui, j'allais dire dans la vie bien sûr
21:07 c'est nécessaire parce que
21:09 c'est bien de se faire
21:11 télescoper comme dans le spectacle d'ailleurs
21:13 des choses graves avec des choses légères
21:15 toujours parce qu'on a besoin
21:17 pour ne pas être
21:19 tragiquement effondré par la douleur
21:21 de rebondir
21:23 et l'humour vous y aide
21:25 et le comique ou la drôlerie
21:27 ou la manière de voir les choses
21:29 de façon légère vous sort
21:31 un petit peu de l'ornière dans laquelle vous pouvez
21:33 sombrer. Donc c'est une alternance
21:35 qu'il y a dans la vie même et que
21:37 raconte un peu tout cette
21:39 même alternance des textes, du choix des textes
21:41 on a besoin de ça
21:43 ça fait partie de la vie. - Et ce que racontent aussi
21:45 vos choix de films, vos choix de cinéma
21:47 on pense évidemment à Tanguy
21:49 de Étienne Chateliez ou encore à Trois Hommes
21:51 et un Couffin de Serot
21:53 vous avez alterné
21:55 tout au long de votre parcours entre des
21:57 comédies et des drames
21:59 est-ce que vous êtes un grand tragénien d'ailleurs aussi
22:01 - J'aimerais bien jouer des tragédies
22:03 dont je me suis moqué
22:05 grâce à Dubillard tout à l'heure mais c'est vrai
22:07 et même un metteur en scène comme Anna Rennet
22:09 que j'étais tellement heureux d'avoir
22:11 rencontré faisait mélo
22:13 et puis aussi on connaît la chanson
22:15 chose tout à fait différente. - Et bien on y revient
22:17 dans les années 70 Truffaut vous repère au Conservatoire
22:19 André Dussolier vous fait tourner
22:21 dans son film Une belle fille comme moi
22:23 puis elle rencontre avec Claude Lelouche
22:25 puis Pinotot puis Chabrol, Romère
22:27 c'est par le théâtre que le cinéma
22:29 est venu à vous et c'est aussi par le cinéma que le
22:31 succès populaire est venu à vous
22:33 allez on va rembobiner ce film là
22:35 *Musique*
22:37 Nous sommes le 29 août, dans 48 heures
22:39 le destin d'Amélie Poulain va basculer
22:41 - C'est nul comme musique !
22:43 Faut que ça pète ! Qu'est-ce qu'on a dit mon dieu ?
22:45 - On ne boit plus
22:47 sauf en cas de nécessité
22:49 on va voyager
22:51 à Meurthe et Moselle, à Charité
22:53 sur Loire, à Cramadour
22:55 à Lens, Montélimar
22:57 Plessis et tout
22:59 - Allez-vous amis ?
23:01 - Dis donc, t'es au cul toi-même hein !
23:03 Je m'en fous, je ne demanderai pas de mon affection au sol !
23:05 Je vous emmerde ! J'ai pas besoin de vous !
23:07 Je trouverai une solution tout seul !
23:09 - A 10 ans c'était charmant, 7 ans insolence, à 20 c'est agaçant
23:11 - Ma petite Mathilde, tu te dis la pique de ton héritage
23:13 dans une croissant du Buesc
23:15 - Bingo crépuscule, pourquoi pas
23:17 youpi tralala !
23:19 - T'es rien, une petite chaîne, un caillou dans une chaussure
23:21 un poing de cul coincé entre les dents
23:23 c'est basse, poing de cul
23:25 - Putain de merde, saloperie de merde
23:27 - Je t'ai bien examiné, il est pas fou ?
23:29 C'est un petit mental qui a une incapacité totale
23:31 à s'extraire du présent
23:33 - En clair, il est incroyablement con
23:35 C'est un asile de fous, pas un asile de cons
23:37 Faudrait construire des asiles de cons
23:39 mais vous imaginez un peu
23:41 la taille des bâtiments
23:43 - Moi j'aime pas les morts qui t'y tuent
23:45 - Et aujourd'hui le ravi de la crèche
23:47 veut faire un grand discours
23:49 pour annoncer toutes ses idées d'enfant de 6 ans
23:51 - Oh !
23:53 - Celui qui gagne une bataille
23:55 c'est celui qui est capable de croire
23:57 à la victoire un quart d'heure de plus que son adversaire
23:59 - T'as cru que j'avais gagné ?
24:01 - Je suis pas assez méfié
24:03 - Vous savez ce que nous faisons aux hommes comme vous
24:05 monsieur Narling ?
24:07 - Je crois qu'on les décore
24:11 - Nous sommes les derniers hommes libres !
24:13 - Quelle aventure !
24:15 - Je suis bien content d'être venu
24:17 - Voilà, on a ouvert avec Le Fabuleux Destin d'Amélie Poulain
24:19 on referme avec Les Enfants du Marais
24:21 ils vous ont gâtés ces cinéastes aussi
24:23 ces scénaristes
24:25 parce qu'il faut le dire, on l'entend dans ces répliques
24:27 que vous portez
24:29 hautes là encore André Dusselier
24:31 qu'il y a des grands textes de cinéma
24:33 et comment cette écriture, celle des scénaristes
24:35 celle des réalisateurs a nourri aussi
24:37 votre phrasé aujourd'hui ?
24:39 - D'abord félicitations aux monteurs
24:43 franchement là j'ai redécouvert tout un parcours
24:45 grâce au son, grâce aux voix différentes
24:47 grâce aux personnages différents
24:49 le cinéma, oui...
24:51 - Merci Félicie Fauchère
24:53 - C'était magnifique, mais...
24:55 les auteurs, le cinéma
24:57 oui, tout a une influence
24:59 y compris le cinéma sur l'écriture
25:01 théâtrale, le cinéma c'est
25:03 beaucoup plus elliptique, c'est beaucoup plus concis
25:05 alors, voilà
25:07 je trouve que le cinéma
25:09 a enrichi aussi l'écriture
25:11 théâtrale, même si
25:13 le cinéma, en effet, vous y avez fait allusion
25:15 c'est beaucoup inspiré avec
25:17 René, avec d'autres
25:19 du théâtre, après
25:21 voilà, on a un patrimoine
25:23 finalement, c'est pas très... c'est assez
25:25 poreux les cloisons, ça fonctionne
25:27 et l'un nourrit l'autre
25:29 - Oui, et ça vous avez raison de citer Alain René
25:31 parce que c'était une de ses marques
25:33 de fabrique, ce mariage extrêmement réussi
25:35 entre la littérature et le cinéma
25:37 c'est votre réalisateur fétiche
25:39 qui l'a réellement conclu ce mariage
25:41 Alain René il est décédé il y a dix ans
25:43 mais vous avez joué, vous, dans son dernier
25:45 film "Aimer boire et chanter" on en entendait
25:47 un extrait à l'instant, il était l'ami des écrivains
25:49 de Queneau, de Duras, de Robbe-Griet
25:51 de Samprin, de Gruau bien sûr aussi
25:53 ils ont tous prêté leur beau au réalisateur
25:55 je crois que vous avez aussi en commun Sacha Guitry
25:57 que vous admirez l'un
25:59 et l'autre, il avait aussi
26:01 tourné, lui, Alain René, un film
26:03 documentaire à la Bibliothèque Nationale de France
26:05 qu'est-ce qu'une bibliothèque pour vous
26:07 André Dusselier, est-ce que vous posez sur les étagères
26:09 d'une bibliothèque le même regard
26:11 gourmand, attendri que René
26:13 l'avait fait avec sa caméra ?
26:15 - C'est vrai que la bibliothèque c'est vraiment
26:17 j'aimerais bien, c'est extraordinaire
26:19 c'est ce que dit Proust, tous ses amis qui sont
26:21 sur les étagères, qu'on peut aller
26:23 rencontrer et re-rencontrer
26:25 d'ailleurs encore, je pense que
26:27 la lecture qu'on peut faire de
26:29 Madame Bovary va changer avec le temps
26:31 ou d'autres textes ou d'autres
26:33 pièces de théâtre, donc c'est des
26:35 trésors qui sont là à portée de main
26:37 et qu'on ne consulte pas assez
26:39 souvent, peut-être bien c'est pour ça
26:41 alors pardon d'y revenir, mais j'ai l'impression
26:43 qu'avec ce spectacle là, je peux faire entendre
26:45 des choses qui sont un peu cachées
26:47 au milieu des livres et qu'on n'entend pas forcément
26:49 souvent parce qu'ils sont pris à l'intérieur d'un roman
26:51 ou parce qu'ils sont dans des recueils de poèmes
26:53 et tout d'un coup, ils existent
26:55 je les fais exister
26:57 pour eux-mêmes alors qu'ils sont
26:59 un petit peu absents
27:01 oubliés et que c'est bon de les ressusciter
27:03 - Voilà, vous nous ouvrez les portes de votre bibliothèque
27:05 dernière question, en 1983 vous êtes
27:07 Raoul dont la vie est un roman, Talin René
27:09 et votre vie à vous, est-ce que vous avez réussi
27:11 à en faire un roman et est-ce que vous allez enfin
27:13 l'écrire ce roman de votre vie ?
27:15 - Je l'écris en travaillant et en faisant
27:17 des choses, ma vie réelle aussi
27:19 existe et est importante pour un cométien
27:21 on a la fiction bien sûr
27:23 on peut s'y échapper
27:25 mais en même temps on a toujours besoin de revenir
27:27 à la réalité
27:29 à la vie de ses proches
27:31 et donc c'est toujours
27:33 un bonheur d'aller de l'un à l'autre
27:35 - Mais dire oui, écrire c'est pas votre truc ?
27:37 - Écrire, non
27:39 quand on consulte
27:41 il y avait une très jolie formule
27:43 qu'avait dit Jean Rochefort
27:45 on lui a dit "vous écrivez, vous avez écrit ?"
27:47 et il avait répondu "oui mais je me surlue"
27:49 et donc
27:51 c'était une manière de
27:53 raconter un peu l'hommage qu'on rend
27:55 aux grands auteurs
27:57 - Merci mille fois André Dusselier d'être
27:59 venu nous voir pour cet entretien de
28:01 Bienvenue au Club, sans dessus de souhait avoir en ce
28:03 moment au Bouffes parisien, c'est donc à Paris
28:05 comme son nom l'indique mais bientôt en tournée aussi
28:07 Merci à vous.